Les clips de la semaine #207 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la seconde partie de notre 207ème sélection.

Theodora – Jours Heureux

Avec un nouvel EP en ligne de mire – Odyssey – à paraître fin mars 2024, Theodora nous fait voyager le long des rivages de ses mers intérieures. Jours Heureux est une chanson sur la désunion, sur l’illusion sensorielle qu’il nous reste après le départ de l’autre et qui s’étiole dans un élan cathartique. L’imaginer sans nous pour pouvoir se reconstruire soi-même. « Tu vis des jours heureux là-bas. Ta bouche, ta peau, respirent sans moi »

Dans Jours Heureux, Theodora joue avec ses ressentiments en leur donnant un caractère onirique. Une voix métamorphosée par des effets subtils, une montée en puissance vite soulignée par des pulsations rythmiques implacables, une ligne basse addictive et des échappées mélodiques qui nous embarquent vers un je ne sais où. Un creuset musical qui permet que colère et abnégation s’amalgament et se transmuent en force et résilience.

Pamp3000 associé à Contextual Mumbling ont donné vie à cette marche en avant irrésistible dans les paysages et la lumière des côtes septentrionales du Danemark. Entourée de ses fantômes obsessionnels, Theodora avance droit devant elle, dans son armure coconneuse. Elle avance au milieu d’une route, longeant une grève caillouteuse, sur la ligne de crête d’une dune, pour retrouver, au sommet du phare de Rubjerg Knudela, la lumière qui la fait vivre. « Tout s’efface et tout renaît. À ma place, un vide parfait. »

Distractions – Siècle

À quelques jours de la release de leur premier album Siècle au Pop-Up du Label, Distractions met en images la chanson qui lui a donné son nom. On retrouve dans Siècle cette verve désenchantée qui nous emporte dans les compositions du groupe. Une mélancolie qui, inconsciemment, naît dans la torpeur d’un jour d’été qui s’achève, lorsque les corps s’ensommeillent et les pensées s’échappent. Portées par une ligne mélodique simple et suave, les voix se répondent avec douceur et sincérité pour ne former qu’une seule et même mélopée.

Confinés dans un imaginaire de salles d’attente d’aéroport et de cabines d’avions, une indolence insidieuse nous envahit. Un monde à la lumière tamisée où les regards deviennent lointains sans jamais se croiser. Un vol au long court pour s’égarer le temps d’un voyage, vers un avenir que l’on ne cherche plus à construire. De cette douce mélancolie qui en émane naît une certaine forme de beauté contemplative. Une saudade que Distractions aurait faite sienne. À tous les voyageurs immobiles, à tous les rêveurs insatiables, laissez votre sensibilité vous guider.

Jeudi prochain – le 29 février – sera un jour que l’on ne connaît que tous les quatre ans. Un jour que l’on qualifie d’intercalaire. Profitez dans cette particularité chronologique pour retrouver Distractions sur la scène du Pop-Up du Label, l’incontournable salle parisienne qui vient juste de fêter ses 10 ans (un dixième de Siècle).

Chahu – Bolide (VROUM)

Si vous nous suivez sur La Face B, il y a une rengaine que vous devez souvent entendre (ou lire) : il se passe de belles choses à Angers.

La preuve encore cette semaine avec Chahu et son superbe Bolide (VROUM). Comme souvent avec Charles, la décharge émotionnelle est intense. Avec ce nouveau morceau, il nous offre une lente et puissante montée, lancinante et obsédante. Le genre de morceau qu’on écoute et face auquel on doit se rappeler de respirer car, une fois l’écoute lancée, plus rien d’autre n’existe que ce qui se passe dans nos oreilles.

À force, on devrait le savoir qu’il se passe quelque chose avec la voix de Chahu, un truc qui nous hypnotise, qui nous pousse sans forcer à l’attention, à l’empathie et à l’oubli… pourtant, on se fait gentiment piéger à chaque fois.

Bolide (VROUM) porte un nom aussi étrange que cohérent si l’on y pense … Ici c’est une fuite en avant dans la langueur, une réparation de l’esprit à travers les mots et la parole. Un grand morceau qui parle de santé mentale, de pouvoir exister sans les attentes (des autres et de soi même), de pouvoir se détacher pour mieux se retrouver.

Josic Jégu filme magnifiquement cet état de stase évolutive, ce genre de moment où, si le corps ne bouge pas réellement, tout se bouscule grandement dans la tête. Dans une sorte de plan fixe en lumière naturelle, la vidéo sublime à la fois Chahu et ce qu’il veut nous raconter, avant qu’un zoom dans le silence ne vienne capturer un rire et un sourire.

