La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont à la fois fait vibrer ses yeux et trembler ses oreilles. Bienvenue dans la première partie de notre soixante quatorzième édition des clips de la semaine.
Bon Enfant – Magie
On commence notre sélection par un voyage magique et mental. Alors que le chapitre de leur premier album éponyme touche progressivement à sa fin , Bon Enfant revient cette semaine avec le clip de Magie.
Magie est probablement l’un des meilleurs titres de l’album, dansant et psychélique, porté par une batterie et une guitare complètement dingue qui tranche avec un propos plus doux-amère. En effet le morceau nous parle d’une personne terne, sans magie ni fantaisie et qui laisse fatalement sa vie de côté.
Pour accompagner ce titre, les québécois ont laissé le champ libre à Ian Lagarde qui nous offre un clip complètement fou, entre pyschédélisme et délire oculte, la vidéo embrasse complètement les thèmes cryptiques du morceaux en leur offrant une puissance visuelle forte et délirante.
On se laisse emporter dans cet univers coloré et fou dingue et on vous conseille de faire de même, le voyage en vaut la peine. Laissez donc la magie prendre possession de vos corps et de vos esprits.
Les Deuxluxes – Vacances Everest
Alors qu’ils ont fêté récemment le premier anniversaire de leur très bon Lighter Fluid, le duo montréalais déjanté revient cette semaine avec une vidéo absolument dingue pour leur titre Vacances Everest.
Si le morceau est un exemple de rock garage moderne, où Les Deuxluxes nous entraine dans une danse sauvage et habitée comme on les aime, le clip de Ariel Poupart lui nous embarque carrément dans une autre dimension.
On y retrouve Anna Frances Meyer et Étienne Barry, qui adorent se mettrent en scène dans leur clips, qui après une tournée dans l’univers connu (et inconnu) ne cherche qu’une chose toute simple : un peu de calme et de détente.
Mais les vacances ne vont pas être de tout repos puisque le duo se retrouve au cœurs de diverses péripéties, entre plantes empoisonnées et bodybuildeur violent.
On navigue en plein délire SF rétro pour notre plus grand bonheur entre Star Trek et Perdus dans l’espace. Une ambiance 60’s qui colle à la peau du groupe et qui permet une nouvelle fois de développer une esthétique géniale qui fait tout le sel de Les DeuxLuxes.
Pure Carrière – Boléro
La semaine prochaine, Pure Carrière dévoilera son premier album Eterna 83 et dévoile cette semaine un clip animé pour leur titre Boléro, qu’on avait déjà découvert en fin d’année passée.
Il n’est pas ici question de danse espagnole, mais plutôt du temps qui passe et du mouvement de celui-ci qui enclenche par moment cette idée de répétition et d’emprisonnement qu’on aurait par moment envie de faire exploser afin de tout voir changer autour de nous. Cette idée, et ces hésitations, étant caractérisées par cette répétition presque hypnotique du « bin oui bin non » alors que le morceau laisse exploser sa colère et son côté presque hypnotique.
La vidéo animée et très colorée de Mireille Bouchard amène cette idée de changement et de mouvement à l’aide des formes rondes qui tournent en permanence et qui se transforment alors que le yin et le yang représentant l’équilibre et le tout réapparaissent à plusieurs reprises. La vidéo expérimente alors toutes les idées et pensées que présentent le titre tout en nous offrant un trip psychédélique qui offre autant de questions que de réponses.
Otchim – Assassine
Attention, vidéo interdite aux moins de 18 ans.
Les âmes assassines d’Otchim sont de retour cette semaine avec une vidéo pour leur titre Assassine.
Le duo franco-russe continue de développer sa coldwave en distanciel et fait exploser le monde moderne entre la froideur des textures techno d’Anton et la chaleur de la basse répétitive et le chant habité et poétique de Jordi.
Assassine, c’est l’amour qui fait mal, celui sur lequel on se brûle les ailes et qui pourtant nous attire encore et encore jusqu’à griller tous nos points de vie.
