La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer se yeux et ses oreilles. Sans attendre, la seconde partie de la 156ème sélection des clips de la semaine.
Pi Ja Ma – Nobody’s Wife
Pi Ja Ma est déjà de retour en ce début d’année 2023 et nous annonce une nouvelle série de 4 titres prévus pour le 17 février avant de la retrouver le 31 mars au Hasard Ludique.
Des morceaux que les plus chanceux d’entre nous ont déjà pu découvrir sur scène. C’est le cas de ce Nobody’s Wife, ode au célibat qu’elle nous a offert cette semaine.
Loin des clichés et des attentes, Pi Ja Ma s’offre une déclaration d’amour à elle-même, assumant sa personnalité et expliquant qu’elle ne sera jamais celle que les hommes attendent. Un morceau aux accents DIY délicieux, qui n’est pas sans rappeler certains titres de ses potes Superorganism.
Pour le clip, réalisé par Nedelko, on retrouve Pauline dans une retraite faussement solitaire, puisque Sacha est toujours présente, pour notre plus grand plaisir. Une vie en forêt dans laquelle elle peut se recentrer sur elle-même et sur les petits plaisirs de la vie.
The Lemon Twigs – Corner Of My Eye
On est prêts à parier que le nouveau single des frères D’Addario vous est vous aussi resté en tête toute la semaine, pas vrai ?
Il faut avouer que ces deux-là savent y faire, depuis 2016 et leur flopée de tubes tous plus qualitatifs les uns que les autres.
Avec Corner Of My Eye, la fratrie nous revient avec ces voix que l’on aime tant, angéliques et harmonieuses à souhait, le tout toujours englobé dans une vibe très 60s.
Ici, ils chantent l’amour soudain, pur, celui des premiers regards et des premiers échanges, celui qu’on ne voudrait jamais voir arriver à terme tellement il semble fort et unique… celui dont on ne peut se passer, en somme.
But when I’ve got you in the corner of my eye / All my moments are the same when day or night / I saw you twice before / Now I really wanna see you more…
Dans le clip, réalisé par Michael D’Addario et Hilla Eden, on y voit le duo habité d’un flegme évident, l’air mélancolique, errer au fil de leurs émotions et de cet amour nouveau.
Alors que The Lemon Twigs dévoilait le mois dernier une poignée de dates pour leur tournée américaine, il nous tarde désormais de connaître la date de nos retrouvailles. Vite !
TASTE – Bang Bang Bang
Même si le titre du morceau peut prêter à confusion, on est loin de Nancy Sinatra et de son cultissime Bang Bang. Pour Taste, pas de ballade mélancolique, mais plutôt un pas de côté assuré, avec le déhanché d’un Iggy Pop version James Bond. La ligne de basse structure le morceau et lui donne une gravité irréfutable, renforcée par le timbre profond de la voix d’Yan Wagner. Dans une atmosphère résolument rock’n’roll, Taste dépeint dans le clip Bang Bang Bang toute l’ambivalence que l’on peut éprouver face à l’attrait des armes à feu. Fascination, sentiment de puissance, bruit, feu et perniciosité.
Les images mêlent, dans une chorégraphie trouble, réalité et fiction. Les fantasmes ou les esthétiques que l’on peut trouver dans le cinéma ou les dessins animés, confrontés à la noirceur et la douleur de la réalité, apparaissant dans les images du massacre de Columbine. De la puissance meurtrière à la peur panique et au désarroi, de l’apparente maîtrise à la pure folie. Une ritournelle illustrant l’instant où, en trois bangs, tout bascule, se désarticule, dans une chorégraphie morbide, de la genèse perdue d’une jeunesse perdue. Bang Bang Bang.
Bang Bang Bang est, après l’excellent Shame Game, le deuxième extrait convaincant de leur premier EP à paraître début février. On a hâte de découvrir les trois autres titres qui les accompagneront !
Rozi Plain – Painted The Room
Lorsque l’on joue une chanson de Rozi Plain, le temps s’arrête pendant un moment. On se retrouve en apesanteur, charmé par la douceur et l’aura mystérieuse qui émane de sa musique. C’est le cas pour son dernier single, Painted The Room, que la musicienne anglaise décrit comme « une sorte de chanson de célébration dédiée aux situations scabreuses qui s’en vont – le soulagement quand vous êtes capable d’avoir la clarté et la liberté de simplement partir au trot ! ».
Un morceau aux ondes positives, tout comme le clip qui l’accompagne. Tourné au Total Refreshment Centre, Rozi Plain y joue aux cartes avec des amis dans des images à différentes vitesses qui finissent par donner le tournis. Un accompagnement parfait pour apprécier la longue partie instrumentale hypnotique à la fin du morceau.
Rozi Plain sortira Prize le 13 janvier. On a hâte de le découvrir.
GARGÄNTUA – ALCOOL ALCOOL
Après l’animation et les crash-test boys en 3D, GARGÄNTUA revient à un style plus cinématographique pour mettre en images leur titre ALCOOL ALCOOL.
