La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici la première partie de notre 220ème sélection.
Allô Fantôme – Chance
Il y a deux ans de ça, on découvrait un peu par hasard la musique d’Allô Fantôme sur scène lors des Francofolies de Montréal. On avait été surpris et happé par la grandiloquence et la folie douce qui émanait de la musique de Samuel Gendron.
Relativement discret depuis, deux singles en 2022 et 2023, Allô Fantôme se lance dans le grand bain du premier long format, sous l’étendard de nos copains de Bonbonbon. Attendu pour l’automne prochain, un premier extrait est sorti cette semaine, intitulé Chance.
Réalisé par Alexandre Martel, le morceau capture tout ce qu’on aime dans la musique d’Allô Fantôme : un petit côté comédie musicale, une grandiloquence joyeuse et entrainante portée par une composition musicale foisonnante mais parfaitement lisible dans laquelle il fait vivre un nombre imposant d’instruments pour exprimer au mieux ses émotions.
Ici, Samuel Gendron s’interroge sur la chance, son absence et sa présence, le besoin permanent qu’il a de vouloir tout faire pour remporter la partie, au risque d’être aussi mauvais perdant que gagnant.
Réalisé par Marc-André Dupaul, la vidéo qui accompagne Chance nous entraine, dans un noir et blanc sublime, dans les pas de Samuel. On suit ainsi le musicien dans une aventure étrange, où il tente envers et contre tout à plier un dé réfractaire à sa bonne étoile, plongeant ainsi dans une transe au bord de la folie alors qu’il n’arrive pas à récupérer la chance que les autres dés semblent bien vouloir lui accorder.
Onirique et cinématographique, on se laisse emporter par la beauté commune de la vidéo et de la chanson. Et autant le dire, on a énormément de Chance d’avoir la musique d’Allô Fantôme.
RDV – DOWNCAST
Retour, reboot. Après 6 ans d’attente, on peut dire que le retour de Rendez Vous était attendu et il risque d’en surprendre plus d’un.
Bien décidé à ne pas laisser les autres imposer une vision sur sa musique, le quartet revient cette semaine avec Downcast, un album qui réinvente tout l’imaginaire du projet.
La preuve avec Downcast qui donne son nom à l’album. Le morceau garde l’intensité et le soin de production chers au groupe mais le transpose ailleurs, dans une musique bien plus proche du rock américain du milieu-fin des 90’s. Le résultat est assez brillant, offrant un mur de son sauvage où les guitares remplacent les synthétiseurs et où la voix de Francis trouve des nouvelles zones d’explorations et d’émotions.
Pour l’accompagner, Lola Margrain réalise une vidéo qui amalgame aussi ces références mais du côté visuel. On se retrouve ainsi dans un univers assez crasseux, esthétiquement puissant qui doit tout autant à blair witch, à MTV et au cinéma d’horreur japonais. Le tout nous offre un grand moment de trouble et d’intérêt au rendu absolument parfait.
Un nouveau chapitre s’ouvre pour Rendez Vous et on a forcément hâte de les retrouver sur scène, notamment leur de leur passage à l’Elysée Montmartre à la rentrée.
Godzi – Je perds la foi
Lui aussi présent dans nos oreilles depuis 2018 et le choc de son Padre Pio, Godzi dépose depuis le début de l’année 2024 des petits cailloux musicaux qui tracent le chemin de son tant attendu premier album attendu pour l’automne 2024.
Cette semaine, le musicien nous dévoile Je perds la foi. Pas besoin de grand analyse tant le titre du morceau nous révèle parfaitement sa teneur. Comme toujours avec Godzi , on plonge tête la première dans ses pensées et ses doutes, dans une vision de l’humanité sombre mais à laquelle on adhère malgré tout.