Filmé avec un téléphone, le Ksheshka Morochkovska prolonge les thématiques sanglantes et meurtrières de James Dean mais les transposent d’un point de vue féminin.
C’est donc ici le quotidien brutale et à forte teneur hémoglobine d’une mystérieuse femme que l’on suit. Entre promenade dénudée dans la forêt, quotidien étrange et pulsation violente amenée par une étrange tache sombre sur la paume, la vidéo développe un univers étrange et inquiétant, parfois proche de la sorcellerie.
On se demande où les aventures d’Otchim vont nous emmener au prochain épisode.
Turner Cody & The Soldiers of Love – Boozing and Losing
Il y a des morceaux qui en un instant nous embarque dans une brume fantasmagorique, nous transportant comme par magie dans un imaginaire qui n’est pas le notre et qui pourtant nous semble fortement familier. Boozing and Losing, nouvelle pièce du chantre de l’antifolk Turner Cody, désormais accompagné de son back band The Soldiers of Love, a cet effet direct sur nous.
Il nous entraine pendant 3 minutes dans ce fantasme de l’Amérique profonde, celle des grandes routes, du sable et des cœurs brisés. On voyage à travers la poésie du bostonien comme par magie, porté par ce chant désabusé et cette rythmique country et on se retrouve ainsi à ses côtés dans ce bar sombre où les gens viennent noyer leur mélancolie tout en espérant trouver un morceau de lumière.
Cette idée est parfaitement mise en images par Frédéric Fonteyne qui nous amène dans ce bar entre le jour et la nuit, en compagnie de ces oiseaux de nuits étranges, ensemble mais pourtant si esseulés. On y retrouve Turner Cody dans un double rôle, à la fois sur scène et derrière un verre, entre présence réconfortante et solitude déchirante, cherchant comme il le dit lui même à se saouler pour s’oublier un instant.
Un vrai morceau d’Amérique comme on l’aime et l’imagine.
Renard Tortue – Dans la merde
Cette semaine voit l’arrivée de deux drôles d’animaux. Renard Tortue c’est deux potes de 21 ans qui se connaissent depuis toujours et qui forcément ont décidé de faire de la musique ensemble. Et parce qui’ls sont des jeunes modernes, les genres musicaux sont pour eux des étiquettes qu’on décolle plus que l’on affiche.
Entre hip hop, chanson française et musique électronique, le duo débarque avec Dans la merde, un premier titre en forme d’uppercut sonore qui nous force à tendre l’oreille.
Avec ce premier titre, Renard Tortue porte un regard féroce sur son époque et nous rappelle qu’au fond, on est tous dans la merde, surtout quand on se retrouve face à un étrange virus qui nous impacte tous. Le morceau égraine les bizarreries du monde ainsi que les petites hypocrisies de l’être humain tout en oubliant jamais une bonne dose d’humour car c’est la subtilité qui aide toujours à faire passer le massage.
En résulte ce clip DIY sur fond vert qui entraine nos deux héros à travers les époques et les personnages qu’ils déclinent dans leur titre.
Avec ce premier titre, Renard tortue fait clignoter le radar de la belle promesse dont on suivra le futur avec attention.
Fredrika Stahl (feat. Dominique A) – Finalement la nuit
La chanteuse suédoise Fredrika Stahl et le chanteur Dominique A se mettent nu à nu au travers du clip de Finalement la nuit. Ils dévoilent un duo tout en profondeur, teinté d’une certaine noirceur. On ressent un sentiment tragique à travers des paroles évoquant tant l’éphémère : “Finalement les étoiles, s’éteindront sous la pluie, finalement la nuit”; la perte : “Finalement la douceur, désertera la peau”, que la rupture : “Finalement ton amour, ne me suffira pas.”
Une mise à nu qui rime avec fragilité ou évanescence. Cette obscurité se retranscrit aussi dans l’esthétisme du clip. Puisque les visages des deux artistes disparaissent et réapparaissent tels des esprits égarés. A chaque instant, baignés de lumière. Jusqu’à ce que des néons viennent éclairer les corps, créant un clair-obscur lumineux et chaleureux. A l’image de Natten, le dernier album de Fredrika Stahl.
