La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre, la première partie de la sélection numéro 133 des clips de la semaine.
Iñigo Montoya – 1986
Iñigo Montoya revient par surprise avec INIGMAXI04, nouvel épisode de leur série de maxi, qu’ils nous livrent de manière épisodique. On y retrouve donc 1986, un titre qui porte en lui tout l’ADN du duo : une ambiance post-apocalyptique, des percussions dansantes, des nappes électroniques entêtantes et un texte qui prend de plus en plus d’importance, malgré le mystère. Ici, c’est un voyage entre le passé et le présent qu’ils nous offrent, un voyage où le passé et le présent se croisent, la jeunesse en écho au présent, l’absence des autres, les grandes villes qui nous bouffent et le monte qui décrépit, petit à petit.
Malgré des tendances sombres, Iñigo Montoya cherche malgré tout l’aventure et une certaine lumière. Celle-ci passe par les autres, le contact, le relationnel, les caresses et les câlins. Une certaine douceur qui s’infiltre ici et là vers la fin du morceau et qui nous réchauffe légèrement.
Qui dit Iñigo Montoya dit forcément ZEUGL, les deux collectifs semblant indissociables l’un de l’autre. C’est un nouveau travail d’orfèvre qu’ils nous offrent, jouant une nouvelle fois avec les textures, les images et les smileys. Ici la vidéo s’offre zooms et dézooms, des images qui construisent, des images avec un côté psychédélique assez prononcé. Sur des teintes assez froides, c’est une nouvelle création folle qui nous est donnée à voir (et à entendre) avec cette vidéo bien plus politique qu’on pourrait le croire au premier visionnage.
Un nouveau jeu sur le son et les images parfaitement réussi.
Godzilla Overkill – Sous le soleil l’ennui règne
Quatre ans après Padre Pio, Godzilla Overkill est enfin de retour avec FATALITAS.
Si la production est moins abrupte, plus pop et léchée, le tout est toujours recouvert d’une vision du monde assez désespérée, violente et provocante, bien que toujours hyper poétique.
La preuve avec Sous le soleil l’ennui règne, petite merveille mélancolique qui parle du temps qui passe, de l’éphémère et du monde qui brûle, qu’on le veuille ou non. Godzilla Overkill nous partage sa peur de l’ennui, les cicatrices d’un passé qui le hantent, et la sensation d’être parfois à l’écart du monde.
C’est beau, déchirant et sincère, même si il vaut mieux être de bonne humeur pour écouter le tout.
Comme un être hors du monde, habillé de blanc et entouré d’êtres en tenues sombres, le musicien évolue dans une fête aux contours flous sous la caméra d’Elliott Eugenie. Il se promène parmi ces gens souriants et inconscients, récitant sa prose avant de finalement les rejoindre dans la fête.
De fête, il en sera aussi question en juillet, puisque Godzilla Overkill fêtera la sortie de son EP au Point Éphémère le 8.
BOLIVARD – PSYCHOPATHE
Le docteur Bolivard est mort et c’est la faute d’un psychopathe. Comme si un patient absolument fêlé avait pris la place de notre héros, c’est un nouveau personnage qui prend vie devant nous. Si le noir et blanc est toujours de mise, c’est désormais le costard trois pièce et la mèche au vent qui remplacent la casquette de Bolivard.
Rassurez vous, le musicien garde la sève de tout ce qui nous fait l’aimer : des rythmiques funky, un chant nonchalant, une vision assez acérée sur le monde et beaucoup, beaucoup, beaucoup d’humour !
Dans ce titre, c’est la société de l’ego qui en prend pour son grade : tous ces gens qui s’aiment beaucoup trop eux-mêmes pour pouvoir envisager qu’il y ait d’autres personnes qui existent autour d’eux.
C’est assez dingue, gentiment cynique et profondément attachiant.
Aussi réalisateur, Bolivard embarque avec lui son boys band de psychopathes propres sur eux et imbus de leur personne pour une promenade à La Défense. On danse, on saute, on remet sa cravate en place et on kiffe son existence vaine et superficielle. Ça semble drôle, mais c’est pourtant l’existence de beaucoup de nos voisins, alors un conseil : faites attention si vous croisez ce genre de personnes dans la rue.
