Dans une galaxie pas si lointaine, les étoiles naissent et s’éteignent à la vitesse du son. Portant le nom d’un compatriote en voix d’extinction, Supernova débarque donc dans le monde de la pop française avec un premier effort brillant, ambitieux et lettré qui nous a touché en plein cœur.
C’est l’histoire d’un homme. Un homme seul et ivre dans la nuit parisienne. Il se promène dans la rue, il ère sous les néons et sous la lune, titubant sur le bitume, se retenant aux murs pour ne pas tomber. Dans sa tête, des histoires se bousculent, des mots, des images et des sons lui reviennent, entre joie éclatante, mélancolie sourde et spleen éthylique. Cet homme (ou cette femme), qu’on a tous plus ou moins été un jour pourrait être le personnage principal du premier effort de Supernova. Ces cinq morceaux forment un tout, d’une fin de journée à un début de nuit, les bal(l)ades nocturnes des cœurs brisés, des impatients, de ceux qui sont résignés et ceux qui le sont moins.
Derrière Supernova, il y a donc Paul et Martin. Il y a surtout une idée, élevée au rang d’art par Serge Gainsbourg, qu’ils portent à bout de bras avec cet EP1. Cette idée est simple : associer l’importance du mot à la française au sens du rythme des influences anglo-saxonnes. Alors oui, on pourrait se dire que cela n’a rien de vraiment révolutionnaire mais là où Supernova se détache avec bonheur, c’est dans l’utilisation du français. Loin d’une envie contemporaine, loin d’un besoin absolu de modernité, les mots de Paul ont parfois un goût de poussière sur laquelle on souffle pour découvrir toutes les merveilles d’une langue française qui navigue dans les âges.
Alors, pour ne pas se sentir trop bête, on choppe un dictionnaire (ou wikipedia car la modernité a quand même du bon) et on cherche ces mots qui nous semblent étrangers : immarcescible, élégie… Et on réalise que ce côté suranné fait toute la saveur de ces morceaux, que cette envie leur donne une couleur unique à laquelle s’associe un sens de l’observation assez parfait, et une vie de raconter des histoires poétiques, parfois brillantes, parfois pathétiques, le plus sincèrement possible. Les mots deviennent des images, les images se transforment en histoires et les histoires deviennent donc des souvenirs. Impossible de ne pas se retrouver dans l’optimisme sans faille d’Immarcescible Rose ou dans la lancinante complainte d’Elégie.
Cette exigence du mot pourrait sonner creux si elle ne se confrontait pas au même moment à une recherche esthétique absolue dans le son. On ne va pas se mentir, Supernova est un groupe qui gravite depuis un petit moment déjà dans nos oreilles et dans notre entourage. Ce premier EP était un peu attendu et va donc au delà de nos espérances. On y trouve un amour sincère pour tout ce qui a trait à la musique populaire. Ici, les chœurs masculins et féminins explosent dans tous les titres, les synthétiseurs et les cordes se mélangent avec bonheur, les ambiances bougent et changent, le cinéma nous fait des clins d’œils sur Les Amants Déchus et Les Vacances de Sarah qui ressemblent à des génériques de fin quand la vie défile et qu’on regarde les noms se succéder sur l’écran de nos souvenirs. Le reggae se taille la part du lion sur Immarcescible Rose, Supernova se transforme en course sans fin guidée par une basse et une guitare qu’envieraient certains groupes anglais et Élégie nous noie dans une valse sombre et presque désespérée.
Avec EP1, Supernova marque donc son petit monde et se place comme une nouvelle étoile brillante dans la galaxie de la pop française. Une musique élégante et réfléchie, pour un groupe qui, contrairement à ce que son nom indique, n’a pas fini de briller. La suite devrait arriver plus vite qu’on ne le pense, en attendant, allez à la rencontre de Supernova, leur bal(l)ades nocturnes valent le détour.