Un second single bluffant qui ne fait qu’augmenter l’attente autour du premier album de Chahu, prévu pour cette année.

Space Alligators – London Tropical

Vous cherchez le soleil en cette fin d’hiver qui s’éternise sous la grisaille ? Directement Londres avec les Nordistes de Space Alligators pour une virée en chemisette dans la capitale du Brexit. Premier titre de leur futur album du même nom, il joue des contradictions pour nous faire réagir et attirer les oreilles curieuses.

Effectivement, leur premier titre en Français parle de Londres, dont la renommée est plutôt construite autour d’un temps maussade (pour rester poli) que sur le bronzage impeccable de ses résidents. Mais après tout, c’est une belle façon de poser la première pierre de leur nouvelle identité. En guise d’introduction à leur premier opus, le titre pose donc les bases d’un renouveau rafraîchissant qui se vit avec une heure de décalage horaire.

Côté images, les cocos exposent leur teint halé made in Hauts de France pour se la jouer groupe de potes et déconne au pub le temps d’un happy hour entre une après-midi à la plage de Buckingham et une soirée terrasse nature à la City. C’est décalé, donc, ça marche, on est déjà en train de réserver l’Eurostar pour aller profiter des cocotiers avec eux !

Eddy de Pretto – Urgences 911

Cette semaine, le clip de Eddy de Pretto « urgences 911 » est disponible. Ce titre est extrait du dernier album  « Crash Cœur », sorti en novembre dernier, centré sur l’amour, le deuil, et la question de la vie après la mort. « Urgences 911 » parle de la relation a deux au quotidien et capture l’urgence de vouloir être présent pour quelqu’un, même au milieu du chaos et de l’incertitude, dans la vie comme dans dans la mort. Le Clip de Urgences 911  commence par un plan large vertigineux du chanteur suspendu dans le vide et agrippé au  pare-chocs d’une  voiture au bord d’une falaise sous un ciel dramatique.  Il remonte peu a peu sur la terre ferme et continuera a danser sur le capot de cette voiture, qui ne tient qu’à un fil mais se questionne sur un plongeon dans le vide. 

Un clip signé   Arthur King,  pour  des paroles inspirées des obsèques d’Agnès Lassalle, l’enseignante assassinée le 22 février 2023. « Lorsque je suis tombé sur la vidéo d’un homme qui entame une dernière danse solitaire lors des funérailles de sa femme, j’ai été profondément ému et cela a éveillé en moi une question existentielle : danserons-nous toujours ensemble, même après la mort ? Est-ce que nos cœurs continueront toujours de danser ? Cette question sans réponse a été un véritable moteur pour l’écriture de ce morceau, dans le but de poétiser une situation aussi douloureuse. J’ai voulu insuffler une touche d’espoir au milieu du pire « , confie Eddy de Pretto.

Swim Deep – How Many Love Songs Have Died In Vegas?

Qui n’a jamais été délicatement captivé par la vision emblématique d’un Elvis célébrant des unions dans une chapelle kitsch de Las Vegas ? C’est dans cette atmosphère empreinte d’icônes que Swim Deep dévoile leur tout premier extrait de l’année : How Many Love Songs Have Died In Vegas?. Les regrets du passé et les éclats de bonheur s’y entrelacent, capturant cette complexité fameuse de la vie.

L’amour, fil conducteur de la chanson, est dépeint avec une franchise douce et gracieuse, nous invitant à partager leur tumultueux apprentissage de ce sentiment. Ceci laisse évidemment entrevoir que la ville du péché peut être le théâtre de la fin de nombreuses histoires d’amour.

Notre attachement pour les musiciens de Birmingham reste, en tout cas, intact. Cette sortie marque le commencement d’une nouvelle ère pour Swim Deep, annonçant un nouvel album : There’s A Big Star Outside, prévu pour juin, promettant une belle gamme de nouvelles sonorités à la suite de Emerald Classics, sorti en 2019 déjà !

Danilo – Hôtel Restaurant 

Après avoir récemment dévoilé son premier titre Bienvenue en enfer dans un clip en plein cagnard, c’est cette semaine dans un Lyon sous la nuit tombante que nous revient Danilo avec Hôtel Restaurant (réalisation : Mazette Bros!). Ce nouveau titre-genèse nous plonge dans le questionnement existentiel de sa vie d’avant qui l’a poussé à troquer un attaché-case terne pour une guitare électrique. Habillé d’une production léchée concoctée par l’artiste lyonnais et son acolyte Nicolas Steib, Hôtel Restaurant figurera sur un premier EP intitulé LMQR prévu pour le 15 mars : rendez-vous à La Marquise à Lyon le 20 mars et à la Dame de Canton à Paris le lendemain pour fêter ça.

