Chez La Face B, on adore les EPs. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EPs sortis récemment. Aujourd’hui, on vous parle des EPs entre rock et pop de Benjamin Cotto, Sheitan & The Pussy Magnets et Almost Lovers
Benjamin Cotto – Bleu
Il est connu pour être l’un des membres du groupe le plus shazamé au monde. Benjamin Cotto, c’est toute la partie instrumentale de Lilly Wood and The Prick, celle qui vous fait danser tous les étés. 2021 sera décidément une année plus que prolifique pour Benjamin qui après un album avec Lilly Wood sort maintenant son tout premier EP en solitaire. Bleu, c’est un plongeon dans l’esprit et l’imaginaire de l’artiste, se dévoilant comme jamais auparavant. Chantant pour la première fois, c’est avec surprise que l’on découvre un ton grave de crooner et un chanté parlé à la Gainsbourg. Terriblement hors du temps. Les années 60-70 peuplent son imaginaire et sont celles qui donneront naissance à ce délice nostalgique. Instrumentale complexe et riche, mélodies qui s’envolent, crescendo émotionnel, on se laisse porter par les vagues et l’on apprécie le voyage.
Un besoin irrémédiable de nous faire rentrer dans son univers a poussé Benjamin Cotto à se saisir là aussi pour la première fois d’une caméra. Le Grand Bleu, premier titre et premier single de l’EP s’accompagne d’un assez incroyable court-métrage filmé tel un thriller en huis clos. Un diner de retrouvailles dans lequel s’installe un malaise de plus en plus violent. Pas à pas, les pièces du puzzle se rejoignent, les relations entre les personnages se dessinent, les tensions s’aggravent. L’alcool décuplera les tensions refoulées depuis trop d’années et un baiser scellera leur destin. Accompagnées de sonorités vaporeuses, entre nostalgie amère et lâché prise absolu, Benjamin se laisse couler dans l’infini. Accompagné de deux sublimes actrices, Lou Lampros et Marie-Ange Casta, elles inspireront en partie le single suivant : Marylou. Parfois une, parfois double. Le timbre si grave de Benjamin est à l’occasion poussé vers plus de hauteur, dans un crescendo de pure rêverie et de tendresse. Marylou est sans nul doute le morceau le plus touchant de cet album, accompagné à merveille par l’écho d’une voix féminine tel un amour qui s’échappe peu à peu.
Après ces amours désabusés, Benjamin se lance dans un groove italo disco et enfile le costume du macho lubrique. Tu Danses, c’est ce petit réveil un peu surprenant qui montre l’étendu du talent de Benjamin, capable de transcender le kitsch et faire preuve d’une auto dérision savoureuse. Depuis que tu n’es plus là est quant à lui un hommage assumé à Barbara. Sur une mélodie au piano désaccordé se greffe de nombreux instruments dans un crescendo d’intensité. Le refrain est fredonné avec nostalgie, alors que Benjamin énonce sa peine en poésie. Une construction qui évoque en écho Paroles de Dalida. L’EP se conclura sur un Rive très cinématographique, qui appelle au voyage et à l’abandon. Regret d’un amour sublime sur les quais de Paris, de braises que l’on souhaite une dernière fois ranimer.
Ce feu passionnel, Benjamin Cotto les fera bruler encore et encore dans nos cœurs. Bleu n’est que le début. Un album est en préparation, et on ne peut qu’avoir très hâte de replonger dans cet univers nostalgique profondément rêveur.
Sheitan & The Pussy Magnets – Nothing to Be Said
S’il y a bien un style musical qui influencera la génération de 90 et donnera envie à tout le monde de porter des slims, c’est bien le rock indé anglais. Sheitan & The Pussy Magnets sont parisiens, mais totalement issus de cette vague de mordus de mélodies et de guitares en reverb. Après avoir écumé les scènes parisiennes, ils sortent leur EP Nothing To Be Said et posent déjà la liste de leurs influences. On sent une jolie empreinte Alex Turner dans la voix, dotée d’un peu plus de vibrato et d’écho pour ne pas nous déplaire, ainsi qu’une mélodie efficace qui se rythme non sans une certaine forme de nonchalance. Sans oublier une petite touche d’autodérision.
Une intro au clavecin, grave et légèrement machiavélique nous plonge dans une ambiance mystérieuse. Que nous réserve les Sheitan ? Et bien un Testing Your Guts aux influences western à la manière d’un The Age of the Understatement (pour rester avec Alex). Le morceau est rythmé pour vous laisser peu de répit et vous faire danser sous les balles à la manière d’un cowboy. Ils testent votre courage on a dit. Et il en faudra beaucoup pour tenir face à la diablesse dépeinte par le groupe. On sent l’expérience.
Fire se part de sonorités plus lourdes pour une virée dans des contrées plus chaudes…. Celle d’un amour ardent, qui pourrait presque virer à la damnation. Nothing to Be Said, titre éponyme de l’EP permettra aussi de visualiser la tête des Sheitan dans un clip. On retrouve le groupe à la fois en train de polluer la campagne environnante qu’enfermés dans un inquiétant salon rouge. On notera surtout l’étrange lampe en forme de diable qui se masturbe. L’emblème du groupe ? Sous un son un peu propret, ils cachent bien leur jeu les petits coquins. La mélodie est ultra accrocheuse, accompagnée de petites trouvailles à la guitare. Une petite pépite indé rock efficace comme on les aime.
Un dernier titre nous enverra dans des envolées plus spatiales. Closer to the Limit nous procure de jolis frissons lorsque la voix s’envole de façon désespérée, rejointe par les plaintes de la guitare. Les Sheitan and the Pussy Magnets ont peut-être rien à dire, mais ça vaut le coup de les écouter.
Almost Lovers – Almost Lovers
La power pop a trouvé ses nouveaux émissaires dans la figure des Almost Lovers. Le groupe franco-belge, fort des expériences diverses de ses différents membres, construit des mélodies infaillibles et singulières dans son premier EP du même nom, paru chez Howlin Banana. Un EP, et ni plus ni moins que six morceaux, qui s’enchaînent les uns et les autres, dans un même élan réjouissant porté par des guitares vigoureuses et des voix nonchalantes. Des choix qui évoquent tour à tour la britpop et l’esthétique des teen-movies old school.
La force du groupe réside ainsi dans ses refrains qui nous restent en tête de façon continue, comme sur le single 2 Good 2 Be True, ou sur le morceau So Gone. Les guitares, éparses et énergiques viennent porter de bout en bout les différentes compositions, notamment sur Turn Around qui marque de par sa vivacité inhérente. Une formule pourtant sans cesse contrastée par cette nostalgie amoureuse qui semble retenir avec légèreté l’ensemble de ce premier disque, dont le dénouement se fait sur une ballade guitare voix, In The USA. Une belle réussite, pleine de cohérence, pour ce groupe qu’il nous tarde de suivre !
PS : vous pouvez retrouver l’ADN de Almost Lovers ici