LES CLIPS DE LA SEMAINE #55 – partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont à la fois fait vibrer ses yeux et trembler ses oreilles. Embarquez avec nous pour la deuxième partie 100% francophone des clips de la semaine numéro 55.

BANDIT BANDIT – NYCTALOPE

Chez Bandit Bandit, tout est une histoire de miroir. La réalité se regarde dans la musique et inversement, l’un déformant l’autre pour mieux se l’accaparer. Chez Bandit Bandit, la zone de flou est mince mais elle existe pourtant, dans l’extrême stylisation de ce qui entoure ce duo à la ville comme à la scène. Une iconisation permanente de la figure du duo, aussi bien influencé par Gainsbourg et Birkin que par American Born Killer, leur musique et tout ce qui l’entoure étant une navigation permanente entre la France et les États Unis. Le tout étant sublimé, depuis leur premier vidéo, par la caméra de Théo Sauvage, son sens du cadre et cette manière de capter en image toute la fouge, l’amour et la violence qui jaillit de la musique du groupe.

Étrangement, pour ce qui se révèle au final leur vidéo la plus personnelle à ce jour, Bandit Bandit a décidé de laisser l’image à d’autres, se trouvant en Luc Bruyère & Julie Simoneau de parfait doppelgängers à l’image. Une histoire de miroir toujours, pour mettre en avant Nyctalope, sans doute leur titre le plus fort, psychédélique et autobiographique.

On suit donc ces deux personnages, dans une romance explosive, charnelle et enflammée. Une bien belle manière de célébrer la première année de leur EP éponyme.

Bonnie Banane – Flash

Après un passage chez Colors il y a peu, la majestueuse Bonnie Banane est de retour avec son nouveau single Flash. Alors qu’elle nous avait déjà scotché avec son titre La Lune & Le Soleil ou plus récemment avec Limites, voilà qu’elle revient accompagnée d’un morceau des plus hypnotiques. Composé à l’aide de ces noms familiers que sont Jimmy Whoo, Martial Foe, Monomite, Loubenski ou encore Papooz, ce titre nous invite à côtoyer ses illusions et réminiscences, dans son monde où doutes et certitudes se confondent sans relâche. Côté visuels, c’est Mati Diop que l’on retrouve derrière la caméra, lequel nous convie à suivre l’artiste dans ce monument français de renom. Au fur et à mesure que les étages défilent, les morceaux du puzzle semblent s’additionner dans son esprit et surtout, à faire sens. Flash est le quatrième single issu de son premier album Sexy Planet et prévu pour le 13 novembre prochain, il nous tarde.

Galo DC – A La Plage

Un an après son premier EP Les orgues, Galo DC revient cette semaine prendre soin de nos oreilles avec À La Plage. Premier épisode d’une série de singles qui seront toujours accompagnés d’une vidéo, ce nouvel extrait prolonge l’univers du garçon autant qu’il le radicalise.

Une volonté de confronter cette poésie onirique en français à une production plus affirmée, ou le son se fait plus ample et direct, sans doute plus froid mais qui permet au morceau d’obtenir une efficacité totale dès la première écoute. En plus de ça, on sent une assurance plus importante dans la voix, Benoit s’amusant avec elle, multipliant les tessitures, n’hésitant pas à s’envoler dans les aigus autant qu’il peut redescendre à la recherche des graves.

Pour accompagner ce nouveau titre, Benoit se fait aussi réalisateur et loin du sable fin et de la mer, c’est bien dans le béton qu’il plante sa caméra, pour un jeu de collages ou chaque image devient la pièce d’un puzzle parfaitement maitrisé. Et une manière de montrer aussi que la plage, plus que son sens premier est un terrain de jeu poétique pour parler du temps qui passe, des choses qui nous dépassent … de la vie au final.

Les Filles et Christopher – Tatoo

Après un été idyllique à la plage, le trio nous emmène au salon de tatouage. S’ensuivent jeux de mots, calembours toujours dans un rythme entraînant à nous rendre accro une nouvelle fois. L’auditeur sera toujours plongé dans cette ambiance idyllique teintée de la devise « suis-moi je te fuis ». Ce clip est à nouveau très criant de gaité et de jeunesse et d’amour libre. C’est l’esthétique des Filles & Christopher, indélébile telle la musique accrochée à la peau comme l’encre idéale. C’est réussi, festif, ça s’écoute sous la douche comme dans la rue. Encore une prouesse musicale et filmique. On en veut encore !

Gaël Faye – Lundi Méchant

On a beau être dimanche, on anticipe le lundi qui sera dur cette semaine. Gaël Faye révèle le titre qui doit à son nouvel album son nom: Lundi Méchant. Toujours aussi inspiré par son parcours et ses origines, l’artiste multi support (on rappelle que le Film Petit Pays, adaptation de son roman du même nom est actuellement en salles) nous parle d’une tradition venue de Bujumbura au Burundi. Un état d’esprit qui veut qu’on refuse la norme et que l’on sorte le lundi soir comme s’il s’agissait d’un soir de weekend. Deuxième extrait de ce nouvel album qui arrivera le 6 Novembre prochain (un vendredi, parce que pourquoi pas), Lundi Méchant poursuit sur un air très dansant et chantant au sein d’un univers sombre mais qui colle très bien à la peau de son auteur. On a hâte de mettre enfin nos mains sur ce nouvel opus qui s’annonce fort en sens et en messages.

