Les clips de la semaine #153 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer se yeux et ses oreilles. Sans attendre, voici la première partie de la 153ème sélection des clips de la semaine.

GRAND BLANC – PILULE BLEUE

Grand Blanc revient avec un nouveau single frappant, et annonce par là même la sortie prochaine d’un nouvel album. Nommé Pilule Bleue, le titre semble vouloir nous projeter dans un futur post-mélancolique.

On était plus qu’impatient d’entendre du neuf chez l’un des groupes français les plus excitants de ces dernières années. Quatre années se sont écoulées depuis la sortie d’Image au Mur. C’est avec un morceau d’une douceur exquise, construit autour d’une harpe, que Grand Blanc choisit de revenir. Dreamy à souhait, une tristesse profonde émane pourtant de la chanson, qui par moments semble à deux doigts de la rupture. Une tension merveilleusement bien dosée, qui laisse transparaître une inquiétude existentielle dans les esprits du groupe.

Imagé par un clip qui met en scène la chanteuse, Camille, dans un monde déserté, accompagnée seulement d’un robot bringuebalant mais attachant : une musicienne en exil. La référence évidente à Matrix nous laisse entendre que l’humanité à peut-être eu le choix de partir ou de rester. La pilule bleue exprime le choix de vouloir rester dans la matrice, mais aucune simulation n’empêchera le réel de partir en fumée. Jules Cassignol nous livre des plans d’une incroyable beauté, qui mettent un peu plus en exergue la poésie subtile de ce groupe que l’on est très heureux de retrouver.

Juliette Armanet – Flamme

On vous en parlait récemment, la flamboyante Juliette Armanet a récemment dévoilé la ré-édition de son album Brûler le Feu et elle décide cette semaine de mettre à l’image l’une des nouvelles chansons, et pas n’importe laquelle : Flamme. L’une de ses (voire sa) meilleures compositions. On vous en parlait dans notre chronique, tout fonctionne dans ce morceau, du groove à la mélodie, en passant pour le texte.

Et la mise à l’image est sublime, avec ce qu’on imagine être des clins d’œil au clip d’Allumer le Feu de Johnny. Mais on a à nouveau envie d’en faire des caisses sur le break de milieu de chanson, déjà incroyable musicalement, et auquel la mise à l’image rend un hommage somptueux, tout en signifiant le passage du noir et blanc à la couleur. Bref, on ne va pas épiloguer, écoutez, regardez, tombez amoureux·se.

Avions – Kindness (Takes Over)

Avions débarquent cette semaine avec un nouveau titre qui suinte les nineties, pour notre plus grand bonheur !

Ce nouveau morceau, Kindness (Take Over), est issu de leur prochain album, qui sortait ce vendredi. Musicalement ancré dans la tradition Alternative Rock, l’envie de sauter sur une planche de skate se fait fortement ressentir dès la première écoute. Et des écoutes, il y en aura. On sent déjà que c’est un titre qui aura du mal à quitter notre esprit, tant ces mélodies sont intemporelles. Toutefois, on ne saurait ne pas sentir la patte d’Avions pour ce qui est de cette nonchalance touchante.

Bien entendu, le groupe nous offre par la même occasion un clip ensoleillé aux accents NoWave. Très frais et drôlement psyché,, tant le groupe s’éclate avec la caméra qui bouge dans tous les sens. On y retrouve le groupe dans divers lieux tels que des parcs ou ce qui ressemble à une gigantesque cour de lycée déserte. Ça respire la jeunesse et les vacances, et ça nous rappelle déjà à quel point l’été nous manque, presque autant que le lycée.

Leur premier album, Avions, est paru chez Howlin’ Banana, et comme à chaque fois, on ne peut que très fortement vous recommander d’aller écouter cette pépite.

Younes – Mima

Nouveau clip de Younes pour continuer de surfer sur le succès d’Identité Remarquable, son premier album. Avec un morceau très intime mis à l’image, Mima, qui prend la forme d’un monologue quasi épistolaire adressé à sa grand-mère. Dans ce texte, il alterne entre le Français et l’Arabe, qu’il explique ne pas avoir appris de suite.

Ce choix a induit une forme d’urgence pour le jeune homme, qui souhaitait pouvoir profiter de la présence de sa grand-mère, et qui nous rappelle à toutes et à tous que personne n’est éternel, et qu’il nous faut chérir nos proches autant que possible.

Côté images, la vidéo est composée exclusivement d’images familiales, qui permettent de voyager dans le cocon de la tribu Boucif et de mieux cerner l’importance des mots, affichés à l’image et sous-titrés afin que le sens des paroles ne se perde pas, même si on ne maîtrise pas les deux langues du chanteur. Attendrissant et qualitatif, tout ce qu’on aime pour un dimanche d’automne.

