La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, on vous invite à découvrir la première partie de la 253ème sélection des clips de la semaine

Vincent Delerm – La fresque
La vie est-elle plus douce avec Vincent Delerm ? La question se pose depuis plus de 20 ans désormais et la réponse est si évidente qu’on se permettra d’éviter de la figer.
Six ans après Panorama, Vincent Delerm revient et nous offre cette semaine un morceau qui a tout d’une bande annonce, puisqu’il donne aussi son nom au futur opus à venir : La Fresque.
Dans ce morceau, on retrouve tout ce qu’on aime chez l’artiste, cette manière de figer les choses, de raconter la vie avec douceur, de transformer les mots en aventures, les morceaux en grandes épopées discrètes. Celles de la vie, de la mort, des livres, des films, des gens qu’on rencontre, de ceux qui disparaissent, des lieux qui marquent et habitent les souvenirs durablement sans qu’on sache réellement pourquoi.
Musicalement, il y a aussi cette volonté de sublimer, de s’offrir des envolées musicales lorsque le mot s’éteint, de s’autoriser les violons, les cuivres tout en se reposant sur des nappes de pianos délicates et une batterie répétitive qui marque le pas comme le battement du cœur marque l’existence.
Visuellement, l’épure toujours. Dans un noir et blanc tranché, Bertrand Jamot & Zenzel filme Vincent Delerm sur un tabouret dans l’écrin du Studio Ferber. La caméra virevolte, filme le visage autant que le corps immobile, s’éclipse lorsque les lumières s’éteignent ou se répercutent sur les lunettes. Des ombres et des lumières, en demi teinte, en toute discrétion avant que les cordes ne fassent une grande apparition, élargissant le champ des possibles et de l’images.
Un petit bon qui fait du bien. La Fresque est attendue pour le 06 juin, et si le morceau ne vous l’avez pas fait comprendre, il sortira chez Tôt ou Tard.
Charlie Pâle – L’usine
Presque 3 ans qu’on attendait d’avoir des nouvelles de Charlie Pâle. Le musicien est de retour cette semaine avec un morceau remplit d’espoir intitulé L’usine.
L’usine, il l’a bien connu et c’est ce qu’il raconte dans ce titre. Alors qu’il la laisse derrière elle, Charlie se rappelle de la routine tout à la fois confortable que dangereuse, portant les corps dans une léthargie et une tension qui permet de survivre mais qui surtout broie les rêves et les envies d’autres choses.
Jamais moralisateur, Charlie Pâle raconte son réel, le trempe dans une poésie contemporaine pour raconter se besoin d’autre chose, ce grand plongeon vers une vie d’artiste aussi incertaine que porteuse d’espoirs et de liberté. C’est ce qu’on aime chez lui, cette façon de décrire un quotidien pour ce qu’il est, sans pathos mais avec un talent qui fait qu’on se reconnaitra tous dans le morceau.
Pour la vidéo qui accompagne le titre, HoBo & MoJo filme un dernier passage à l’usine et l’échappée qui la suit, dans un univers solaire et lumineux, un appel aux grands espaces et à l’ailleurs.
La suite ? Un EP attendu pour le mois de mai et une première date en solo en juillet au PopUp du Label.
ARTICLE15 – SERVITEUR DU CRÂNE
Quelques mois après Hallelujah, Article15 est de retour et enfonce le clou avec l’exceptionnel Serviteur du Crâne dévoilé cette semaine.
On peut vous le dire : il est physiquement impossible de résister à la déflagration sonore qu’est Serviteur du Crâne. Certains parleraient de banger, nous on a juste envie de dire qu’on s’est pris une énorme tarte.
Parce qu’Article15 c’est un projet, mais c’est surtout la fusion de deux univers furieux et intenses qui se réunissent pour nous secouer comme jamais. Ici, le chant de LovaLova se fait une nouvelle fois grandiose, habité, puissant, presque terrifiant par moment. Mais surtout, il se laisse contaminé, dans sa folie et ses intentions, par la production de Grigri, véritable tour de force sonore qui frappe au corps, qui surprend, qui évolue en permanence tant est si bien qu’on ne sait jamais sur quel pied danser sans pour autant pouvoir s’arrêter de le faire.
Un morceau en deux temps, impressionnant, qui installe une certaine idée de la musique pour totalement la retourner et nous installer dans un univers plus épique et dangereux du quel on ressort fatalement changé.
Ne renonçant jamais à l’ambition, Article15 offre une vidéo inspirée, troublante et parfaitement réalisée dans laquelle nos deux héros semblent dans une position différente, ouvrant toutes les théories quand à l’histoire qui se joue devant nous.
