La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici la première partie de notre 214ème sélection.
Hermetic Delight – Ankara Punk
Ankara Punk c’est l’hymne du trio Strasbourgeois Hermetic Delight. Quelques notes douces et pop afin de revivre l’espace d’un instant la jeunesse des années 90. En l’occurrence celle de la chanteuse, Zeynep Kaya, à Ankara. Le parc et les verres échangés, les concerts partagés, les K7s piratées. En Turquie, ou ici, s’impriment et se partagent des moments sacrés. Et si au présent le groupe s’emploie à élever dans les airs un cerf-volant, nul doute que dans le rétroviseur de leur 205, c’est bien dans le passé qu’iels sont installé.e.s ! Delphine Padilla à la batterie nous y conduit, tandis qu’Atef Aouadhi à la guitare nous berce.
Signé sur le label October Tone en France (BBCC, La Houle, …) et The Animal Farm en Angleterre, le groupe est de retour avec une série de singles et une tournée européenne au printemps. Iels seront d’ailleurs de passage au RDC de l’Inter le 30 avril prochain ! L’occasion de (re)découvrir leur premier album, F.A Cult, sorti en 2020.
Fontaines D.C. – Starburster
La plénitude peut, ou du moins aspire à, prendre forme en s’appropriant chez l’autre. Cette quête d’épanouissement pourrait-elle donc braver les frontières de l’interdit ou de l’immoralité ? Il serait pertinent d’ajouter que cette appropriation de l’autre pour trouver son propre bien-être est-elle si délibérée ? En fin de compte, pourrait-il y avoir un geste d’une innocence authentique en désirant s’approprier ce que l’autre possède déjà en abondance ? Il se peut que nous ressentions même un manque, non pas d’un objet tangible, mais simplement le désir de découvrir et de savourer quelque chose que nous ne connaissons pas, pour satisfaire une autre forme de bonheur : celle de l’exploration de l’inconnu et de l’adrénaline qu’elle suscite.
C’est d’ailleurs une véritable montée d’adrénaline que nous offre le retour des cinq Irlandais les plus poétiques et mélodiques de ces sept dernières années. Starburster nous livre 3 minutes et 41 secondes à écouter en boucle pendant des semaines, mais cela annonce également une longue attente pour découvrir bien plus encore. En mettant fin aux années tumultueuses qu’ont connues Partisans Records avec les musiciens de Dublin, Fontaines D.C. rejoignent désormais les rangs de l’écurie XL Recordings pour y préparer de nouvelles aventures harmoniques.
Nous pensons qu’il serait incongru de révéler le nombre d’écoutes que nous avons accordées à ce nouveau morceau. D’ailleurs, nous-mêmes aurions du mal à y croire. En tout cas, comme beaucoup l’ont peut-être fait, nous avons trouvé une source de bonheur pur en nous confrontant à la puissance sonore qu’offre ce nouveau single, annonciateur d’un album très percutant pour cette année. Puisque Starburster nous offre cette possibilité, continuons dans cette quête innocente, explorant la découverte tout en effleurant ce qui ne nous appartient pas, ne serait-ce que pour quelques instants.
We Hate You Please Die – Adrenaline
Le trio We Hate You Please Die est de retour avec un nouvel extrait clippé : Adrenaline. Au sein d’un skate park abandonné, les artistes performent. Adrénaline ou cette hormone qui permet de se dépasser, qui régit nos gestes en situation de stress et nous aide aussi à nous mettre en pilote automatique.
C’est un hymne de liberté, finalement, que crie ici We Hate You Please Die dans l’urgence du refrain et la frénésie des accords. Le groupe sera en concert le 7 novembre prochain à La Maroquinerie et c’est à ne pas manquer !
Dani Terreur – Le bonheur et la tristesse
Le bonheur et la tristesse 1er single du futur Album de Dani Terreur attendu fin 2024. Le bonheur et la tristesse mélange les sentiments de mélancolie et d’adrénaline avec poésie sous une mélodie qui s’imprime dans les esprits.Ce passage de la chanson son encapsule bien le message de ce titre:« Une larme glisse et je souris « . Le riff marque bien le passage entre le spleen et la quête du bonheur. S’en suit ces paroles qui marquent une éclaircie dans la noirceur du début « Les étincelles prennent racines dans mon coeur vidé, je suis ressuscité » .
Le clip est réalisé par Martin Schrepel. Ce clip oscille entre les plans serrés de Dani Terreur allongé sur les rails (comme s’il attendait le danger ou la mort) et les plans larges d’errance mêlant paysages vides et chemins de campagne, a la recherche d’un signe de bonheur et d’exploration de soi. Il y a également un signe fort dans cette guitare qui tantôt prend l’eau puis s’embrase dans le feu comme symbole de la renaissance du Phoenix.
