Plus qu’une musicienne, Jenny Hval est une artiste à part entière. De Viscera (2011) son premier album, à The Practice of Love (2019), en passant par Blood Bitch (2016) ou encore Apocalypse, girl (2015), ses opus sont des autels conceptuels aussi intrigants que captivants. La musicienne sort aujourd’hui Classic Objects, un album composé à un moment où le spectacles n’avaient plus lieu. Une remise en question involontaire pour l’artiste, qui a fait de cette condition le point de départ de cet opus naturellement tourné vers l’intérieur, plus centré sur elle-même qu’aucun autre de ses précédents…
Nous avons pu lui poser quelques questions quelques semaines avant la sortie de Classic Objects. L’occasion d’en apprendre un peu plus sur cet album artistique, pop et expérimental… Nous avons parlé entre autre de la conception de l’album, de relation aux objets, et de performance live…
LFB : Salut ! Comment ça va ? Comment te sens-tu à quelques semaines de la sortie de Classic Objects ?
Jenny Hval : Je suis un peu moins nerveuse ou excitée que je ne l’ai été dans le passé, simplement parce que je pense que cette fois-ci, c’est très confus. Je suis donc assez calme. Ce qui est bien. Sortir de la musique maintenant est juste un peu plus inconnu et un peu, je ne dirais pas frais mais c’est un peu différent qu’avant la pandémie.
Maintenant, je ne sais pas ce qui va se passer et combien d’espace cérébral les gens auront pour penser à la musique en général. Mais ça semble aller mieux maintenant en ce qui concerne… Au moins ici en Norvège, c’est un peu plus normalisé qu’il y a seulement quelques semaines. J’ai l’impression que les gens ouvrent lentement leurs horizons.
LFB : Comment Classic Objects a-t-il vu le jour ? Peux-tu nous parler un peu du processus de construction de l’album ?
JH : Bien sûr. Je pense qu’à l’origine j’essayais d’écrire un manuscrit. Je ne savais pas si ce serait un livre ou autre chose. Au début de la pandémie, j’écrivais, mais je pense que j’écrivais surtout pour continuer à faire quelque chose, parce que, comme tout le monde, je n’étais pas capable de travailler ou même de communiquer avec beaucoup de gens.
Donc je suppose que j’ai abandonné ce manuscrit, mais il est devenu en partie une sorte de disque à la place. Et donc ce n’était pas très intéressant en fait, mais au moins j’avais un petit peu… J’ai fait un petit travail d’écriture de mots en norvégien qui me semblait inutile. Et puis j’ai commencé à extraire quelques phrases et à les raccourcir, à les resserrer sur des textes. D’une certaine manière, c’était un processus calme, car je n’avais pas envie d’écouter de la musique. Je n’avais pas envie d’être inspirée par l’extérieur, car l’extérieur était proche de moi.
Et je me souviens avoir lu beaucoup de livres au début de la pandémie, puis plus rien. Je n’avais pas envie de faire quoi que ce soit. Et je n’ai pas beaucoup écouté de musique. Je suis du genre à chercher beaucoup plus de sources extérieures quand j’écris, mais cette fois, je ne le faisais pas du tout. Ça ressemblait plus à un rituel privé. Je me suis sentie attirée par le fait de raconter des histoires très simples, car j’avais l’impression que ma vie était très simple, mais d’une manière intéressante.
J’ai fait une pause dans mes représentations et dans la logistique des voyages, ce qui m’a fait du bien. C’est une chose très privilégiée à dire parce qu’évidemment, cela signifiait aussi que personne n’avait d’argent et ce genre de choses… Mais oui, j’ai eu l’impression de faire une pause. Pas dans mon processus habituel, mais la vie qui entoure la créativité. Et donc, d’un côté, j’ai l’impression que c’est un album de presque rien à cause de ce manque de structure qui, espérons-le, le rend différent.
