La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer se yeux et ses oreilles. Sans attendre, voici la première partie de la 154ème sélection des clips de la semaine.
Johnny Jane – Normal
C’est quoi la normalité ? Souvent, cette idée se répercute au regard de l’autre, à sa propre réalité et à ses propres conventions. Ainsi, la normalité des uns n’est pas forcément celle des autres.
Johnny Jane est un fêtard, un garçon qui se fond dans la nuit et dans les brumes de l’alcool. C’est, selon sa propre opinion, ce qu’il sait faire de mieux et ce qu’il fera toute sa vie. Est ce un problème ? Pas vraiment, c’est même tout à fait Normal.
Alors que se profile sa date à La Maroquinerie, le jeune homme nous offre donc ce banger génial, histoire de réchauffer l’hiver. Un nouveau morceau réjouissant qui mêle libération et noirceur et qui fait remuer les corps de la première à la dernière seconde.
La vidéo qui l’accompagne est à l’image du morceau, une vraie petite boule d’énergie qui traverse les jours et les nuits, les lieux et les gens, pour nous entraîner dans une folle cavalcade remplie de vie et d’incrustations visuelles du plus bel effet.
Johnny Jane future star ? Rien de plus normal.
Tim Dup – Si je m’écoutais vraiment
D’une manière ou d’une autre, nous sommes tous contraints par le monde. La bienséance, le regard de l’autre et la peur nous innervent et nous rendent parfois prisonniers de ce qui nous entoure.
Poète du quotidien, Tim Dup s’imagine le monde sans tout cela, un monde qui existerait uniquement via notre propre regard, nos propres envies. À travers Si je m’écoutais vraiment, il vise l’universel à travers son point de vue, nous raconte la libération et la douceur d’un monde où tout est possible, où les petits désirs du quotidiens ne sont plus barrés par des entraves.
Après Amor, il s’offre un retour musical plus proche de ses dernières sorties, porté par une douceur ouatée, des cordes très présentes, le piano toujours, et des notes synthétiques qui s’envolent et percent nos carapaces. Sur cette mélopée réconfortante, il pose sa voix, qu’il lance dans les aigus, sûr de sa force et de sa liberté.
Pour l’accompagner, on pense d’abord à un plan fixe au noir et blanc, puis lentement, dans une sorte de course au ralenti pleine d’ivresse, Tim Dup débarque, s’envole et semble, comme dans son titre, vivre enfin pleinement.
Une nouvelle course folle comme on l’aime, en attendant l’arrivée de son nouvel album pour le début d’année 2023.
Jean Felzine – Fanfiction
Après quatre albums avec le groupe génial Mustang, puis deux autres avec le duo malicieux qu’il forme avec Johanna Wedin, Jean Felzine nous avait déjà fait part d’un succulent EP de cinq titres, et aujourd’hui, l’annonce est faite d’un premier album solo, Memory, qui sortira le 23 février prochain.
Nous retrouvons donc Jean dans un lieu assez inattendu, puisqu’il s’agit de la Japan Expo – car voici le sujet de ce premier clip. Après le single A Blanc, où il nous parle d’infertilité masculine, Jean nous parle cette fois de la place importante qu’a pris le manga ou l’heroic fantasy et son imaginaire érotique dans le monde d’aujourd’hui, qu’il décrit comme un monde de Fanfiction. Toujours avec humour, Jean Felzine nous décortique des sujets concrets et sérieux ; on appelle cela de la très bonne chanson française.
Avec énormément d’intelligence et de talent, une écriture toujours aussi habile, et une musique forte en synthés mixée par Adrien Durand de Bon Voyage Organisation, cet album est sans aucun doute l’un des plus délicieux présages pour l’année qui arrive.
Evergreen – Voices in your heard
Le groupe Evergreen partage cette semaine, Voices in your head, un deuxième extrait de leur prochain EP.
Filmé dans la petite ville de Saint-Leonard, dans le sud de
l’Angleterre, le clip nous livre les élucubrations nocturnes du duo
franco-anglais. Entre paillettes qui fanent sous les yeux, dernière
danse au karaoké ou long trajet en transport en commun, Voices in your head nous parle de cette petite voix douce et empreinte de mélancolie qui vient nous envelopper parfois quand on rentre un peu éméché de soirée.
La musique pop et énergisante qui accompagne les images nous fait, quant à elle, tenir facilement jusqu’au petit matin.
