Les clips de la semaine #266 – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, on vous invite à découvrir la première partie de notre 266ème sélection des clips de la semaine.

jean – ARTICULE!

Si il y a une chose qu’on a parfois tendance à oublier dans la musique de jean, c’est sa part d’humour. Elle est bien cachée, mais elle donne à sa musique un petit supplément, une petite bouée pour remonter à la surface et ne pas tout prendre au sérieux.

Un exemple ? Appelez un morceau ARTICULE! alors que le but même de celui-ci est de mettre en scène un garçon tellement au bord du gouffre que ses paroles, bien que sensées, en finissent par devenir parfois inaudible. ARTICULE! est aussi un exemple parfait du jeu d’équilibriste de jean, entre une musique parfaitement dansante et un texte souvent hyper sombre, porté par des réminiscences et des histoires d’autodestruction et de verre de trop.

Amateur assumé de cinéma, jean prend un soin tout particulier à la confection de ses vidéos. Après nous avoir offert son pendant cinématographique, il passe dans un univers plus brut en forme de mini-documentaire pour la vidéo accompagnant ARTICULE!

La caméra de Arthur Bartoli le suit au plus près avec son comparse ju!es alors que les deux s’apprête à donner un concert à Lyon le soir même de la sortie de C’est quand même bizarre. On les suit au court de cette journée, entre le voyage en train, les balances, le concert, la rencontre avec les fans et la fête qui suit. Surtout, on réalise la grande complicité qui cimente cette équipe de pote qui se pousse mutuellement à aller plus loin.

Et après une boule noire et une maroquinerie complète, c’est désormais le Trabendo qui est en ligne de mire ainsi qu’une tournée partout en France.

De notre côté, on a eu le plaisir de retrouver jean pour discuter avec lui de son album et on vous partagera ça très prochainement !

8ruki – CRÉSILLE

8ruki nous offre une nouvelle extension de son projet PoweredByRuki. Et ce
volet-là, FREE IA, confirme la singularité de l’artiste. Le clip de CRÉSILLE, titre flatteur à son image aux intonations robotiques, reflète l’émerveillement de 8ruki pour toutes les tendances jugées has-been : le dab, l’emploi du terme swag, et, dans le clip, des hashtags clignotants en typographie brutale et grasse.

Les créations 8ruki-esques paraissent toujours fait maison et accessibles, dans leur spontanéité apparente. Mais en réalité, il débloque à chaque fois un nouveau niveau d’originalité. Les images distordues et le côté goofy qu’il revendique font de lui une perle rare.

Pas étonnant qu’il veuille libérer l’intelligence artificielle : elle ne pourra jamais égaler l’ovni intemporel qu’est 8ruki.

FYRS – WDYWB? feat. Kate Stables

Une association qui fait naitre l’émotion. Cette semaine FYRS est de retour avec un nouveau titre en collaboration avec Kate Stables. Les deux artistes sont connus pour leurs univers profonds et foisonnant et leur rencontre ne fait pas exception à cette règle.

WDYWB? est un morceau qui navigue entre structures folks et intonations électroniques, qui laisse ici et là exploser quelques percussions et qui met en avant les voix sublimes et caractéristiques de FYRS et de Kate Stables. WDYWB? est une quête intime, autant humaine qu’artistique, qui interroge sur ce que l’on est, et surtout ce que l’on a réellement envie d’être. Le morceau explore cette quête étrange et parfois libératrice, qui permet d’évoluer en adéquation avec soi même, loin des pressions et des injonctions d’une époque de plus en plus oppressante. Entêtant mais jamais agressif, le morceau effeuille peu à peu ses mystères pour nous inviter subtilement à nous questionner nous même.

La vidéo de Quentin Lateral joue aussi de cette subtilité et des zones de flou qui habitent parfois nos existences. Dans un noir et blanc parfait, la vidéo nous entraine à la recherche des deux héros du morceau, dans une forêt qui ne semble pas prête à dévoiler tout ses secrets.