J’ai vraiment aimé l’enregistrer et l’écrire. J’avais l’impression de chercher quelque chose, mais j’allais probablement vers l’intérieur plutôt que vers l’extérieur et je cherchais des histoires plus simples à raconter et peut-être des structures musicales plus simples. Finalement, je ne pense pas que ce soit devenu si simple et c’est devenu plus que je ne le pensais. Mais c’était bien de trouver ça dans mes propres écrits au lieu de vouloir sonner un peu comme ceci ou de vouloir un ressentit un peu comme cela.
Il est donc un peu plus difficile pour moi de parler de ce disque. Parce que parfois, j’ai eu l’occasion d’avoir cet espace cérébral autour d’un disque où à n’importe quelle question j’ai pu sauter et parler du travail de quelqu’un d’autre. Ce qui est bien pour moi. Mais c’est peut-être aussi comme une échappatoire pour parler de la façon dont je travaille et de ce que j’écris.
Alors oui, j’ai eu l’impression d’essayer de faire la chronique de ma propre existence, mais en devenant un peu libre avec ça. C’est un matériau qui est peut-être plus basé sur la narration que beaucoup de mes autres travaux qui sont plus proches de l’essai parfois. Mais oui, c’est un peu comme si on ne pouvait pas faire confiance au narrateur. Donc ça s’en éloigne un peu.
LFB : Et comment est né le titre Classic Objects ? Quelle est ta relation avec les objets ?
JH : Je pense que j’ai un peu exploré le sujet. Je suis contente que tu poses cette question parce que c’est une meilleure réponse à la question précédente.
J’étais, et c’est dans la chanson titre… Il y a ce passage vers la fin où je pense aux accessoires que j’ai utilisés sur scène auparavant et que j’ai maintenant chez moi et je me demande, est-ce que c’est toujours de l’art? Est-ce que ça a déjà été de l’art ou est-ce que ce sont juste maintenant des objets normaux ou des objets sans signification ?
Et je pense que j’ai eu beaucoup de ces moments pendant les périodes de confinement les plus strictes où je fouillais dans des valises. J’y trouvais de vieux costumes, des micros, toutes sortes de choses que je n’utilisais pas. J’ouvrais une valise qui était restée dehors dans une sorte de stockage et où j’abandonnais vraiment froidement des choses qui avaient toujours été utilisées, que nous avions utilisé pour créer un spectacle sur scène. Et maintenant, ils sont presque, pas gelés, mais ils ont changé de texture parce qu’ils étaient dans le froid, inutilisés et peut-être sales d’un spectacle d’il y a un an.
C’était une expérience intéressante de redécouvrir mes objets de scène comme des objets inutiles, des objets inanimés. J’aime beaucoup avoir des objets sur scène et les utiliser pour avoir l’impression d’être en conversation avec quelque chose avec mes mains ou avec mon corps ou avec la musique sur scène. J’aime beaucoup tenir les choses ou les mettre en scène sur scène.
Donc ma relation avec les objets est en quelque sorte venue du besoin de sentir que je relie les points sur scène et que je fais quelque chose de plus visuel et de plus, je ne sais pas, comme créer différentes textures sur scène qui imitent ou auxquelles je peux m’identifier musicalement. Pour moi, il y a aussi beaucoup de texture et de son dans la façon dont j’utilise ma voix et les mots.
Donc ma relation avec les objets dans un contexte scénique est… j’ai beaucoup pensé à ça à l’époque où je ne pouvais pas les utiliser. Et j’ai beaucoup pensé à ça ainsi qu’aux salles vides de tous les lieux fermés dans le monde. Je pense à l’espace vide. Et d’une certaine manière, j’ai parfois l’impression que l’artiste sur scène est aussi comme un espace vide, ou quelque chose qui peut être rempli. Je ne suis pas si intéressante que ça juste debout sur scène. J’ai l’impression d’être presque, non pas une toile vide, mais j’ai besoin de faire quelque chose pour dire quelque chose afin d’être intéressante. Donc j’étais aussi un peu ce genre d’espace vide.
LFB : Tout comme le dernier album The Practice of Love ne parlait pas d’amour comme on pourrait l’imaginer, d’une manière romantique, Year Of Love, le deuxième single de l’album, est sinon ambivalent, du moins très lucide, avec un regard extérieur sur le mariage et l’amour. Est-ce que tu peux nous parler un peu de cette chanson ?