Le nouvel EP d’Evergreen, s’appelle Sign Out et il sera disponible le 23 janvier.
Björk – Sorrowful Soil
Le retour de Björk cette année se poursuit avec la sortie du clip de Sorrowful Soil, l’un des titres de son dernier album : Fossora Date, paru en septembre dernier.
La réalisation a été confiée à Viðar Logi, un talentueux photographe et réalisateur ayant travaillé aux côtés de Björk pour la mise en images de son dernier projet.
La mélodie a cappella chantée par Björk et accompagnée d’une chorale nous donne un rendu poétique et mélancolique. Le clip accompagne ces caractéristiques de manière grandiose, en nous montrant l’artiste située en plein milieu d’un volcan en éruption, chantant vêtue d’une tenue assez propre à son univers. Néanmoins, ce clip dispose d’une mise en images assez insolite : un format ovale et vertical, qui donne l’impression d’admirer un tableau où est représenté le magnifique contraste des couleurs orange de la lave qui percute et glisse sur les sombres rochers d’un volcan.
Le choix de ce format nous offre un moment intime avec la chanteuse, comme si l’image avait était réduite pour que nous seuls puissions voir cet instant, tout en nous exposant un spectacle impressionnant et immense.
A$AP Rocky – Shittin’ Me
Depuis ses débuts, A$AP Rocky a toujours su prouver qu’aussi bien dans les flows que dans les productions, il savait se montrer innovant. Une recette que l’on retrouve dans son dernier titre en solo, Shittin’ Me. Après avoir enchaîné les festivals cet été, il semble prêt à livrer de la nouvelle musique, preuve en est avec ce nouveau clip réalisé par Grin Machine.
Tête d’affiche du rap US, il ne s’en cache pas dans ce clip prenant place dans un bureau, dans lequel A$AP a la place du boss et est parfaitement servi par son équipe, qu’il n’hésite pas à mépriser si ça ne file pas droit. Mais avant de tenir cette place, Rocky est avant tout un enfant de New York, ce que montre également ce visuel, avec des plans tournés dans la ville mettant en avant le lifestyle du jeune artiste, où quotidien et vie de star peuvent parfois se montrer étouffants.
La conséquence ? Le rappeur s’effondre et devient la marionnette de ses fans, des labels véreux et de tout un système qu’il critique habilement. Forme et fond sont à nouveau réunis avec A$AP Rocky.
abel31 Ft Irko – 5712
Architecte encore discret de cette excitante fusion entre les sonorités électroniques et celles du rap, le producteur abel31 commence à prendre les choses en main, dans un premier temps en invitant Irko sur 5712. L’univers très marqué du jeune rappeur se combine à merveille à ce genre d’instrumentales, donnant un rendu captivant, tout comme son visuel, réalisé par Adrien Vallecilla.
Ce dernier, complètement animé, se confond avec l’ambiance cryptique et militaire des paroles d’Irko. A l’image d’un jeu vidéo de guerre, le jeune rappeur masqué est ici le protagoniste de cette nouvelle mission, avec comme bande son les obscures 808 d’abel31. Si le but de cette nouvelle opération n’est pas explicité, on se régale tout de même de voir la qualité de l’animation et de ses impressionnants décors.
Il y a, ici, tout le travail et la recherche de ces jeunes artistes déterminés à souffler un vent nouveau sur le rap francophone, aussi bien dans les sonorités qu’ils peuvent y apporter que dans les créations visuelles.
Zéphir – 4/5
Après avoir sorti de manière aléatoire quelques singles, le jeune bruxellois prénommé Zéphir a pris du temps pour réfléchir et structurer sa musique. En découle cette sortie : 4/5, et son clip aux accents cinématographiques, réalisé par ses soins et ceux de Jordan Le Galeze.
C’est dans une ambiance nocturne et fatalement obscure que se dessine ce nouveau départ pour le jeune artiste. Le tout est couplé à un titre aux influences hip-hop lui permettant de faire valoir une certaine maîtrise.
Déroutante par son charme, la proposition de Zéphir annonce un intéressant mélange entre musique et visuels. En tout cas, c’est ce que laisse présager cette mise en bouche mettant en scène une balade de nuit en voiture où de mystérieux personnages s’agglutinent devant la fenêtre du flegmatique artiste, et qui en dit déjà long sur lui.