Là ou la vidéo devient intéressante, c’est qu’à l’image du morceau, elle bascule complètement dans sa deuxième partie, devenant en un clin d’œil une sorte de statement sur les enjeux financiers d’un projet en développement et sur une précarité toujours plus grande pour des projets qui ont besoin de grandir sans forcément jouir des moyens nécessaire à l’exposition qu’ils méritent.
Imparable et percutant, ce serviteur du crâne est une carte de visite absolument parfaite à l’univers d’Article15. Surtout, elle vous donnera fatalement envie de les retrouver sur la scène de La Boule Noire le 26 juin prochain.
Altwain – Teach Me How To Ride
Altwain est né de la volonté d’Allan, chanteur guitariste du groupe, qui continue ainsi de mouvoir cette vibrante scène lyonnaise qu’on adore. Entouré d’une équipe de rêve avec des musiciens·nes tels·les que Sabrina (Irnini Mons, Satellite Jockey, Lùlù et on en oublie sûrement), Chloé (Caïman, Claire Days et on en oublie sûrement) ou encore Romain (Ulysse Von Ectasy), et après un EP en 2023, c’est avec Teach Me How To Ride qu’iels nous reviennent.
Dans ce clip, réalisé par Allan et Chloé, on se doit tout d’abord de souligner les sous-titres en ukrainien. Peut-être est-ce le pays d’origine de l’un·e d’entre elles·eux, mais ce qu’on pense surtout ici, c’est qu’ils sont la traduction inconditionnelle d’un soutien à un peuple qu’on opprime et qui ne demande que la paix. Face à la censure qui devient une mode, ce moyen détourné de faire passer le message se veut carrément ingénieux. La culture est politique, oui. Merci Altwain.
Ce morceau, renforcé par l’approche du clip, met en lumière la fuite à travers le mouvement et la solitude. La fuite est souvent accompagnée de doutes et d’incertitudes, c’est ce qui l’engendre/peut l’engendrer finalement. Cela fait partie intégrante des apprentissages de la vie que de passer par ces moments. Cette fuite crée des errances plus ou moins longues et forge nos expériences.
Le clip de Teach Me How To Ride illustre parfaitement ces sensations. Côté musique, on est sur quelque chose de très garage et très acidulé. Pourtant, ce morceau va droit au but, à l’essentiel. Malgré les doutes et les incertitudes, à l’écoute, on sait où le groupe veut nous emmener.
Teach Me How To Ride est typiquement un morceau qu’on écouterait en boucle en voiture lors de longs déplacements, de départs en vacances, en tournée… Bref, Altwain s’écoute partout et on retrouve le groupe en première partie de Chalk au Marché Gare, Lyon, le 18 mars ! Quelle date insane ! Foncez !
Ellah A. Thaun – Time. Again. Allergic.
Ellah A. Thaun c’est tout d’abord une affaire d’exploration de la musique dans ses moindres interstices. Le groupe de Rouen (on adore les groupes issus de la scène rouennaise, soit dit en passant) a été initié par la chercheuse d’or (figuré), plasticienne, écrivaine et musicienne Nathanaëlle-Eléonore Hauguel. Elle en a d’abord fait son projet solo. En ont découlé de nombreux enregistrements étalés sur huit années de recherche.
Aujourd’hui, Ellah A. Thaun est devenu un projet collectif, mûrement réfléchi, très structuré, toujours empreint de ces explorations vécues et plus que jamais déconcertant. On a hâte de vous en dire plus.
Le clip fascine autant que le morceau étonne, resplendit et résonne. Ellah A. Thaun est constitué d’alchimistes du son qui orchestrent autant de rock/grunge que de post-hardcore/noise. Le tout étincelle dans une fluidité et une habileté à mélanger les genres tout bonnement sublimes. On le répète : ce groupe est fascinant.
Avec Time. Again. Allergic, Ellah A. Thaun dépose la pierre angulaire d’une pépite à venir. Wow ! Mais quelle découverte !
Les images illustrant le morceau sont à l’image de la musique : une bulle surréaliste. Deux ambiances et deux visions s’entremêlent. L’impression créée résulte de l’observation de scènes à la fois d’un point de vue scientifique avec ces images qui semblent être macroscopiques, mais aussi d’un point de vue à notre échelle, beaucoup plus réaliste.
Il y a dans le montage, une façon très artistique d’appréhender l’image. Des superpositions l’envahissent, on adopte différentes façons de voir les choses, tantôt insecte, tantôt sous l’emprise de drogue ou alors serait-ce des visions embrumées d’un sentiment de vertige ? Libre cours à l’imagination, libre cours à l’interprétation ! On se doit vraiment de saluer le travail d’Aurore Gosalbo (Rapport 1984) !
