Les clips de la semaine #281 – partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite on vous invite à découvrir la première partie de notre 281ème sélection des clips de la semaine.

OrelSan – Ailleurs

Même si il s’en défend un peu, la fuite en avant de OrelSan est intimement lié à son film Yoroï. Dans ses thématiques forcément, mais aussi dans certaines transitions et dans certains personnages que l’on retrouve dans le film et l’album et qui se répondent comme des échos.

Ailleurs en est la preuve en deux temps. Le morceau sous l’apparente légèreté de sa production et son côté pop révèle une certaine noirceur. Il est peut être le titre qui représente le mieux le titre, la fuite en avant, ce besoin d’avancer autant pour échapper à des choses qui nous pèsent et nous ralentissent que pour protéger un avenir et des sentiments qui s’annoncent plus radieux.

Comme toujours avec OrelSan l’écriture semble simple au premier abord mais révèle des trésors de profondeur et d’humanité. S’il se base sur son propre vécu, ses interrogations impactent tout ceux qui vivent et existent comme lui et qui, nature humaine oblige, se retrouvent à un moment ou un autre confrontés aux mêmes interrogations. Ailleurs est une fuite et un renouvellement, un morceau doux-amer qui cherche l’espoir dans la remise à zéro.

Et puisqu’on parlait des liens étroits entre musique et cinéma, le clip, filmé à l’iphone, de David Tomaszewski fait lui aussi le pont et propose une sorte de préquel à l’histoire de Yoroï.

On suit ainsi le couple formé par OrelSan et Clara Choï pendant les deux semaines qui précèdent les premières images du film. Échappés de la France, on les voit débarquer à Tokyo et vivre leur vie de touristes de la meilleure manière qui soit. Entre Karaoké, activités geeks et visite de lieux culturels, on les voit aussi préparer leur futur en se concentrant sur un quotidien à deux et bientôt à trois … avant que tout ne dérape forcément.

Pour connaître la suite, on ne peut que vous conseiller d’aller voir l’excellent Yoroï, toujours présent dans les salles, et de (ré)éecouter la fuite en avant, le dernier album d’OrelSan.

Austra – Fallen Cloud

Austra est de retour cette semaine avec son nouvel album Chin Up Buttercup, 10 morceaux qui suivent l’histoire d’un deuil amoureux, de la colère à la libération, portés par une volonté prononcée de faire danser l’auditeur tout en délivrant une poésie puissante et intime.

Fallen Cloud, mis en avant pour la sortie, en est l’exemple parfait. Si on est toujours impressionné par la puissance vocale de Katie Stelmanis, le morceau nous entraine dans un univers très percussif, répétitif et presque hypnotique dans lequel la musicienne semble vouloir négocier et réparer une histoire qui touche à sa fin, même si elle ne le sait pas encore. On apprécie particulièrement la montée en puissance du morceau et son explosion dans la seconde partie qui nous entraine vers des territoires de plus en plus dansant.

La vidéo de M. Blash joue de cette histoire, tout à la fois répétitive et évolutive, et profite des superbes territoires d’Hawaï pour nous offrir un pendant visuel étrange où Austra se transforme en héroïne débarquée sur une planète étrangère et qui cherche à retrouver le sens de son existence.

Porté par des incrustations visuelles et différents formats de réalisation, la vidéo de Fallen Cloud se pare d’un rendu très S.F qui confrontent les mondes intérieurs et extérieurs de notre héroïne avant que celle-ci ne se libère complètement de ses émotions pour disparaitre dans le cosmos.

Austra sera de retour l’an prochain sur les scènes françaises avec notamment des passages au Grand Mix et à La Gaité Lyrique. Et si vous souhaitez en savoir plus, on vous invite à découvrir notre entrevue avec Katie par ici.

Teenage Bed – Récifs

Teenage Bed, le crooner le plus triste et singulier de la côte ouest française, rejoint la galaxie Howlin Banana Records et dévoile cette semaine Récifs, premier extrait de son album Pause Printemps attendu pour le mois de janvier prochain.

Comme toujours, on est assez emballé par cette manière qu’à Nathan Leproust, de son nom au civil, de manier dans un équilibre tout à la fois parfaitement dose et complètement casse gueule influences DIY américaine et spleen poétique forcément très français.