On observe et on les suit dans des scènes qui ressemblent parfois à des sortes de tableaux vivants, où la caméra avance et recule à l’envie et où FYRS et Kate Stables évoluent sans jamais réellement se croiser.

Un morceau qui, on l’espère, en appellera d’autre pour un artiste discret mais toujours plus excitant à chaque sortie.

Jaymee – PARTI D’CHEZ MAMA

Après les allures de road movie fêtard dans le clip de J’AI DIT À BRO, Jaymee revient avec une nouvelle ode à ses proches intitulée PARTI D’CHEZ MAMA. Toujours fidèle à lui-même, le rappeur déambule cette fois-ci dans un décor plus sobre, porté par une production trap épurée, légèrement éloigné de l’énergie solaire de ses précédents visuels.

On découvre un Jaymee plus lucide, tiraillé entre le besoin de quitter le cocon familial pour poursuivre ses rêves et le poids émotionnel de ceux qu’il laisse derrière lui. Précarité, amitié, solitude et sacrifices : il touche à une réalité partagée par de nombreux jeunes en quête de construction. C’est dans ce personnage sincère et accessible que Jaymee affirme sa singularité. 

This Will Destroy Your Ears – Gorgeous Eve Holds a Banger Hammer

Avec un titre aussi riche et dense en étendard, qui résonne comme un slogan poignant, This Will Destroy Your Ears attise les attentes autour de cette nouvelle composition. Cette dernière débarque et fait miroiter quelque chose de plus grand. Après Clear en 2019 et Everybody Knows Mickey en 2022, le groupe reste dans son élan et perpétue la tradition triennale des sorties d’albums. À cet effet, FUNLAND paraîtra le 10 octobre prochain via les labels À Tant Rêver du Roi, Luik Music, Cowboy à la Mode et Conicle Records.

Thibault Tourmente prend la casquette d’architecte du clip qui est basé sur un livre unique dont les esquisses et illustrations ravivent la fascination du trio pour la ville de Blackpool, lieu d’étrangeté, de secret, incarnant un mysticisme qui n’est plus à prouver suite au visionnage. Ces images sont le recueil de scènes de vie hors du commun, presque hors-champ, dépassant le champ des possibles mais qui s’inscrivent pourtant dans la réalité. Une semaine de travail pour 4’ de tournage, derrière l’œil aguerri de Alberto Scattolin.
Livre façon cabinet des curiosités à l’appui, This Will Destroy Your Ears gagne le pari d’une sortie très réussie, arborant un refrain qui se meut en une rengaine post-wave – comme iels aiment à l’appeler – pleine de force, de puissance et de confiance. Le groupe signe un titre devenu instantanément tube qui nous met en émoi pour la suite. On en veut plus !

Nastyjoe – Strange Place

Les Bordelais de Nastyjoe n’ont pas dit leur dernier mot et reviennent de plus belle avec un nouveau single très attendu intitulé Strange Place. Après un EP en 2022 très convaincant et des prestations live qui ont assuré cette certitude, ils entameront un nouveau chapitre début 2026 avec un nouveau disque qui prendra la forme d’un album prévu avec À Tant Rêver du Roi.

Strange Place, réalisé par Robin Rauner, membre du groupe, fait état d’un pont qui se dresse entre le présent et le futur. Cet état d’âme est celui qui s’installe entre la vie et la mort, entre la souffrance et la joie, entre le fantasme et la réalité, entre la toxicité et la pureté, brouillant toutes les convictions, manipulant nos émotions, nous ôtant toute clairvoyance. Le discernement occulté, comme les effets de l’amour l’occultent. À coup de flashbacks et de flashforwards, le groupe nous trimballe dans une situation pleine de contrastes dont l’œil de Robin se joue.