Solal Roubine – Solo

Le nouveau titre de Solal Roubine intitulé Solo est une jolie bulle de douceur dans laquelle on parle d’envie de tomber amoureux et de partager des moments à deux. Le narrateur prend conscience de sa tristesse suite à une rupture que sa vie manque de saveur, de rythme et d’émotions fortes. Le refrain est vraiment beau et reste dans la tête sur cette ballade qui nous emmène dans l’univers de Solal Roubine.

Le clip signé Hugo Van Manen surprend avec ses côtés nostalgiques et à contre-courant: Ca commence par un prank type braquage ou kidnapping  un groupe de potes rentrent dans une voiture pour aller passer la journée à la mer pour l’anniversaire de Solal. Ces vrais amis jouent leur propre rôle d’où cette  complicité et  ces moments d’amitié et de tendresse sur tout le clip. 

iZem feat. Flavia Coelho & LUIZA – Sua Pele

iZem a fait de son surnom le nom de son dernier album : In Ze early morning. De ce disque, il en sort une collaboration avec les deux chanteuses Flavia Coelho et LUIZA. Les trois artistes partagent le Brésil comme territoire commun. iZem ayant vécu à Recife, Flavia Coelho habité à Rio et LUIZA a des origines brésiliennes.

Cette dernière est une voyageuse dans l’âme, ayant accompagnée à La Réunion ou La Cigale le groupe de pop balkano-caucasienne Ladaniva. Le fruit de cette collaboration est le festif morceau Sua Pele. Mise en image par le réalisateur Julien Peronnet, Sua Pele a des teintes festives et hautes en couleur. Le clip est presque kitsch, décalé, avec une esthétique cathodique, rappelant les vieux postes de télévision. 

Péniche – NONO 168

Après la sortie de leur premier single, GROTSUNAMI, le trio Péniche est de retour avec un nouvel extrait clippé : NONO 168, réalisé par Josic Jégu. 

Une joyeuse déclaration d’amitié à tous leurs copaines et plus particulièrement à Nono, coupeur de bois et Xavier, ébéniste de métier qui officiait auparavant à la basse dans le groupe. 

Un titre aux allures de math rock où l’on découvre Xav’ en train de plancher sur une installation géante… quelques lettres qui une fois assemblées forment évidemment un mot: Péniche. 

NONO 168 s’écoute en live, pour la douce folie, l’ivresse des corps et le bonheur d’être toustes là. 

Aucklane – Hard To Get

Qu’est-ce qu’Aucklane ? Aucklane, c’est la marque incantatrice de Charlotte Maquet. Originaire de Liège, le projet a donné naissance à un premier EP il y a deux ans Nightfall avec des titres déjà géniaux comme Age Of Gold. On y découvrait déjà une artiste accomplie jouant de ces deux profil, l’un folk mélodique, l’autre trempé dans le rock indé sombre et remuant.

Hard To Get revêt les attributions de ce dernier. Les rythmes cassés et un roulement de basse en structure en font un pur produit rock. A cela s’ajoutent tous les éléments comme la distorsion lourde de la guitare où les notes qui pleurent au loin.

Les spots rouge sang sont les seules lumières de la nuit auxquelles se fier pour s’orienter et cette ambiance là nous parle parfaitement. On attend l’album avec impatience vu la qualité de composition et cette voix qui trouve sa place dans chaque coin sombre de nos oreilles

Lewis Evans feat LBLK – Only The Strong

En manque de rêverie ? Le chanteur franco-britannique Lewis Evans nous offre de la matière à voyager, avec la sortie de son nouveau single Only The Strong en featuring avec les sœurs LBLK. Elles apportent une touche rap au morceau, et le mélange entre leurs deux registres fonctionne à merveille. 

L’univers de Lewis Evans, aux accents pop, est dépeint par une très belle animation, dynamique et colorée. Si des plantes carnivores se mettent à chanter, et que des fleurs avec de grandes dents jouent tout à coup de la guitare, qu’une vague de poissons s’intègre à la scène.. et que Lewis Evans semble éclore au cœur de la végétation, vous ne rêvez pas ! Le rythme entraînant nous plonge dans ce tableau, cet imaginaire abstrait et sensible. Loin d’être naïves, les images contrastent presque avec les paroles du refrain « Only the strong survive ». 

En deuxième partie de morceau, les sœurs LBLK font à leur tour leur apparition sur des écrans cathodiques. Parler de nos faiblesses, tout en gardant confiance. À travers ce single et ces images, ces trois artistes jouent avec la complexité de nos émotions, avec douceur et simplicité, au détour d’une autre galaxie.