Après avoir joué et tourné avec d’autres musiciens (notamment en tant que guitariste de Clara Luciani ces dernières années), Benjamin Porraz a profité d’une pause pour composer et enregistrer son premier album solo. Sous le nom de KLEIN, le musicien multi-instrumentiste a sorti un opus au titre éponyme, 8 morceaux instrumentaux cinématiques et rêveurs, infusés de psychédélisme 60’s. Il nous parle de ce projet, de sa conception et de ses inspirations…
LFB : Comment ça va ?
KLEIN : Ça va bien et toi ?
LFB : Ça va bien !
Pour ceux qui ne te connaitraient pas, peux-tu nous parler de toi et de ton parcours musical ?
K : Oui… Je m’appelle Benjamin. Je suis musicien professionnellement depuis une petite dizaine d’années et j’ai commencé à vraiment faire de la musique avec un groupe qui s’appelait Agua Roja, c’était en 2013. En fait j’ai fait une école de son qui s’appelle l’ISTS – parce que je ne savais pas trop quoi faire après mon bac – et j’ai rencontré un mec qui s’appelle Clément Roussell. Ensuite on a croisé la route de November Ultra, qui fait de la super musique. On a fait un groupe tous les trois et on a sorti un single qui s’appelle Summer Ends un peu comme ça dans le vide sur internet et ça a un peu buzzé. Et pendant 5 ans après on a fait plein de trucs, plein de concerts… Puis on s’est séparés.
Et à partir de ce moment-là j’ai fait pas mal de musique pour d’autres artistes. J’ai un peu joué avec Théo Lawrence, avec Julia Jean Baptiste, avec Part-Time Friends aussi et avec plein de groupes. Et après j’ai rencontré Clara Luciani. On se connaissait déjà un peu de vue et au moment où elle cherchait des musiciens pour sa première tournée avant que son album sorte, j’ai été pris.
Et donc pendant 4 ans on a tourné comme des oufs, j’ai vraiment pas été beaucoup chez moi. On était beaucoup sur la route, on avait beaucoup de promo…
Et en fait, sorti de ça, ouais j’étais un peu chez moi et je me suis dit bon bah maintenant, c’était un peu « qu’est-ce que je fais ? ». Et en fait c’était bien parce que j’ai pris du temps pour vraiment faire de la musique. De la musique solo, dans ma chambre avec tous mes instruments.
Et c’était super parce que c’était un truc que je n’avais jamais fait. J’avais jamais vraiment ressenti le besoin de faire un truc solo, et en fait là, plus ça avançait, plus j’écrivais des trucs et plus je voyais un truc qui se formait et je trouvais ça super excitant. Et voilà, j’ai sorti ce premier petit album y a presque 1 an, c’était en juillet. Et le confinement, et tout est un peu tombé à ce moment-là… Mais c’était cool quand même, c’était super. J’étais très content de faire ça.
LFB : Tu as un peu répondu à ma prochaine question, c’était : quel était le point de départ de ce projet ?
K : Bah ouais c’était un peu ça. De faire ça comme ça, tout seul, face à moi-même, tout seul sans personne. Parce que j’avais toujours travaillé, soit avec des gens qui vraiment… je sais pas, je trouvais ça toujours plus facile en fait de travailler avec des gens, d’être drivé, de driver l’autre aussi. Et d’être vraiment seul, solo total… Je crois que j’avais un peu peur de ça et au final c’était super. J’étais content de pouvoir y arriver. C’était un petit défi en fait.
LFB : Tes morceaux sont hypnotiques / psychédéliques avec une forte inspiration 70’s. D’ailleurs l’album a été conçu comme une « musique Library des années 70 » une compilation de tes différentes influences. Est-ce que tu peux nous parler un peu de celles-ci ?
