Les clips de la semaine #190 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici la première partie de notre 190ème sélection.

KCIDY – Sentiment banal

Pas de doute ! À l’écoute, le nouveau titre de KCIDY on se rappelle – sans délai ni remise – ce qui fait que l’on affectionne autant de suivre cette nouvelle scène française qui sait toujours et encore se réinventer. En seulement 1 :53, Sentiment banal est un condensé de spontanéité et d’entrain. Une ligne musicale délicieusement lofi et psychédélique sur laquelle la voix de Pauline Le Caignec s’appuie et rebondit. Un rythme endiablé juste pour se souvenir qu’il y a urgence à vivre et à profiter de chaque moment, même ceux qui nous semblent relever d’une apparente banalité.

« Faut accepter le sens de tout, sans regretter ni fantasmer la banalité »

Mis en images par Leslie Chanel et Rémi Richarme, un Sentiment banal devient une folle course poursuite entre nos émois et nos affects qui se panache de teintes mauve et jaune, ces deux couleurs que l’on associe à la joie et à la gaieté.

Jeanne Added – Pretty

Jeanne Added nous gâte avec un nouveau titre exclu Pretty, un an après la sortie de son album By Your Side. Celle qui arpente la France pour une tournée pharaonique nous offre un titre ultra dansant, qui attrape tout de suite le corps et l’écoute.

On bouge, inevitablement. Le clip n’est pas en reste : esthétique vintage, côté artisanal, il dévoile une ode à la liberté des corps, de tous les corps, les corps minorisés, clashés, cachés, détéstés, pour finalement, les aimer.

Dans une déambulation d’images tantôt grainées, glitchées, tantôt ultra HD, ce clip illustre savamment les ambivalences de soi, de la souplesse nécessaire pour être soi dans l’espace. Jeanne Added fout un coup de pied dans ces conventions poussiéreuses, ces peurs inutiles et avilissantes, et nous fait chanter en coeur : Yes, I’m feeling pretty.  

SIMONY – TONNERRE SOUS LES TROPIQUES

À une semaine de la sortie de son attendu premier album, et après une performance remarquée au MaMa, Simony passe une tête cette semaine dans les clips de la semaine avec Tonnerre Sous Les Tropiques, son nouveau single.

Si, comme souvent avec le rappeur, le titre de son morceau rappellera des bons souvenirs aux amateurs de cinéma, il utilise celui-ci dans une toute autre optique. Ici, il nous parle d’amour, du passé, de ces choses qui nous marquent au fer rouge et qui nous empêchent de vivre pleinement. Avec un flow toujours aussi précis et une écriture aussi fine que direct, Simony plonge en lui même pour nous raconter ses colères et surtout son besoin d’en sortir.

L’amour est au centre du morceau, mais pas seulement celui de la relation, celui qui est familial et aussi celui que ne nous ont pas donné les autres, ou alors mal. Du tonnerres sous les tropiques donc, qui perturbe et modifie les paradigmes d’une existence, disruptée dès la jeunesse par des émotions mal présentées. Toute l’idée du morceau est là, dans la manière de se construire et de laisser le passé au passé.

Pour ‘l’accompagner, Igor Dorembus réalise un clip sobre, en grande partie centré sur Simony. Derrière lui le fond visuel se fait mouvant, représentant les émotions et les pensées du rappeurs qui changent de ton et de couleur.

Un morceau impactant qui représente parfaitement le superbe ORIGINES : Euphoria. Mais pour le savoir, vous devrez attendre le 20 octobre.

2geeked – I Like Uuu

Pour éviter toute confusion, on va d’emblée poser les bases : non 2geeked ne vient pas des États-Unis mais bien de notre côté de l’Océan. Si sa voix chargée d’effets pousse la mesure en anglais et que l’esthétique nous fait penser aux meilleurs moments de la trap, elle arrive à jouer de ses codes outre-atlantique pour en tirer une inspiration qui balise sa musique. Elle en fait l’étalage sur son dernier single I Like Uuu

Dans un décor sombre, elle rajoute une touche de couleurs à l’aide de peluche hello kitty, créant un contraste ironiquement surprenant. Les plans s’enchaînent avec frénésie et ne cachent pas l’aspect festif du morceau. 

