Les clips de la semaine #76 – partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont à la fois fait vibrer ses yeux et trembler ses oreilles. Tout de suite, voici la seconde partie de la soixante seizième édition des clips de la semaine.

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Nerlov – Acide

Si l’on suit les conseils de l’assurance maladie, un bon brossage de dents doit durer environ 2 minutes. Cela tombe bien, c’est à peu près le temps que dure cela prend à Nerlov avant que tout ne parte en couilles dans Acide.

L’angevin, qu’on avait découvert il y a un an avec un premier EP fabuleux (chroniqué ici et interviewé par là) est de retour cette semaine avec Acide et semble prolongé sa formule du pain dans la gueule qui prend les apparats d’un câlin pour mieux nous fracasser par surprise.

On pourrait voir dans le morceau une sorte de slow presque accueillant qui, comme toute rose qui se respecte, recèle de pas mal d’épines. C’est dans les mots que Nerlov nous frappe et s’autorise à cracher sa bile. Solitude, rapport biaisé à la virilité, colère intérieure … Tout y passe et nous entraine avec lui. Parce qu’au fond le discours extrême du garçon n’est qu’une amplification de tout ce qu’on a ressenti un jour et sans doute pour ça qu’il nous touche en plein cœur.

Visuellement, on vous en parlait plus tôt, Simon Higelin & Nathan Houé nous entraine dans une sale de bain digne d’une bonne apocalypse. Un plain fixe qui distille doucement son malaise comme un poison qui prendrait place dans nos veines. Percutant et fascinant, idéal pour nous faire patienter jusqu’à la sortie du nouvel EP prévu pour cet automne.

CORPS – Et si tu n’existais pas (Joe Dassin cover)

Soyons honnête, cela fait bien deux ans qu’on trépigne d’impatience à l’idée de voir CORPS débarquer avec son premier album. L’attente a désormais une ligne d’arrivée fixée au 28 mai, date de sortie de CARNIVORE.

En attendant d’en dévoilé les tenants et les aboutissants, CORPS nous offre un petit apéritif rouge sang avec une reprise du Et si tu n’existais pas de Joe Dassin. La filiation n’est pas la plus évidente et pourtant à l’écoute, cette histoire de sexe et d’amour déçu, un brin totale colle parfaitement aux ambiances de l’artiste.

Il transforme ce classique de chanson française en une sorte de morceau hybride, sensuel, moite et qui n’hésite pas au milieux de ses vagues électroniques et de ses rythmiques de guitare minimaliste à s’offrir de grandes envolées lyriques à base de corde.

C’est aussi inattendu que réjouissant et ça s’accompagne d’un clip minimaliste à base de bouche à contre temps et de rouge omniprésent. Une charte graphique qui semble coller à CORPS et qui risque de bientôt inonder nos yeux et nos oreilles.
Le rendez vous est pris, on a hâte.

Felix – Mad Science Sad Club

On connaissait Léo Adrover en tant que photographe et réalisateur, pourtant l’année passée, le garçon a troqué ses appareils visuels pour sa guitare et s’est réinventé sous le pseudonyme de FELIX.

Il nous a alors offert un premier EP prénommé Wolf qui agissait sur nous comme un véritable conte sonore insturmental. Un an plus tard, il semblerait que le garçon ai trouvé sa voie et sa voix, puisqu’il est de retour avec un nouvel EP sur lequel il chante enfin.

On y retrouve ce titre Mad Science Sad Club, un morceau qui jongle parfaitement entre ambiance profondément positive et enlevée dans laquelle baigne une douce mélancolie à la tendresse qui nous emporte.

Un titre qui nous invite à danser les yeux embués de larmes et qu’il accompagne cette semaine d’une vidéo qu’il réalise lui même et dans laquelle il alterne des plans kaléidoscopiques et colorés de lui à la guitare et des images d’archives d’une vie heureuse et insouciante qui semble pourtant de plus en plus nous échapper.
Une vidéo qui permet de visualiser parfaitement toutes les émotions qui existent dans ce superbe morceau.

Mad Hatter, son second EP, est déjà disponible sur les plateformes et on vous en parler très bientôt.