Woodkid – Reactor 

Woodkid revient avec un nouveau clip, celui de Reactor, morceau qui figure dans son album, S16. Dans un monde dévasté, où un volcan semble avoir tout emporté, l’humanité se relève difficilement. Alors que la lave se répand au sein des infrastructures, des êtres oeuvrent à la reconstruction.

L’animation, dirigée par Saad Moosajee, colle parfaitement à cette mélodie sur laquelle s’assemblent chant en anglais et chants d’enfants en japonais. La voix de Woodkid, pleine de sensibilité, est posée sur un piano accompagné de cordes, créant ainsi une ambiance incertaine, entre résignation et réconfort. 

SCH – Autobahn

A7 est devenu un classique de SCH et du rap français. 7 ans plus tard et après 5 albums, le marseillais sort la deuxième mixtape de sa carrière ce 18 novembre, Autobahn. Long de 14 titres, Le S voyage dans les styles pour offrir des sonorités tantôt énervées, tantôt plus dansantes. Il sort dans la foulée le clip du titre éponyme.

Dans un beat à la Jul, SCH prend le volant et ne compte pas s’arrêter. Le clip, réalisé par Kévin Hilem, nous embarque dans le milieu de l’automobile, où le rappeur roule sur la concu à travers une course de F1. Le visuel du clip est un véritable porte drapeau de la mixtape, car il reprend toute la DA de cette dernière. Gestu parfaite et charisme de fou furieux (merci à la combi de F1 qui en rajoute encore), Le S, comme à son habitude, a sorti un clip carré et très esthétique.

À contrario des experts de Twitter, SCH a sorti un projet correct, pas son meilleur, certes, mais il ne faut garder que le positif. Il est compréhensible, vu la promo du projet, que certains souhaitaient retrouver un SCH de A7. Mais l’artiste nous prouve qu’il peut travailler maintenant sur plusieurs styles. Pour revenir au clip, pas de surprise. Le S est sans aucun doute un artiste qui porte beaucoup d’attention à ses clips, et ne déçoit jamais avec ses visuels.

MURGIDA – MAFIA

Après Bodeguita et Je peux pas me permettre, Murgida met en images un nouvel extrait de son EP, 3007, paru l’été dernier. Dans son thème, Mafia fait référence à la famille. Celle dont les racines s’étendent en terres italiennes et qu’on aime retrouver, même si les aléas de la vie nous ont menés loin de la péninsule. C’est empreint de cette sensibilité grâce à laquelle Adrian Murgida a construit son persona d’artiste à mi-chemin entre un latin lover et un charming loser. Baignée par cette nonchalance, la chanson s’appuie sur une ligne musicale efficace, intercalant couplets rappés et refrains pop seventies. Le pied se met à battre la mesure sans qu’on y prenne garde, « à l’italienne ».

Pour illustrer Mafia, Adrian Murgida a fait appel à Johan Rosigue, avec qui il avait déjà collaboré sur la vidéo Bodeguita. Pas de prises de vues réelles mais un voyage au sein d’images générées via intelligence artificielle à partir de mots clefs de la chanson – Château, Via Roma, Billets, Sombrero, Eldorado…  Les représentations esquissées par les algorithmes s’entremêlent. Et du fait, de par l’interprétation parfois un peu hasardeuse faite par l’ordinateur, il émane de cette vidéo un côté onirique qui nous fait rêvasser, là aussi « à l’italienne ».

TASTE – SHAME GAME 

Les goûts et les couleurs ne se discutent pas, mais s’écoutent et se regardent. Taste est un tout nouveau projet associant La Mverte et Yan Wagner. Un krautrock aux volutes ténébreuses se mêlant à la voix profonde du chanteur. Mais pour autant, rien de lugubre. Tout comme dans le dernier album, Couleur Chaos, d’Yan Wagner, l’humour est présent dans la chanson et ruisselle dans la vidéo. Absurde et décalé, dans Shame Game, il se joue des sentiments de honte qui nous assaillent en de multiples occasions et dont on ne sait s’il faut s’en défaire ou les assumer.

Les assumer semble être la voie suivie par la vidéo qui accompagne le titre. Elle détourne, à la façon bad Taste, l’iconographie de nos héros musicaux préférés. Les pochettes des disques d’Etienne Daho, de Madonna, de Serge Gainsbourg, de Roxy Music et bien d’autres sont revisitées, de Jim Morrison aux chœurs de l’Armée rouge, en leur appliquant des incrustations dignes des meilleures vidéos de Jean Christophe Averty. Il y a un côté jouissif et libérateur dans cet exercice potache limite blasphématoire. Et même si Hélène et les garçons n’en sont visiblement pas convaincus, nous, on adore !  