Comme toujours avec les deux garçons, il y a beaucoup de vérités sous le vernis de la provocation. On pourrait voir le titre comme un énième banger, un moyen de s’éclater en soirée ou en concert mais le morceau traite d’un sujet bien plus fort qu’il n’y paraît : la banalisation de l’alcool dans la société française.
Bien malin, le duo, accompagné de Sébastien AUGER à la réalisation, met cette idée en scène dans un clip absolument génial. Prendre un même acteur pour présenter deux histoires parallèles d’alcoolisme (l’une dans un milieu mondain, et l’autre dans un milieu populaire), et d’ainsi dénoncer les ravages et les conséquences générées, qui seront les mêmes peu importe la qualité de l’alcool ou le style vestimentaire du « héros ».
Deux destins, une même destinée, qui finissent par se rencontrer dans un final « explosif ».
Une nouvelle réussite pour le duo, qu’on retrouvera en tournée cette année, avec notamment un passage au Trabendo en mars. D’ici là, on partagera avec vous notre rencontre avec J4N D4RK et God3froy.
yoa – Maddy
Chez yoa, tout est une histoire d’équilibre entre la force et la fragilité. Mettre à nu ses faiblesses et ses désirs pour mieux les contrer, les combattre et les transformer en force motrice et en armes.
Maddy, derrière la sensualité de la production qui fait monter la température, joue sur ces paradoxes et cette modernité. Un jeu du chat et de la souris qui s’inverse, une quête entre l’attraction et la répulsion, dans laquelle yoa reprend les armes et inverse les codes d’une société toujours dirigée par les fantasmes et les pulsions masculines.
Cette idée trouve toute sa vérité dans le clip qu’elle co-réalise avec Louise de Bastier. Dans un lieu qui transpire la toxicité et le malaise, yoa s’avance et s’amuse des clichés masculins et des attentes en matières de clips « sensuels », souvent réalisés par des hommes et pour des hommes.
Pas question de danser en petite tenue ou de valider ce système de pensée, c’est bien tout le contraire qui se déroule ici et qui renforce non seulement le propos mais aussi la personnalité musicale de yoa.
Un univers en constante évolution, qu’on a hâte de retrouver sur scène, cette semaine au BISE de Nantes, et plus tard ce mois-ci à La Maroquinerie.
YellowStraps feat. Sam Wise – Flowin
Ce début d’année ne serait pas tout à fait le même sans les locks dorés de Yellowstraps, qui accompagnent son flow partout où il va. Pour 2023, on lui souhaite de continuer à nous faire groover avec son RNB mélodique et ses titres qui font mouche à chaque sortie.
C’est bien parti avec Flowin, qui évoque l’amour comme une torture, avec tous ses dangers, et les relations qui peuvent être plus toxiques que bénéfiques pour leurs participants. Avec son compère, Sam Wise, ils prétendent à un amour pur et sain, mais qui nécessite un cœur soigné de ses blessures.
La mise à l’image sert de mise en abîme, avec des personnages qui s’ambiancent sur leur propre morceau dans une voiture, dont on découvre le destin au fur et à mesure, et qui sert de métaphore à leurs sentiments. On aime beaucoup le travail sur la colorimétrie, très froide, mais avec un grain d’image très propre. En voilà pour qui l’année 2023 démarre du mieux possible.
Baby Neelou – Phinéas & Ferb
Partir sous le soleil pour les fêtes de fin d’année, c’est la promesse de cette douceur qu’est Phinéas & Ferb, titre qui apporte chaleur et réconfort à la grisaille hivernale, grâce à la douce voix de l’artiste et à son visuel coloré, réalisé par Lonnyprod.
La bonne humeur communicative du jeune artiste transparaît dans son flow et ses expressions face à la caméra. Un état d’esprit qui se combine parfaitement avec la production aérienne de Peso20K.
C’est avec nonchalance qu’il livre un flow DMV calibré, apportant juste ce qu’il faut d’onirisme aux morceaux.
Tout en douceur et efficacité, il prouve qu’avec peu de moyens, on peut rendre les auditeurs heureux.
Charlotte Fever – In love de moi
Réalisé par Victor Hanotel et produit par DISTORSION FILM, le dernier clip « In love de moi » du duo déjà iconique Charlotte Fever n’a jamais été aussi évocateur… Les synthés eighties, signatures de leurs morceaux, se parent d’une aura vénéneuse, tandis que les plans s’enchaînent, mettant en scène autant de paragons du désir.
Bouche pailletée, torse caressé, bottes un brin fetish… Les déclarations enfiévrées sur l’importance de la jouissance, partagée comme onanique, s’illustrent parfaitement à l’écran sous les néons fluo. Dans les brumes artificielles où se perdent les corps et cœurs épris, pour un soir ou pour la vie, cette ode au plaisir à l’esthétique léchée a des accents anachroniques…
Sans doute ceux-là ajoutent-ils au discours intemporel : « Il faut bien que le corps exulte » – une relecture 2.0 de Brel : La chanson des jeunes amants, peut-être ?