Svudvde – À la folie

La saudade est, le sentiment mélancolique mêlé à la rêverie et à un désir de bonheur imprécis. Voilà une définition qui colle bien à « A la folie », le dernier titre de Svudvde (lisez Saudade, ndlr). Que cela soit dans la musicalité ou dans son écriture, l’artiste vise juste dans les émotions qu’il transmet. Il a décidé que ce morceau serait son premier clip et il a décidé d’en soigner l’esthétique. Que cela soit par un code couleur fort terne mais qui ne tombe pas non plus dans le sombre ou encore par le lieu choisi, la nature. Une manière de montrer qu’il revient au fondamentaux, tout comme sa musique qui paraît simple dans sa construction, mais qu’il arrive à relever par sa manière de se placer sur celle-ci. Le morceau traitant d’amour, on le voit partager le quotidien avec son âme soeur, entre coupé par des moments de réflexions. Rappelant à quel point l’amour c’est beau mais à quel point cela peut aussi être dur. Svudvde pose son univers visuel avec ce premier clip aussi réussi que le morceau l’accompagnant. 

The Hyènes – Bègles

Le rock engagé a t-il encore de beaux jours en France ? Si pour certains ce genre musical est à ranger dans la case « musique de papa », il serait pourtant dommage d’en négliger l’importance, mais aussi la qualité. En tout cas, The Hyènes est bien décidé à montrer que guitares et engagement sont toujours une alliance gagnante. La preuve avec Bègles, qui annonce la sortie de leur prochain album, Verdure. Ici le quotidien, celui qui aliène et qui détruit, devient l’encre d’une saine colère, les bordelais dénonçant avec force une sorte de train train quotidien qui ne cesse de nous faire plier l’échine jusqu’à ce qu’on ne puisse plus se relever … Un message qui trouve encore plus de force dans les moments que l’on vit en ce moment où l’on en vient de plus en plus à vivre pour travailler et non plus travailler pour vivre.

Forcément, pour porter ce discours devant la caméra, il fallait un nom qui claque, afin de porter le message le plus largement possible de liberation au figaro en passant par Gala. Bien malin, The Hyènes est allé chercher un voisin, voisin de palier autant que voisin de luttes : Phlippe Poutou. En offrant à l’homme politique un rôle d’anti héros, sorte de personnage déconnecté du monde, vivant des mésaventures comme si tout était mérité, le groupe prend le risque contrôlé de le voir lui voler la vedette. Mais le plus important est que le message passe et c’est ce qui passe avec Bègles. Un accord gagnant-gagnant, c’est si rare de nos jours qu’il fallait le souligner.

Ojosmisterio misterio

Ojos débarque avec un nouveau son bilingue accompagné d’un clip behind-the-scenes en studio. L’arrivée de misterio misterio donne une seconde chance à cet été 2020 raté en nous faisant danser comme si c’était toujours le mois de juillet, à grands coups de ligne de basse faisant trembler les murs. S’il y a bien quelque chose qui, contrairement à ce titre, n’est pas un mystère, c’est la belle ascension du duo (qui devait notamment jouer à la Boule Noire pré-annulation du MaMA) qui sait décidément parfaitement s’y prendre avec les bangers. 

Faye – Sur la lune

Une plume remplie de spleen vient se poser délicatement sur les notes de pianos de Augustin Charnet et permettent à Faye de décoller, accompagné par ses pensées aussi lumineuses que sobres, « Sur la lune ». Le clip accompagnant le morceau joue sur cette dualité de pensée. Le tout agrémenté d’un montage respectant le rythme du piano, et augmentant l’immersion dans l’univers de l’artiste. Un clip coloré de noir et blanc et n’ayant comme seul acteur, Faye lui-même. Un moyen de centraliser l’attention sur les émotions dépeintes à travers le morceau. L’artiste se livre durant une balade solitaire l’obligeant à cotoyer ses démons. Ces mêmes démons qui le poussent aussi à écrire un texte soigné tel que celui de « Sur la Lune ». 

Jumo ft Léonie Pernet – Steve

Nouveau clip pour le premier album de Jumo, Et le vent ?, sorti début juin. Un groupe de jeunes dansent dans une cave éclairée de néons blancs ou rouges. Une série de tableaux s’enchaînent, nous présentant un homme dansant seul au milieu de l’assemblée immobile, ou inversement se tenant droit face à la foule mouvante. Un cadre 4:3 à l’image brouillée fait de rares apparitions. Les danseurs se libèrent sur cette Electro Cold wave, portés par la voix profonde de Léonie Pernet. Un lent travelling arrière laisse place à un montage saccadé, dont le rythme des plans finit par suivre la basse. Les ambiances rouges et blanches se mélangent et les tableaux se confrontent. L’homme se retrouve à danser dans une salle vide, à l’image du collectif immobile, pour ensuite être plongé dans une foule en pleine transe. De belles images pour illustrer la fête, le plaisir de se délivrer de toute contrainte et laisser son corps parler.