BOLIVARD – ROMANTISME
Ah Bolivard … Cynique ? Ca ne fait aucun doute. Drolatique ? C’est l’évidence même. Antipathique ? Sans doute pour certains. Mais romantique ? Absolument pas ! C’est en tout cas ce que le musicien nous confesse dans son dernier morceau, Romantisme.
Et pourtant, tout y est : un rythme langoureux, une voix qui susurre des mots doux, une guitare qui élève le rythme … Mais non, malgré tout ça, pas de chanson d’amour. À la place, on se retrouve avec un nouveau classique de Bolivard, un morceau qui s’amuse des images éculées pour mieux les détourner, qui nous invite à questionner le rapport quotidien à la romance et à ce que cela signifie dans nos vies.
Bien sûr, cette idée, il la transpose aussi dans le clip qu’il réalise lui même. Champ de fleurs, soleil couchant, balade en barque et restaurant … Tout les clichés sont ici passés à la sulfateuse Bolivard pour nous faire sourire. Accompagné de Pocket qui prend le rôle de Monsieur Romantique, le musicien s’amuse beaucoup à déconstruire des fantasmes qu’on nous colle en permanence depuis toujours.
Et honnêtement, parfois la réalité, et une bonne partie de Mortal Kombat sur PS5, c’est quand même plus marrant que le romantisme (sauf quand il est chanté par Bolivard bien sûr).
ALIAS – COCKTAILS AND DREAMS
On porte tous une part de chaos en nous. Un petit démon qui vient nous parler à l’oreille et nous entraîner avec lui pour le meilleur ou pour le pire. ALIAS l’a bien compris et plutôt que de le combattre, il a décidé de lui dédier un album tout à sa gloire.
EMBRACE CHAOS est sorti vendredi et c’est tout ce qu’on espérait et même plus. On vous partagera notre avis plus en longueur demain mais en attendant on s’intéresse à COCKTAILS AND DREAMS qui se voit accompagnée d’un clip pour célébrer la sortie du second long format du français.
Premier morceau composé pour cette aventure et dernier de l’album, il se dégage ici un on ne sait quoi d’à la fois lumineux et réjouissant. COCKTAILS AND DREAMS a tout de la grande conclusion d’une aventure, un relâchement d’énergie parfait et contagieux qui a tout pour rendre heureux.
La vidéo de Gabrielle Thiffault porte en elle cet espèce de surréalisme libérateur qui vit à l’intérieur d’EMBRACE CHAOS. On se retrouve ainsi au sein d’une entreprise complètement déglinguée qui semble t-il recrute des nouveaux membres, tous plus étranges les uns que les autres. On regarde donc cette assemblée étrange vivre et se réunir pour mieux vivre avec son chaos intérieur. Et ça nous donne furieusement envie d’en faire de même.
BELLBOY – La neige
La neige est entrain de partir, mais BELLBOY est bien décidé à entretenir dans son essence à travers le premier extrait de son second EP, attendu pour le mois de mai chez Microqlima.
La neige, c’est donc leur nouveau titre et il semble parfaitement coller à ce que leur musique renvoie dans nos esprits : quelque chose de fragile, d’éphémère, qui amène à lui des souvenirs et des sensations qu’on a envie de chérir et de protéger.
Articuler en deux parties, le morceau commence comme une sorte de comptine enfantine et mélancolique avant de lentement dériver vers une expérimentation électronique mouvante et surprenante. Maîtres des effluves qu’ils nous envoies, les garçons de BELLBOY continue de tracer un chemin étonnant et émotif qui nous touche complètement.
Pour l’accompagner, les Rennais font une fois de plus confiance à Romane Granger pour animer leur univers et offrir du corps à leurs rêves. On se plonge donc à nouveau dans une bulle hors du temps, faite de couleurs et de beauté qui met en son centre certaines obsessions que l’on retrouve dans la musique : l’amour, le temps qui passe et l’envie de sublimer le réel. Une association musicale et visuelle qui ne sera pas sans rappeler celle d’un célèbre duo avec un grand mangaka.
yoa – Matcha Queen
Fin mars, yoa effectuait son grand retour avec Matcha Queen, un morceau qui amorçait des nouvelles aventures après la belle réussite de chansons (+) tristes.
Déclaration d’amour à la boisson verte, le morceau continuer de tracer le chemin de l’intime pour yoa. Une écriture évidente et élégante qui traite d’une génération un peu perdue mais qui n’a plus peur de se l’avouer. Le tout était mis en beauté par une production efficace qui redonnait ses lettres de noblesses à une pop music en français qui nous touche en plein coeur.
Un mois a passé, les écoutes se sont accumulées et yoa est de retour, accompagnant son morceau d’une vidéo réalisée par Jade de Brito.
Superbement réalisée, la vidéo commence de manière classique pour dévier lentement vers une sorte de surréalisme étrange et bienvenue.
Théâtral, superbement chorégraphié et laissant à yoa le soin de développer toute la palette d’émotions qu’on lui connait, le clip de Matcha Queen permet d’instaurer une sorte d’iconographie autour de la musicienne jusqu’à la faire plonger dans une tasse géante de matcha.