Récifs, à l’image de son titre, à la fois dangereux et réconfortant, nous entrainant dans un lieu qui dévoile ses trésors à mesure que l’on se rapproche de lui. C’est là tout l’art et la puissance de Teenage Bed, cette manière de manier la simplicité et d’en faire jaillir des milliers d’émotions, de rajouter l’air de rien un arpège de piano pour ensuite le noyer dans sa boite à rythme avant qu’une guitare répétitive prenne le pas sur la voix et le sens des mots.

Récifs est un morceau bouillonnant et foisonnant, prouvant la force et l’intelligence d’une musique qui se développe et se perfectionne depuis des années.

Le clip du morceau est à son image, entre DIY, spleen et humour, Teenage Bed s’amusant avec des incrustations et des images étranges qui mélangent les contextes. Il tisse une toile visuelle impressionniste, chaleureuse et poétique qui laisse passer ici et là une petite dose d’humour, le tout avec beaucoup d’amour.

Désormais, on attend la suite avec beaucoup d’impatience.

Bonne nuit – Crier Vomir Pleurer

Le duo Bonne Nuit est de retour avec un nouveau single plus doux, plus planant, qui mélange une électro enveloppante et des nappes d’arpégiators hypnotisantes. On retrouve leur sensibilité, leur façon de faire monter l’émotion en douceur, presque en apesanteur.

Crier Vomir Pleurer.” Trois mots, trois gestes de détresse qui tournent en boucle comme une tentative d’exorciser la peine. Le morceau semble raconter ce moment suspendu après une rupture violente, ce nœud au ventre qu’on ne sait pas nommer mais qu’on ressent jusqu’au bout des doigts. Cette douleur qui déborde, qu’on n’arrive ni à contenir ni à expliquer, et qui finit par sortir comme elle peut.

Le clip nous plonge dans un supermarché, lieu du quotidien par excellence, où un protagoniste danse au milieu des rayons. Sa chorégraphie traduit la souffrance, la crispation, la tempête intérieure que plus personne ne voit. Autour de lui, les gens passent, indifférents, comme si son mal-être était invisible depuis l’extérieur. La scène se termine sur Étienne et Théodore, respectivement caissier et employé de mise en rayon, un clin d’œil touchant et simple qui ramène Bonne Nuit au cœur de l’image : deux artistes qui transforment le banal en poésie brute.

Bachar Mar-Khalifé – Olive Tree

Le musicien et compositeur Bachar Mar-Khalifé nous offre une ritournelle de sept minutes en hommage à la Palestine. Il reprend le symbole de l’olivier en donnant le titre Olive Tree au morceau. Un arbre typique du pays qui représente l’allégorie de la paix par son branchage.  C’est un arbre, parfois volontairement déraciné, arraché, se fait l’écho d’un peuple d’une région meurtrie par la guerre du Liban à la Syrie. Pour illustrer ce clip, le chanteur s’accompagne de Sabrina Hakim pour assembler des archives de l’Unraw de Cisjordanie, organe onusien venant en aide aux personnes réfugiées. Le spectateur aperçoit des moments suspendus de danse, de partage et d’une légère insouciance. 

Vonsharon – dm for collab 

Vonsharon, est un duo breton composé de Maxim et Noel qui avancent avec une honnêteté rare, entre tension, lucidité. Leur retour résonne d’autant plus fort que ce nouveau titre sort exactement dix ans après les attentats de Paris, une nuit qui a profondément marqué l’un Maxim, présent au Bataclan. Survivant parmi d’autres, ce moment d’horreur se transforme aujourd’hui en force à canaliser.

“dm for collab” démarre sur un riff sec comme un coup d’avertissement. Le morceau raconte un prédateur qui se cache derrière le langage sucré des réseaux pour repérer une personne vulnérable, un malaise que le duo connaît trop bien. C’est un titre nerveux, clair, qui expose sans détour la fragilité de nos vies connectées.

