La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer se yeux et ses oreilles. Sans attendre, voici la première partie de la 149ème sélection des clips de la semaine.
Rob & Jack Lahana (feat. Catastrophe) – Toupies
Cette semaine sort un nouvel extrait du projet Summercamp de Rob & Jack Lahana, qui s’avère être encore bien mystérieux. Après deux épisodes avec Giorgio Poi, Gordon Tracks et Leon Larregui, c’est aujourd’hui au tour de Catastrophe de collaborer avec le duo pour proposer une œuvre qui s’inscrit dans la lignée très électronique de la proposition. Elle nous parle de la complexité de la vie et de la difficulté à tenir un cap au sein de celle-ci, nous transformant de facto en toupies incapables d’indiquer une direction plus d’un instant.
La transition à l’image est assurée par Benoît Forgeard et sublime la dimension psychédélique du morceau en envoyant les membres de Catastrophe voler dans tous les sens, à travers des plans conceptuels ou en stop motion dotés d’un aspect graphique qui convient très bien au collectif français que l’on continue de suivre à travers son sans-faute perpétuel. Rendez-vous pour le prochain épisode de la série Summercamp, qu’on suivra avec attention.
SÜEÜR – Noir=Dark
Ce vendredi, SÜEÜR a dévoilé son premier album, Ananké. Un mélange de fureur, de puissance, de mélancolie et de douceur. C’est dans cette deuxième moitié qu’on peut classer Noir = Dark.
Un titre plus aérien et posé, dans lequel Théo Cholbi parle d’amour, celui qui se vit intensément mais qui peut aussi détruire dans le temps. Le morceau défile et il renforce ces sentiments, le besoin de vivre à deux, de grandir et de se protéger l’un l’autre, comme une armée à deux face au monde.
Pour une fois, l’artiste ne passe pas derrière la caméra et laisse ce rôle à Baptiste HERONDELLE. Celui-ci respecte à merveille les codes de l’univers SÜEÜR et nous livre un clip en noir et blanc, intense et humain, dans lequel deux amants se déchirent et se retrouvent, et où Théo apparaît en filigrane, comme un fantôme présent dans l’histoire qui observe l’amour se faire et se défaire.
Marek Zerba – Sans Contact
Les mesures sanitaires gouvernementales ont laissé des traces chez Marek Zerba. Sur ce troisième extrait de son premier album, Qu’on leur donne de la brioche ! il nous rappelle tous les gestes barrières à prendre avec précaution. Si le ton se montre désinvolte aux premiers abords, les paroles se révèlent être celles d’un pastiche renforcé par la dualité de la voix en écho, qui fait inlassablement résonner le terme de Sans Contact.
Et c’est là le coup de génie de Marek Zerba. De faits concrets, sérieux et caricaturés, on passe dans un univers absurde et pathétique. Le clip, rempli de parodies de gestes sans contact, met d’ailleurs bien en lumière cette sensation. Tourné dans le mythique bar parisien Le Pop In, l’artiste se met à l’écart de la fraternité des gens, désabusé par l’agitation autour de lui, entre baisers torrides et pogos de comptoir.
On tombe également sous le charme de ce titre banger d’une efficacité puissante et mélodique, porté par des riffs de guitare à la sauce 90’s. Bien joué.
Uèle Lamore – Something about us
Alors qu’elle nous avait emmenés dans de nombreux territoires avec son premier album, Loom, en début d’année, Uèle Lamore est déjà de retour avec un nouveau titre, Something about us, annonciateur d’un nouvel EP.
Influencée par son expérience de la scène, la musicienne nous offre un nouveau titre bien plus « physique », mené par de nombreuses lignes de basses qui confèrent au tout une ambiance à la fois lourde et psychédélique.
Un titre instrumental assez direct et lourd, qui évolue au fil du morceau pour nous surprendre et nous offrir différentes visions autour d’une direction mélodique qui reste pourtant la même du début à la fin.
C’est tout le talent de Uèle Lamore qui s’exprime, sa façon de nous faire voyager et de nous offrir une expérience musicale à la fois exigeante et accueillante.
Pour l’accompagner, elle nous offre un clip DIY, fait maison et porté par des sous-titres absolument hilarants au fur et à mesure que les images défilent.
Reste cette idée qui nous fait du bien, quand elle nous raconte que Something about us est utile pour « curing your depression« . C’est un peu vrai et c’est là toute la force de la musique en général.
Spider ZED – Club de cœur
On a tous un Club de coeur en nous, celui qu’on supporte dans les hauts comme dans les bas, avec ses qualités et ses défauts. On ne parle pas de foot ici mais bien de la famille, celle qui s’impose à nous mais qu’on ne quittera jamais.