Pam risourié – So Be It, Eternity
Le groupe darkgaze parisien pam risourié revient et continue de nous mettre des étoiles plein les yeux avec So Be It, Eternity, un nouveau titre aux riffs de guitares lancinants gorgés de réverb’ et à la voix rêveuse qui nous emmène loin, bien loin, dans les torpeurs d’un monde imaginaire, avec des paroles oniriques et envoûtantes qui rêvent la vie : “What happened to my sole dream / To dream my life away” et nous mettent des images poétiques plein la tête : “all those stars in my veins”. Le clip à l’esthétique 90’s qui accompagne le morceau réalisé en Finlande par Janne Kokkonen, superpose les images et continue de nous hypnotiser.
Avec So Be It, Eternity, le groupe annonce la sortie 11 juin prochain de leur troisième EP du même nom, qui succèdera à leurs deux excellents premiers, Rituals (2019) et Noctessa (2020) (dont on vous avait parlé). Et la bonne nouvelle n’arrive pas seule puisqu’un album live intitulé I Only Play For You Once a Year enregistré lors de leur concert au Trabendo – où le groupe s’est produit en septembre dernier – verra le jour en même temps, et l’on a aussi appris que les musiciens travaillaient sur le premier album. On a hâte de les découvrir !
Klein – Chanson de Lili
Il y a une légèreté solaire à la Chanson de Lili, titre tout en apesanteur de KLEIN, le superbe projet solo instrumental de Benjamin Porraz, autrement guitariste de Clara Lucciani. Le musicien a sorti son tout premier album éponyme il y a peu, et nous présente cette semaine la vidéo qui accompagne ce morceau doux et rêveur aux claviers éthérés et à la guitare lancinante. Il s’agit d’une animation poétique aux couleurs pastels réalisée par Nevil Bernard (qui a également réalisé des clips pour Catastrophe), où l’on peut voir des cactus, une chaîne stéréo et un humain fondre de chaleur sous le soleil écrasant d’un désert, avant de se transformer en flaque d’eau puis de s’évaporer en nuages, ce qui pourrait être une allégorie de la légèreté que l’on ressent et qui nous fait fondre à l’écoute de la chanson… on peut aussi y voir la silhouette du guitariste évoluer dans des motifs psychédéliques qui finissent de nous hypnotiser…
Chanson de Lili figure sur Klein avec sept autres morceaux instrumentaux aux vibes psyché 70’s et nous vous conseillons fortement leur écoute !
Veik – political apathy
Veik, nous présente cette semaine Political Apathy, un titre aux influences krautrock et new wave au synthétiseur analogique vintage et à la guitare post punk abrasive. Les paroles introspectives parlent des structures qui forment nos esprits : “We are shaped by these invisible forces / Surrounding structures” ou “Everybody should look at their mind / it’s terrifying how you’re feeling blind”. Le chanteur et batteur du groupe Boris Collet écrit du titre : “Political Apathyraconte l’histoire d’un homme qui, depuis chez lui, témoigne d’une dissonance entre ses croyances (ou du moins ce qu’il pense être ses croyances) et leur manque de mises en œuvre concrètes. Implicitement, il s’agit des manifestations des gilets jaunes, que le personnage en question regarde depuis sa fenêtre. Ce n’est pas une chanson protestataire, mais un titre introspectif d’éveil pour les gens indolents.”
Le clip en 3D numérique réalisé par Mathieu Hubert (Matbert3000) & Johnann Van Aerden (Vander2000) nous emmène dans une bouche chantante avant de nous propulser dans d’autres parties internes du corps humain…
Political Apathy est le deuxième single du premier album du groupe, Surrounding Structures, qui sortira le 30 avril sur Fuzz Club Records.
Special Friend – Ennemi Commun
Décidemment, ce début d’année 2021 fait la part belle au retour des guitares et à ce petit jeu l’excellent label Howlin Banana Records n’est jamais loin. Et cette semaine, ce sont les franco-américain de Special Friend qui débarque avec un nouveau titre, Ennemi Commun, titre qui donnera aussi son nom à l’album prévu pour le 26 mars.