Le grand intérêt de Je perds la fois, c’est aussi la manière dont l’artiste se réinvente, laissant de côté une forme de brutalité (qui pourtant lui va parfaitement) pour tremper sa plume dans une musique bien plus mélancolique et pop. Une manière aussi de pervertir le tout, nous attirant avec un style proche de l’hyperpop pour mieux nous contaminer de sa noirceur et de sa vision d’une humanité qui n’a plus rien qui mérite d’être sauvé.
Visuellement Elliot Eugénie nous offre une lyric video aux allures de conte post-apocalyptique. Dans un univers qui semble en pleine désolation, on retrouve Godzi qui se fait une beauté face à un miroir autour de détritus. Beauté esthétique, cynisme et sous entendu de fin du monde, tout Godzi résumé en moins de 4 minutes.
Bad Juice – Amour noir
Tiré de l’album du même nom, Amour noir s’offre un clip en noir et blanc en hommage non dissimulé à La Jetée de Chris Marker. Amour noir est le troisième et dernier volet de la trilogie qui s’ouvrait avec le single Mad love, une histoire d’amour en bord de mer. Le duo de frangins strasbourgeois joue avec un diaporama d’images reconstituant peu à peu une espèce de récit, un photo-film réalisé par Tristan Thil qui reprend la forme et le principe narratif du court-métrage sus-cité.
Au-delà de la question graphique, Amour noir est un titre en nuances de gris, une ambiance bien garage qui invite à taper du pied malgré tout et secouer la tête.
Rank-O – Springs
En avril dernier, on vous avait parlé de Monument Movement, dernière sortie en date des Rank-O. Cette semaine, les tourangeaux nous font l’honneur de donner un clip haut en couleur jaune pour fêter le printemps – on vous jure qu’il finira bien par arriver mais genre vraiment ! – et leur titre fort à propos : Springs.
Springs respecte graphiquement cet espèce de tonalité décalée et rétro qu’on a aimé dans l’album. Le quintet prend la route champêtre pour mieux rappeler que la nature pourra continuer à vivre, prendre place, sans nous, les humains qui restons plantés là.
Mustang – L’argent du beurre
Mustang nous dévoile, pas à pas, leur nouvel album MEGAPHENIX, après le puissant Aérosol, voici L’argent du beurre. Dans un tout autre style que le titre précédent, on retrouve l’esprit balade électrique mettant en avant la si particulière écriture du groupe. On connaît l’espièglerie et le jeu sarcastique que déploie le trio de disque en disque. On se rappelle bien sûr de Loyal et Honnête, Salauds de Pauvres ou le culte Sens des Affaires, voici un titre dans cette parfaite lignée.
L’ironie sociale ici se décline comme une force supérieure dogmatique. Après tout, puisque rien n’a de sens, il n’y a rien à justifier. Cela nous rappelle que Mustang n’a probablement pas le succès qu’il mérite lorsqu’on entend toute l’originalité et la créativité dont ils sont capables. Nous, nous sommes persuadés que ce futur album qui sortira le 11 octobre prochain comme tous les précédents vaudra le beurre et l’argent de celui-ci.
Personal Trainer – Round
Nos hollandais favoris reviennent avec un clip totalement délirant et à leur image. Dans le clip de Round, dernier titre enregistré pour leur prochain album, on suit l’aventure trépidante d’une orange. Douche, clope et empilement de pintes, cette orange mène une vie sympathique. En vrai, elle remplace le rôle de Willem, le leader et chanteur du groupe. Avouons-le, l’idée est amusante. Round est une nouvelle belle surprise du collectif rock Les harmonies sont joyeuses et entraînantes, piochantst dans l’univers de Pavement. Rendez-vous le 2 août pour découvrir leur deuxième album Still Willing !
Tramhaus – Once again
Plus trop besoin de vous présenter les néerlandais de Tramhaus. Bon, si, mais dans une version très courte. Quintet rock indé néerlandais d’amis formé dans les années Covid, ils ont à ce jour signé un premier EP sobrement intitulé Rotterdam d’où ils sont originaires.
