Les clips de la semaine #202 – partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici la première partie de notre 202ème sélection.

Felower – Cold

Garçon qui se mouve dans les ombres, être discret qui laisse avant tout parler sa musique et ses visuels, Felower propose quelque chose d’assez fascinant, à l’opposé de la mise en avant permanente qui vampirise le monde actuel.

Cold, morceau onirique, à la douceur qui nous transperce et porté par une ligne vocale assez dingue qui fonctionne comme une sorte d’incantation, se voit aujourd’hui mis en image par le musicien, accompagné de Zoé Joubert.

Et c’est une nouvelle fois dans les animations 3D qu’ils nous entrainent, ce monde de tous les possibles où l’on croise des humains d’argiles et des créatures millénaires issues de leur imaginations.

Ainsi, à mesure que la musique évolue, qu’elle gagne en ampleur et en beauté, on regarde cette créature, invoquée par ces deux artistes, grandir et se mouvoir, se séparer d’un monde dans lequel elle est piégée pour aller au fur et à mesure vers la lumière et gagner en liberté.

C’est beau à pleurer autant que c’est hypnotique, on se laisse bercer autant par les images que le son qui nous entoure. Une fois encore, Felower a tout bon.

Coco Macé – Des Pommes

L’émerveillement n’est pas une question d’âge. Il se travaille, il se ravive et il est nécessaire de ne pas le laisser s’éteindre.

Coco Macé vit dans cet émerveillement constant, celui qui fait garder le sourire, qui fait grandir comme une pomme pourrait murir, gagnant en consistance et en goût.

C’est cette idée que le musicienne traite dans Des Pommes, morceau aérien et tendre dans lequel il nous raconte le recul sur l’existence, le fait de se regarder grandir, changer et de la façon dont on prend du recul sur ce qu’on a été.

Poétique et dansante, la chanson de Coco Macé nous permet à la fois de nous évader et de penser, comme lorsqu’on penche la tête dans le vide en regardant un paysage à travers une fenêtre pour laisser nos penser divaguer.

Pour accompagner le morceau, il réalise avec Julia Gouget, un petit clip en forme de goûter animé, rempli de couleur, de douceur et de beauté.

Un morceau qui fait du bien au cœur et dont les saveurs coulent dans nos oreilles comme lorsqu’on croque dans une pomme et qu’on se laisse envahir par ce plaisir simple.

Peel – Y2J

3 ans après leur premier EP, Peel est de retour et annonce l’arrivée de leur premier album, Acid Star, chez Innovative Leisure pour le mois de mars.

À cette occasion, le duo a dévoilé cette semaine deux morceaux très différents qui semblent étendre le spectre de ce qui nous attend musicalement. D’un côté, on retrouve Y2J, morceau profondément pop et dansant qui nous entraine dans des rythmiques robotiques faites par des humains et dans lequel les deux voix de Sean Cimino et Isom Innis se passent le relai entre moments froids comme Manchester et d’autres qui fleurent bon le psychédélisme australien.

Le second morceau Acid Star, qui donnera son titre à l’album, est une balade acoustique et onirique qui nous entraine dans un monde complètement différent. La preuve que ces deux là n’ont pas peur de nous surprendre et d’assumer une orientation musicale à la palette aussi large que cohérente.

C’est Y2J qui a les honneurs du clip que réalise lui même Sean Cimino. Et comme il est indiqué, on déconseille la vision du clip aux épileptiques, tant la vidéo joue sur le floue constant et la cohabitation des deux membres du groupes. Teintés de rouge et de bleu, ils alternent leur présence à l’écran comme pour signifier la cohabitation de deux univers différents qui pourtant vivent parfaitement cette symbiose.

Deux extraits qui nous mettent l’eau à la bouche, en attendant, on l’espère de les retrouver un jour en France pour un concert.

Chelsea Wolfe – Everything turns blue

Quelques semaines avant la grande sortie de She Reaches Out to She Reaches to She, Chelsea Wolfe nous fait l’honneur d’un nouveau dernier clip : Everything turns blue. On quitte les paysages colombiens pour un objet visuel très graphique. Les plus geekos d’entre nous pourraient y voir une animation du lecteur Windows Media époque Windows 98 voire XP, les plus arty y verront gesticuler une matière bleue dans un décor que nous serions tentés de qualifier de spatial.