JH : Cela a commencé en France !
LFB : Vraiment ?! Intéressant…
JH : Cela s’est passé en 2019 pendant un concert que nous donnions. Quelqu’un était assis au premier rang et a demandé sa petite amie en mariage. Et ce n’était pas comme… parfois on voit des demandes en mariage dans un contexte de scène, mais c’est généralement au baseball, à une sorte d’événement sportif ou à un show de stade, un énorme spectacle… Mais là, c’était dans un théâtre.
Et donc tout le monde pouvait le voir. C’était beaucoup plus théâtral. C’était beaucoup plus mis en scène. Et pour moi, c’était incroyablement intéressant… et un peu choquant pour moi de vivre cette expérience dans le contexte de The Practice of Love, qui consistait à explorer, comme tu l’as dit, d’autres contextes ou d’autres types d’amour que l’amour romantique traditionnel ou les tropes de l’amour romantique tels qu’on les voit dans des récits plus normatifs comme la comédie romantique ou autre.
Mais cet incident est devenu un peu une comédie romantique d’une manière différente. Et ça m’a fait réfléchir au fait que je racontais moi-même ces histoires sur l’altérité et d’autres types de connexion et d’amour, alors que j’étais aussi mariée et que j’entrais dans une relation normalisée.
Et même si c’est juste une chose structurelle, tu sais, c’est comme quelque chose que tu pourrais mettre sur une liste, ce n’est pas vraiment le récit de toute ma personnalité. Dans cette chanson, ça l’est un peu, parce que ce n’est évidemment pas l’histoire complète. C’est un récit choisi pour voir ce qu’est un.e artiste, et comment cet.te artiste est compromis.e.
Et c’est assez problématique de… d’un côté, tu te contredis toujours, comme s’il y avait toujours quelque chose dans ta vie qui contredisait ce que tu disais. À quel point est-il important d’en parler ? Peut-être que c’est important de le faire. Mais c’est important de sentir que ça t’annule. Ou, tu sais, c’est assez problématique de se retrouver presque censuré.e ou de s’autocensurer avec le sentiment que je devrais me censurer ou comme confesser que je ne peux pas vraiment voir ou raconter ces histoires d’amour parce que je suis mariée. Ce sentiment est très intéressant.
Je trouve que le rôle de l’artiste pop est très problématique et très en phase avec le caractère des réseaux sociaux et la personnalité, le sujet des médias sociaux. Ils sont très liés. Tu es censé.e être cette personne qui est une personne privée et raconter cette histoire dans un espace public, qui est également payé et affilié au partage de données privées.
Et c’est un espace assez contesté. C’est un espace assez difficile et y participer est quelque chose d’assez ambivalent pour moi. Évidemment, je suis ici, donc je continue à y participer. Je pense donc que j’ai toujours l’impression qu’il est utile d’y être et de dire que c’est un endroit ridicule mais je suis là. Évidemment, j’aime aussi beaucoup ça. J’aime jouer et je crois en la musique. C’est un endroit très problématique et je pense que les paroles de Year of Love sont définitivement… si une histoire est racontée, c’est en fait cette histoire, je pense.
Et puis, c’est venu avec cette sorte de mélodie joyeuse et ce paysage sonore très léger et percutant. L’arrangement est très rebondissant sur ma façon de jouer. C’est aussi très rapide, pas nécessairement un rythme rapide, mais c’est léger. C’est aussi très rapide, pas nécessairement un rythme soutenu, mais c’est léger. Il y a de la légèreté et j’espère que cela donne de l’espace aux mots.
LFB : Dans la vidéo du morceau on peut te voir réfléchir, regardant ton téléphone ou tapant sur un ordinateur… Dirais-tu que, comme dans la vidéo, l’album parle de faire de l’art ? C’est de l’art, mais c’est aussi sur le processus de création ?