En attendant leur premier album The First Exit – titre de circonstance – d’ores et déjà pré commandable – la sortie est prévue pour septembre, la fine équipe nous invite à découvrir Once again. Un single au clip ramassis de l’absurdité du numérique réalisé par Peter Marcus. Pot-pourri d’images aussi curieuses qu’inutiles, animaux et humains se côtoient dans le meilleur des mondes, n’est-ce pas la promesse d’internet ? Trouver tout et n’importe quoi à une vitesse défiant toute concurrence.
Sur le plan musical, Tramhaus s’inscrit, pour ce single du moins, dans une dynamique grunge et on imagine déjà ce que ça risque d’envoyer scéniquement.
Jwles – ahhhh
Le duo entre le rappeur Jwles et le producteur Blasé pourrait se voir comparer à une multitude de duo iconique du sport ou de la pop culture tant la combinaison et l’alchimie entre les deux hommes est à chaque fois au rendez-vous. La sortie spontané d’ahhhh n’échappe pas à la règle.
Accompagnée d’un clip réalisé par Shadrinsky l’artiste fait une nouvelle fois la jonction entre un rap aussi exigeant que décalé. C’est ce deuxième qualitatif qui anime le clip qui le met en scène dans une sorte de parodie de film d’horeur à la SAW. Effectivement, Jwles et une bande de filles se retrouvent coincés, lampe torche à la main dans une pièce délabrée où même la lumière ne daigne pas pointer le bout de son nez. La joyeuse bande aussi peureuse soit-elle essaye tant bien que mal de se sortir de cet endroit mystique.
Heureusement pour elle, son adversaire ne semble pas plus malin qu’eux et il n’arrivera pas grand chose de plus à Jwles et ses copines.
Don Toliver – Attitude (ft. Charlie Wilson & Cash Cobain)
De l’esthétique à la musique, le teasing autour du nouvel opus de Don Toliver laisse entrevoir une direction artistique bien affirmée et rodée. Attitude et le clip qui l’accompagne se confondent à merveille dans l’esthétique rock post-apocalyptique très visuel que les deux précédent visuels avaient laissé entrevoir.
Il enfile une nouvelle fois son cuir et sa moto pour roder plein gaz dans une ville aux élans futuristes qui semble tomber en ruine, faute à la folie qui habite ses habitants. Un sentiment oppressant et angoissant qui est accentué par le traitement de l’image qui lui donne un aspect granuleux et saturé mais également de plans (souvent assez serrés sur les visages ou jouant avec la contre-plongée).
Au sein de cette folie, les trois rappeurs se démarquent par cette entraînante production reprenant Beautiful de Snoop Dog et Pharell avec une rythmique jersey mais également par leurs voix atypiques qui se complètent parfaitement.
Golden Bug & The Limiñanas – Hi No Tori (ft. Vega Voga)
Avec en ligne de mire un nouvel album Piscolabis II (son précédent album Piscolabis a été publié en 2022), Golden Bug nous en dévoile avec Hi No Tori, un nouvel extrait. Le producteur français s’est une fois encore associé aux incontournables Limiñanas et leurs guitares hypnotiques ainsi qu’à Vega Voga (Narumi Omori) à la voix envoutante. Vous avez sans doute déjà croisé Narumi Omori aka Vega Voga derrière les claviers de Jeanne Added ou au sein de Tristesse Contemporaine, son projet commun avec Leo Hellden et Michael Giffts.
Hi No Tori est un voyage musical, ascendant et libérateur, que l’on effectue entre krautrock et transe psychédélique en suivant les chemins presque mystiques ouverts par le chant en japonais de Vega Voga.