K : Ouais, c’est dans la forme, j’avais envie de faire un truc un peu compil’, un truc trouvé un peu comme ça, on ne sait pas trop d’où ça sort… avec des morceaux quand-même assez différents. Genre un morceau un peu disco, un morceau plus dreamy, un autre plus rock, et en fait, j’aimais bien cette idée de compil’ trouvée comme ça dans un bac de disquaire, on sait pas trop ce que c’est…
Mais ouais, moi j’ai pas mal écouté de compil’. Genre les compil’ KPM. C’est une music library pour habillage sonore et TV et c’est des mecs comme Keith Mansfield, un peu des génies de la musique instrumentale des années 60/70.
Ce sont toujours des morceaux qui restent instrumentaux, qui sont assez courts avec un thème qui se développe un peu et je trouvais ça intéressant. De ne pas partir dans des phases instrumentales qui peuvent être un peu chiantes à un moment avec plein de parties qui se superposent… Là j’avais envie de garder un truc avec un thème A, un thème B qui se développent un peu, mais on reste quand même dans des formats assez courts où les morceaux dépassent pas 4 minutes en moyenne. Donc voilà, ça c’était un truc que j’avais envie de faire, surtout dans la forme.
LFB : La couverture montre un temple indou et certains titres font référence à l’Inde notamment Kholkata et aussi Rama avant de revenir « Rive Gauche »… Quelle est ta relation avec ce pays/cette culture ?
K : En fait j’ai pris la photo à la Réunion et je crois que c’est un temple tamoul – après je t’avoue que je ne connais pas vraiment la culture tamoul. Je me suis beaucoup intéressé à un moment à toute la musique psyché qui venait plus de pays orientaux ou du Brésil, toute cette vague qu’il y a eu. Ça m’intéressais vachement. Ou la musique turque des années 60/70 aussi… J’avais envie de faire un truc un peu comme ça et en plus, y a plein de groupes aussi que j’écoute aujourd’hui qui reviennent vachement là-dessus.
Notamment y a beaucoup de groupes des Pays-Bas comme Yin Yin ; The Mauscovic Dance Band est un super groupe qui font de la musique qui s’inspire de la cumbia. Y a aussi Altın Gün que j’aime beaucoup qui reprend vachement les codes de la musique psyché turque des années 70. Et ça c’est un truc que j’ai pas mal écouté et que j’aime beaucoup et j’avais envie que ça se reflète un peu dans l’album. C’est vraiment une vision un peu occidentale de la musique orientale mais qui au final était déjà une réinterprétation de la musique occidental à l’époque.
LFB : D’autres titres pourraient être des détails d’un script (de film): « Niveau -1 » « Galop Lent », « En Dehors »… et d’ailleurs tout l’album à un effet cinématique… L’album a été « conçu comme une bande originale où l’auditeur est libre de créer son propre film ». Quelles ont été/sont les bandes originales de films qui t’ont marqué ?
K : Ouais c’est vrai. Je suis hyper cinéphile. Je me suis toujours énormément intéressé au cinéma, je pense que c’est vraiment… après la musique la forme artistique que j’admire le plus et qui m’intéresse le plus. Mes plus vieux souvenirs musicaux c’était vraiment les musiques de John Williams, les films de Spielberg – même si ça n’a pas vraiment à voir avec ma musique – mais oui ce sont des trucs très contemplatifs que j’aime énormément.
Et après, je me suis vachement aussi intéressé au films Giallo, ce sont des films d’horreur italiens des années 70. Pareil, je suis très grand fan de films d’horreur et toute la musique de films d’horreur, ça m’a toujours vachement passionné. Et notamment le groupe Goblin que j’ai vachement écouté à un moment qui a fait énormément de BO de films d’horreur des années 70 italiens notamment de Dario Argento et ça m’a passionné.
Et oui, j’aime bien l’idée que la place de l‘imagination soit hyper présente et que chacun puisse… C’est ça que j’aime bien dans l’instrumental, c’est que c’est très libre, chacun peut y voir des images alors que la musique chantée, on donne tout de suite un peu une direction. Avec un morceau instrumental, t’as le droit de rêver, c’est ça que je trouvais super intéressant.