Un retour marquant, qui appelle forcément d’autre morceau avant de pouvoir retrouver yoa là où se musique prend tout son sens : sur scène.
Tuerie ft Kronomuzik (Legendes Industries) – Mauvais Garçons
Après le succès de la mixtape ZZCCMXTP, qui a réuni une pléiade d’artistes, de créateurs et de musiciens, le trio formé de Ronare, Pandrezz et Kronomuzic entrevoit un avenir des plus prometteurs. Mais leur euphorie fut brutalement interrompue par l’arrivée dévastatrice d’une inondation qui anéantit leur emblématique studio. Déterminés à surmonter cette épreuve, ils décidèrent de repartir de zéro et de donner naissance à leur tout nouveau projet : Legendes Industries.
Plus qu’un studio, les trois amis planifient une variété de contenus pour leurs différents réseaux, incluant un live Twitch chaque semaine, des lives session et le lancement de leur projet principal, BANGR. Celui-ci implique l’invitation d’artistes très chauds, pour enregistrer une session studio d’un morceau inédit, et d’ensuite publier le clip sur leur chaîne. Après les prestations de Nayra et Houssbad, c’est désormais au tour de Tuerie de prendre la scène dans BANGR.
Il est fortement recommandé de regarder la vidéo pour mieux saisir la genèse de Mauvais Garçons et appréhender l’atmosphère qui imprégnait l’enregistrement. Quant au clip, il propose une fusion idéale entre l’esthétique de Tuerie et l’approche décontractée de Legendes Industries. Que ce soit dans une salle de billard, un bar, ou même ce qui semble être à la tête d’une sorte de supérette, le rappeur de Boulogne démontre une fois de plus sa capacité à jongler entre le chant et le rap avec une immense maîtrise. Il est accompagné de Krono pour un couplet de grande qualité, illustrant une évolution impressionnante dans son flow et son style de rap.
Marquez votre calendrier pour rejoindre la chaîne Twitch de nos trois comparses ce 24 avril et découvrir la session live de Mauvais Garçons en compagnie de Tuerie. Avec ce nouveau concept et projet, les visionnaires de Legendes Industrie ont réussi à se réinventer tout en offrant ce qu’ils font de mieux : un contenu sans prise de tête, drôle et hyper quali.
Gabriel Auguste (ft. Alain Chamfort) – Le Mythe
Il y a déjà un mois, La Face B vous partageait un extrait de l’album La grande gomme de Gabriel Auguste. Pour son dernier clip, le chanteur ne s’accompagne plus de Dominique A, mais d’Alain Chamfort, une autre grande figure de la chanson. Alors ce n’est pas un hasard si dans ce conte contemporain, il y incarne le mythe. Cette chanson lui est dédiée en s’appelant Le Mythe.
A l’instar de Benjamin Biolay avec son emblématique titre Ton héritage, Gabriel Auguste évoque ce qu’on lègue à ses enfants. Alain Chamfort devenant l’allégorie de l’ancien monde qui s’efface doucement. Un parti-pris d’autant plus touchant que La grande gomme a été réalisé pour le fils de Gabriel Auguste. Pour donner vie à ce titre, l’artiste réalise son propre clip avec l’aide du réalisateur Martin Lazlo. Une ambiance mystérieuse en clair-obscur.
Joe la panic – Jour de pluie
Votre fenêtre s’offre à votre vue. En posant un pied devant l’autre, vous avez enclenché ce mécanisme organique qui vous permet de scruter avec clarté et netteté la possibilité, offerte par le ciel, de vous évader à l’extérieur. Cependant, Joe la panic, vous rappelle qu’aujourd’hui, le temps sera humide et gris, voyant sans doute dans cette journée la chance, malgré votre confinement, de vous ouvrir.
Cette balade mélodieuse et sincère offerte par Jour de pluie démontre la palette éclectique de sonorités que peut nous offrir la musicienne. Se replonger dans ses déboires sentimentaux durant un temps comme celui présenté aujourd’hui est évidemment plus que bénéfique. Quoi de mieux qu’un temps qui offre la possibilité d’être imprégné de tout ce qui peut nous faire stagner et cogiter, alors que ce même temps peut aussi nous servir à nous laver de tout ce que nous devons évacuer ? Installée confortablement à l’extérieur, dans sa baignoire, sous cette pluie battante dispensant de manière abondante l’eau procurant un bain gris, mais tout de même avec des touches colorées çà et là. Joe la panic, nous rappelle, que malgré les joies futures que procurent les jours ensoleillés, rien ne doit dicter que les jours teintés de platitude et d’odeur abondante d’herbe mouillée ne soient un jour non propice à la paix intérieure. Profitons, de manière ouverte ou moins, de ces jours que la vie nous offre, qui sont tout aussi poétiques et emplis d’émotions.