Les images animées illustrant le titre sont orchestrées – comme pour l’Effet Domino, le premier extrait de Piscolabis II – par le talentueux Pierre Magnol. Elles décrivent, avec leurs tons rougeoyants, un monde dystopique à la Blade Runner dont Hi No Tori (en japonais, l’Oiseau de feu ou le Phénix) cherche à nous extraire. Aussi prégnantes et qu’énigmatiques, les phrases musicales restent, telles des persistances sonores, longtemps gravées dans notre mémoire auditive. « Ecoutez la voix de votre âme intérieure pour vous connecter à la source de l’univers »
Smerz, GAEA – Det som kom
Avis aux amateurs de romans policiers nordiques. Tidligere den dagen (plus tôt en ce jour) est un projet – conjoint entre le duo de musique électronique avant-gardiste Smerz et GAEA un ensemble polyphonique norvégien – créé dans le cadre du festival de musique contemporaine Ultima et présenté à l’automne dernier au musée Munch d’Oslo.
Tidligere den dagen a été conçu comme la partition musicale d’un roman aussi noir et énigmatique que peut l’être un polar scandinave. Det som kom (qu’est-il arrivé ?) est l’une des 24 pistes qui composent cette bande son qui sera publiée le 6 juin prochain.
Dans Det som kom, les nappes électroniques de Smerz transpercent la torpeur des nuits nordiques comme les faisceaux d’une lampe torche. Des rayons fugaces amenant, par leur présence, la clarté ou au contraire, par leur absence, les ténèbres. Les huit voix de l’ensemble GAEA, seules ou à plusieurs, interrogent, soupçonnent, se questionnent. Une boîte à musique s’ouvre, laissant apparaître les contours encore indéfinis d’un crime. Une aura mystérieuse et créative naît de l’alliance de l’électro avant-gardiste et de la musique contemporaine. Deux courants qui en s’associant unissent, dans des scènes en clair-obscur, réalité et illusion.
VILLEVIEILLE – DANSE
Relativement discret du côté de la pop depuis maintenant un an, VILLEVIEILLE vient se rappeler à notre bon souvenir cette semaine avec un titre sobrement intitulé DANSE.
Dans un chanté-parlé absolument parfait, le garçon nous invite à un programme tout simple : le grand relâchement par l’expression physique. On se retrouve ainsi transporté dans la tête du musicien, on vit ainsi de manière intime sa soirée, ses questionnements et ses pensées.
Autour du texte se construit la musique, elle colle aux réflexions, kick aux moments opportuns, s’intensifie alors que le corps s’enflamme et s’offre même une échappée lyrique et pleine de cordes lorsque les mots se taisent. Un jeun de ping-pong entre le verbe et le son absolument génial qui prouve une nouvelle fois tout le talent d’esthète de VILLEVIEILLE et sa volonté de créer des morceaux à la fois pop et expérimentaux qui nous emballent clairement.
Pour accompagner son morceau, il passe aussi derrière la caméra et s’offre la présence de la danse Marion Barbeau devant la caméra pour donner une présence et une aura à sa musique.
Un travelling arrière dans une nuit noire qui laisse la place aux mouvements des corps, aux expressions des visages et à ce moment de libération qu’on a déjà tous vécu, quand la musique qui nous fait vibrer fait tout taire autour de nous et ne laisse vivre que les BPMs qui s’infiltrent en nous pour … nous faire danser.
Une nouvelle mission accomplie avec brio par VILLEVIEILLE. On attend la suite avec impatience.
nous étions une armée – la vie éternelle
Le duo nous étions une armée est de retour avec un nouveau single, la vie éternelle. Déjà entendu en live, c’est un morceau où la montée se fait progressive, où les mots, en français semblent avoir été écrits pour soi. Réalisée par les deux musiciens, Léo Nivot et Rémi Le Taillandier, la vidéo révèle le jeune homme aux lunettes rondes se saisir de la vie.
Courir à travers les champs de colza, s’asseoir au coin du feu, retrouver son âme d’enfant et sentir la pluie sur ses épaules. Les guitares s’emballent, le silence se fait et ainsi va la vie.
Ils seront en concert le 19 novembre prochain au Point Ephémère (Paris) pour la sortie de leur EP et c’est évidemment à ne pas rater.