Avec Everything turns blue, Chelsea Wolfe renoue avec les sonorités électroniques indus, la noirceur toujours au rendez-vous. Les terrains de jeu de la princesse des ténèbres américaine sont multiples, elle montre une fois de plus ses capacités à s’adapter à eux.

Pierre Grizzli – Danser sur l’eau

Oh non Pierre Grizzli n’a rien d’un ours. Au contraire, ça serait un petit ourson chevelu tout mignon. Il nous révèle cette semaine le clip du single Danser sur l’eau, premier titre à émerger de son album.

Celui qui se faisait connaître sous le nom d’artiste PIERRE, nous embarque à prime abord dans un paysage brumeux verdoyant. Tel une figure christique, vêtu de blanc, le chanteur l’arpente.

A mesure qu’il progresse dans cet espace très terrien, il finit par se retrouver face à l’eau, l’immensité de la mer où une figure féminine fait son apparition. Se multiplient des images qui invitent à l’évasion, la légèreté. Un imaginaire très emprunté au monde du rêve. Danser sur l’eau est un morceau léger, planant qui s’inscrit dans la lignée dream pop à la française.

Grand Public – Torrent de compliments

Il ne se passe pas une semaine sans qu’on aille voir ce qui se trame chez nos cousins du Canada et cette semaine c’est avec bonheur que l’on capte le retour de Grand Public.

Après un Idéal Tempo d’excellente facture, le quatuor annonce l’arrivée pour le premier printemps de son premier long format chez Lisbon Lux Records.

Pour ce faire, ils nous offrent cette semaine un Torrent de compliments. Dans une rythmique lo-fi à la mélodie affirmée et entêtante, Grand Public s’interroge sur la dissociation de réalité qui peut exister dans la vie d’un artiste, ou de n’importe qui en fait. Des petites hypocrisies, des illusions qui se forment et un sentiment illusoire qui se forme pour, bien souvent, créer un … torrent de déceptions.

Un morceau assez personnel qui résonnera chez toute personne travaillant dans le milieu culturel et qui se voit accompagner d’un clip à l’esthétique très 90’s dans lequel on retrouve le groupe qui joue et qui enquête à la fois sur l’évolution des fleurs, qui grandissent et fanent aussi rapidement, parallèle évident des sentiments fugaces et du vide qui lui laissent place.

Grand Public est donc ici un groupe de scientifique du rock. On attend la suite de leurs investigations sonores avec beaucoup d’impatience.

Khruangbin – A Love International

Khruangbin est de retour ! Après l’excellent EP Texas Moon en collaboration avec Leon Bridges, les américains semblent mettre en marche sa remise en scelle avec un nouveau single : A Love International. Aussi hypnotique qu’à l’accoutumée, le groupe développe à travers ces quatre minutes de musique une boucle hypnotique qui prend une tournure épiphanique lors de son climax. On ressent l’habituelle finesse et la délicatesse des texans qui prend place dans une construction harmonique à la fois douce et lumineuse. La section rythmique met en place une fondation minimaliste notamment portée par une basse ronde qui complète parfaitement la guitare simple et structurée. Le tout crée alors une boucle enivrante qui nous emporte sur une plage d’été.

C’est par ailleurs ce que le clip transmet dans ses images. Une ambiance chaude, prenant place sur une plage au sein de laquelle se trouve un groupe d’enfants. On y remarque particulièrement deux protagonistes principaux, un jeune et une jeune fille, semblant être épris d’une romance estivale épisodique et temporaire. Scott Dungate, le réalisateur de la vidéo, prend le soin de mettre en avant des adjectifs allant vers cette ambiance presque hypnotique. À travers les mots inscrits sur un livre lu par l’un des deux personnages principaux, on retrouve les termes « captivé », « enchanté » ou encore « charmé ». De quoi donc nous laisser imaginer les ambitions du trio concernant des parutions futures.

À mi-chemin entre hypnose et ode à un amour innocent et charmeur, Khruangbin semble signer un retour doux et paisible qui laisse espérer une sortie plus fournie en quantité très prochainement ! Pour découvrir la suite, rendez-vous le 5 avril et le désormais très attendu A LA SALA.