JH : Oui, je pense que j’écris toujours sur ce sujet parce que c’est une si grande partie de qui je suis. Créer des choses est une si grande partie de qui je suis. Et quand j’écris certaines choses, je suis aussi… Je crois qu’au fond, je suis une artiste qui se situe entre l’artiste traditionnel et le critique. Ou du moins j’ai un pied, même si j’essaie de raconter une histoire fictive ou romancée, j’ai aussi toujours cette perspective méta où je critique ce que j’écris et ce que je fais et où je me pose des questions sur ce qu’est la musique, ou ce qu’est la performance… ou il y a toujours quelque chose qui pose des questions sur le contexte de mon travail.
Cet album traite dans une certaine mesure de ce que c’est que de créer quelque chose à l’époque où nous vivons. À quoi ressemble ce monde ? C’est plus une sorte d’apprentissage de l’existence, une existence dans un monde où l’art n’est pas autorisé. Parce que les espaces publics, les espaces numériques et publics en ligne sont un peu une blague (rires). C’est genre Facebook… Donc oui, c’est définitivement à propos de ça.
LFB : Musicalement, en quoi Classic Objects diffère-t-il de tes précédents albums ?
JH : Il est très différent de la plupart des choses que j’ai faites parce que je voulais avoir un groupe. Peut-être aussi en partie parce que j’écris beaucoup et que je me suis contentée de démos et de fichiers inutilisés sur des ordinateurs pour faire mes derniers albums et qu’il y avait très peu d’interaction et de jeu d’instruments dans une pièce.
Peut-être aussi pour des raisons de pandémie. Je voulais être avec les gens. J’en avais aussi l’occasion. J’ai donc réservé un studio cette fois-ci. Un de mes amis travaille dans un studio à Tunheim… un peu au nord d’Oslo. C’est beaucoup plus au nord (rires). Mais nous y sommes allés, moi et plusieurs personnes avec lesquelles je joue live maintenant, pour essayer de faire des choses que j’avais faites sur mon ordinateur et de les transférer sur de “vrais” instruments.
C’est donc un album de groupe. Et je ne joue presque rien, ce que j’apprécie vraiment. Je suis une musicienne très médiocre. Je suis bien meilleure pour écouter que pour jouer des instruments. J’ai donc pu endosser ce rôle, écouter la musique et faire partie d’une interaction dans laquelle les personnes pouvaient faire beaucoup de choses que je n’avais pas prévues.
Donc oui, je pense que dans ce sens, l’album est très différent de tout ce que j’ai fait auparavant. Parce que je n’ai jamais fait jouer ma musique par un groupe avant, par un groupe complet de plusieurs personnes. J’ai déjà enregistré en live une fois. Mais c’était seulement avec deux autres musiciens.
Donc cette fois, il y avait beaucoup d’instruments avec lesquels je n’avais jamais travaillé auparavant. Beaucoup de claviers différents, beaucoup de percussions, et beaucoup de superposition d’instruments différents ce que je n’ai jamais pu faire.
Donc, pour moi, c’est une expérience très intéressante. Un disque au son très différent, on voulait qu’il sonne comme un groupe. Parce qu’évidemment, quand je fais un disque, j’ai besoin de beaucoup d’espace pour les paroles. Avec autant de mots, il serait étrange de les mettre à l’arrière-plan du paysage sonore et de donner la priorité à ce qui sonne bien plutôt qu’à raconter l’histoire.
Donc je pense que c’est censé être quelque part entre un vrai groupe qui joue ensemble, et un groupe qui a joué ensemble mais dont quelqu’un d’autre, comme moi, a trouvé les enregistrements plus tard et les a utilisés pour une session de karaoké.
LFB : Tu as une grande tournée en Europe et en Amérique du Nord de prévue dans les prochains mois… Y aura-t-il des accessoires de mise en scène particuliers dont tu parlais justement? As-tu déjà joué l’album en live ?
JH : Nous allons nous produire dans environ un mois et commencer par jouer quelques dates en Norvège. Nous allons en fait simplifier beaucoup les choses. Je n’ai aucun plan pour des éléments visuels ou performatifs. Je pense que nous allons beaucoup travailler avec la vidéo. Cela pourrait donc me faire changer à ce sujet.