À noter que leur album The Seminal Record Of Ellah A Thaun sortira via Howlin’ Banana, Incisive Records et Flippin’ Freaks Records le 16 mai prochain. Restez dans les coins !
The Ninety 2 – Higher Than Love (feat. Jessica Winter)
The Ninety2 revient avec Higher Than Love, un titre envoûtant sublimé par la voix cristalline de Jessica Winter. Pour accompagner cette sortie, le duo propose un clip lyrics immersif, où ils apparaissent sous une forme pixélisée, en écho à l’univers visuel de la pochette du single.
Dans un décor minimaliste, les deux musiciens manipulent des instruments virtuels, fusionnant esthétique rétro-gaming et modernité musicale. Le morceau, porté par une production néo French touch, oscille entre douceur et mélancolie, avec des synthés planants et des nappes électroniques subtiles. La voix de Jessica Winter, aérienne et délicate, vient enrichir cette ambiance éthérée, flirtant avec l’introspection et l’apesanteur.
Avec ce titre, The Ninety2 confirme son talent pour mêler textures sonores et visuels travaillés, offrant une expérience sensorielle captivante.
These New Puritans (ft. Caroline Polachek) – Industrial Love Songs
These New Puritans reviennent d’outre-tombe pour nous sortir un ovni dans leur discographie. Industrial Love Song est un titre atmosphérique envoûtant qui mêle l’univers étrange de grues sur un chantier cherchant à assimiler leur ombre. Le clip se révèle être un tableau d’art contemporain saisissant de beauté. C’est tout simplement beau. En prime, Caroline Polachek vient ensorceler cet instant majestueux. Le duo de l’Essex nous surprend avec classe sur ce morceau qui paraîtra sur leur cinquième album Crooked Wings dont la sortie est prévue le 23 mai.
Caesaria – Can’t sleep another night
Pas plus tard que cet été, quand on a eu l’occasion de discuter que ça soit avec Edith Nylon ou Kas Product Reload – qui revient très bientôt dans l’actualité avec un album et des concerts -, nous évoquions ce revival des années 1980. Le trio strasbourgeois Caesaria rentre dedans à pieds joints avec son nouveau single Can’t sleep another night issu de son album Tonight will only make me love you more.
En tendant bien l’oreille, Can’t sleep another night peut rappeler l’univers d’un certain groupe norvégien légendaire pour son clip unique en son genre : a-ha ! Référence dont le groupe n’a pas à rougir tant Take on me est culte. Bel hommage subtil ! Mais soyons bien rationnels, on ne parle que sur le plan musical. Il y a ce côté hyper dansant tout en étant très mélancolique et frais !
Dans le clip de Can’t sleep another night, le plan principal est sur le chanteur Théo Chaumard qui vit une des plus belles insomnies – si si ça existe -. Celle où l’amour vous maintient éveillés, surexcités comme jamais, les papillons dans le ventre qui vous dopent, bref l’Amour. On vous laisse profiter de cette succession de moments heureux, créatifs, voire même un peu fous, jusqu’à la dernière minute qui, promis, vous réserve une drôle de surprise.
Si vous adhérez, sache qu’après une Boule Noire le 17 février dernier et une Poudrière le 1er mars à guichets fermés pour les deux dates, Caesaria est sur les routes à partir du 30 mai à Gray à l’occasion du Rolling Saône Festival.
PAMELA – IDNTKNWYT
On n’a pas fini de vous dire que PAMELA va faire un carton ! Leur EP LIVE. SHIFT. DREAM est dans les bacs depuis le 7 mars et de nouvelles dates s’enchaînent pour les garçons. Ce mardi 11 mars a vu arriver le clip du titre mystérieux IDNTKNWYT. Autant G.R.E.A.T on comprend instantanément, autant l’interprétation est très libre sur IDNTKNWYT. On serait bien tentés de vous expliquer maintenant que l’on a échangé avec les garçons, mais on a décidé de garder le secret.
Mais rassurez-vous, très vite vous comprendrez par vous-même. Eh oui ! Dès les premières phrases lâchées par Sam Sprent, il est question de leur grande amie Zaho. On trouve des clins d’œil à la musique de Bowie, notamment dans le timbre de voix de Sam Sprent. Une pépite à laquelle on a adhéré sans réserve. Les synthés bien 80s, cette énergie qui nous avait séduite au premier jour, tout excelle ! Indépendamment de la musique, ce clip en carton est une merveilleuse création d’un autre comparse bien connu de l’univers de Zaho, nous avons nommé ici : Guillaume Ménard. Tout le monde a mis la main à la pâte pour reconstituer un plateau télé entier. Chapeau les gars !