Jwles – Shit & Choc
L’association entre Jwles et le producteur de musique électronique Mad Rey a toujours donné des morceaux brillants, et Shit & Choc n’échappe pas à la règle. Morceau dansant aux sonorités house, il illumine de sa présence l’album très complet du rappeur parisien, sorti il y a peu et se prénommant Le Zin & les Autres. Logiquement il y fait partie des singles qui vont le porter, et pour cela, le clip en a été dévoilé, et on y retrouve Lopez à la réalisation.
C’est donc parti pour une fête qui va vous mettre la tête dans tous les sens, au propre comme au figuré. Variant les objectifs et les prises de vues, le visuel immersif vous emmène sous le soleil de la côte, entre moments de vie et soirée aux accents psychédéliques (bien aidée par les choix de réalisation).
Même quand le Zin est en vacances, il pense à son public ; le Zin à un grand coeur !
Oré – Tunis (Feat. Arthur Ely)
Comme un joli cadeau de Noël, Oré et Arthur Ely nous ont offert le 23 décembre un titre qu’ils ont co-composé avec Louis Dureau. Tunis met en musique les états d’âmes qu’ils partageaient au moment d’une escapade orchestrée en Tunisie par l’Alliance Française, dans le cadre de l’accompagnement du Fair, à la sortie d’une crise sanitaire qui avait entaillé les espérances et les désirs. Il y est question de solitude et des sentiments d’égarement qui en résultent, même sous le soleil de Tunis. Mais, bercés par quelques notes de ukulélé et portés par la mélodie (en)chantée, le sourire et l’envie de repartir reviennent. « J’aimerais que tu me dises que tout s’est arrangé par ici / comme par magie ».
C’est un joli présent pour commencer une année qui nous offrira, c’est certain, d’autres délicieux moments à partager avec Oré et Arthur Ely. On les attend avec une impatience déraisonnable !
Tedax Max – Tchouraï
Ça fait un moment que Tedax Max se démarque par un rap brut ultra précis, détaillant avec une authenticité froide son quotidien. Constamment en évolution, son dernier projet, Hors dOeuvre, lui permet de sortir un de ses clips les plus ambitieux jusqu’à l’heure : celui accompagnant le titre Tchouraï.
Plus d’une fois il aura revendiqué son attachement à sa ville, Lyon, y faisant le lieu de vie de tous ses récits. Une ville qu’il repeint à sa manière sous la caméra de Boris Mouraret et Fatim N’Diaye, dans un visuel aux accents cinématographique suivant le chemin d’un mystérieux attaché-caisse.
Le départ est donné au garage du block du rappeur, pour ensuite se balader dans la cité avant de prendre le métro, une manière pour Tedax Max de mettre en avant les lieux emblématiques de son quotidien.
Une multitude de clins d’œil à la ville et ses traditions hip-hopesques se glissent dans le clip, rappelant que même si on ne veut pas de lui, le rap est et sera toujours omniprésent dans la vie d’une ville.
Sans arrogance mais avec style, Tedax Max s’impose en maire de Lyon, le temps de laisser brûler le Tchouraï.
Philippe Katerine et Pierre Daven-Keller – Le Roi
Puisque c’est la période de la galette des rois, c’est le timing parfait pour intituler un morceau Le Roi. Cette idée vient du duo composé de Philippe Katherine et Pierre Daven-Keller. Ce titre évoque la chute et la renaissance d’un roi. “Le roi est mort, vive le roi !” Pour illustrer musicalement cet adage, il faut faire des choix. Ce duo est composé d’ une musique mélancolique et électrique.
Également pour illustrer cette chanson, le duo fait appel au réalisateur Igor Keltchewsky. L’ambiance est 3D, à tel point que l’on se croirait dans un dessin animé. Les deux chanteurs sont représentés comme des rois multiples : de la scène, du basket ou de la monarchie. On comprend alors que le roi ici évoqué est une représentation (peut être) autobiographique d’un chanteur déchu de ses grands titres.
Houdi – Calmito
Après une année 2022 productive, Houdi ne semble pas essoufflé et attaque cette nouvelle année d’entrée de jeu en livrant un nouveau titre, accompagné d’un visuel réalisé par Smithwessprod. Après Calmé et Calmada, le jeune rappeur toujours aussi incisif livre Calmito.
Dans une esthétique habituellement sombre, portée par un noir et blanc de rigueur, le rappeur masqué étale une nouvelle fois toute sa maîtrise technique. Rythmé par la production de Tim7oclok et un montage efficace, il se joue de la caméra avec aisance.
Jamais avare de surprises, il dévoile un beat switch étonnant, le lançant sur quelque chose de plus festif, qu’il accompagne d’un costard, sa manière à lui de souhaiter ses meilleurs vœux tout en prouvant sa versatilité.
Nous savons donc à qui il faudra faire attention dans le paysage rap en 2023…