La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre, voici la première partie de notre 206e sélection.
Flèche Love – Cetus feat. Cheb Anouar
Cetus est le premier titre de Guérison, nouvel album de Flèche Love. À travers Guérison, Flèche Love veut se reconnecter à ses racines, à la nature et à ses valeurs et « espère créer une vibration avec d’autres personnes« .
Cetus mêle la puissance et la douceur et nous emporte « à la croisée de mondes qui d’ordinaire ne se croisent jamais« . Dès le début, la voix envoûtante de Cheb Anouar, légende de la musique algérienne, nous guide dans un voyage spirituel au refrain porté par un chœur gospel puissant tel des vagues dans la tempête rythmées par des basses « créés à partir de chants de baleines« . Flèche Love nous raconte de sa voix délicate en français, des souvenirs d’enfance.
Cetus, premier clip de l’album Guérison, « fusion céleste de chœurs de gospel aux chants sacrés algériens » commence par des plans larges de paysages algériens. On suit Flèche Love dans les sillons et elle nous ouvre les portes de ses racines et son enfance en mettant en scène des femmes algériennes et ainsi “rendre hommage à nos ancêtres” et aux liens intergénérationnels riches et précieux.
Kim Gordon– I’m a Man
Kim Gordon, alias la « Marraine du Grunge » ou la Queen of Noise Rock revient avec I’m a Man, deuxième extrait de The Collective, second album solo de la musicienne et artiste-plasticienne qui sera disponible le 8 mars.
Produit par Justin Raisen, I’m a Man traite des normes de genres, des stéréotypes et des discriminations. La voix hantée de Kim donne à ce titre sombre au rock brut et disruptif tout son sens avec ce refrain démoniaque « It’s not my fault I was born a man …Take my hand, Jump on my back, Cause I’m the man« . Le Clip I’m a Man réalisé par Alex Ross Perry avec Coco Gordon Moore (fille de Kim Gordon) et Connor Fray met en scène les normes de genre, les stéréotypes de genre et le désir de ne plus satisfaire ces normes.
IDLES – Grace
Sorti le jour de la St Valentin, le dernier extrait du nouvel album de IDLES s’offre un coup de projecteur audacieux avec un clip vidéo qui résume à du génie ! C’est simple, c’est le même clip que Yellow de Coldplay. Sauf que la bande s’est amusée avec l’intelligence artificielle qui vient marier les lèvres de Chris Martin avec les paroles de Grace. Subversif et drôle pour une ballade, c’est tout ce qu’on aime chez eux.
Imminence – Continuum
Imminence ne cesse de progresser depuis quelques années et ce nouveau single le prouve à nouveau. Les Suédois arpentent la scène Metalcore européenne depuis plus d’une dizaine d’années déjà et se sont toujours différenciés par une production sans faute et les parties au violon d’Eddie Berg, également chanteur. Mais ce qui n’était qu’un gimmick auparavant devient petit à petit de plus en plus solide et le groupe de Malmö continue son parcours sans faute avec ce nouveau titre, Continuum.
Ça commence violemment, avec des riffs qu’Architects période 2014-2016 ne renierait pas et se poursuit avec un refrain tout en douceur d’une beauté certaine. Rien de nouveau pour le style me direz-vous, mais le tout est extrêmement accrocheur sans être cliché, ce qui est déjà plus rare. L’Europe avait un train de retard dans ce style face aux merveilles arrivant des États-Unis, d’Australie ou du Japon et Imminence amorce la réponse. Plus qu’à voir avec curiosité ce que ce nouveau titre donne sur scène.
Later. – Cold Touch
Après quelques partages de live sessions, le quatuor parisien qui dans neuf jours tout pile va poser bagages à la Cigale nous offre un clip pour son titre Cold Touch où se mêlent images comme dérobées d’un shooting et de live. Le single aux sonorités Pop et French Touch, nous embarque dans les murs du légendaire temple des années 1980 qui ont accueilli entre autres Andy Warhol et Yves Saint-Laurent ; Les Bains. Tourné à la péloche, le clip oscille entre moments festifs clubing, tranches de vie du groupe et sessions bleutées de rêverie suspendues de Charles-Marie.
Cold touch est une nouvelle démonstration que les Later. ne se cantonne pas qu’à un seul style, inscrit résolument dans l’époque, c’est peut-être un peu pour ça qu’on les aime. Si le temps des dancings est révolu, on est prêts à les voir en live !
The Dandy Warhols – I’d Like To Help You With Your Problem (feat. Slash)
Les Américains reviennent sur les devants de la scène avec un invité de taille, j’ai nommé Slash, oui oui le gratteux des légendaires Guns and Roses ! Nouveau single de l’album Rockmaker à venir pour le 15 mars prochain, I’d like to help you with your problem nous transporte dans un univers généré par l’artiste Andy Link qu’on dirait tout droit programmé d’un Midjourney.
