Format court #95 : Marell, tip stevens et Guesney

Chez La Face B, on adore les EP. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EP sortis récemment. Aujourd’hui, on s’intéresse aux EP de Marell, Tip Stevens et Guesney.

Marell – Anywhere (somes place else)

Il est de ces artistes qui s’attachent à créer, modeler leur propre univers, à transporter l’auditeur dans un autre monde. Le temps d’une chanson, ou comme nous l’offre MARELL, sur un EP, prenez le temps de plonger dans la brume de Anywhere (some place else)

Après un premier EP sorti en 2023, Places that we know, qui évolue dans un rock shoegaze et vaporeux, les trois musiciens toulousains expérimentent une nouvelle fois pour leur second EP. Un nom tout aussi mystérieux que les membres de MARELL sont discrets. 

On se concentre alors sur le contenu de ce nouvel EP. Au cœur du projet : une certaine urgence, comme une poursuite de quelque chose de tout proche mais cependant inaccessible. De temps en temps, un joli moment guitare-voix doux et où le groupe renoue avec ses premiers amours dans le rock shoegaze. Ce second EP est l’évolution naturelle de Places that we know. Le parallèle entre les deux titres le reflète d’ailleurs parfaitement. Dans Anywhere (some place else), on sort des sentiers battus, on avance plus vite, on sort de sa zone de confort.  

Everything black and white en introduction nous plonge directement dans l’univers MARELL : une voix sombre et caverneuse, une guitare traînante et un jeu d’écho envoûtant, la formule parfaite pour cette entrée en matière. Le second titre, Easy, change totalement de tonalité, en passant à des voix parfois screamées, mais toujours assez étouffées, comme un souffle lointain. Une rage sourde et puissante. Sur le troisième morceau, Show me, les guitares se font plus fortes et pressantes, les voix se rapprochent. Une discussion de soi à soi s’ouvre, en quête de paix intérieure, MARELL cherche une nouvelle voie, au sein d’un tumulte inquiétant de guitare en dernière partie de morceau. 

And I’ve not been right

Since you’ve gone away

Will I ever find

Some peace of mind ?

Sur le titre Walk, des inserts sonores viennent apporter une touche d’originalité et de fièvre au morceau, où de nombreuses couches se superposent : batterie, guitare, sons électroniques distordus. Un peu de calme après la tempête, l’avant dernier morceau se nomme What it is et permet de relâcher les tensions. Un fameux guitare-voix à la fois léger et profond. Petite surprise à la moitié du titre, où la pression monte crescendo et les émotions se déversent dans un torrent d’un jeu guitare-batterie hypnotisant. What it is est intimement lié au dernier titre du morceau, anywhere.anyone.anytime.anyway par une transition impeccable. Ce dernier morceau nous replonge dans nos pensées et nos songes, apportant de nouvelles sonorités de percussions, il est hypnotique et aux frontières du psychédélisme. 

MARELL signe ici un EP unique, précieux et démontre de sa capacité à expérimenter et à assumer un style qui leur est propre. Une réelle identité musicale ressort de leur œuvre, et on a déjà hâte de voir ce que le groupe nous réserve ! 

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Tip Stevens – Elephant

Tip Stevens ne cessera jamais de nous surprendre. De par sa capacité à produire de manière intensive (tout de même 5 EP en deux ans !) mais aussi sa formidable envie d’innover, d’expérimenter et d’amener sa musique toujours plus loin. Il se présente lui-même comme un éternel “touche à tout”, naviguant d’EP en EP, d’animal totem en animal totem. Les sorties de Tip viennent toujours accompagnées d’une DA soignée, colorée et qui est devenue depuis quelque temps sa marque de fabrique. Jamais de long format pour le musicien, qui préfère l’exercice du format court afin d’évoluer constamment et d’avoir la liberté d’exprimer son art plus librement.

Tip Stevens est revenu cet été avec un nouvel effort, Elephant, doté de 5 titres, 5 bombes musicales. L’artiste assume cette fois-ci encore davantage ses influences électro, nous ayant plutôt habitués à une ambiance pop-rock, Elephant marque sa différence dans la discographie de Tip Stevens. On retrouve tout de même toujours ce dynamisme, ce rock empressé et coloré, mais ici le rock est plus sombre. La pochette de l’EP reflète à merveille toute l’ambiance des titres : un rock-électro puissant et inquiétant. 

00:14, pour commencer. Mystérieux et uniquement musical, le ton est donné. On peut apercevoir dans certains aspects quelques influences orientales, et tout du long, un synthé lourd et grave qui ne nous lâchera pas. On se croirait en plein jeu vidéo ! 

Le second titre, Stomp me, nous donne carrément envie de nous battre : “Kick, kick me hard, kick me hard right in the chest, Never stop, I’ll show you how much I can take”. Tip Stevens veut en découdre, et ses instruments seront ses armes. Le morceau est envoûtant, encore plus électro que le précédent, avec des beats oppressants. Typiquement le morceau qui finira dans ta playlist pour tes séances de sport ! 

