La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la fin de notre 223ème sélection.

APOLLO DRAMA — Machina
Apollo Drama joue avec les codes et s’en arrange façon drama. Queer jusqu’au bout des poils de sa barbe, il anime la scène d’un lyrisme flamboyant. Dans Machina, son texte claque et rebondit sur une structure musicale électro implacable. Il vit sa façon d’être et de s’assumer de manière théâtrale, laissant la créature blottie au fond de lui, au fond de nous, prendre son essor. Sa démarche semble s’inscrire dans un mouvement inexorable, atténuée par une douceur et une fragilité que l’on ressent dans son regard. Douceur et fragilité à préserver, car ce sont eux qui permettent à ses émotions de s’exprimer.
Aurélien Boute a mis en images Machina dans un huis clos oppressant duquel Apollo Drama cherche à s’échapper, attiré par une lumière transcendante, tel un bombyx ou un sphinx.
Machina est le nouvel extrait de son futur EP, Mon Olympe, à paraître à la rentrée. D’ici là, Apollo Drama sera sur la scène de La Maroquinerie vendredi prochain (21 juin) pour la finale du Grand Zebrock 2024.
Molchat Doma – Son
Les biélorusses Molchat Doma sont de retour ! Belaya Polosa débarquera chez Sacred Bones Records en septembre prochain. Pour patienter, Molchat Doma nous fait parvenir Son avec un clip très cinématographique. Musicalement, on s’éloigne légèrement de ce qui pouvait être la pure cold wave balte pour une filiation proche de l’indie des américains d’Interpol et de leurs grands frères russes Kino.
Dans un paysage écossais mystérieux en noir et blanc, nous voilà embarqués dans une espèce d’ambiance mystique avec ces personnages en négatif qui laissent imaginer des interventions spectrales. Et cette connexion électrique incroyable. Le morceau engage de belles promesses de ce que l’album peut nous réserver. Une tournée accompagne l’album et quelques passages sur nos terres françaises sont d’ores et déjà annoncés : le 29 octobre à l’Aéronef (Lille), le 31 octobre au Transbordeur (Villeurbanne) et le 2 novembre à l’Olympia (Paris) !
Gringe – Du Plomb / Effet de Surplomb
En voilà un retour qu’on n’osait plus espérer. Acteur, auteur, on pensait que Gringe avait laissé la musique de côté … C’était mal le connaître. Sans prévenir, le bonhomme vient de frapper un grand coup avec un double single, Du Plomb / Effet de Surplomb, qui annonce l’arrivée de son second album et une énorme tournée à travers la France en même temps.
Une partie rappée, une partie chantée, une production brute et une plus lyrique avec l’ajout de cordes et d’éléments symphonique, ce double single est Gringe tout en entier, un yin et yang fabuleux et sincère dans lequel le garçon ausculte comme jamais notre époque. Une violence qui nous assaille de partout, un quotidien sans espoir, un manque d’espace de plus en plus oppressant, Gringe fait parler sa plume comme jamais et s’offre un retour intense.
Pour l’accompagner, il fait confiance à Frédéric de Pontcharra pour clipper les morceaux. Le réalisateur nous offre une épopée hyper cinématographique, alternant avec brio images du réel, symboles visuels et plans iconiques pour mettre en avant ces deux morceaux à la fois si-différents et pourtant si complémentaires.
La suite arrive vite, on a déjà hâte.
Calypso Valois – Douce Bouche
Calypso Valois n’a pas fini de nous faire danser sur sa pop 80s. Ca scintille de tous les côtés, les synthés rebondissent, ambiance kaléidoscopique, tous les bons ingrédients sont réunis dans le clip réalisé par Tessa Louise-Salomé.
La pop de Calypso Valois ondule sur les dancefloors disco, elle est donc naturellement dansante, tout en étant profondément mélancolique. Un héritage familial musical qu’elle ne peut renier. On adore les couleurs presque lynchéennes du clip et on se laisse volontiers déstabiliser par ses f(i)louteries qui offre un cachet d’époque à cet objet clipesque.
Michelle & Les Garçons – Sion-sur-l’océan
Un an après un premier EP éponyme qui leur a permis de faire découvrir leur musique partout en France, Michelle & Les Garçons s’apprêtent à conquérir d’autres territoires puisque le trio angevin s’envole la semaine prochaine pour une série de date au Québec.
Un nouveau single était donc nécessaire pour fêtait cette nouvelle et quelques mois après Revoir le monde , le groupe continue de placer les pièces de son nouveau chapitre avec Sion-sur-l’océan.
En convoquant des souvenirs d’adolescence, en retournant vers un territoire de tous les possibles, des premiers amours qui marquent et qui se gravent dans les mémoires, Michelle & Les Garçons s’offre une ritournelle nostalgique superbement produite qui classe le groupe dans le haut du panier de la pop française actuelle. En condensant son énergie et en s’offrant une production plus ample et plus ouverte, Sion sur l’océan a tout du petit tube qui nous accompagnera tout l’été.