Aja – Ondéambule

Une pluie lascive tombe sur la frondaison des arbres. Les gouttes d’eau ruissellent le long des branches en suivant leurs parcours sinueux pour reformer des petits filets au contact des blocs de granit qui émergent du tapis forestier. Dans un écosystème fantasmé dont les couleurs se parent de nuances de vert ou de gris, le minéral se fond en toute sensualité avec le végétal.

Après un premier album Ajasphère paru en novembre 2020, Clémence Quelennec redessine les lignes d’horizon de son projet Aja avec un deuxième volume à paraître en 2024. Ondéambule en est le premier extrait. Un mot-valise, comme titres de ses autres compositions, qui nous emmène dans un voyage onirique propice à l’errance de l’esprit ; une invitation à une pause contemplative à l’écoute de tous ses sens. Dans Ondéambule, Aja modèle sa matière sonore. Elle mêle des sons de la nature à ceux de son ordinateur, mais également à ceux, organiques, joués par Jonas Dannecker à la clarinette. Fermez les yeux et laissez-vous porter par la ligne mélodique qui se dévoile délicatement avec harmonie et féérie.

Aja sera en concert avec Frànçois Atlas les vendredi 26, samedi 27 janvier et dimanche 28 janvier à la Maison de la Radio à l’occasion de l’Hyper Weekend Festival. À la Villa Medicis de Rome le 30 janvier dans le cadre d’une résidence. Et le 22 février à Brest pour le festival Astropolis

The Big Idea – The Fight

À deux semaines de la sortie de leur prochain album Tales of Crematie chez Room Records, nos six marins préférés de The Big Idea balancent The Fight, nouveau single et clip, tout en violence et en impétuosité.

On quitte légèrement le rock pop et la new-wave à laquelle le groupe nous avait habitué, notamment sur le précédent album The Fabulous Expedition of Le Grand Vésigue, pour partir vers des contrées beaucoup plus saturées, agressives et brutales. Les rythmes saccadés, les guitares plongées dans la fuzz et le chant complètement névrotique installent une ambiance de tension sans pareil, et l’aspect noise que les garçons adoptent sur ce nouveau single semble parfaitement leur coller à la peau.

Le clip, réalisé par Matéo Aillet, met sobrement en scène deux hommes s’affrontant, autant psychologiquement que physiquement, au beau milieu d’une plage. La fureur du morceau couplée au noir et blanc du clip et à la lutte métaphorique dépeinte dans celui-ci, révèlent une certaine poésie dans la colère et dans la rage qu’on se prend en pleine face.

Le groupe, originaire de La Rochelle, sera en concert le 8 février à Paris, le 15 février à Bordeaux et le 23 mars à La Rochelle. Les trois concerts seront des release party à l’occasion de la sortie de leur nouvel album Tales of Crematie le 2 février.

Lysistrata – Trouble Don’t Last

Après une pause bien méritée, un projet avec Frànçois & The Atlas Mountains et un regain d’énergie nécessaire, le trio Lysistrata est de retour avec VEIL, un nouvel album qui sortira le 1er mars chez Vicious Circle. Afin de nous mettre l’eau à la bouche, le groupe a commencé à nous faire découvrir ce prochain opus avec le titre clippé Horns il y a environ deux mois.

Cette semaine c’est le single et clip Trouble Don’t Last que le groupe originaire de Saintes nous dévoile. Une échappée cathartique à travers une violence viscérale qui sert d’exutoire et que peu de groupes en France arrivent à orchestrer et à cracher aussi magistralement. Un son puissant, intense, efficace et monstrueux taillé directement et brutalement dans la roche. La musicalité du trio, qui flirte et oscille toujours autant entre pulsion de mort et espoir nécessaire, nous invite encore un peu plus dans un univers sensible et à fleur de peau et insuffle sur la scène rock indé noise une leçon d’honnêteté.

