Les clips de la semaine #214 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici la première partie de notre 214ème sélection.

Last Train Heroin Still

Abel Chéret – L’inconfort

Abel Chéret, l’un de nos petits favoris du Chantier des Francofolies s’apprête à sortir un nouvel EP pour cette année 2024. Pour nous faire patienter après une première date aux Trois Baudets où il nous a fait découvrir des petits nouveaux, il a sorti ce jeudi un nouveau clip pour le titre L’inconfort

Le petit drame solitaire et pathétique comme il le décrit lui-même est réalisé par le photographe Philippe Lebruman. L’une des chambres de l’Hôtel La Louisiane plante le décor de cet objet filmique intimiste. Et la chambre n’est pas si banale. Elle a accueilli Madame Juliette GrécoAbel Chéret se retrouve à l’étroit, esseulé dans un format vertical très resserré, la seule ouverture c’est la fenêtre ouverte sur la rue piétonne, les lumières sont instables comme stroboscopiques . Ne serait-ce pas là la définition de L’inconfort ? Dans la vie sentimentale, dans l’espace de vie. Abel Chéret a repris sa plume sucrée et ce n’est pas pour nous déplaire. Son ton taquin, sa poésie, on s’y retrouve avec joie.

Green Montana x SDM – Barcelona92

Après avoir égayé l’été 2022 avec Neymar JRGreen Montana invite à nouveau son collègue SDM pour une nouvelle collaboration qui prouve que l’alchimie entre les deux hommes n’était pas qu’un cas isolée. 

La connexion est actée, le lieu rendez-vous est donné, il s’agira des hauteurs de la Catalogne et une des luxuriantes villas que les Pyrénées cachent. Dans cet écosystème qui s’éloigne fort de la grisaille de Verviers ou des tours de Boulogne, Green attend son confrère. Une fois ce dernier arrivé, ils attrapent un pick-up et s’enfoncent un peu plus dans la garrigue pour (littéralement) y mettre le feu. 

Un visuel sobre réalisé par Arthur Keasy qui prouve bien une chose : les deux artistes ont définitivement passé un cap et comptent parmi les plus grands du jeu actuel. 

NØNNE – Pics

Tours, Tours, Tours… Ah oui, the place to be ! Après More Pain, le trio NØNNE dévoile un nouvel extrait : Pics, annonciateur de leur premier EP, Nothing’s Goin’ On, attendu le 17 mai prochain. 

La vidéo, réalisée par l’excellent Julien Philips (à l’origine des clips de Rank-O) suggère habilement l’effet que peut procurer sur nous certains médicaments. Car Pics, avec ce refrain qui nous donne envie de chantonner gaiement, traite bien de la dépendance et des hallucinations que les cachets ont sur notre corps. Un tempo qui donne envie de danser, un son pop et des paroles fortes :  NØNNE aurait-il prévu de nous faire tourner la tête ?

Styleto – Faut que tu m’aimes

Styleto s’enfonce un peu plus dans les carcans de la pop francophone avec le très efficace Faut que tu m’aimes. Une balade catchy, à la frontière du kitsch qui vient puiser dans les intimes doutes de la chanteuse quant à l’amour qu’on peut lui porter. Un sujet vu et revu, encore plus dans ce genre musical, mais qui en plus de rester en tête, s’accompagne d’un clip, réalisé par Antoine Wibaux, permettant de mieux cerner l’univers de la jeune chanteuse. 

Se mettant en scène dans une compétition de rubik’s cube, elle confirme le ton adolescent qu’elle donne à sa musique pour parler de l’adulte qu’elle tente de devenir. Ne sachant par quel côté prendre ses multiples carrés colorés, elle se compare dépitée à ses adversaires qui semblent bien plus à l’aise qu’elle. Une pression qu’elle s’auto-soumet et qui fait écho à ses deux métiers : l’influence et la musique, des métiers d’image où le regard des autres sur ce qu’elle produit est inévitable. 

