Un concert tout simplement magnifique. Devendra Banhart nous a fait part de tout son talent et son grand cœur dans la magnifique salle du Grand Rex.
En ouverture de Devendra Banhart, on retrouvait le chanteur John Moods, accompagné d’une musicienne et d’un musicien. De la musique folk à l’américaine, des chœurs, une flute traversière, pour une première partie maîtrisée. On sentait du cœur à l’ouvrage dans ce trio, qui débordait d’envie, mais pour être franc, on a fini sur notre faim. Il nous manquait le petit truc, le petit quelque chose qui touche le cœur.
Expliquer Devendra Banhart est une tâche à la fois simple et ardue. En effet, le musicien est un artiste complet, multi-instrumentalise, multi-linguiste, passé par pléthore de phases. Au travers d’une bonne dizaine de disques, de collaborations en tout genre, il est difficile de mettre le doigt sur ce qu’il est. Néanmoins, la musique de Devendra Banhart se résume à une simplicité souvent déconcertante. De cette folk psyché qui habitait ses premiers disques jusqu’à Ma, sorti en 2019, on reste sur une musique résolument dénuée d’artifice. Reste en constante cette voix, ces textes poétiques, ces arrangements précis, chaleureux, aux délicieuses sonorités d’Amérique du Sud.
Mais son denier effort est un petit événement tant il diffère de l’univers de l’artiste. Dans Flying Wig (2023 / Mexican Summer), on retrouve beaucoup moins de chaleur, de sonorités qui ont fait la popularité du musicien. Cet album, produit par Cate Le Bon est un virage assez abrupte. En effet, on est, de prime abord, un peu perdu par cette constante froideur. L’ambiance est glaciale, on retrouve mêmes quelques sonorités qu’on pourrait lier au post punk, antinomie quand on pense à Devendra Banhart. Les synthétiseurs se succèdent, les rythmes perdent de leur entrain, le tempo est moins vif. Une sacrée dose de larmes.
Car, quand ce dernier pointe le bout de son nez dans nos écouteurs, on sent de la chaleur, des couleurs calmes et joyeuses, des rythmes enjoués, des chœurs, des sonorités d’Amérique du Sud. Bref, voici donc un album dont on ne s’attendait pas à cette teneur, et dont on ne sait pas trop quoi faire. En lui-même, ce disque est loin d’être mauvais, loin de là. Mais venant du compositeur d’albums comme le magnifique Mala en 2013, ou son précédent effort Ma en 2019, on ne peut qu’être surpris.e. Flying Wig est un quelque chose de l’ordre d’un phénomène particulier. Un phénomène de mélancolie, vaporeux en nappes de synthé, cadré de boites à rythme. Et un très bon disque.
De cette date, on retiendra le talent de Devendra Banhart, mais aussi son grand cœur. On le sent dans son élément, accompagné de musicien.nes de talent. Il n’hésite pas à interagir avec le public, blaguer -parce qu’en plus, il est drôle. Cet homme a-t-il un défaut ? Il cède même la lumière, le temps d’une chanson, à son guitariste, Huw Evans (aka H. Hawkline) pour qu’il interprète une des siennes. Quel artiste solo, qui tourne pour son énième album, donne le temps d’une chanson le micro à l’un de ses musiciens ? Qui plus est, le reste du groupe l’accompagnait, Devendra le backant aux chœurs. Cet homme est une pépite.
En résulte donc un concert excellent. Grâce à un son d’une rare qualité, Le Grand Rex, quoi que pas totalement rempli (quelle tragédie), a pu profiter d’une soirée exceptionnelle. Le set est admirablement bien construit, rythmé en phases de plus en plus intenses. Le tout est magnifié par un rappel exceptionnel qui aura fait se lever le par-terre de la salle. Une standing ovation, des au-revoirs, et un long et difficile retour à la réalité. Devendra Banhart est un musicien exceptionnel, un artiste au grand cœur, et une personne formidable.
Toutes les photos ont été réalisés par Cédric, qu’on peut retrouver sur instagram juste ici