Le clip, lui, nous plonge dans une fête foraine en pleine effervescence : manèges qui hurlent, néons qui éclaboussent l’écran, foule mouvante. Cette agitation contraste avec le malaise du morceau, comme si l’insécurité pouvait se glisser même dans les endroits les plus lumineux. Une ambiance électrique, presque étouffante, qui colle parfaitement à l’esprit du titre.

Aïteka – Aïteka Anthem

Vous n’avez pas encore dîné ? Ça tombe bien, car le groupe Aïteka vous a concocté un met des plus surprenants. Ce groupe parisien qui mêle afrobeat, jazz et funk, a sorti un nouveau single intitulé Aïteka Anthem. Mis en images par le studio Bonnie & Brocoli, le clip est un régale de cinéma, prenez place.

Sous la cloche, le poisson est déjà servi. On découvre les cinq protagonistes de la scène dans un univers à la fois inquiétant et savoureux. Une seule personne dénote autour de la table. Aïteka Anthem s’illumine sur l’écran cathodique. Avec sa belle voix singulière, Adriana donne le rythme à la doyenne. Ce morceau c’est un feu vif et coloré sur lequel on ne peut s’empêcher de danser. Alors serait-ce vraiment le diable qui s’empare de cette joyeuse mamie en quête de lumière ? Le groupe ne s’arrête pas là, les musiciens sortent de l’écran, pour redonner des couleurs à cette lugubre demeure. Aïteka entrelace le son des percussions, cuivres, claviers et guitares, pour nous offrir une dose d’énergie nécessaire. Revenons-en à ce mystérieux dîner ; la chute de l’histoire est un délice, que l’on vous invite à découvrir sans plus attendre !

Myra – SPLASH

7h, aïe ça pique. Thé vert et tartines au beurre, j’allume machinalement la radio. Bbrrrri. Un problème ? 77.7 ? Une voix encore méconnue semble animer une nouvelle émission. On prend la direction de la « maison du bonheur » avec Myra. Cette artiste aux multiples talents nous présente Splash, pour le plus grand plaisir de nos auditeurs. Ok, pourquoi pas, je réparerai la radio plus tard.

Ce clip, comme le morceau, est un bonbon acidulé. Dans une ambiance orange et velue feutrée, on se laisse moelleusement tomber sur le sofa, embarqué par la voix de Myra. Entourée de son groupe, elle manie le second degré à merveille. Véritable interprète, elle chante la femme, « Elle est drôle, elle fait des très bonnes blagues, elle est très très drôle, et elle fait des espèces de pâtes.. au pesto. ». Décalé et élégant, c’est groove, rythmé et smooth à la fois. Les chœurs reprennent les mots de l’artiste, et on souligne l’utilisation du talkbox, qui apporte ce petit truc en plus. Le sucre peut-être ? SPLASH est le réveil dont nous avions besoin, doux et lumineux, pas de quoi retourner se coucher ni se précipiter ! On en redemande, et on a hâte d’assister aux nouvelles émissions de Myra.

Bandeliers – Come clean

L’an 2024 avait vu arriver leur EP Misunderstandings. En novembre 2025, les Bandeliers sont de retour avec un petit changement dans le line-up puisque désormais Bleu Reine a rejoint la fine équipe suite au départ du chanteur-guitariste Declan Cullen.

Pour peu que vous suiviez leurs aventures, le groupe a relayé sur son compte Instagram les coulisses de leurs sessions de travail en Bretagne qui ont donné naissance à deux morceaux ; Come clean et Shed Skin sortis au grand jour ce vendredi 14 novembre. Aujourd’hui, on s’attardera sur Come clean qui s’est accompagné d’un clip.

Autant vous dire qu’ils ont fait les choses différemment et que c’est un vrai plaisir d’avoir de leurs nouvelles !  Frontman d’un jour, c’est Jef – batteur – qui raconte l’histoire (que l’on imagine très vraie) d’un vécu de syndrome de l’imposteur. En quelques mots projetés en pâtes alphabet baignant dans la sauce tomate, voilà que vous comprenez que le personnage a besoin d’extérioriser ce qui le traverse.

En résulte un morceau d’inspiration très 1990s. Alors qu’on les avait laissés sur des sonorités très marquées par les Smiths, les Bandeliers dévoilent désormais des influences grunge. Un son faussement sale, des arrangements délicats presque psyché, les Bandeliers sont donc de retour ! Avec une tournée européenne au programme, on voit qu’ils ont bien préparé leur come-back. A nous de nous ruer dans les bacs à la prochaine sortie !