Bien obligée de faire abstraction des autres pour finir cette compétition, elle se concentre sur elle-même. C’est alors que petit à petit, elle tombe, échoue, se relève et finit par se jouer des cases pour finir par trouver la solution et colorer d’une même couleur chacune des faces du cube. Même si cela n’aura sûrement pas réglé tous ses problèmes de confiance, ça lui aura au moins permis de finir la compétition.

MALVINA – For the Fun of It

Nouvel extrait du futur album – Mercedes – de Malvina à paraître le 17 mai chez Pop NoireFor the Fun of It est le titre qui ouvrira le disque. Résolument hyperpop, avec tous ses curseurs de prod – distorsions, compressions – poussés à fond, For the Fun of It est un morceau, frontal, dont les artéfacts sonores – et il y en a pléthore – s’impriment durablement dans notre mémoire auditive. Un brouillement musical d’où émerge, portée par le refrain, une fulgurance mélodique, implacable. Elle en dessine ses lignes de fuite, celles qui lui ouvrent des perspectives aussi insoupçonnées que stimulantes. 

Cette déflagration sonore s’accompagne dans la vidéo d’une explosion de couleurs. Chaussée de ses bottes aux talons infinis, Malvina enchaîne spins et tricks sur sa barre de pole dance accompagnée par deux danseuses. Et si – dans ce jeu à trois à la sensualité troublante et presque en apesanteur – l’on perdait nos repères simplement, For the Fun of It ?

Malvina sera dans tout juste un mois en concert (en performance) au Point Ephémère pour la sortie de son album, ne la loupez pas !

notinbed – trickshot 2

En parallèle de ses productions pour la scène rap, notinbed a toujours mis un point d’honneur à mettre en avant son goût pour la production de musique électronique. Ce qu’il avait déjà prouvé avec l’EP action(s) et qu’il confirme à nouveau cette semaine avec les deux titres qui composent atm. Sorti mercredi, il était également accompagné d’un visuel réalisé par @notre_thys et @pedro_summer.

Si le producteur garde une aura assez mystérieuse, ce visuel à la frénésie folle, permettra aux yeux les plus attentifs d’en apprendre sommairement un peu plus sur son lifestyle. Effectivement, sans se mettre en scène directement, le montage ultra-dynamique offre une succession minutieusement agencée de moments du quotidien. Ce dernier, à l’image de la vidéo semble par moment glitché, laissant apparaître à l’image un lapin humanoïde déambulant dans Paris ou des images psychédéliques chargées de grain histoire de brouiller les pistes. 

La seule chose dont on est maintenant sûr, c’est le rapprochement officialisé à la fin du clip avec le label Sublime. La suite au prochain épisode ? 

Gwizdek – IA

Bien que les Intelligences artificielles soient / des outils fantastiques qui s’immiscent déjà / partout dans notre quotidien. / Il est parfois urgent de se déconnecter un temps, / pour ré-imaginer le monde au travers / nos propres process et émotions.” C’est ainsi que le groupe Gwizdek présente IA, le premier extrait d’un premier album attendu pour l’automne 2024. Les grenoblois nous proposent cette semaine un clip magnifique où la nature reprend ses droits via des animations 3D conçues par Alexandre Albisser, qui signe également la réalisation aux côtés de Daniel Gwizdek. Ce travail minutieux et titanesque vient sublimer ce nouveau morceau déjà bien beau : en nous invitant à couper le courant, IA a toutefois capturé toute notre attention. 

Suki Waterhouse – Faded

Suki Waterhouse semblait d’humeur généreuse. Avant de partir pour Coachella, la britannique a laissé deux visualizers fleurir sur sa chaîne YouTube, Faded est l’un deux. 

Animé avec des collages par le cerveau de Callum Scott-Dyson, le visuel rend un hommage plus direct à Londres, ville dans laquelle la chanteuse est née. Sous la pluie, elle prend la direction du centre-ville pour y balader la mélancolie d’une relation perdue qui semble habiter les paroles du morceau. 