Mr GISCARD – Tu sais ma vie c’est vite chiant
Petit à petit, Mr GISCARD crée un court métrage de ses clips. Une histoire décousue, dans laquelle on retrouve souvent les mêmes héros, incarnés par Rod PARADOT & Jade LEGRAND, et dans laquelle il s’amuse à faire des petites apparitions ici et là.
Alors qu’il a dévoilé ce vendredi son premier album :): , il s’associe une nouvelle fois à Louis LEKIEN pour une mise en image de Tu sais ma vie c’est vite chiant. Si le titre est, comme à son habitude, très dansant, et repose sur une production bien plus électronique que ses précédents morceaux, ce n’est toujours pas la joie de vivre chez Mr GISCARD.
Ainsi, ce morceau se révèle sans doute le plus honnête et à vif qu’il nous ait offert, racontant de manière désenchantée sa vie, son manque de communication, son incapacité à comprendre et accepter ses sentiments, et la tristesse qui découle de tout ça.
À l’écran, on suit les deux personnages brisés, avec leur non-dits, leur amour qui vibre et se détruit, la mort qui traine et qui, elle, finit par tout détruire. C’est superbement réalisé, émotionnellement chargé et parfaitement interprété.
L’histoire de Mr GISCARD continue et nous on suit le tout avec bonheur, continuant de regarder à travers les failles de ce garçon faussement décontracté.
edgar déception – edgar pleut toujours sous ta fenêtre de merde
L’indie-emo-tweepunk-whateverpop, vous connaissez ? C’est ainsi qu’edgar déception a choisi de qualifier sa musique à la sortie d’un nouveau single, edgar pleut toujours sous ta fenêtre de merde. Toujours aussi adorablement imprévisible, le groupe nous raconte une amourette autant passionnée que cafardeuse sur fond de pop-punk (le genre décrit plus haut colle vraiment bien pour le coup). Touchant, faussement idiot, comme souvent avec edgar déception. Côté clip, qui est entièrement réalisé par Eva Seniak, la guitariste du groupe, c’est un dessin animé simpliste de la vague naïve qui illustre cette chanson avec une histoire d’amour entre un raton-laveur et…un autre être vivant, tous deux très mignons. Ce single est là aussi pour annoncer la sortie d’un nouvel EP, qui sortira au courant de l’automne 2022, et qu’on attend avec hâte !
Baston – Chamade
Ce vendredi, Baston nous présentait le clip de Chamade, un morceau issu de leur dernier disque, La Martyre. Exercice cinématographique assez déstabilisant, ce court est une vraie bonne surprise, autant de par la pléthore d’interprétations qui nous est offerte, que par la réalisation très soignée de Clovis Le Pivert. En effet, le clip peut, de prime abord, être assez déconcertant, mais il se révèle rapidement très poétique et chargé de symboles. Sa mise en scène minimaliste et un suspense bien dosé parviennent à nous accrocher à l’écran, pour le meilleur, car le travail sur l’image est juste incroyable. Hypnotisant, il colle très bien au Post-Rock atmosphérique et viscéral de Chamade, tout en laissant derrière lui ce qu’il faut de mystère et de rêverie.
Les Gordon – Enid & Rebecca
Nouveau titre pour Les Gordon avec Enid & Rebecca ! L’alliance opérée par l’artiste entre une chorale d’enfants et des sonorités électroniques dansantes fonctionne à merveille. Le morceau sent bon l’été et nous transporte dans un univers lumineux et plein d’espoir.
Côté clip, Les Gordon nous offre des images en stop motion, avec des dessins effectués au feutre. La culture asiatique est mise à l’honneur dans ce périple où Enid rejoint Rebecca. Voiture, avion, fusée, parachutisme, la protagoniste multiplie les modes de locomotion et s’offre même un voyage dans l’espace.
En résumé, l’artiste propose une musique pleine d’originalité, avec une ambiance assez légère, parfaite pour les fortes chaleurs à venir.