Parce que cette fois, je veux faire une tournée. Donc je ne peux pas vraiment apporter grand-chose parce que nous devrons voyager avec beaucoup d’instruments et de personnes. Et donc je voudrais vraiment me concentrer sur la musique et je pense que ça va être un spectacle assez ordinaire, comme des artistes ordinaires jouant un spectacle ordinaire !
Mais qui sait ? C’est bien parce que je me suis tellement concentrée sur les éléments visuels et performatifs pendant longtemps sur scène que maintenant que j’ai un groupe complet, je pense que ce serait trop pour moi de me concentrer à la fois sur la musique et de faire autre chose. Je pense que cela se mettrait en travers de la musique cette fois-ci. Donc, la simplification est une bonne chose!
Avoir quelques éléments en vidéo, mais peut-être se concentrer davantage sur la narration d’histoires et le fait de jouer ensemble en live, et pas tant se rouler sur une balle de yoga… Parce que tu ne peux pas voir quand tu fais ça ! Et si je ne peux pas te voir et que tu ne peux pas… tu perds une grande opportunité d’avoir une conversation musicale avec les autres quand tu dois toujours faire des tâches qui t’éloignent des autres personnes qui savent ce que tu fais et des autres personnes du groupe qui te voient et qui peuvent aussi chanter. Ces dernières années, j’ai fait beaucoup de choses qui m’ont rendue la tâche de me produire très compliquée !
Cela a sa place ! mais cet album… J’ai fait beaucoup plus de chant parlé avant et cette fois, je pense que j’ai envie de chanter des mélodies ! Et c’est beaucoup plus difficile ! Il faut beaucoup rester immobile !
LFB : Et ma dernière question : Y a-t-il des choses que tu as découvertes récemment et que tu aimerais partager avec nous ?
JV : Je viens de relire les derniers essais et conférences de Susan Sontag. C’était donc ma dernière découverte, qui était une redécouverte. Parce que j’avais déjà lu un peu de son travail auparavant. Mais c’était vraiment bien. Je n’ai pas beaucoup lu pendant la pandémie et quand j’ai lu, c’était de la fiction. C’était donc très agréable de lire un peu d’essais sur l’écriture.
J’ai l’impression que j’en avais envie, mais que je ne le savais pas. C’est une merveilleuse critique. Elle est très célèbre, donc, je ne suis pas sûre que ce soit très excitant, mais c’était vraiment agréable de lire ses dernières pensées après une si longue vie de réflexion sur l’écriture et sur les arts et la culture.
LFB : Et y a-t-il une musique que tu aimes particulièrement en ce moment ?
JH : Non, je n’ai pas beaucoup écouté de musique. Donc comme je le disais, en fait, c’est intéressant, je suis un peu vide, mais j’attends d’être remplie. (rires) Évidemment il y a des trucs que j’ai écouté mais je n’ai pas été capable de m’enthousiasmer comme avant. Peut-être que je suis juste vieille aussi. Je pense que c’est normal parfois d’être comme ça.
LFB : Merci beaucoup !
Jenny Hval sera le 13 avril à la Gaîté lyrique à Paris et le 11 avril à EartH à Londres.
Lire notre chronique de Year of Love ici.
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More than a musician, Jenny Hval is an artist in her own right. From Viscera (2011), her first album, to The Practice of Love (2019), via Blood Bitch (2016) and Apocalypse, girl (2015), her albums are conceptual altars as intriguing as they are captivating. The musician is releasing Classic Objects today, an album composed at a time when shows were no longer taking place. An involuntary reassessment for the artist, who has made this condition a starting point for this naturally inward-looking opus, more centred on herself than any of her previous works…
We asked her a few questions a few weeks before the release of Classic Objects, an opportunity to learn a little more about this artistic, pop and experimental album… We talked about the conception of the album, the relationship with objects, and live performance…
LFB: Hi! How do you feel a few weeks before the release of Classic Objects?
Jenny Hval: I guess I’m a little bit less nervous or excited compared to what I’ve been in the past just because I think this time is so confusing. So I’m quite calm. Which is nice. Releasing music now is just a little bit more unknown and sort of, I wouldn’t say fresh but almost like, it’s a little different from before the pandemic.