You never should have changed your ways and faded
The colors you painted were perfectly simple
I know you used to hate it when I’d say that
All of these days that, that we remember
Had faded away

Comme un voyage loin de ce qui la tourmente, elle s’enfuira même du centre ville pour progressivement rejoindre des zones sub-urbaines ou elle laissera peut-être s’évaporer son mal-être dans la fumée qui parasite ses zones industrielles. Mais comme souvent, c’est en s’éloignant qu’on se rend compte des choses qui nous constituent et le retour à Londres semble inévitable. 

A travers cette histoire somme toute basique, Suki Waterhouse et Callum Scott-Dyson ont rendu un hommage mignon aux lieux qui constituent la chanteuse. 

Pierre Guénard – Pas les mots

L’ancien chanteur du trio de rock français Radio Elvis revient avec un nouveau clip. Pas le mots provient de l’album Je n’ai plus peur de danser. C’est le premier qu’il sort en solo. Pourtant récompensé pour ses chansons aux Victoires de la musique, et publié (Zéro Gloire, aux éditions Flammarion) Pierre Guénard y chante ne pas avoir les mots.

Une chanson intimiste, ou le chanteur délaisse les textes déclamés pour le chant, sobrement accompagné d’un piano et d’une batterie. Fabien Vourlat, qui réalise le clip, a décidé de jouer la carte de la sobriété, de l’élégance et du minimalisme. Pierre Guénard réaffirme sa volonté artistique de puiser dans l’intime sans voiles, sans caches, contrairement aux métaphores utilisées dans son dernier projet. 

The Lemon Twigs – How Can I Love Her More?

S’il vous plaît, permettez-nous de partager notre enthousiasme pour la sortie d’un nouveau titre des frères de Hicksville. Un quatrième extrait a été partagé cette semaine, et l’anticipation de ce nouvel album prévu pour mai prochain devient de plus en plus intense. Faisons preuve de patience et remercions ces deux musiciens de grand talent pour nous fournir leurs dernières munitions afin de préparer l’arrivée de cette collection de mélodies et d’harmonies vocales.

How Can I Love Her More? est une nouvelle fois une démonstration qu’il est parfois, mais le plus souvent possible, nécessaire de transformer le mal en bien. Le manque de confiance en soi et la peur de voir l’être aimé partir sont abordés sous une exposition de sonorités puissantes et captivantes. Certaines personnes pourraient peut-être percevoir une certaine bizarrerie et un décalage dans l’approche des Lemon Twigs entre la forme et le fond. Néanmoins, il serait dommage de juger leur travail ou eux-mêmes de cette manière. Tout ce que nous pouvons écouter avec ce nouveau titre, ainsi qu’avec les précédents, est une réaction saine et naturelle face à une situation délicate ou complexe.

Ces deux artistes, comme beaucoup d’autres, ont leur propre manière de transmettre leurs émotions et offrent plutôt la possibilité qu’ils puissent humblement nous présenter une autre manière de gérer nos sentiments et situations négatives. Ne vous privez surtout pas, avec le retour du soleil, de recevoir cette vitamine D tout en emportant avec vous cette dose supplémentaire de bien-être et de joie qui résonnera dans vos oreilles.

Last Train – Heroin

On se permet de tricher un peu maintenant avec une session live plutôt qu’un clip mais du point de vue cinématographique on est loin d’être en reste. C’est donc le grand retour pour les Alsaciens de Last Train après une très longue tournée pour The Big Picture et une belle pause qui ne leur a rien enlevé de leur ambition.

L’ambition, c’est bien ce qui caractérise ce nouveau projet qu’ils nous présentent. OMPS (pour Original Motion Picture Soundtrack), c’est un travail réalisé en partenariat avec l’orchestre symphonique de Mulhouse – important de faire travailler les acteurs locaux – et qui prend la forme de la bande originale d’un film imaginaire.

Au programme aujourd’hui, Heroin pour introduire ce travail et c’est simplement somptueux. Le travail de cadrage et de lumière sont extraordinaires, alors montez le son et la résolution, vous allez comprendre très vite.