BOB PASSION – Couvre-toi

Chez La Face B, on aime beaucoup les losers magnifiques. Parce qu’on se sent proche d’eux. De ces garçons et filles qui se plantent, qui nous racontent leur histoires d’amour et d’amitié un peu foireuse mais qui le font avec tellement de panache qu’ils finissent par conquérir nos cœurs.

Et il semblerait qu’on se soit trouvé un nouveau héros en la personne de Bob Passion. Déjà rien que le choix du nom dénote d’un second degré qui ne peut que nous charmer. Et autant dire qu’à l’écoute de son premier titre, Couvre-toi, le garçon a définitivement tout bon.

Un titre en français pour un morceau en anglais, une pop qui prend le soleil et nous emmène directement sur les plages californiennes où dans les soirs d’été où l’on regarde le ciel en comptant les étoiles. Cela dit, le morceau peut aussi devenir le remède idéal à un dimanche matin pluvieux où l’on cherche un peu de réconfort alors qu’on est planqué sous la couette. Bref, Couvre-toi est un morceau qui fait beaucoup, beaucoup de bien.

La vidéo de Thomas Bringuier en est une expression visuelle directe. On plonge dans l’univers de Bob Passion, un monde à la frontière du rêve et de la réalité, volontairement décalé et tendre avec une esthétique DIY très prononcée.
Tout cela appelle à l’arrivée d’un premier EP qu’on scrutera avec beaucoup d’intérêt.

Janie – Mon Idole

La petite blonde Janie vient de sortir un tout dernier clip… ce serait le dernier clip qui illustrerait son 1er EP, Petite Blonde, qui est sorti le 30 octobre dernier. Ce clip c’est celui de « Mon Idole », sans conteste le titre le plus touchant et le plus émouvant de ce disque, puisqu’il est une déclaration d’amour, non pas à une star de la chanson dont la chanteuse aurait été fan plus jeune et qui lui aurait donné envie de faire de la musique, mais à l’homme de sa vie, son père. Quoi de plus poignant en plus, quand on sait que Janie tire son nom de scène de ce père, qu’elle a perdu très jeune, fusionnant ainsi son prénom « Julie » au sien « Jany ». Un père qui l’a initié à la chanson française, aux bals musettes, à la variété… Alors pour ce titre, Janie a voulu faire différemment, elle a vidé son compte instagram, comme pour créer un bel écrin qui portera les images extraites de ce clip, comme si elle ne voulait pas que ce titre soit mélangé aux autres, comme si elle voulait le préserver, lui donner un endroit réservé.

Pour le clip, Janie a refait appel à Elisa Baudouin, qui a déjà réalisé les clips de ses titres « Nino ou Rose », « Depuis Samedi » et « Les Mêmes Chansons »… mais qui est également connue pour avoir réalisé le clip du duo Terrenoire « Mon Âme sera vraiment belle pour toi ».
Janie a fait le choix du noir et blanc, un choix qui dénote par rapport à ses précédents vidéos, la photographie quant à elle et la direction artistique du clip rappellent également beaucoup les films de La Nouvelle Vague. Et comme nous le racontions dans la chronique dédié à son EP, « Mon Idole » se décline comme une chanson triste, en piano-voix, jusqu’à ce que la musique s’arrête et qu’un accordéon ne se fasse entendre, entamant une musique de guinguette, alors que la voix de Janie s’élève et déclame une lettre qu’elle a écrite à son père, après sa mort. Dans le clip, ce passage est passé en couleur, et on voit Janie danser avec une figure paternelle, sur une plage déserte, avec des petits fanions d’un bal passé.

Distractions – Royal Cheese

https://www.youtube.com/watch?v=sopaOs8ZsWw

Une musique centrée sur le texte, telle est la mission de Distractions. Le groupe français travaille sur une poésie brute ensuite transformée pour le chant et la musique. En résulte une musique hybride où la colère des mots se colle à des nappes électroniques qui gagnent par moment en intensité et en puissance pour coller aux envolées des mots qu’on n’a plus envie de garder pour soi.

Royal Cheese parle de l’humain, des hommes qui s’abiment et qui se noient, dans des routines, des violences et des petites humiliations du monde qui les entoure. Tour à tour acteur et observateur, le morceau nous entraine dans ce quotidien fait de vexations qui ne semblent jamais briser la fierté des personnes.