Genoux Vener – Metro Boulot Dodo

Les deux acolytes de Genoux Vener régalent nos yeux et nos oreilles avec la sortie de ce nouveau clip : Metro Boulot Dodo. Harassées par la vie quotidien, exténuées par ce désespoir permanent de ne pas être maître de sa propre vie, les deux chanteuses poussent ici un coup de gueule.

La société qui exige de nous que l’on soit toujours disponibles, en forme et libres… Cela n’est pas la réalité. La réalité, Genoux Vener la dénonce « Tu te sens libre mais c’est faux. », « T’as pas le choix, faut garder le tempo. »

Entre le clip et le titre, il y a une grande cohérence : rythme, synchronisation dans le récit et immersion dans notre nouveau quotidien, Genoux Vener porte même leur masque dans le métro !

VIKTOR & THE HATERS – COLLISION

Chaque groupe a son hymne, son manifeste. À l’écoute de Collision, on se doute bien que c’est sans doute ce morceau qui représente le mieux l’esthétique de Viktor & The Haters. Collision des genres musicaux, collision des mots qui claquent à une production qui tabasse, collision du fond et de la forme … Le morceau, issu de leur premier album Blackout, est un mur du son, qui nous choppe par le col pour nous fracasser gentiment la tête et les oreilles avec la radicalité d’un groupe qui ne cherche pas à plaire à tout le monde mais simplement à ceux qui comprendront son message et sa liberté.

Visuellement, DDKBS prend la collision au premier degré et nous embarque dans un délire éthylique et psychédélique ou bagnoles fracassées et soirées trop arrosées se rencontrent pour le meileur et pour le pire.

VSSVD – BONNIE

Le monde aime créer des mythes, des histoires qui prennent ancrage dans la réalité mais se parent au fur et à mesure du temps qui passe d’une bonne part de fabulation. Ainsi, un peu par facilité, un peu à cause de l’époque, le mythe de Bonnie & Clyde s’est construit autour de la folie et la fureur d’un homme. Mais si la réalité était tout autre ? C’est un peu le questionnement qui ressort du Bonnie de VSSVD.

Retour sur un mythe, le morceau laisse la parole à un homme pour laisser transparaitre la puissance de la femme, ses pulsions, sa violence et ses envies meurtrières qui finissent au fur et à mesure par contaminer celui qui l’accompagne. Un storytelling puissant sur une production hip hop qui navigue entre un côté atmosphérique et beat froid et assassin. Le froid et le chaud se rencontrent et se repoussent pour notre plus grand plaisir.

Le clip lui, réalisé par Nathan Almeras, troque le rouge pour le noir et blanc et nous offrent une plongée dans l’esprit de Bonnie, nous laissant voir le monde à travers son regard, entre découpage étrange et envies meurtrières de plus en plus présente. Un joli choc esthétique qui nous emporte avec lui.

Aurore de St Baudel – Mes journées comme ça

Autant nourri par les mots français que par les nappes électroniques et les rêveries synthétiques, Aurore de St Baudel s’est présentée au monde récemment avec son premier EP, Tokyo L’été. Une musique dense, onirique et moderne autant nourrie par le monde extérieur, et les villes visitées lors de voyages, que par des réflexions intimes. Ici c’est du second côté du prisme qu’on fait face. Dans mes journées comme ça, Aurore de St Baudel nous raconte l’amour simple et direct, celui qui nous donne envie de stopper la fuite en avant, de vivre avec l’autre d’accepter ses contradictions, de prendre le temps pour connaitre celui qui fait battre notre cœur différemment. Une déclaration franche et poétique. Daniel Aguilar transforme cette histoire en délire presque kitch, emmenant l’artiste très loin du monde, au milieu d’animation psychédélique et colorée ou Aurore de St Baudel devient une sorte d’hologramme qui navigue dans ses pensées.

Charlotte Fever – La Fille du Ciel

Il faut être honnête, si vous pensiez connaitre Charlotte Fever, leur nouveau titre risque de vous faire revoir vos certitudes. Si le groupe était connu pour une musique pop et solaire, presque adolescente par moment, La Fille du Ciel prend son monde à contrepied et nous emmène dans un univers bien plus adulte et … érotique. Premier extrait de leur nouvel EP, Erotico, le morceau est une lente introduction , un titre parlé qui se dévoile et s’effeuille pour devenir une porte ouverte à un nouveau monde,une plongée dans les années 80, mais loin de la pop française ici on se rapproche plus musicalement de l’univers de Tron, des jeux vidéos super nintendo ou des livres dont vous êtes le héros, la ou les mots défilent et nous entrainent dans un monde ou notre imagination a autant d’importance que le texte qui apparait sous nos yeux. Pas étonnant alors que le clip qui l’accompagnent rende hommage à tout cet univers rétro à travers un minitel qui nous invite à jouer avec lui. La nuit ne fait que commencer nous explique Charlotte Fever. Alors, êtes vous prêt.es à jouer ?