Club de coeur, c’est l’histoire que Spider ZED nous raconte. En douceur, sur une prod entraînante, avec des mots simples et directs, le rappeur nous raconte sa famille, histoires de classe moyenne où les sentiments restent au fond des poches, où les dîners de famille sont aussi brillants que pathétiques et les non-dits omniprésents.
ARA Like The Damn Bird apporte à cette histoire une image animée. Le foot revient de manière imagée avec ces deux familles qui jouent un match grâce auquel tout va changer. Des larmes au sourire, il n’y a qu’un pas, que Supder ZED franchit en moins de 3 minutes.
La suite, vite !
i300 – Amen
Le duo issu du 92 montre à nouveau toute son alchimie dans un nouveau morceau rempli d’énergie, Amen.
Décidant de clipper ce morceau, ils ont fait appel à l’équipe de Piege Studios pour la réalisation. Cette dernière a pu s’amuser en mélangeant le côté brut du duo et de leur musique à une esthétique plus divine. Rejouant la Cène à leur manière, le duo exprime son début d’ascension.
En parallèle, ils n’oublient pas leur côté plus urbain, et le passage d’un univers à l’autre se fait via un montage assez dynamique et intelligent, jouant sur certains objets pour passer d’un plan au suivant.
Le visuel se clôture par l’annonce d’une Boule Noire début janvier, pour ce duo qui continue petit à petit de passer les étapes d’un parcours bien tracé.
Spencer Cullum – Kingdom Weather (feat. Yuma Abe)
Spencer Cullum sort cette semaine Kingdom Weather (feat. Yuma Abe), une ballade intemporelle aux saveurs d’été, en anglais mais aussi en japonais, avec les mots de l’auteur-compositeur basé à Tokyo, Yuma Abe. Et en ce temps où il commence à faire froid et où les jours commencent à raccourcir, le musicien londonien basé à Nashville fait revivre une journée estivale qui frôle la perfection.
Une chanson folk, légère et bucolique, où les couleurs sont vives et le soleil brille. Les paroles sont nonchalantes et sereines : “This is Kingdom Weather/ couldn’t ask for more/ Doesn’t get much better/ Let’s see what’s the day’s got in store”. Le clip, réalisé par Jake White, nous projette dans les herbes hautes au bord d’une rivière, avec des images tournées en super 8 qui collent au style rétro du morceau et nous réchauffent un peu le cœur en ces jours pluvieux d’automne.
Le musicien anglais a annoncé, avec ce morceau, la sortie prochaine de Spencer Cullum’s Coin Collection 2, qui fera suite à Coin Collection 1 (2021) (qu’on avait adoré).
L’opus est prévu pour le 14 avril 2023 sur Full Time Hobby, et on a hâte de le découvrir !
Jeune Mort – Cavale
La fine équipe de la 75ème Session semble encore avoir plein de belles promesses à nous présenter. La dernière en date se nomme Jeune Mort, et prouve avec Cavale pourquoi son lien avec la 75éme est évident.
Effectivement, il semble cocher toutes les cases qui peuvent être assimilées au crew parisien : du spleen, une plume aiguisée, un kickage maîtrisé et des mélodies touchantes. Il est par conséquent logique de le voir se poser sans difficulté sur l’instrumentale nocturne d’Epektase, teintée d’instruments organiques donnant du corps à cette ride nocturne trouble.
En tout cas, c’est comme ça que le collectif a voulu traduire ce morceau à la caméra. Déambulant dans leur 75, ils jouent de l’énergie troublée de Jeune Mort pour l’appliquer dans leur réalisation.
Le tout se combine à merveille et laisse éclater toute la mélancolie du rappeur.
GURL – MY DREAM CAR
Les parisiens de GURL viennent de sortir un nouveau single nommé My Dream Car. Il est accompagné d’un lyric clip à base de vieilles bagnoles et de désirs d’évasion sur les longues routes solitaires du continent nord-américain.
Le Garage-Punk du groupe nous donne le smile sur ce nouveau titre. Gentiment entraînant, mélodiquement imparable, c’est du petit lait pour les oreilles. Ce n’est pas un morceau sur les voitures, la voiture est ici un prétexte, elle est synonyme de liberté. Partir loin, appuyer sur la pédale de droite et tout laisser derrière soi. Voilà le vrai sujet de My Dream Car.
Le clip renforce cette envie de grands espaces : il est en effet construit d’images d’archives qui datent d’il y a certainement cinquante ans, et dont certains plans semblent presque lunaires aujourd’hui. Un bond dans le temps qui nous donnerait presque envie de sauter non pas dans une vieille Chevrolet, mais plutôt dans une DeLorean. Majoritairement noir et blanc, il se pare de couleurs lorsque la musique s’envole, et c’est du meilleur effet. Croyez-nous, le dernier GURL vaut le détour !