Entre hypnotisante proposition de flow et le teint rose adopté par la caméra de @nov100k, le clip nous en dit déjà beaucoup sur le personnage intrigant de 2geeked.

EMPRS – Million Miles Away (feat. The Pharcyde)

« Il est là, il est arrivé ! » Non, non on ne vous parle pas du nouveau Taillefine (référence très marquée enfant des 90s ? Peut-être !) mais bien du clip de la chanson Million Miles Away de nos camarades EMPRS.

Par ces temps pour le moins troublés, offrez vous un moment groovy avec Million Miles Away en featuring avec The Pharcyde. Un clip qui nous replonge dans le temps des courriers manuscrits du cœur. S’il peut paraître ancré dans l’époque 2023, le clip nous fait faire un petit voyage à l’époque des Walkmans à cassettes – attention à toi lecteur.rice si tu ne sais pas ce que c’est, on ne pourra pas grand-chose pour toi -, où le téléphone était fixe et même filaire, qu’on pouvait encore s’écrire des cartes postales régulièrement – oui, oui même en dehors des vacances – et que la télé n’était ni forcément en HD ni un écran plasma.

Factuellement ça raconte une petite histoire d’amour entre deux ados séparés par quelques miles away – non non, on ne spoilera pas la vraie distance -. Ca saute sur le lit la musique dans les oreilles, ça s’impatiente quand le téléphone ne se libère pas tout de suite et ça se retrouve. On aime tellement la tendresse du clip réalisé par Franck Annese et Julien Nodot. On aime ces vies menées comme des droites parallèles qui finissent perpendiculaires. Un conseil : on prend son vélo ou son skate, on se laisse porter par les sentiments et on savoure l’instant !

Poupy – Le Coup

Sorti il y a peu, Le Coup est le premier EP du rappeur Poupy, entre maîtrise technique et productions actuelles, le jeune artiste se balade sur les cinq titres du projet. Cette semaine, il a sorti le clip éponyme réalisé par Vadim et Ensemble Creative pour accompagner un peu plus l’EP sorti il y a peu. 

On plonge directement dans une sorte de quotidien romancé de la vie du jeune rappeur. Tapis dans une cave aménagée en studio. Sur les rythmiques rebondissantes de la production Instinct Company, lui et son équipe font l’étalage de leur symbiose devant la caméra. Tout en discrétion, le visage flouté par des effets, Poupy offre une large palette de flows allant du kickage au chant. 

En signant un EP déjà très prometteur, il ouvre une belle porte à son rap qui ne pourra que tendre vers le meilleur par la suite.

BLANK\\  ZUUNZ

BLANK\\ nous dévoile ZUUNZ, extrait de son premier EP, Inconsistent People qui sortira le 10 novembre (stay stuned, on vous en parlera très bientôt).

En attendant, si son nom vous dit déjà quelque chose, c’est normal, elle a fait un feat avec les géniaux marcel sur le morceau Intimité (on vous en causait ici )

Ici, le rythme lancinant rencontre la nuit noire tandis que Manon (de son vrai nom) erre devant les phares rougis d’une twingo, bière à la main. Réalisée par Rainbow Rushes, la vidéo met en lumière les instants de doute et de lutte vécus dans le milieu musical. 

Un titre corrosif, à laisser entre de mauvaises mains.

ISHA x Limsa d’Aulnay – Inna Di Club

Il s’agit déjà d’une collaboration qui n’a plus rien à prouver. Dès que Isha et Limsa d’Aulnay se partagent un titre, on peut s’attendre à une pépite. Un featuring qui fonctionne tellement bien que les deux rappeurs ont annoncé un album commun, Bitume Caviar Vol.1, prévu pour le 1er décembre. Pour nous faire patienter, ils ont sorti Inna di Club, premier extrait du projet.