La vidéo, qui agit comme un véritable court métrage, prend le texte au corps et nous entraine au plus prêt d’un de ces anonymes qui ne semblent pas vouloir se résoudre à la condition que l’on voudrait pour lui. Une vidéo puissante, presque naturaliste et qui rappelle que l’existence est un combat quotidien qui nous fait parfois chuter mais dont il est important de se relever pour pouvoir embrasser ce que l’on est au plus profond de soi.

Elliot Maginot – Holy Father

La figure du père a toujours une place importante dans la vie de tout un chacun. D’abord guide et figure d’admiration, il devient celui qu’on affronte et que l’on défie pour enfin être celui vers qui l’on revient.

C’est ce questionnement qui guide Holy Father, le nouveau titre du montréalais Elliot Maginot. Le morceau pop-folk gagne au fur et à mesure de la durée en intensité, l’importance du propos étant surélevé par la voix unique de l’artiste ainsi que par les percussions et le quatuor à corde qui l’accompagnent.

Cette idée de transmission et de défi nourrit aussi la vidéo de Adrian Villagomez. On y suit un jeune homme seul avec son père qui semble devoir suivre le chemin que celui-ci a tracé pour lui. Jusqu’au jour où le garçon se confronte à un autre moyen d’expression, une autre manière d’envisager la vie et dans laquelle il se plonge afin de se dévoiler à lui même. Une vidéo superbe, portée par des images saisissantes et qui collent parfaitement au message du morceau.

Adam Carpels – Ulysse

Si on se réfère à la mythologie grecque, Ulysse est celui qui, de part sa mort, a mis fin à l’ère des héros. Il est aussi le personnage centrale du poème l’Odyssée.
Adam Carpels s’empare du nom du héros pour son nouveau titre et se permet de relier par la métaphore, le passé et le présent. Son titre parle de ceux qui aujourd’hui prennent la mer à la recherche de liberté et d’un monde meilleur : les migrants.
La musique du nordiste embrasse ces péripéties et fait de Ulysse, une épopée musicale évolutive sombre, portée par des influences diverses et ouvertes sur le monde. Le morceau navigue ainsi entre un onirisme certains et la brutalité du monde qui nous entoure.

Pour accompagner le titre, Adam lance une série de vidéo nommée Panorama qui ont pour ambition d’être une carte blanche à des artistes visuels à travers une image en plan séquence. Pour ce premier numéro, il laisse Sofian Hamadeïne-Guest exprimer sa vision du morceau derrière la caméra, nous emmenant à Barbès et posant sa caméra dans ce quartier multi-culturel en perpétuel évolution. Une manière de ramener le morceau dans le réel tout en accentuant le côté onirique à travers des montages visuels qui superposent les vidéos pour en extraire toute la force.

Josman – Goal 

Le JOS nous offre cette semaine un deuxième clip pour son EP MYSTR J.O.$. Après l’excellent F*cked Up 4 intro du disque, c’est au tour du morceau de clôture Goal de nous dévoiler une vidéo hypnotique.
On accompagne le rappeur dans son univers nocturne et l’expression de ses démons, entre verdure bourbon, femmes et réflexion permanente.
C’est HELMI qui réalise le clip avec une esthétique toujours incroyable et ce rouge incandescent qui rappelle le feu que crache Josman mais surtout cette tension permanente et cette réalité à laquelle il sait faire face, en lévitation dans le seum et l’ivresse « toujours aussi loin du rivage, bonheur en mirage, pas de miracle ».
On se retrouve à la croisée des humeurs du rappeur, entre mélancolie et pragmatisme, un phrasé toujours parfait et cette étrange impression que Josman navigue à l’aveugle mais ne perd jamais le cap.