Futuriste et steampunk, dystopique, le clip est une petite dinguerie visuelle où on croirait assister à une espèce de festival rock en bord d’océan empêtré dans la catastrophe environnementale.
Si Courtney Taylor-Taylor préfère parler d’acid rock « de l’époque du Vietnam », I’d like to help you with your problem nous fait penser à un bon son stoner décoiffant à la Queens of the Stone Age. Quand on voit les autres guests du prochain album – spoil : Debbie Harry (Blondie) et Black Francis (Pixies) -on se dit que les Dandy Warhols nous réservent un lot de surprises conséquent.
Dajak – HOODIEBLACK : Live Symphonique
Dajak souffle déjà la première bougie de son tout premier album, Les Larmes du Soleil. Publié en février 2023, ce projet nous emmène en voyage à travers l’univers sincère et authentique du parisien, mettant en valeur tout son talent de poète et démontrant sa maîtrise parfaite de divers styles. Pour marquer cette occasion, il dévoile une version symphonique de son titre HOODIEBLACK.
Dajak est installé dans un studio, plongé dans l’ombre, sa guitare à la main, entamant son morceau. Peu à peu, la pièce s’illumine, révélant la présence d’un bassiste, de violoncellistes, de violonistes et de trois choristes qui se joignent à lui. Alors que la version symphonique était jusque-là légère, l’ajout progressif d’une batterie en dernière partie du clip apporte une dimension plus brute à cette nouvelle interprétation, la sublimant encore davantage.
Avec la sortie symphonique de HOODIEBLACK, Dajak marque de manière élégante le premier anniversaire de son album Les Larmes du Soleil. C’est aussi l’occasion idéale pour souligner sa date au Trianon le 26 avril, qui s’annonce comme un événement à ne pas manquer.
Infinit’ x Rim’k x Alpha Wann – Mc Gregor
Ça y est, le nouveau projet d’Infinit’ est dehors. 888 reprend les codes du rap chirurgical du sudiste pour livrer un condensé de ce qu’il sait faire de mieux. Pour ce faire, il lui fallait l’espace nécessaire. C’est pour cela que hormis son ami 3010, on ne retrouve qu’une autre collaboration sur les 15 titres du projet. Cette dernière réunit, en plus de l’hôte, le vétéran Rim’k et le flegmatique Alpha Wann. Une triade qui se complète à merveille sur cette instrumentale wavy de Jay-Jay et Selman Faris. L’alchimie se retrouve également sous la caméra de Kamel Gondry.
Les trois hommes et quelques amis (Deen Burbigo, Rowjay,…) s’attablent pour partager des sushis cuisinés avec le même pointillisme que celui se dégageant de leur rap. Le poisson cru déposé sur le riz gluant est finement découpé, tout comme les couplets des trois rappeurs. En fond, un écran et une console assurent le divertissement. Les ambiances west-coast émanant du titre se retrouvent matérialisées par le gameplay de GTA dans lequel on retrouve les trois artistes.
Que cela soit sur la gastronomie ou sur le rap, ils dévoilent un sens du bon goût bien aiguisé, qui donnerait presque envie de s’offrir un petit délice sucré pour terminer comme il se doit la soirée.
thaHomey – ROSA PARKS
Que ça soit sur ses projets ou singles ou sur ceux des autres, thaHomey semble constamment omniprésent. S’il aime croiser le fer avec d’autres artistes aux univers distincts, cette semaine c’est en solo qu’il dévoile ROSA PARKS. À la vue du titre et du sujet qui imbibe le morceau, le fait de s’y attaquer en solo paraît logique. Sans perdre son style fait d’ego-trip et d’arrogance, il arrive à se raconter un peu plus en mettant en avant son amour pour la culture hip-hop.
Pour faire les choses bien, il a carrément embarqué le réalisateur @blackswordcreatives de l’autre côté de l’Atlantique pour se rapprocher du berceau de cette culture : New York. Sous un noir et blanc de circonstances, le rappeur se dévoile d’une manière moins démonstrative et plus personnelle. N’hésitant pas à mettre en avant son quotidien d’homme noir et les difficultés auxquelles il se confronte. Sans se dénaturer, le jeune rappeur arrive à faire passer son message, comme quoi forme et fond peuvent encore et toujours cohabiter.
Mairo & H JeuneCrack – Catenaccio
Voilà une surprise qui fait plaisir. L’alliance entre deux des plus belles promesses de ce rap francophone voit le jour sous la forme d’un projet 3 titres. Court, mais ultra-efficace, il permet à Mairo et H JeuneCrack de laisser leur talent parler pour eux, et ce, sur différents types d’instrumentales. Pour accompagner cette sortie, les deux artistes laissent parler rigueur, pour Mairo et nonchalance pour H JeuneCrack sur Catenaccio.