So now I just don’t know what will happen and how much brain space people will have to think about music in general. But, I mean, it seems to be going better now in regards to… at least here in Norway, it’s a little more normalised than only like a few weeks ago, so I do feel like people are slowly sort of opening their brains a bit.
LFB: How did Classic Objects come to life? Can you tell us a bit about the process of construction of the record?
JH: Sure. I think originally I was trying to write a manuscript. I didn’t know whether it would be a book or something else. So early days of the pandemic, I was writing, but I think I was writing mainly to sort of keep doing something because I wasn’t, like everyone else, I was not able to really work or even really communicate with a lot of people.
I guess I abandoned this manuscript, but it became sort of the record instead, partly. That’s not that interesting actually, but at least I did a little writing of words in Norwegian that I felt was kind of useless. Then I started sort of just pulling out some sentences and sort of shortening it, tightening it a lot to some lyrics.
So in a way it was like a calm process, because I didn’t feel like listening to music. I didn’t feel like being very inspired by the outside because the outside was sort of close to me. And I remember reading a lot of books in the beginning of the pandemic and then just nothing. I didn’t want to do anything. And I haven’t listened much to music. I’m seeking a lot more research and seeking a lot more outside sources when I’m writing, but this time I just wasn’t doing that at all.
So it felt more like a private ritual. I felt drawn to telling very plain stories because I felt like my life was very plain and kind of in an interesting way.
I had a break from performing and from the logistics of travelling which was I think pretty good for me. As you know, that’s a very privileged thing to say because I mean, obviously it was also meaning that nobody had any money and that kind of thing… But yeah, I felt like I got a break from my, not my usual process, but the life that surrounds creativity. And so, on the one hand, I feel like it’s an album of almost nothing because of lacking structure that maybe hopefully makes it different.
I mean, I really loved recording it and writing it and I felt like I was searching for something but I was probably going inwards instead of outwards and looking for some kind of simpler stories to tell and maybe some simpler musical structures. That eventually I don’t think became that simple and became more than I thought. But it was nice to sort of find that within my own writings instead of wanting to sound a bit like this, or wanting to feel a bit like that.
So it’s kind of a little more difficult record for me to talk about. Because sometimes I’ve had the opportunity to have this brain space around a record where I’ve just been able to jump off any question and go into talking about someone else’s work, which is nice for me, but maybe then it’s also like an escape from talking about how I work and what I’m writing about.
So yeah, it felt like I was trying to chronicle my own existence, but then sort of becoming a bit wild with it. It’s like material that’s maybe more based on storytelling than a lot of my other work, which is more almost like essay like writing sometimes. But yeah, it’s kind of you can’t trust the narrator. So it takes off a bit.
LFB: And how did the title classic object come about? What’s your relationship with objects?
JH: I think that I did explore this a bit. I’m glad you asked that because maybe I’ll have a better answer to the previous question with this as well. I was and this is in the title track, I am sort of… there is this one passage towards the end where I’m thinking about props that I’ve used on stage previously and that are now just sitting around my house and I wonder, are they still art? Were they ever art or are they just now sort of normal objects or like meaningless objects?
And I think that I had a lot of these moments during the more strict lockdowns where I was going through suitcases, finding old costumes, finding microphones, finding all kinds of things that I didn’t use, and that were just like… Opening a suitcase that’s been outside in storage and just really cold, abandoned and stuff that once was always in use. We used to create a stage show and now they were almost, not frozen, but they changed texture because they were cold and unused and maybe dirty from a show like a year ago.
It was an interesting experience to sort of rediscover my stage stuff as useless objects, inanimate objects. So I’m very fond of having objects on stage. And using them to feel like I am in a sort of conversation with something with my hands or with my body or with the music on stage. I’ve become very fond of holding things or putting things in place on stage.
So my relationship with objects has kind of come from the need to maybe feel like my connecting the dots on stage and perhaps feeling like I’m doing something that is more visual and more to do with different textures on stage that mimic or that I can relate to musically as well. For me, there’s also a lot of texture and sound in the way I use my voice and in words.