D’ailleurs, c’est bien d’amour dont il est question. Un amour en berne, un amour toxique, un amour passé, qu’on recrée dans un présent mais qu’on distingue dans le rétro et qu’on s’imagine en boucle dans le futur. Cet amour se morcelle, consume et tamponne la mémoire. S’en détacher déclencherait presque l’instinct de survie. Puis, chaque lieu crée une réminiscence, chaque objet est gorgé de rires obsolètes et devient personnification. Ce sentiment si fort agit tel un poison qui coule et roule doucement dans nos veines, pour mieux s’imprégner, pour mieux forger le sang-froid plus tard. Mais, ce passé encore présent engendre un présent misérable et un futur vide, noir, à l’image d’une cave et tout ce qu’on peut lui associer de plus morbide et triste. Alors, on se recroqueville, on devient chétif.

Les songes sont-ils réels ? L’âme en errance et le vague à l’âme, on attend l’électrochoc qui fera tout basculer et qui va s’articuler entre trois choix : un avenir inéluctable, un état psychologique flirtant avec le pire ou une réalité trop difficile à digérer ? Est-ce qu’on va survivre à cette fin ? Y aura-t-il un recommencement ? Et surtout, QUAND ?

Les Bordelais abordent avec Strange Place une expérience de vie commune à beaucoup. Écrire et en parler dans cette composition font office d’exutoire et peuvent aider chacun·e à se sentir moins seul·e.

L’avenir se pare de surprises et Nastyjoe est attendu pour nous en réserver de belles ! Si le passé nous l’a dit, le futur le dira tout aussi bien.

Pain Magazine – Dead Meat

Pain Magazine n’incarne rien d’autre que la fusion d’artistes/groupes de renom tels que Birds In Row, Louisahhh et Maelstrom associés à des genres comme le post-hardcore ou la techno industrielle. C’est ce choc artistique entre talents de divers horizons qui font la richesse de cette formation et qui augmente les attentes pour leur faire atteindre un niveau titanesque. Pain Magazine représente donc la réunion de fortes personnalités qu’on a pu entrevoir à travers le premier single, Violent God, sorti le 18 avril dernier. Il faudra cependant patienter pour qu’iels nous dévoilent l’intégralité de leurs plus beaux atours. En effet, l’album paraîtra le 3 octobre prochain chez Humus Records.

Le clip, vêtu d’une parure noire et blanche, embraie sur une façade sculptée et parée d’un voile qui ondule au gré du vent et qui se confondrait avec des flammes, caressant l’air et détruisant le visage qui tente d’exister encore. Ce voile fait référence à une femme à qui sont corps n’appartient plus, à qui il ne reste que sa tête pour penser, un infime espace en guise de prison dorée, un endroit restreint où les pensées tournent en boucle. Et puis, il y a ces vers, ces phrases lourdes de sens portés par une voix féminine de caractère. Et toujours ce voile, dont la polysémie se déploie à mesure que le morceau progresse et qui se dirige vers une émancipation certaine. Parce-que cette prison est ce qui nous contraint et aussi tout ce qu’il nous reste de force, de courage et d’intelligence.

Dead Meat parle de ce qu’on devient à force d’éponger la charge émotionnelle d’un·e partenaire. Il incarne un cri de rage porté par des voix, des guitares envoûtantes et des refrains ravageurs. C’est dans ce genre de relation toxique que l’autre croit pouvoir déverser sur nous ses propres émotions qu’il ne gère pas. La victime officie alors en tant que punching ball, se prenant en pleine face la violence de l’impact. L’heure est à la prise de conscience, le glas résonne comme un signal d’alerte. Dead Meat est un morceau de rupture. Il faut que cela cesse.

Assurément un titre accessible, sans pour autant négliger aucun aspect de sa composition, ce nouveau percute tout autant que son prédécesseur. Can’t wait pour la suite des hostilités. Merci à ces grands·es musiciens·nes pour leurs propositions qui reflètent quelque part une grandeur d’âme.

