Les clips de la Semaine #219 — Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois, ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionnes les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Clôturez votre semaine en beauté avec notre deuxième partie de la 219e sélection des clips à ne pas louper !

BAASTA! – Iceberg

Et BAASTA! dévouvrit la couleur ! Après quatre ans de noir et blanc, le groupe arrageois a enfin régler sa télé cathodique pour rajouter de la couleur dans ses vidéos.

Après le superbe Madcalais, le duo est de retour cette semaine avec CRASH, EP et première partie d’un diptyque qui se verra complété plus tard dans l’année. Et autant dire que cet ICEBERG qui ouvre cette nouvelle aventure perpétue la musique de BAASTA! tout en la disruptant légèrement : ici, on économise les mots histoire de ne pas faire fondre complètement la colère et la laisser exploser encore un peu plus.

Musicalement, on est sur un versant bien plus brut, presque sauvage et dissonant par moment, porté par une boucle de basse et de boite à rythme sur laquelle vient s’agréger des élements sonores qui nous fracassent la tête et nous secouent comme il faut.

Pour accompagner le tout, BAASTA! transforme un glaçon et deux personnages Lego en une sorte de dancefloor métaphorique, sourires figés et monde qui brille alors que tout fond et part en couilles autour. Mais comme pour le Titanic après le crash, tant qu’on est pas mort, autant continuer à jouer de la musique.

Nerlov – C’est raté

Cette semaine, Nerlov a enfin dévoilé Pas si grave, son tout premier album et lorsqu’on pense à l’angevin, on ne peut s’empêcher de voir une sorte « d’artiste Face B », parce qu’il a proposé ses premiers titres à peu près en même temps que la naissance du site et qu’on le suit en continue depuis.

Et une chose est sure, lorsque l’on pense à la musique de Nerlov, on ne se dit jamais que « c’est raté ». On voit surtout un garçon qui a grandi et qui propose un premier album intense, une sorte de joli soulier de verre qui lui va parfaitement.

Sauf que celui-ci ne disparaitra pas après minuit. La preuve avec ce titre, qui tire la pop vers le punk, qui jouit d’une belle tension sur laquelle Nerlov pose son cynisme un peu doux qui se fissure à mesure du temps, la carapace un peu branlante laissant percer beaucoup d’amour, de doutes et de douceur.

Un titre parfait pour présenter l’arrivée d’un album qui s’accompagne d’un clip, réalisé par ses comparses, Morgan Richard et Flavien Caouren , dans lequel Nerlov occupe le cadre en permanence, donnant aux images un ton tout à la fois burlesque et tendre dans lequel il nous entraine dans une aventure, celle de la réalisation d’un clip, entre pause kebab, câlin à son chat et promenade en trottinette.

On vous reparlera prochainement de Pas Si Grave, mais surtout on vous invite à prendre vos places pour la Boule Noire de Nerlov le 13 juin prochain, car c’est sur scène que tout se joue pour lui et c’est là que sa musique prend toute son importance.

Chahu – Les Chveux

On reste à Angers pour retrouver CHAHU, de retour cette semaine avec les chveux, troisième extrait de son premier album attendu pour l’automne 2024.

Ce qu’il y a de prodigieux avec Chahu, c’est cette capacité à nous surprendre en permanence, à nous proposer un univers en permanente évolution. Avec les chveux, le comparse de Stav et Nerlov nous invite dans une sorte de dancefloor mentale, une fête qui se révèle un brin amer et pourtant totalement imparable à mesure que le morceau évolue.

Si on pense d’abord être face à une chanson d’amour, le morceau, à mesure que sa boucle électronique grandit et que des éléments s’y incorporent, dévient complètement et laisse paraitre son vrai message : celui d’un garçon toxique qui réalise tout le problème à être ce qu’il est, à confondre la violence avec la passion et à trouver des excuses à son comportement problématique.

Loin d’être évident, les chveux de Chahu est une grande réussite car sa simplicité de façade et sa poésie de tous les instants rendent le propos bien plus percutant et direct, donnant au tout une forme d’évidence à la fois musicale et thématique.

À l’image du texte, la vidéo de Josic Jégu nous offre un rendu très onirique et mentale du morceau. En une sorte de sauveteur de piscine dans un monde aussi noir qu’un esprit peut l’être, Chahu évolue seul dans ce monde où il tourne en boucle, dérive lentement en se transformant en une sorte de crooner pathétique qui finit, par instant, par dévoiler tout le ridicule de ce qu’il peut être.

Veut-on être sauvé par son personnage ? On ne le pense pas, mais une chose est sûre, la musique de Chahu est entrain de devenir une grande bouée de sauvetage pour la pop francophone. On vous aura prévenu.

Nada Surf – In Front Of Me now

Qui aurait pu parier à l’époque de « Popular » que Nada Surf serait encore là aujourd’hui ? 30 ans plus tard, le groupe surprend en annonçant en toute simplicité la sortie de son 10ème album (excusez du peu) intitulé « Moon Mirror » et prévu pour le 13 septembre prochain.

L’annonce de l’album est accompagnée d’un premier titre et d’un premier clip. « In Front Of Me Now » traite de l’incapacité de Matthew Caws, chanteur et compositeur du groupe, à faire plusieurs choses à la fois et de sa volonté de se concentrer sur ce qui se présente à lui à partir de maintenant. C’est un pur morceau de Nada Surf, de ceux qui ne paient pas de mine et à côté desquels on pourrait facilement passer lors d’une écoute distraite. Nada Surf a bâti sa carrière sur des titres pop parfaitement écrits et emplis de chœurs et refrains imparables. Ici on se retrouve rapidement à chantonner « Todaaaay-aay-aay » et à sourire à l’écoute des paroles (« In the middle of summer, I was decembering »).