Le troisième titre, Emperor, fait mine de commencer en douceur pour mieux nous en mettre plein la vue au bout d’une minute. Tip Stevens choisit ici de modifier sa voix, la rendant grave, presque robotique, frissons garantis ! Le beat est ultra rapide, tandis que le chant est long, traînant, inquiétant, nous mettant au défi : “You want my throne, you want my crown, you want the power, come on and get it”. 

Tip Stevens nous entraîne au fin fond de son club électro sur Washing Machine, qu’on pourrait presque prendre pour un titre dansant si les riffs saturés ne nous enveloppaient pas autant, nous laissant bouche-bée devant tant de précision et de diversité dans la production. Les performances vocales du chanteur sont impressionnantes sur ce morceau, sur lequel il joue moins sur la déformation et n’hésite pas à aller dans les tonalités aiguës, en dissonance avec le reste du titre. Encore, dernier titre de cet EP intense, vous le prendrez au mot. Nous voilà plongés en plein film d’action, des riffs électroniques sombres, saturés. Le rythme plus “lent” de ce titre vous surprendra mais vous fera appuyer sur replay autant de fois que nécessaire. 

Quel effet nous fait Elephant ? On a du mal à s’en remettre, clairement. L’artiste du label Floral Records met la barre très haute avec cet EP, d’une qualité sonore riche et où rien n’est laissé au hasard. Tip Stevens revient dès le mois d’octobre avec Cobra 2, que l’on attend de pied ferme ! Rendez-vous le 7 novembre à l’Olympia pour rentrer dans le club Stevens…

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Guesney – Sentinelle(s) (Originaux & Remixes)

Guesney fait partie de ces artistes qu’on n’a pas vus venir mais que les algorithmes finissent par mettre en relation avec vos oreilles. Honnêtement, il apparaissait régulièrement sur mon fil Instagram. Ayant déjà eu la même approche – ou devrait-on dire accroche – il y a quelques années maintenant avec un autre artiste, j’ai choisi de renouveler ma « confiance algorithmique ». Bien nous en a pris. Le Normand de naissance a fait paraître un premier EP en mars 2024 ; Sentinelles mais, à ce moment-là, on est passé à côté. C’est finalement à l’occasion de sa réédition parue en juillet 2025 qu’on a pu tendre l’oreille plus attentivement.

Si l’univers de Guesney s’apparente à de la chanson française, on pourrait facilement le faire basculer dans le spoken word aux sonorités très rock voire électro parfois. Il s’est entouré de deux musiciens : Guillaume Quinette à la basse et Samuel Perrier à la guitare. À bien l’entendre, on retrouve des inspirations telles que Étienne Daho, Alain Bashung ou encore Daniel Darc.

Quatre morceaux – sans compter les remixes – peuplent Sentinelles. Avec une voix plus que jamais à la Daho, Guesney nous fait entrer dans son univers par la porte du cinéma. En effet, le morceau d’ouverture s’intitule Claude Sautet. Sur un tempo lent, le synthé bien appuyé, Guesney installe une ambiance presque rock à mi-parcours lorsque s’invite la guitare progressivement saturée de Samuel Perrier. Du côté du texte, c’est une histoire complexe, sans référence frontale avec le réalisateur des Choses de la vie si ce n’est en toute fin. Plus rythmique, avec une ligne de basse puissante signée Guillaume Quinette presque cold, Guesney étale la vie d’artiste sur Dernier avertissement avec presque un clin d’œil en comparaison avec la vie d’entrepreneur dès lors qu’il fait mention de plan d’action. Sur la dernière minute, on serait presque sur un morceau dansant où le synthé rebondit bien. Leni qui prend la suite – seule chanson qui s’est vue accompagnée d’un clip – est beaucoup plus électronique, dansante et relativement nerveuse. C’est sans doute avec cette chanson que le normand natif a tapé dans l’oreille de Zaho de Sagazan – pour qui il a ouvert il y a 2 ans lors des Rendez-Vous Soniques -. Presque jazzy dans son introduction au piano, Morceau optimiste aurait pu se retrouver dans la discographie d’un certain Benjamin Biolay pour sa tonalité hyper mélancolique tant dans le texte que sa composition. On vous invite à découvrir les remixes en parallèle. Chaque morceau prend une véritable autre dimension dont son tout premier : Terrain vague comme sorti d’un jeu vidéo bien retro.  

L’univers musical de Guesney parlera aux oreilles curieuses d’une chanson française qualifiable de pop expérimentale structurée qui emprunte à différents registres musicaux. Spleen en perfusion, il livre ses textes sans grand artifice et nous réserve de belles surprises dans le live.

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