Les deux artistes nous emmènent dans les rues de Rotterdam, où les caméras de Willy Guittard captent des moments de vie. On accompagne la collab franco-belge à travers la ville, tantôt au port, tantôt assis à la terrasse d’un café. Avec peut être, l’image la plus intriguante d’une violoncelliste jouant en plein milieu d’un coffee shop. Pas de surprise, Isha et Limsa délivrent un véritable banger, prouvant qu’ils excellent dans le maniement de la plume et la découpe d’instru. Mélangez ça à une prod entêtante, et vous avez la recette parfaite pour un titre de qualité.

Limsa et Isha savent parfaitement nous faire attendre. Avec Inna di Club, ils ont déjà mis la barre très haute pour un des albums les plus attendus de cette fin d’année.

Pop Crimes – No More Cryin’

En ces temps de pleurs, le quatuor d’indie rock parisien rajoute des déluges de larmes à travers son nouveau clip. On découvre les quatre membres du groupe (Romain, Morgane. Nicolas et Quentin) chantaient puis sombraient dans la mélancolie dans cette lutte de la confiance en soi. Le réalisateur Gaspard Rolland s’appuie sur une esthétique rétro qui fusionne le chaud et le froid à travers les couleurs et les effets de clair-obscur et de flou. On apprécie d’être entouré ainsi avec ce son de Pop Crimes dans nos moments de détresse. La patte du son 90s garage et lo-fi marque ce morceau en renforçant ce besoin d’être isolé dans notre bulle. Le titre explose dans son final par sa guitare déchirante qui emporte toutes nos pensées.

No More Cryin’ fait officie d’avant-goût pour leur premier album très prometteur Gathered Together qui sortira le 17 novembre prochain sur les labels Howlin’ Banana Records, Safe in the Rain Records et les Disques du Paradis (bon, trois labels c’est suffisant?). Mais il ne faudra pas également rater sa release-party le 15 décembre à la Boule Noire de Paris qui s’annonce électrique : ça sera Noël avant l’heure !

S.Pri Noir – Les clefs du Château

Cela fait maintenant 3 ans qu’on attendait le retour de S.Pri Noir. Annoncé via son compte Insta, le rappeur veut être totalement transparent avec son futur projet. Il veut faire découvrir sa vie avant S.Pri Noir et comment il est devenu cet artiste bourré de talent. Il commence son histoire en dévoilant Les Clefs du Château.

C’est sous une pluie abondante qu’on retrouve S.Pri Noir, entouré d’une horde de parapluies, faisant face à une tombe. La pierre tombale indique « À notre mère » et le cercueil est orné par une photo d’une femme avec le regard barré, image que le rappeur avait déjà posté sur son insta. S.Pri ne voulait rien cacher, et dévoiler tous les aspects de sa vie, même cet événement tragique avec cette perte difficile. Le clip se termine par plusieurs images de sa jeunesse accompagnées d’un récit sur son évolution. Il faut saluer la justesse folle de l’artiste, qui parvient à dépeindre ses émotions d’une plume authentique et sensible, avec un sujet qui parle à tous : la perte d’un être cher.

Il n’y a qu’une seule chose à dire, ça valait le coup d’attendre. Ces 3 ans ont permis à S.Pri Noir de travailler sur ce futur projet qui s’annonce déjà passionnant et surtout de se livrer à ses fans : « Ce titre est bien plus qu’une rétrospective, cet album c’est l’histoire de mon évolution, de mon épanouissement ».

Troye Sivan – One of Your Girls

Pour accompagner la sortie de Something to Give Each Other, son très attendu troisième album, Troye Sivan a en parallèle dévoilé un clip pour l’un de ses morceaux cette fin de semaine. Dans One of Your Girls (réalisé par Gordon von Steiner), on retrouve l’artiste australien à la fois fabuleux et méconnaissable : transformé par l’art du drag, il incarne l’essence du titre à la perfection.