So my relationship with objects are in a stage context… Yeah, I mean, I’ve thought about that a lot at the time where I couldn’t use them. So I think that I did think about that a lot as well as the empty rooms of all the closed venues around the world. Sort of thinking about empty space. And in a way sometimes, I feel like the artist on stage is also like an empty space or something that can be filled. I mean, I am not so interesting just standing there on stage. I feel like I’m quite like almost, not an empty canvas, but I need to do something in order to say something in order to be interesting. So I was also that kind of empty space a little bit.
LFB: Just as the latest album The Practice of Love wasn’t about love as one would expect it, like in a romantic kind of way, Year Of Love the second single of the album, is if not ambivalent, very lucid with an external eye on the whole wedding thing and the love thing. Can you tell us a bit about the song?
JH: It started in France!
LFB: Really?! That’s interesting…
JH: So this happened in 2019 during a show that we were performing and someone sitting in the front row proposed to his girlfriend.
And it wasn’t like… I mean, sometimes you see like proposals in a stage context, but it’s usually like baseball, like some kind of sports event or it’s like a stadium show. So it’s like this huge spectacle.
But this was in a theatre. And so everyone could see it. It was much more theatrical. It was much more staged. And for me that was incredibly interesting, and kind of a little bit shocking to me to experience this in the context of the Practice of Love, which was about exploring, like you said, other contexts or almost finding value in other types of love than the traditional romantic or the tropes of romantic love as we see it in more like sort of norm core narratives like the romantic comedy or whatever.
But that incident became a bit of a romantic comedy in a different way. And it just made me think about how I was myself telling these stories about otherness and other types of connection, and love, yet I was also married and into a normcore relationship.
And even if that’s just a structural thing, you know, that’s like something you could put on a list, it’s not really retelling my entire personality. In this song it kind of is, because it’s obviously not the full story. It’s a chosen narrative of looking at what is an artist, and how is that artist compromised.
On the one hand, you always contradict yourself, like there’s always something in your life that will contradict what you say. And how important it is to address it? Maybe it’s important to address it. But it’s important to feel like it would cancel you.
Or, you know, like it is quite problematic to sort of find yourself almost censored or self censoring with the feeling that I should be censoring myself, or like confessing that I can’t really see or tell these stories about love because I’m married. But the feeling is very interesting.
And you know, I find the role of the pop artist is very problematic and very much in line with the character of social media and the personality, the subject of social media. They’re quite connected. I mean, you’re meant to be this person that is a private person now and telling that story in a public space, that’s also like paid for and affiliated with the sharing of private data.
And it’s quite a contested space. It’s quite a difficult space and participating in it is something I’m quite ambivalent to. Obviously I’m here so I’m still participating in it. So I guess I still feel like there is value in standing there and saying this is a ridiculous place to be but here I am. Obviously, I also really enjoy it and I enjoy performing and I believe in performing music. It is a very problematic spot and I think that the Year of Love lyrics definitely, if any story is told it is actually that story, I think.
And then, it came about with this kind of joyful melody and the very sort of light and percussive soundscape. The arrangement is very bouncy on the way I perform. It’s also very quick and, not necessarily fast paced, but it’s light. It has a lightness to it and hopefully it gives some space to the words.
LFB: In the video, we can see you thinking looking at your phone or typing à a computer, would you say that like in the video the album is about making art? It is art, but it’s also about the process of making art ?
JH: Yeah, I mean, I think I always write about this because creating stuff is such a big part of who I am. And when I write certain things I’m also… I guess at heart I find that I am an artist that is in between being a traditional artist, and a critic. Or at least I have one foot, even if I am trying to tell a fictional or fictionalised story, I also always have this meta perspective where I’m criticising what I’m writing and what I’m doing and requestioning what music is, or what performance is… or there’s always something that is asking questions about the context in my work.
This album definitely is about to certain extent what is it like to create something at this time? What is this world like? This more kind of, learn from existence, an existence in a world where art is not allowed. Because public spaces, digital and public space online are a bit of a joke (laughs). Because it’s like Facebook. So yeah, it’s definitely about that.