Breanna Barbara – Nothin’ but Time
La pop psychédélique de Breanna Barbara est imprégnée de blues et de rock. Elle transcende le temps avec une âme 60’s et une manière d’écrire bien contemporaine. La musicienne new-yorkaise a sorti il y a peu son second album, Nothin’ but Time, (qu’on adore) sur Fuzz Club records, et nous présente cette semaine le clip qui accompagne le morceau titre. La vidéo est une ode à sa ville de cœur, dans laquelle on la voit parcourir les rues, les buildings et le subway de la métropole américaine. Elle écrit : “Cette vidéo, dirigée et filmée par Laura-Lynn Petrick, est une lettre d’amour à New York ainsi qu’un certain hommage aux Ailes du Désir de Wim Wenders, un de mes films préférés.” L’artiste nous emmène en balade et c’est un plaisir de découvrir son univers. On aime !
Shygirl – Poison (Club Shy mix)
Shygirl fait d’une pierre deux coups en nous dévoilant à la fois un remix club de son titre Poison, présent sur son premier album Nymph paru le mois dernier, et le clip qui l’accompagne. En restant dans l’esthétique travaillée au millimètre caractéristique de l’artiste, les visuels sont de plus en plus poussés vers le délire psychédélique qui rend son image et sa musique si uniques.
Le clip est hypnotisant de par les multiples filtres qui y sont présents, et qui pourraient presque nous laisser penser aux effets que pourraient avoir certaines substances hallucinogènes. Il complète parfaitement le remix, digne d’un club des années 2000, qui ramène une vibe plus festive à la musique de Shygirl et nous fait découvrir une nouvelle facette parmi les nombreuses qui la composent et la rendent si incomparable.
Nemo – NEVERSTOPTHERAVE
3ème sortie pour Nemo, et nouveau clip pour l’accompagner. NEVERSTOPTHERAVE nous emmène dans un monde qui fleure bon le vidéo club, le minitel et Lionel Jospin.
Vous l’aurez compris, on prend un aller simple pour les années 90 avec le jeune producteur, qui nous propose une nouvelle ambiance beaucoup plus eurodance que dans ses 2 premiers morceaux, un peu plus variétés dans leur approche, malgré des arrangements très électroniques qui restent d’une proposition à l’autre.
Côté images, le côté « musique à fond dans la Saxo » se prolonge avec des images de longboarders aux couleurs ultra flashy, qui prennent presque une tournure hypnotisante. Bref, montez le son, je sens que ce dimanche va être une pure soirée.
The 1975 – Oh Caroline
Les anglais de The 1975 ont sorti cette semaine un clip éclatant pour leur titre Oh Caroline, tiré de leur dernier album, Being Funny In A Foreign Language, sorti en octobre.
Ce morceau, qui a tout d’un tube indie, brillait déjà de ses effluves Funky Soul. Armé d’une tendance très pop, Oh Caroline renvoie directement aux Hits Parades et autres Top 50 des eighties. Avec son chant haut-perché, ses guitares chaloupées et son groove imparable, elle communique une folle envie de danser. Bien évidemment, on entendra parler d’un nom qui obsède, celui de Caroline. Un visage certainement rencontré de manière fortuite, un bref échange de regards au détour d’un dancing ou d’un concert et qui, malgré les années, continue de hanter.
On retrouvera justement dans le clip un sentiment de mélancolie, l’expression d’un souvenir fantasmé que l’on ressasse encore et encore. On y retrouve le chanteur du groupe, Matthew Healy, dans ses vieux jours, qui retourne dans ce qui fut un dancing dans lequel il semblait avoir l’habitude de se produire avec son groupe afin d’y danser, plongé dans le réconfort du souvenir, aux côtés de celle que l’on soupçonne être Caroline. On pourrait également interpréter ces images comme une projection des conséquences de ne pas sauter le pas et oser aller parler à cette Caroline alors que pour le moment, elle est ici, tout près.
Quoi qu’il en soit, le fait de voir le groupe au complet partageant un café et quelques cigarettes chaleureuses à l’aube de leur sixième décennie tend à réchauffer le cœur, tant cela en dit long sur la manière dont ses membres envisagent leur avenir. Observer le groupe jouer avec toutes ces années de plus leur confère une classe touchante. Aussi, The 1975 nous prouvent avec ce nouveau disque qu’ils ne sont pas prêts à arrêter de nous offrir des petites pépites pop-rock, pour notre plus grand bonheur.