Le rendez-vous tant attendu arrive à grands pas : la Maroquinerie le 20 mars. De nombreuses dates à travers la France sont prévues du fait qu’ils accompagnent leur amie quasiment partout. Les malheureux Parisiens qui n’ont pas eu leurs places pour la Maroquinerie peuvent d’ores et déjà se consoler, un Trianon est prévu le 6 novembre 2025 !
Jeanne Bonjour – Les lumières de la ville
Une vraie claque ! C’est ce qu’on a ressenti en découvrant l’énorme clip Les lumières de la ville de Jeanne Bonjour.
Le morceau, à l’énergie rock, évoque l’insécurité que les femmes peuvent ressentir dans la rue, leur culpabilisation et, par extension, la domination masculine. Jeanne Bonjour nous parle aussi d’émancipation, et fait ainsi résonner le combat du féminisme.
On est happé par les paroles ciselées de Jeanne Bonjour, le rythme haletant de sa musique et le crescendo qui fait progressivement monter la tension du morceau.
Cette tension est omniprésente dans le clip de Sacha Arethura, réalisateur de films et des clips musicaux pour des artistes tels que Alkpote, IAM, Luv Resval, Doc Gyneco, etc. Le clip est un véritable petit bijou cinématographique truffé de références inspirées notamment du cinéma expressionniste. On retrouve également des clins d’œil à la mélancolie des gravures de Gustave Doré, au glamour de Federico Fellini, à l’univers visuel du Rocky Horror Picture Show.
Dans une chorégraphie signée Romane Cohen-Ajuelos, Jeanne Bonjour incarne une héroïne tantôt forte, tantôt fragile, qui oscille entre insécurité et émancipation, ombre et lumière.
Lamomali, -M-, Fatoumata Diawara, Toumani Diabaté, Balla Diabaté – JE SUIS MALI
Lamomali, le projet musical initié par Matthieu Chedid (-M-), renaît en 2025 pour rendre hommage à Toumani Diabaté, maître de la kora disparu en 2024. Un nouvel album est prévu pour le printemps, avec en avant-première le single Je suis Mali, disponible sur les plateformes et accompagné d’un clip. Fidèle à l’esprit de Lamomali, Je suis Mali célèbre la fusion entre musique française et malienne avec Matthieu Chedid (-M-), Fatoumata Diawara et Balla Diabaté. Une tournée d’envergure suivra, traversant la France et s’achevant en apothéose à l’Accor Arena de Paris en décembre, sans oublier une saison de festivals bien remplie.
Je suis Mali est un chant vibrant d’amour et de nostalgie pour une terre natale, porté par la voix de l’exil. Entre français et bambara, les paroles expriment l’arrachement et la connexion intime à la beauté infinie du Sahel et du Mali. L’image du voyage solitaire pour « toucher ta magie » évoque ce lien presque mystique avec le Mali, entre rêve et réalité. Le refrain, telle une incantation, réaffirme l’identité et l’ancrage profond dans cette culture. La fin de la chanson en bambara, avec ses invocations à l’honneur et à la fraternité (Balimaw bè sanfè, Sinjimaw bè sanfè), apporte une dimension universelle a Je suis Mali: elle dépasse l’exil pour devenir un hymne à l’unité et au métissage, où la musique relie les peuples et, mais aussi les générations.
Le clip, réalisé par Alexandre Moors, capte cette essence avec une esthétique lumineuse et envoûtante. Tourné entre Paris et des paysages évoquant le Mali, il alterne des plans des musiciens, baignés de couleurs chaudes, et des scènes illustrant la richesse culturelle malienne : silhouettes dansant sous le soleil du Sahel, images de villages, de villageois et d’artisans façonnant un monde vibrant de vie. -M-, Fatoumata Diawara et Balla Diabaté apparaissent comme les passeurs d’un héritage musical, où la pop électrique se mêle à la kora avec une fluidité naturelle. La présence solaire de Fatoumata Diawara insuffle une intensité émotionnelle, tandis que la kora de Balla Diabaté, héritier de son père, perpétue l’âme du Mali. À travers cette mise en scène à la fois poétique et immersive, le clip transcende les frontières et invite à un voyage sensoriel, où la musique devient un pont entre les cultures.
En somme, Je suis Mali et plus largement, Lamomali marque une nouvelle ère renforçant davantage les liens entre Paris et Bamako, et témoignant d’une aventure musicale toujours plus vibrante et universelle.