Soulignons également la direction artistique impeccable, notamment dans ce nouveau clip où la mise en scène sobre et minimaliste laisse place à l’interprétation la plus simple comme à la plus métaphorique. Lutte personnelle et profonde contre soi-même, combat quotidien invisible mais douloureux face à la vie, recherche de la lumière au bout du tunnel… Le cri intérieur et poignant qui sert de moteur à la musique de Lysistrata n’a jamais autant pris de sens, et tous les filtres, tous les voiles, tous les bloquages, toutes les peurs disparaissent enfin. Rendez-vous le 1 mars.

Landmvrks – Creature

Lentement mais sûrement, Landmvrks s’est fait se place parmi les gros noms de la scène metalcore européenne et même mondiale. Deux ans après leur dernière sortie, les Marseillais sont de retour avec Creature, un single diablement efficace témoignage de leur changement de dimension. Musicalement on retrouve la marque de fabrique du groupe avec des riffs ciselés et un Florent Salfati plus inspiré que jamais au chant, alternant diverses techniques et laissant la part belle à ses influences rap.

Du Landmvrks classique mais avec une évolution naturelle et un clip de toute beauté à l’esthétique très Stranger Things. Alors que la tournée européenne du groupe est en train de se blinder à une vitesse folle, le prochain album pourrait définitivement faire exploser le groupe en France et à l’étranger s’il est de cette qualité.

Une chose est sûre, l’ascension de Landmvrks ne fait que commencer et bien malin qui pourra dire où elle va s’arrêter.

Villagers – That Golden Time

Tout juste après avoir annoncé la sortie de son 7ème album That Golden Time le 10 mai prochain, Villagers a dans la foulée dévoilé un sublime premier single portant le même nom. Avec sa voix chaleureuse et enveloppante, l’auteur-compositeur irlandais raconte le bon vieux temps des jours heureux où tout allait mieux, celui dont on se rappelle dans un soupir quand le monde actuel qui nous entoure est un peu trop glacial.

Dans un éblouissant clip fait de poussières d’or et réalisé par Rok Predin, ce conflit entre idéalisme et réalité est joliment illustré par un papillon de nuit qui se retrouve à la fois attiré et désorienté par une flamme captivante et dangereuse, comme nombreux•ses de ses camarades avant et après lui.

Lesram – Question

Ça y’est, Du peu que j’ai eu, Du mieux que j’ai pu est dehors, premier album du rappeur emblématique du Pré-Saint-Gervais. Pour l’occasion, Lesram a souhaité marquer l’événement avec le clip le plus ambitieux de sa carrière. 

Question nous porte des rues du 93, jusqu’aux montagnes de Val d’Isère en passant par Marseille comme si le rappeur était venu marquer la France entière de toute la richesse et précision de ses textes et de sa vision unique. Lesram nous marque une nouvelle fois de sa vision réaliste du monde dont la simplicité a tout à nous apprendre. Son rap n’a pourtant rien de moralisateur mais la puissance de ses textes impose le respect. Question montre que Lesram peut évoluer musicalement mais la ligne de conduite reste inchangée: malgré les doutes et les questions qui nous parasitent, les valeurs elles sont toujours là, infaillibles. 

Yovo, DIOGENES – CLARA M.

Une bombe vient d’être lâchée et sa déflagration nous secoue encore. Yovo, rappeur révélé avec son premier EP ZÈBRE, et le producteur et compositeur DIOGENES (404 Billy, Isha, Leo SVR…), se sont donnés pas moins de 2min30 pour laisser leur empreinte indélébile sur la scène rap fr actuelle. 

Après deux premières collaborations, CLARA M. est un concentré de ce qu’ils ont de mieux à nous offrir : Yovo enchaîne des phases d’un égo trip à la fois puissant et sarcastique sur une compo New Boom Bap complétement visionnaire de DIOGENES. Si les deux sont venus tout exploser, la déflagration n’aura d’autre effet que d’apporter un nouveau souffle au rap en 2024. Et jusqu’ici, nos yeux resteront rivés sur eux. Il est sûrement bientôt l’heure de préparer « le champagne dans des verres à pied » !

Si le titre était déjà une claque, le clip de CLARA M est une prouesse de plus ! Réalisé par L’ENFANT SOLEIL et stylisé par Dora Tamazout affirme cet équilibre singulier; à la fois macabre et emprunt d’humour, qui marque leur univers.