Flora Fishbach – Comme Jean Reno (ft. Jean Reno)

She’s back ! Elle a juste ajouté son prénom mais rassurez-vous c’est bien la même personne ! Celle qui officiait sous le nom de Fishbach fait son grand retour et en duo avec une figure française du septième art : Jean Reno. En complément d’un nouvel album – le troisième ! – à venir pour le 18 septembre, c’est un autre rendez-vous qu’il faut d’ores et déjà inscrire dans son agenda : le 18 septembre à la Machine du Moulin Rouge. S’en suivront d’autres dates dans le début de l’année 2026.

Comme Jean Reno est co-écrite avec Arthur Navellou de Catastrophe. La chanson fait revenir à la surface les textures synthétiques initiées sur le fabuleux Morteldix ans auparavant. Si vous aimez les inspirations années 80, vous allez être servis ! En poussant un peu plus loin le curseur, on pourrait dire des synthés à la Manureva et qu’on se le dise ; c’est classe !

Dans un clip au cachet rétro signé Fleur Niquet, Flora Fishbach se métamorphose en inspectrice, à la recherche de celui qui a joué le rôle culte du nettoyeur Léon. Elle fait également référence au légendaire Grand bleu dès lors qu’elle narre qu’elle plonge dans les abysses. L’acteur français lui donne la réplique sans pour autant pousser la chansonnette mais en posant sa voix et rien que ça, c’est génial !

Puggy – On my mind

Prendre la route pour profiter des beaux jours avec les belges Puggy voilà ce qu’on vous propose ce week-end. Du moins, accepter de prendre la route avec eux c’est se soumettre à quelques péripéties. Mais à en croire le clip, ça va c’est parfaitement gérable ! Sur le plan musical, On my mind est un single positif et groovy qui sent bon la saison estivale. Léger, il a tous les ingrédients pour passer un bon dimanche. On s’est entendus dire qu’un nouvel album devrait voir le jour à la rentrée. Indépendamment de ce qui se passe dans le clip, les Puggy sont véritablement sur les routes et passeront notamment par l’Olympia le 5 novembre prochain et retourneront au bercail au Forest National de Bruxelles le 18 novembre. Stay tuned !

Lucie Sue – Ride the wired wild tiger (ft. Satchel (Steel panther))

Lucie Sue envoie du très lourd cette semaine avec Ride the wired wild tiger, nouvel extrait génialement perché de Battlestation, son prochain album annoncé pour le 29 août. Et pour l’occasion, la rockeuse basque réussit un coup de maître avec un featuring de haut-niveau en la personne de Satchel, le guitariste du groupe de métal américain Steel Panther.

Avec beaucoup d’humour et le sens de l’autodérision qu’on lui connaît, Lucie Sue livre-là une critique acerbe sur le manque de créativité de certains groupes qui se contentent de copier/coller les autres. Une critique mise en images avec talent par Rémi Capdeville, avec une esthétique léchée délicieusement vintage.

Voilà le pitch : alors que Lucie Sue joue tranquillement au jeu vidéo, une voyante apparaît tout à coup dans l’écran et délivre la recette d’un tube : une seule règle, ni peur ni honte. Et 4 astuces : 4 accords basiques, frapper fort sur la batterie, prendre n’importe quel mot, en rapport avec le rock. La formule magique prononcée, voilà Lucie Sue et sa bande propulsés dans le jeu, transformés en pâle copie de Power Rangers prêts à affronter des méchants un peu ridicules, armés d’une pelle, d’un balai et d’un râteau. Le combat fait rage, les coups fusent, les effets spéciaux pleuvent. Malgré leur panache, Lucie Sue et ses acolytes sont mis KO. L’arrivée providentielle de Satchel redonne vie aux valeureux héros, grâce à un solo de guitare littéralement électrique. Regonflés à bloc, ils finissent pourtant par être vaincus par le petit Wired Wild Tiger. Triste fin, mais un combat haut en couleur à savourer au millième degré. Et si le cœur vous en dit, Lucie Sue jouera sur la grande scène du Hellfest le 21 juin prochain !