Ce terme issu du jargon footballistique définit un style de jeu où la défense prime. Alors, pour les amoureux du ballon rond, il sera facile de comparer la performance des deux rappeurs à celles qui ont offert de belles saisons de la Juventus grâce à la doublette Chiellini et Bonucci.
Pourtant, pour le visuel, le réalisateur Metanoia n’a pas choisi l’Italie mais plutôt le Japon. Un terrain de jeu qui lui permet de briller montrer qu’il a assimilé les codes du cinéma asiatique. Ces derniers se retrouvent dans la symétrie de certains plans où encore dans les mouvements très directs de caméra. Pour le reste, le charme du Japon et le flow inné des deux artistes finissent d’achever une prestation 5 étoiles aussi bien sur le visuel que sur le rap.
Jessica Pratt – Life Is
« God, it’s good to be back » avait teasé Jessica Pratt en début de semaine. Et quel retour.
Après 5 ans d’absence, depuis son album Quiet Signs, la chanteuse américaine libère le merveilleux Life Is. Un des titres les plus aboutis de sa carrière, qui dénote presque dans sa discographie. Life Is nous happe instantanément avec ses percussions dignes du Pet Sounds de Brian Wilson. Et il y a cette voix rêveuse, légèrement en écho, qui nous plonge directement dans un songe. Ce savant mélange tout aussi réconfortant qu’angoissant aurait certainement eu le droit a sa place dans la B.O. de Twin Peaks.
5 années se sont écoulées, qui lui ont laissé le temps de vivre, et de revenir avec des réponses. « Life is never what you think is for« . La temporalité semble toujours aliéner la chanteuse. Ce temps trompeur, qui prend différentes formes et qui ne nous mène jamais là où l’on souhaite se diriger. « Life came and went and you didn’t land where you thought you would. Itʼs the third act and youʼre trying to climb back on the horse before it gets dark.« . Quelle couleur prendra donc son nouvel album Here in the Pitch le 3 mai prochain ?
Nous aurons la chance de pouvoir découvrir le nouvel album de Jessica Pratt en concert à l’Alhambra le 6 juin prochain. À ne pas manquer.
HALO MAUD – My Desire Is Pure
Après Terre Infinie et Catch The Wave, My Desire Is Pure est le troisième extrait de son deuxième album Celebrate (à paraître fin mars) qu’Halo Maud nous dévoile. My Desire Is Pure est une chanson leitmotive qui confère aux sentiments vrais que l’on ressent au plus profond de nous, toute leur sincérité. Une impression de pureté, presque virginale, exhale de la ligne mélodique renforcée par la voix cristalline d’Halo Maud dont par moments la montée d’arpèges nous fait penser à celles de Bjork version Homogenic. Une chanson moins facile qu’elle ne paraît – comme souvent dans les compostions d’Halo Maud – et qui sait partager un message aussi simple qu’authentique.
Un sentiment de pureté qu’Adrien Selbert (il a réalisé la vidéo) a fait se révéler dans un décor de montagnes alpines dont les pentes accompagnent les montées et les descentes prises par la ligne mélodique. Halo Maud y apparaît en combinaison blanche sur des prairies enneigées. Blanc sur blanc, les plans s’unissent presque à l’infini sans pour autant se confondre, comme l’œuvre carré blanc sur fond blanc du peintre suprématiste Kasimir Malevitch. « My desire is pure – précieux comme toi »
Malik Djoudi – Lettre à France
Les albums « hommages », on les regarde souvent du coin de l’œil, avec un brin de méfiance.
Mais souvent, dans les interstices se cachent des petites merveilles, des moments où l’univers d’un monument se voit transformer par un artiste qui y appose son cachet, sa singularité.
Voir Malik Djoudi reprendre Michel Polnareff avait tout de l’évidence dans nos esprits et le musicien ne nous a pas déçu. Sa version de Lettre à France, il l’a fait vibrer de sa voix cristalline, il la trempe dans ses obsessions synthétiques, dans les sonorités qui n’appartiennent qu’à lui et qui font toute la différence entre une reprise et une réinterprétation.
C’est aussi évident que c’est beau, intense et addictif.
Pour prolonger l’idée, Antoine Carlier nous offre une live session qui fleure bon les 70’s, que ce soit dans les éléments de décors, les costumes et la façon dont elle est réalisée.
Un bien bel objet qui nous donne envie de découvrir le reste d’il était une fois Polnareff, d’autant qu’on y retrouvera des artistes qu’on apprécie énormément notamment UssaR, Pomme et Yael Naim.
À suivre donc