JE T’AIME – Out of Sight
Le groupe parisien Retro-Wave JE T’AIME a sorti cette semaine le clip de Out of Sight, single tiré de la seconde partie de leur dernier album, Passive/Agressive.
Mêlant Electro-Clash et New-Wave crépusculaire, le trio nous présentait en octobre dernier la seconde partie de leur dernier effort. Un double album audacieux dont les premières pistes nous étaient dévoilées le jour de la St Valentin. Industriel, sans concession, leur son est massif, les machines qu’ils triturent dans tous les sens posent une ambiance électrisante, qui peut nous rappeler aussi bien Carpenter Brut que New Order. Out of Sight est ultra-efficace, elle détonne et reste en tête.
Pour le clip, le groupe a fait appel à un duo d’artistes visuels encore assez peu connus, mais qui livrent un clip superbe à l’esthétique très travaillée. Une cave toute enfumée, des couleurs chaudes et froides qui se mêlent, et nos trois musiciens qui se déchaînent dans ce décor surréaliste, simple mais efficace, à la poésie sombre et industrielle, mais noyée de lumière.
Aloïse Sauvage – Fumée
Circassienne, chanteuse, danseuse, comédienne…. Dans ce clip de la version live du titre Fumée, issu de son tout dernier album Sauvage, Aloïse Sauvage se donne une fois de plus l’occasion de nous montrer ses nombreux talents.
C’est dans les mouvements de caméra d’un plan séquence de l’artiste se produisant à La Cigale que nous pouvons retrouver l’artiste qui semble (et d’expérience : est) faite pour la scène !
Oeil rieur, complicité avec le public, moves de folies, énergie complètement dynamitée, ce clip est une vraie ode à la scène et à toute la magie qui se passe derrière les portes de toutes ces salles sombres et bien éclairées.
De notre côté, on a déjà notre billet pour la tournée actuelle de l’artiste, toutes les informations sont ici.
Nili Hadida – 2022
Avec 2022, Nili Hadida nous électrise à travers un clip pensé en hommage à Girls and Boys de Blur, et réalisé par son compère de Lilly Wood & The Prick, Benjamin Cotto. Des couleurs acides, de la guitare dans tous les sens et une Nili Hadida plus rock que jamais, ce titre est un véritable séisme pour notre rétine et nos oreilles !
Quant aux paroles, elles ne sont pas en reste : la chanteuse nous propose une lecture juste sur les absurdités de notre monde, entre pandémie, réchauffement climatique et politique peu glorieuse… Et nous invite à revenir, l’espace d’un titre, dans ce bon vieux temps chéri, celui des 90s, de l’adolescence et ses garage bands d’après-lycée, où le monde semblait être un terrain de tous les possibles.
Une plongée intense et sans concession dans l’univers d’une artiste qu’on adore, alors notre conseil : attrapez une chupa chups, ouvrez une canette de soda et regardez ce clip tout l’après-midi, à renouveler quotidiennement !
Yeah Yeah Yeahs – Wolf
Le groupe new yorkais s’est offert ni plus ni mois que Britt Lower pour le clip de Wolf. La star de la série Severance d’Apple + est emprisonnée dans une vie de couple morne et sous le pouvoir de son marie terne. Intriguée par un mystérieux oiseau bleu, elle part à sa recherche et se révèle être plus sauvage et endiablée que jamais.
Sous la tutelle d’Allie Avital, la vidéo montre tous les paradoxes de cette ode à la liberté qui mène aux portes de l’Enfer. Les synthés grandioses viennent appuyer la grandeur magistrale de cette nature à la fois magnifique et intrigante. Un retour aux sources qui correspond parfaitement au come-back attendu et réussi de Yeah Yeah Yeahs.
Yves Tumor – God is a Circle
Avec ce nouveau single, c’est désormais Yves te mord. L’artiste américain livre ici une petite pépite post-punk sous la houlette, une nouvelle fois, de Noah Goldstein. Les images du clip sont superbes, ne vous étonnez pas, on y retrouve la patte de Jordan Hemingway, déjà à l’œuvre avec Wolf Alice. Le réalisateur réussit encore la prouesse de mettre autant de couleurs en valeurs dans un environnement sombre. Le rendu rend un véritable hommage au cinéma d’art et d’essai des seventies, comme le célèbre Salò ou Les 120 jours de Sodome de Pasoloni. Oui, vous verrez des corps nus souffrir dans ce clip, pour notre plus grand plaisir.