Sophie Maurin – Longitudes

Sophie Maurin est de retour. Près de dix ans après son premier album et une tournée cet automne avec le Mégaphone Tour, elle nous dévoile un extrait de son futur deuxième album. Longitudes, où comment voyager intérieurement dans ses émotions, là où la distance se transforme en temps qui passe. Temps que l’on ne rattrapera pas lorsque Longitudes rime avec solitude. Une sincère mélancolie émane de cette chanson, mais elle est atténuée par le rythme narratif croissant « On court, on court les longitudes ».

Pour la vidéo, Sophie Maurin a fait appel à Carol Teillard d’Eyry, que l’on connait pour ses talents de percussionniste et de prestidigitateur au sein groupe Catastrophe. Il se métamorphose pour la chanteuse en illusionniste de ses sentiments. A noter que parmi les figurantes, on retrouve Lise, qui a abandonné le temps de la vidéo ses animaux rigolos, ainsi qu’Almée. En espérant que le temps qui passe – si prégnant dans Longitudes – nous rapproche également de la sortie du prochain album de Sophie Maurin, que l’on a hâte de découvrir !

Rémi Guirao – Suivre Les Docks

Se laisser aller à l’inconnu, tel est le message porté par Rémi Guirao dans son dernier titre, Suivre les Docks. Avec cette chanson entremêlant pop et variété, l’artiste nous invite métaphoriquement à prendre de nouveaux départs, s’affranchir des routes qui ne nous correspondent plus et qui nous apportent autant de doutes que de confusion. “Jette toi sur la jetée, il faut suivre les docks.” Car après tout, on est toujours accompagné de quelqu’un prêt à nous soutenir ou nous épauler : “Et si toi tu tombes, je suis là. Et même s’il fait sombre il y aura toi et moi.” C’est d’ailleurs en duo que le clip est réalisé, par Rémi Guirao et Louanne Perret. La vidéo est à l’image musicale du titre : pop, solaire et réconfortante.

PALATINE – La Sentinelle Amadouée

La nouvelle sortie du groupe Palatine combine à la fois lyrics video et court clip d’animation narratif. Un format souvent privilégié par le groupe, dont l’un des membres fondateurs, Vincent Ehrhart Devay, est aussi illustrateur. Le clip de La Sentinelle Amadouée narre un récit que l’on devine autobiographique, de par l’évocation du dernier album de Palatine, intitulé Grand Paon de Nuit. L’histoire tourne autour de la difficulté pour un artiste d’atteindre certaines sphères de la célébrité. Il y a quelque chose de profondément intime dans ce titre, ne serait-ce que par la manière de chanter : en dehors des refrains, les paroles sont déclamées.

Comme si le groupe nous racontait quelque chose au creux de l’oreille, et qu’une contrebasse venait, colorée d’émotions. Le clip nous renvoie donc à la métaphore du monde de la notoriété comme d’un lieu presque inaccessible, en hauteur et gardé par un vigile aux airs de Sphynx. Parmi les artistes ayant un laissez-passer, on reconnaît des artistes ayant commencé en même temps, si ce n’est pour certains avec Palatine, comme Feu! Chatterton, Radio Elvis, Juliette Armanet, ou encore Clara Luciani. Il faudrait alors trouver le moyen d’amadouer cette sentinelle cruelle…

Peter Deaves x Lucas Houchard – Opening Night in Open C

Dans Opening Night in Open C, deux âmes talentueuses s’unissent le temps d’une balade – à se fendre le cœur. 

Sous l’œil bienveillant du brillant réalisateur Lucas Hauchard, qui adopte une prise de vue rapprochée criante de sincérité, le chanteur folk Peter Deaves nous livre l’une des complaintes dont il a le secret. Ses mots au diapason des cieux crépusculaires disent l’amour s’eclipsant à pas de loup, quand tout en lui semble implorer son retour. La nuit sera bientôt là (à moins qu’il ne s’agisse d’un jour nouveau ?) et les vaines promesses adressées à l’immanence d’une nature vaste et sereine rappellent qu’on ne chante jamais que pour soi. Élan tendant à la conjuration d’une inéluctable absence : celle de l’Autre, indifférent.e aux éclats d’or baignant ce visage où s’effacent les possibles tandis que la balade s’achève… De la mélancolie à l’état pur.

The Go! Team – Whammy O

Déjà le troisième titre du prochain album Get Up Sequences Part Two, qui fait suite au précédent, sorti en 2021. Ian Parton poursuit sa collaboration avec les artistes féminines du monde soul, R&B et hip-hop. Cette fois-ci, c’est Nitty Scott qui apporte son flow sur les rythmes bondissants et enjoués de Whammy O. Le titre se révèle efficace, surtout comme complément vitaminé au petit matin pour vous lancer avec fougue, joie et bonne humeur dans votre journée. Le clip reflète, avec ses images flash d’archives, toujours aussi bien l’ambiance seventies que lorgne Ian Parton depuis ses débuts.