Réalisé par le camarade STAV, le visuel qui accompagne le morceau joue sur ce rapport important au rêve et au souvenir du morceau et nous entraîne sur le sable d’une plage hors du temps à la rencontre de ce qui semble être une sirène. Les teintes de rouge et de bleu semblent toujours aussi importante et nécessaire dans le rapport visuel du groupe et nous offre un visuel à l’image du morceau ; iconique et attachant.
Lydsten – BIAS
Attention, choc. Il est parfois nécessaire d’offrir du temps à une œuvre artistique, de la laisser nous happer et nous frapper par son sublime et sa nécessité. On ne peut que vous conseiller de prendre 10 minutes de votre vie et de les accorder à BIAS. Pas vraiment un clip, cette vidéo à l’ambition folle est plutôt un court-métrage dont la musique de Lydsten serait la bande originale.
De manière assez parfaite, elle est aussi le reflet visuel d’une musique sans parole, délivrant par ce biais les clés de compréhension du nouvel EP de Lydsten. Sa musique a toujours été chargée en émotions, en pulsions à la fois vers la vie et vers la mort, sur le fil de ce que l’existence peut parfois, bien contre nous, nous pousser vers l’autodestruction.
Une symbiose entre le son et l’image qui doit beaucoup au travail de Simon Lemarchand. Bien ancrée dans les terres du nord, le film nous entraîne dans le sillon d’un personnage principal en proie à la dépression. Alors que la légèreté des autres vibre autour de lui, on le voit sombrer, s’aliéner de plus en plus dans un quotidien qui ne semble plus rien lui apporter, devenant étranger au monde qui l’entoure.
Utilisant parfaitement des images d’archives comme des flashs des pensées qui peuvent assaillir le héros, la vidéo nous entraîne parfaitement dans l’esprit de ce garçon, bien aidé par la musique de Lydsten.
On avance alors lentement, jusqu’à l’acte fatal, jusqu’au trop plein (ou au trop vide) qui n’a plus d’autre raison que de s’exprimer, de laisser parler l’incompréhension. La vidéo a alors l’intelligence de changer le propos, de se rapprocher de la réaction de ceux qui entourent, entre incompréhension, colère et amour. Un dernier tiers puissant et intime comme un appel et un cri vers la vie.
Une vidéo qui marquera tous ceux qui la verront et qui fait beaucoup de bien pour des raisons plus ou moins évidente.
Pour la suite, Lydsten sera la semaine prochaine sur la scène du Point Éphémère, et on ne peut que vous inciter à venir le (re)découvrir avec nous.
Chanje – Merrick
Dès les grosses basses saturées qui ouvrent le morceau, l’ambiance est donnée. Pour son retour, Chanje a décidé de plonger dans un univers singulier particulièrement bien défini et le clip qui accompagne la sortie de Merrick en témoigne à merveille.
La réalisation de Rayan Habhab s’offre un délire cyberpunk qui s’accorde avec l’univers sombre et oppressant du morceau. Accompagné d’une bande de marginaux, le rappeur se joue des ultras basses de la production (signée par Hermann, Monarch et Chanje lui-même) pour poser un flow hargneux et un égotrip tout aussi incisif.
« Je chuchote dans un micro tu crois que jsuis un mec de la new-wave (bitch)
J’étais de la new-wave (bitch) avant qu’il y ait la new-wave (bitch) »
Entre misantropie, grosses basses et visuel léché, c’est un retour pleins de promesses que le rappeur/producteur offre avec ce single.
Caroco – Comme les gens changent
C’est après une désillusion poignante que Caroco choisit de canaliser sa mélancolie dans un premier single émouvant, publié sous le label Pan European. Ce morceau intime fort de son storytelling dévoile le moment où son regard sur une personne de son entourage a irrémédiablement changé.
Le clip, tourné dans les rues de Bruxelles, capture avec justesse le désarroi et la solitude qui ont envahi l’artiste, offrant un visuel saisissant à cette pop nostalgique et intime. Sa force réside indéniablement dans son talent d’écriture et dans le ton insouciant de sa voix, qui nous transporte immédiatement dans son univers.
Témé Tan feat. Pierre Kwenders – Pancake
Je crois bien qu’on a reçu un appel. Témé Tan accompagné de Pierre Kwenders nous offrent de quoi bien nous réveiller, de la bonne humeur à tartiner, avec Pancake. Ce single est un projet qui donne le sourire, porté par les voyages de l’artiste. Il est extrait du dernier album de Témé Tan sorti en novembre 2023, intitulé Quand il est seul.
Le clip de Pancake, en format portrait, nous met face aux deux amis, la guitare à la main, tranquilles au grand air, ou sur le point de déguster ce fameux pancake. Les images et le choix visuel sont assez simples mais fonctionnent bien. Contents de ne pas avoir manqué ce rendez-vous fort sympathique, on apprécie beaucoup le passage de l’anglais au congolais. C’est peut être d’ailleurs ces mots en congolais qui nous resteront en tête. Ouh yeah! On bascule les épaules de gauche à droite. Bref c’est un clip joyeux, pile à l’heure pour l’été, ils s’amusent et ça fait plaisir à voir !