Le clip reste sur cette idée de simplicité et d’humour. Les quatre membres du groupe vivent à différents endroits du monde (Matthew Caws en Angleterre, Daniel Lorca en Espagne, Ira Elliot en Floride et Louie Lino au Texas) et nous proposent un clip avec un écran divisé en 4, chacun jouant chez soi, ce qui n’est pas sans rappeler les vidéos de l’époque du covid. Le clip est truffé de blagues potaches des uns et des autres. On y voit notamment Caws essayer de s’allumer une cigarette avec un pistolet à eau, Lorca s’adonner paresseusement à la basse acoustique ou Elliot jouer de la batterie en talons aiguilles. La preuve s’il en fallait une qu’à presque 60 ans (Ira Elliot a même 61 ans), les Nada Surf sont toujours des gamins qui ont envie de faire de la musique ?

Cassandra Jenkins – Delphinium Blue 

Réveil en douceur, on se laisse porter par le dernier titre de Cassandra Jenkins, intitulé Delphinium Blue. Cette artiste originaire de New York nous dévoilera très bientôt son nouvel album My Light, My Destroyer, le 12 juillet pour être tout à fait précis. Jouer avec ces deux termes, la lumière et la destruction, sans les opposer. Delphinium Blue est une des pièces qui compose ce projet. 

Le clip s’appuie sur deux images, une fleur vue de très près et le visage lumineux de Cassandra. Les plans se superposent pour ne former qu’un seul et même tableau. Celui-ci est mouvant, un mouvement lent et hypnotisant, presque magique et abstrait. Il y a quelque chose de très apaisant dans la proposition. 

« I see your eyes in the delphinium too ». Cassandra Jenkins nous regarde droit dans les yeux, on s’évade avec son personnage et sa voix aiguë. Elle incarne cette attente, le rêve d’un être aimé, faisant écho à la beauté de la nature. C’est une ode, le reflet de nos songes dans la nuit. On vous laisse émerger en douceur, et calquer les battements de vos cœurs sur le rythme du Delphinium Blue

Buvette – La Madrugada

De la noirceur la plus profonde de la nuit vers la clarté des premières lumières de l’aube. La Madrugada est le terme en espagnol qui désigne ce qu’on appelle en français l’heure bleue. Celle des premières lueurs durant laquelle un calme apparent règne. C’est le moment où les animaux de la nuit se taisent et où ceux du jour n’ont pas encore commencé de chanter. C’est pour nous le temps où les émotions s’apaisent, où les sentiments de la veille vont laisser place à ceux que l’on n’a pas encore éprouvés.

Erwan Fichou & Marie Taillefer ont mis en images ces sensations en filmant les déambulations de Buvette au moment où la nature mexicaine, à la fois aride et exubérante, s’éveillait à une nouvelle journée.

Chantée en espagnol, La Madrugada est une ballade rêveuse empreinte d’une douce mélancolie. Elle clôt avec ses notes d’espoir du dernier album de Buvette, Tales of the Countryside, publié fin mars sur le label Pan European Recording.

I Me Mine – Alien

À la fin du dernier album du trio I Me Mine, il y a un morceau, qui s’appelle Alien. C’est un très joli morceau, axé autour du piano, comme la couverture du disque. On y est emporté par la voix du chanteur qui prend le lien entre un alien et un astronaute comme métaphore relationnelle. Un très chouette moment, rempli de nostalgie et de simplicité comme un vendredi d’Octobre, où pas grand-chose ne semble déterminé à sortir de l’ordinaire, et pourtant… Côté images, on découvre le visage de la voix de ce morceau, en train de jouer sur son piano. Là aussi, beaucoup de simplicité et la pénombre pour magnifier les éclairages qui invitent à se poser tranquillement pour déguster le moment avant de doucement fermer les yeux.

Gwizdek – Bunker

Du nouveau pour Gwizdek cette semaine : après IA, le groupe collabore à nouveau avec l’artiste 3D Alexandre Albisser pour le sublime clip de leur contemplatif Bunker.

Sur une mélodie douce-amère, les grenoblois posent un regard tendre sur les souvenirs marquants et rassurants qui nous construisent : à la fois nostalgique et bien ancré dans le présent, Bunker nous offre de quoi nous laisser doucement bercer jusqu’à son envolée finale.

DYE CRAP (vs Servo) – CHEERS NEIGHBOR GLITCH 2.1

Cette semaine, on vous invite à une grande expérience : la réunion de DYE CRAP et de Servo pour un combat de singles, autour d’une même idée de vidéo. D’un côté CHEERS NEIGHBOR, de l’autre GLITCH 2.1.

Deux morceaux qui représentent à la perfection les styles des deux projets rouennais entre un punk rock bien vénère et joyeusement foutraque et une musique bien plus virulente, sauvage, les deux partageant une forme d’intensité folle sur des registres pourtant très différents.

Qu’est ce qui pouvait réunir ces deux morceaux ? Et bien la caméra de Baptiste Magontier. Le réalisateur nous invite dans une grande bataille digne des plus grands combats de Street Fighter et propose deux clips bien différents, le tout sur la même idée.

Imaginez un croisement entre Bruno Dumont, Rocky et le Sacré Graal des Monthy Python et vous êtes encore loin de ce grand délire qui nous est proposé ici.

Fou et hyper cinématographique, ce diptyque visuel propose deux points de vues d’une même histoire tout en collant aux énergies propres des deux groupes rouennais.

L’apparition en forme de clin d’œil des We Hate You Please Die à la fin du morceau annonce t’elle une suite à ces aventures ? Rendez vous au prochain épisode !