Son alter-ego féminin fier mais au cœur lourd crève l’écran et nous saisit presque aussi vite que la sublime ligne de basse qui porte ce nouveau single. Avec son refrain qui ne quitte pas notre tête et qui n’est pas sans nous rappeler les grandes heures de Daft Punk, One of Your Girls s’impose comme l’une des pièces maîtresses de Something to Give Each Other

bar italia – Jelsy

Bar italia, c’est ce trio rock profondément énigmatique qui séduira les nostalgiques des années 90, une époque bien avant l’ère des réseaux sociaux. Ils restent un mystère presque total, enveloppant leur musique d’une aura particulière. 

Dans une ambiance rétro en noir et blanc qui nous ramène au temps de nos arrière-grands-parents, le groupe, adossé au comptoir d’un bar, nous présente Jelsy, leur nouveau morceau qui s’ajoute à my little tony, le premier extrait de leur prochain projet The Twits. Cette chanson prend la forme d’une conversation entre les trois artistes, tour à tour plongés dans une réflexion sur la solitude, le tout sur un fond de guitare plus épurée que dans leur précédent morceau, demeurant fidèle à l’identité qu’ils peaufinent depuis 2020.

Edgär – TIME

On prend la direction d’Amiens pour aller à la rencontre de deux de nos locaux préférés : Edgär. Le duo Pop revient après son album Secret sorti l’année dernière, avec un single qui claque comme un coup de fusil : TIME. Très Rock, nerveux et incisif, cette suite tranche sans compromis avec les derniers morceaux de la formation, en proposant une esthétique moins feutrée mais pas moins travaillée, comme une sorte de retour aux sources.

Côté image, on découvre une mise en abîme du clip sous la forme d’un live dans une émission de télé, minuté à la seconde et à l’épilogue morbide, à l’instar d’une vie qui passe à un rythme effréné et qui ne représente qu’une goutte d’eau à l’échelle du reste du monde. Plusieurs autres interprétations pourraient se joindre à celle-ci, on vous invite à leur partager la vôtre une fois que vous aurez été hypnotisé(e)s par ce morceau !

Puggy – Never Give Up

En voilà un nom qu’on n’avait pas vu passer depuis un bail : Puggy. Alors certes, il y avait eu quelques bandes originales entre temps, mais depuis Colours (sorti en 2016, c’est-à-dire avant la naissance de La Face B), on n’avait plus eu le droit à de nouveaux morceaux des Belges qui avaient conquis le monde au début des années 2010 avec leur Pop mélodique, qui restait en tête du public de l’époque.

Une dizaine d’année plus tard, on aurait pu les retrouvés déphasés ou en décalage, et bien au contraire ils ont compris sans mal les codes de l’époque, les références pop Culture et les possibilités offertes par les moyens du moment.

Leur clip s’inscrit dans un mouvement de questionnement lié aux intelligences artificielles et l’ambivalence entre les possibilités qu’elles offrent et la perte qu’elles peuvent causer. Bref, on retrouve un trio qui nous a manqué, comme de vieux amis qu’on a l’impression d’avoir quittés la veille alors qu’on n’a pas eu de nouvelles depuis 5 ans. Un bonheur.

Les Clopes – Faszination beton (NDW) & fascination béton

Deux versions béton pour une chanson canon. Délaissant un temps leur cimetière coquinou, Les Clopes exhalent, sans plaisir, nicotine, nouvelle bouffée du béton qui les avait vus naître dans un blockhaus noir (à l’époque, ils se sentaient déjà bien déprimés). Dithyrambe à l’architecture horizontale, verticale – rarement diagonale – qui apporte grisaille et angoisse à notre quotidien, fascination béton ou Faszination beton se vit pleinement et avec universalité (sans connaître de frontières étatiques ou linguistiques).

Emportés dans leur cold troll wave – côté fascination béton – (ou la Neue Deutsche Troll Welle côté Faszination beton) exécutée avec un enthousiasme déprimant, ils nous conduisent dans les affres de leur créativité sans limite qu’elle soit Gauloise ou Teutonne (merci à Sophie Gonthier et à Stéphanie Acquette pour l’adaptation dans la langue de Goethe tendance les Autobahns du jeune Werther). Et c’est toujours jubilatoire ! Pour les fans les plus « hardcore », vous pouvez écouter les deux versions en parallèle. L’expérience de mise en abîme est juste hypnotique !