LFB: Musically, how would you say Classic Object differs from your previous records?
JH: It’s very different from most things I’ve made because I wanted to have a band. Maybe also partly because I had written so much and just stuck with demos, unused files on computers to make my last few albums and there was very little interaction and playing of instruments in a room.
Maybe it was also pandemic reasons. I wanted to be with people. I also had the opportunity. So I booked a studio this time. A friend of mine works in a studio in Tunheim??? In the north of Oslo. Quite a bit further north (laughs). But we went there, me and several people that I also perform live with now, trying to sort of make stuff I’d done on my computer and transfer it onto real instruments.
So this is a band record. And I hardly play anything which I really enjoy. I’m a very mediocre musician. So I’m much better at listening than I am at playing instruments. And so I could take on that role and sort of listen to the music and be part of an interaction in which people could do a lot of stuff that I hadn’t anticipated.
So yeah, I think that in that sense, the album is very different from anything I’ve done before. Because I’ve never had a band play my music before actually, like a full band of several people. I’ve recorded live once. But that was only with two other musicians. So this time it was like lots of instruments I haven’t worked with before. Like lots of different keyboard based instruments, lots of percussion, and lots of layering of different instruments that I’ve not been able to do.
So, for me a really interesting experience. A very different sounding record, I think they wanted it to sound like almost a band. Because obviously there’s the needs to be a lot of space for lyrics when I make a record. A lot of words on it would be to put that at the back of the soundscape and like and prioritise what sounded good over telling the story would be strange. So I think it’s meant to be like somewhere in between a real band playing together, and a band that played together but then someone else, like me, found the recordings later on and use them for a karaoke session.
LFB: You have a big tour in Europe and North America planned in the next months… Will there be any particular staging props you were talking about? Have you already played the album live?
JH: We’re going to perform in about a month and start playing a few shows in Norway. We’re actually going to simplify this a lot. I have no plans for any visual or performative elements. I think we’re going to work a lot with video. So this might change my thoughts about that.
Because this time, I want to do a tour. So I can’t really bring much because we’ll have to be travelling with so many instruments and people. And so I really just wanted to focus on the music and I think it’s gonna be a pretty regular show, like an ordinary artists playing an ordinary show!
But who knows? But it’s nice because I’ve been focusing so much on visual and performative elements for quite a long time on stage. Now bringing a full band in, I think it would be too much for me to focus on both the music and making something else. It would come in the way of the music this time I think. So, simplifying is good.
Having some elements on video but maybe focusing more on storytelling and playing live together and not so much rolling around on a yoga ball or… because you can’t see when you do that! And if I can’t see you and you can’t… You take away a great opportunity to have a musical conversation with others when you’re always having to do tasks that put you away from other people knowing what you’re doing and other people in the band seeing you and also being able to sing. I’ve done a lot of stuff the last few years that it’s made it very complicated for me to perform.
It has its place! but this record… I’ve done much more of spoken word of singing before and this time, I think I crave just singing melodies! And that’s much harder! You have to stand still a lot!
LFB: And my last question is: Are there things that you’ve discovered recently that you would like to share with us?
JH: I’ve just reread the last essays and lectures by Susan Sontag. So that was my last discovery which was a rediscovery because I’ve read a little bit of her work before. But it was really nice. I haven’t read that much during the pandemic and when I have read it’s been fiction. So that’s been really nice to read a little bit of essays about writing.
I feel like I craved it, but I didn’t know. But she’s a wonderful critic. I mean she’s very famous so I’m not sure that that’s very exciting. But it was really nice to just read her last thoughts after such a long life of thinking about writing and thinking about arts place and culture.
LFB: And do you have any music that you like at the moment?
JH: No, I haven’t listened to music very much. Like I was saying actually, this is interesting, I’m kind of empty, but I’m sort of waiting to be filled. (laughs)
I mean, obviously there is stuff I’ve listened to. But I haven’t been able to sort of get excited about it in the way that I used to. Maybe I’m just old as well. I think it’s ok sometimes to be like that.
LFB: Thank you very much!