LFB : Tes vidéos ont un esprit 70’s aussi, celle de Chanson de Lili est une animation psychédélique réalisée par Nevil Bernard, est-ce que tu peux nous en parler ?
K : Ouais, en fait Nevil c’est un vieux copain à moi, et j’ai toujours surkiffé les vidéos et les anim’ qu’il faisait et j’avais vraiment envie de bosser avec lui. Et en fait le clip aurait dû sortir il y a 6 mois et tout a pris un temps de malade. Ça a été assez long, mais je suis trop content qu’on ait réussi.
Et oui j’adorais l’ambiance de ses vidéos et ouais, moi j’avais envie de faire un truc assez psyché avec des ambiances très dessins animés des années 70, comme Métal Hurlant, un truc un peu inspiré de la science-fiction et je suis super content du travail qu’il a fait. Il a vraiment bien capté l’ambiance du titre.
LFB : Est-ce qu’il y a un titre en particulier qui te tiens à cœur sur l’album ?
K : J’aime bien Kholkata parce que c’est vraiment la première que j’ai faite. C’est la première où je me suis dit « c’est cool, je suis assez content ». Je suis content de ce titre… Et nan mais Chanson de Lili aussi j’aime bien. Parce que j’avais un son dans la tête et j’ai réussi à être fidèle à ce que j’avais vraiment en tête. C’était un objectif que j’avais et que je pense vraiment avoir réussi.
LFB : Comment ces derniers temps ont-ils impacté ton approche à la musique ?
K : Le truc surtout c’est de ne pas pouvoir faire de concert. C’est très frustrant parce qu’on m’a proposé pas mal de trucs qui au final n’ont pas pu se faire et c’est vrai que j’ai vraiment envie de défendre l’album en live. Dans l’idée moi j’ai envie de le faire avec un groupe et qu’il m’apporte aussi quelque chose ; et qu’on réinterprète aussi l’album parce que je pense que l’album va être un point de départ à un nouveau truc en live. Des nouveaux sons qu’on peut réarranger, réinterpréter. Et je trépigne un peu à l’idée de pouvoir faire ça.
J’essaye aussi de voir le positif et c’est bien aussi d’avoir du temps pour pouvoir écrire plein de nouveaux morceaux. Avoir beaucoup de temps c’est pas mal pour moi, je peux vraiment réfléchir aux arrangements que je veux exactement avoir un résultat définitif qui me plaît et c’est assez cool en fait.
Mais bon, c’est vrai qu’on s’emmerde un peu quoi !
LFB : Où et quand as-tu composé l’album ? Est-ce que tu l’as enregistré seul ou étais-tu accompagné d’autres musiciens ?
K : Je l’ai composé chez moi en grande partie et chez ma copine et c’était il y a un an et demi à peu près. Et ça s’est fait assez rapidement, c’était assez naturel comme processus, tout était assez fluide.
J’étais complètement seul. Enfin tout l’enregistrement j’ai vraiment fait tout seul et après c’est un copain à moi qui s’appelle Clément Roussell avec qui je faisais Agua Roja qui a mixé l’album et ça a été un peu compliqué parce qu’on n’a pas pu se voir, on a tout fait à distance donc ce n’était pas le meilleur cas de figure mais on y est arrivé. Et c’est un autre ami à moi qui a masterisé l’album qui s’appelle Adrien Pallot qui a travaillé avec énormément de groupes – et c’est un vieux copain à moi aussi – et il a fait un super boulot. Mais tout ce qui est processus d’enregistrement, c’est vraiment moi qui ai tout fait.
LFB : As-tu d’autres projets musicaux en cours /ou dans les mois à venir ?
Oui je prépare des nouveaux titres pour sortir un nouveau disque en septembre et j’espère des concerts très vite !
LFB : Merci !
Crédit photos : Ella Hermë