Sinead O’Brien – Like Culture
Alors qu’elle vient à peine de sortir son tout premier album, Time Bend and Break the Power, l’artiste irlandaise met en lumière son titre le plus dansant, Like Culture. Avec son rythme disco et ses riffs de guitares qui griffent les sonorités entrainantes, Sinead O’Brien nous invite à danser à la gloire du monde de la nuit. Dans le clip, elle apparaît en agent Smith des festivités nocturnes, en nous arguant sur scène, puis dans un bar de prohibition, où plusieurs corps se caressent et s’embrassent. Le monde de la nuit est un artifice qui permet de se libérer de ses mœurs et d’atteindre, au final, le vivre-ensemble selon Sinead : « Growing together like culture« . Voilà un bon slogan pour les noctambules !
Metric – What Feels Like Eternity
Cette semaine débarque le troisième titre du nouvel album très attendu de Metric, Formentera. Après All comes crashing et Doomscroller, le groupe de Toronto dévoile What feels like eternity, avec un clip réalisé par Justin Broadbent. Vingt ans de carrière pour Emily Haines et ses acolytes, et on retrouve tous les éléments qui ont fait leur succès, à commencer par des mélodies rudement efficaces, dans un héritage new wave et grunge. Une époque remise à l’honneur dans ce clip d’une simplicité qui nous ramène aux bases du rock. Un set drapé, des amplis, une batterie, des gros plans sur les instruments, la base sans artifices. L’effet se renforce dans la partie plus musicale du morceau, avec des images off à la super 8 ; on y confondrait Emily avec Debbie Harry à la grande époque de Blondie. On entend même la chanteuse de Gold Guns Girls lâcher un “so nithies” en fin de vidéo, époque d’or de toute une génération. On veut en écouter plus, mais pour cela on va devoir patienter, alors on règle notre réveil au 8 juillet prochain, et en attendant on se met What feels like eternity en boucle.
Toro y moi – Goes By So Fast : a MAHAL Film
Les fans de Toro Y Moi sont habitué.e.s aux productions visuelles accompagnant ses albums. MAHAL ne fait donc pas exception : après la vraie-fausse vidéo d’écoute du nouvel opus parue en mai, dans laquelle une bande de potes mi-humains mi-carton pâte se retrouvent un aprem autour d’une bonne demie douzaine de spliffs pour écouter cérémonieusement leur musicien préféré (toute ressemblance avec la réalité ne saurait être que purement fortuite), nous voilà parti.e.s avec Toro Y Moi dans un road trip californien. Plus précisément, Chaz Bear, de son vrai nom, se retrouve embarqué après une panne d’essence sur le périph’ de San Francisco à bord d’une camionnette douteuse, conduite par le non moins douteux Eric André (animateur hilarant du démoniaque Eric Andre Show). Ok, on triche : entre fiction, images de tournage, vidéo live et animation, il s’agit bien d’un film plus que d’un clip-de-la-semaine amélioré. Le musicien y livre une performance live toute tendre du morceau Goes By So Fast, avant de revenir à une réalité moins laid back, dans une Jeepney qui semble se conduire toute seule. On y découvre également, au détour d’une séquence d’animation ludique, l’histoire de cette fameuse camionnette emblématique des Philippines, dont la mère de Chaz Bear est originaire, qui se positionne en véhicule-icône de ce nouvel album, que l’équipe de Toro Y Moi a conçu pour l’occasion. Ce ne seront pas douze minutes de votre week-end de perdues, promis.
Le Paon – Jamais Assez
« Jamais assez de toi jamais assez », Marion Corrales aka Le Paon porte en elle la fougue et l’énergie de vivre ses sentiments de façon pleine et entière. Si, dans Jamais Assez, il est question de chrysalide ou de coquille, c’est pour mieux s’en dégager. Son souffle prend vie au travers de sa voix retenue mais puissante, qui ne demande qu’à remplir l’espace sonore. Comme égarée dans un palais vénitien abandonné, le décor est posé pour un conte baroque où l’amour se recherche avec une passion dévorante : « Donne un morceau de toi je veux goûter ». Dernière signature du label Elektra, dans Jamais Assez, Le Paon se pare de ses plus belles plumes pour vous séduire et vous conquérir.