LE BLEU – Je retombe encore

Ca faisait un petit moment qu’on n’avait plus vraiment de nouvelles des toulonnais Le Bleu. En même temps, la bande d’Hugo et Arthur est pas mal montée sur scène. D’ailleurs, ils seront de passage au POPUP du Label demain – ce lundi 17 novembre -, nous vous recommandons vivement d’aller les voir !

Devant la caméra de Romeo Lefort, le groupe se met en scène dans le cadre bien agréable de la région occitane. Quand tout le monde est heureux autour de vous, ils font la fête et que votre vague à l’âme prend plus de place, c’est un peu ce qui arrive au protagoniste campé par Thomas Barnole Cosin. Peu à peu, il prend ses aises ou serait-ce qu’une hallucination ? Un personnage bien troublé qui semble perdre le contrôle tout en étant bien conscient de sa réalité traversée. On vous laisse vous faire votre idée.

En attendant que vous soyez fixés, LE BLEU reste fidèle à son rock en français et ses tourments à fleur de peau. Le parolier chanteur Hugo Pezery rechute dans son mood mélancolique qui nous a tant plu les premiers jours de découverte. Je retombe encore est l’illustration sonore de la tension entre la résignation et l’espoir ; la guitare soignée, une batterie plus brute. LE BLEU a de beaux jours devant lui, on n’a pas fini de vous le dire !

DEADLETTER – To The Brim

Le gang anglais DEADLETTER réapparaît avec la grâce de ceux qui savent quand frapper, et annonce son deuxième album, Existence is a Bliss, attendu pour le 27 février chez SO Recordings. Leur nouveau single, fraîchement dévoilé, donne déjà un avant-goût du virage que le groupe semble emprunter.

Le clip, impeccablement chiadé, joue la carte d’un rouge éclatant et met en scène un adolescent à la dérive, coaché par les membres du groupe eux-mêmes. L’intrigue frôle l’absurde : un paquet de friandises volé dans une supérette qui déclenche une cavale haletante face à deux flics trop grands pour être vraiment menaçants. Il les sème, file sur le toit d’un parking, et devient, l’espace d’un instant, l’icône improbable d’une délinquance miniature. Drôle, nerveux, parfaitement mis en scène.

Musicalement, DEADLETTER adoucit le trait sans perdre sa rugosité. Le saxophone, moins pesant qu’auparavant, glisse comme un souffle hypnotique. Les guitares retiennent l’explosion, créant une tension contenue qui devient leur nouvelle signature. Avec ce mélange d’expérimentation et de pop affûtée, le groupe lorgne du côté de Television et réinjecte du sang neuf dans la matrice post-punk. Un retour qui promet un album aussi élégant que fiévreux.

Hudson Freeman – If You Know Me

La connexion entre êtres humains est peut-être la manière la plus vive et la plus sincère d’exister. Connaître l’autre, c’est chercher à en saisir la poésie, l’authenticité, les nuances. Mais comment être sûr que notre vision soit juste, réelle, et non un simple fantasme que l’on projette sur celui ou celle qui nous fait face ?

Cette année, le musicien Hudson Freeman poursuit son exploration de la fragilité harmonique, qui l’amène à prendre du recul sur ce genre de réflexions. Son superbe album is a Folk Artist ne fut finalement pas sa dernière contribution en 2025 : il partage cette semaine un deux-titres, accompagné d’une reprise à la fois efficace et surprenante de Wild Horses de My Bloody Valentine, ainsi que du morceau qui nous intéresse ici, If You Know Me.

Exprimer un ressenti aussi intime et complexe à travers un langage simple et universel, c’est tout le charme de cette nouvelle chanson. Elle met en lumière une vérité presque quotidienne, celle qui, parfois, se perd dans le brouillard du temps jusqu’à devenir presque imperceptible. Heureusement, des musiciens comme Hudson Freeman demeurent ces lanternes rares qui nous guident à travers le tourbillon de doutes et de certitudes, afin que nous puissions, à notre tour, les déconstruire.