On retrouve dans ce morceau toute la spontanéité du groupe et ce côté DIY qui colle parfaitement à leur musique. Un son brut et cadre, l’album ayant été enregistré sur un 8 pistes, qui tranche avec la douceur des voix qui se mèlent à la perfection pour nous charmer totalement.
À la douce mélancolie du morceau se mèle celle des images puisque le groupe nous propose de nous plonger dans des souvenirs du monde d’avant avec des images délavées de leur tournée américaine au mois de mars 2020. Des images qui au fur et à mesure du clip se délavent et perdent de leur clarté comme un souvenir qui disparaitrait progressivement de nos esprits.
Danny Elfman – Kick Me
Attention, petit choc en vue ! Si beaucoup d’entre nous connaissent Danny Elfman a travers son travail de compositeur ou les excellents Oingo Boing, il est certains que cette musique va vous surprendre.
Si on retrouve le goût de l’américain pour une musique grand-guignolesque et très théâtrale, c’est du côté métal qu’il nous embarque avec Kick Me. Un shoot d’adréline d’à peine plus de deux minutes dans lequel il interroge sur le rapport à l’image à travers le prisme de sa propre personne.
Le morceau nous présente un personnage qui affiche à la fois son dégoût pour le monde tout en recherchant son amour et son approbation. Une schizophrénie musicale qui trouve tout son sens dans les derniers instants où dans une frénésie sonore kick me et love me s’alternent sans pose.
La vidéo de Petros Papahadjopoulos prolonge cette folle dualité en nous offrant un clip complètement fou, nous emenant au plus près de l’étrangeté et du malaise. Des images chocs et déconseillées aux épilpetiques qui permettent surtout de découvrir les fabuleux tatouage de Danny Elfman.
L’artiste a prévu de dévoiler un titre chaque onzième jour du mois (en rapport à son nom de famille Elfman, Elf signifant onze en allemand) et on se demande où il nous emménera au mois d’avril.
Tony Allen – Cosmosis feat. Skepta, Ben Okri
Tony Allen n’en a visiblement pas fini avec nous. Malgré son décès il y a bientôt un an, son dernier album n’est pas encore paru. En effet, Blue Note a annoncé l’arrivée prochaine de There Is No End, co-produit notamment avec Damon Albarn et Remi Kabaka.
Si le nom de Tony Allen ne vous parle pas, vous l’avez sans doute déjà entendu. Génie de la batterie, ayant collaboré avec les plus grands, il a par exemple signé le groove si fin de La Ritournelle de Sébastien Tellier. C’est donc avec plaisir qu’on prendra une dose de rab, avec ce premier single Cosmosis déjà, qui nous emmène sur des terrains très groovy et hip-hop.
On se perd dans les dribbles de caisse claire et de grosse caisse et au rythme des images qui rendent un bel hommage au Nigérian qui doit être très fier de voir ces dernières productions voir le jour. On aime, on prend un bain de nostalgie, et on en redemande. Rendez-vous le 30 Avril pour There Is No End.
ROUGE CONGO – Abandonné
Si l’on regarde Rouge Congo, on verrait deux garçons qui jouent tel des équilibristes entre le rêve et la réalité, basculant sans prevenir d’un côté où de l’autre au rythme de leur chanson. C’est cette idée qui traversait de part en part leur précédent opus l’île noire et de leur précédent EP.
Cette idée traverse aussi Abandonné, pop song aérienne qui traite des souvenirs, de la façon dont ils trahissent parfois une histoire et un moment et comment ils peuvent nous hanter.
Comme toujours avec les rémois, le clip joue une place centrale dans leur univers. Très esthétique et énigmatique, on voit le duo enfermé dans une maison, une boucle dont ils semblent prisonniers, regardant l’exétieur sans jamais pouvoir y retourner et préférant s’enfermer dans le souvenir et ce qu’il aurait pu donner plutôt que de se confronter au réel.