S.TÉBAN – Audemars

On avait laissé S.TÉBAN en janvier dernier avec son banger PARIS DAKAR en featuring avec Alonzo. Le talentueux rappeur marseillais reste dans le thème du désert avec un nouveau clip pour son morceau Audemars filmé dans le les plaines de sables de Dubaï, avec un coucher de soleil sanguinolent et magnifique.
L’artiste nous offre un morceau planant avec un refrain chanté et cette volonté de mettre au poignet une Audemars, tout le titre repose sur cette réussite matérielle qui attire tant le rappeur, on l’accompagne dans ses couplets et ses gestus dans des paysages et des gamos toujours plus époustouflants.
« Dinero ici ou autre part », S.TÉBAN sait ce qu’il a à faire pour réussir et on ne demande qu’à être témoin de cette ascension

Timothée Joly – Glaçon

Après nous avoir dévoilé Un coeur, premier extrait de son EP à venir, Timothée Joly revient aujourd’hui avec un clip pour Glaçon, son nouveau morceau.
On connaissait le talent artistique du chanteur mais il faut dire que sa créativité dépasse toutes nos espérances, c’est dans un clip magnifique qu’on le retrouve pour un morceau explicite sur les démons qui le hantent et ce poison qui coule dans ses veines.
Toujours à la croisées des aigus et d’un grave venu des profondeurs, l’artiste nous emmène dans son univers musical si futuriste, où la musique électronique vient se heurter à la chanson française dans un mélange pop si rafraichissant. Et ça tombe bien parce que que Glaçon c’est le titre de ce morceau et dans ce clip on retrouve un Timothée Joly couvert d’une texture argentée dans un décor bleu glaçant, puis dans un fond orange et plus chaleureux par moment avant que la glace ne reprenne le dessus finalement.
Les tenues de l’artiste contribuent à créer un personnage aussi froid que fascinant et c’est un tout qui nous hypnotise pour une prestation 4 étoiles.
A défaut de nous réchauffer, Timothée Joly sait nous émerveiller et nous faire voyager, vivement l’EP….

Kabbel – Lights Go Out

Alerte forte vague d’émotion en approche. Après nous avoir surpris avec son premier clip Young Again il y a quelques semaines, notre nouveau coup de cœur du mois nous offre une seconde vidéo tout aussi saisissante : Lights Go Out.

Si Kabbel définit son style comme du Queer Sadcore, on ne peut lui refuser d’avoir trouver une nouvelle formule tant sa musique est singulière. Cette étrangeté sonore sortie de nulle part, mêlant de doux passages pop hachés par de courts instants electro bien plus énervés, se ressent également dans la vidéo. L’artiste se met en scène seul dans de grands espaces vides, nous invitant à rejoindre cette solitude; pour cela, il suffit de suivre le son de sa voix

L’image se fait secouer dans tous les sens, tantôt habitée par des vagues, tantôt envahie par un intense grain; la netteté n’est pas au programme. Tenez-vous au courant, son premier EP End Of Norms, sortira le 16 avril, et vous vous en doutez, on sera les premiers à en parler pour notre plus grand plaisir ! 

BUNGALOW DEPRESSION – Hold Me

Eh ! Vous avez besoin de stimulants ? Venez par ici et écoutez un petit peu ! La scène rouennaise a encore de belles pépites visuelles et sonores à vous montrer. Cette semaine, c’est un titre de son premier album sorti en novembre dernier sur le label SOZA, que le groupe décide de nous illustrer au travers d’un clip dédié aux fans du stroboscope.

Véritable délire graphique, on y retrouve un performeur sauvage, aka Edward Aleman, se débattant dans une cage en verre. Si le clip est avant tout une métaphore du combat que chacun mène en interne face au sentiment amoureux, notre petit Edward semble avoir de nombreux démons à combattre.

Petit à petit, le trip visuel nous saisit la rétine, modifiant l’image à sa guise, que l’on retrouve tant ondulée que saccadée. Après la grosse claque que nous offrait avec The Whirl en mai dernier, la bande de Rouen nous prouve ici qu’elle n’a rien perdu de son talent. Et si vous avez raté leur album Blank Slate, on vous laisse aller fouiner pour rattraper cette cruelle erreur.

Para One – SPECTRE: Shin Sekai

Figure culte de la scène électronique française, cela fait bientôt 10 ans que Para One a délivré son dernier album, Passion. Depuis, Jean-Baptiste de Laubier n’avait pas totalement disparu puisqu’il était devenu le miroir sonore du cinéma de Céline Sciamma.

On est donc aussi surpris que ravi de le voir de retour et mes aïeux, quel retour ! Shin Sekai est une véritable secousse, une introduction à un projet plus large intitulé SPECTRE et qui s’écoute comme un hommage absolu à Kenji Kawai et plus particulièrement à la bande son monstrueuse de Ghost In The Shell. Le morceau est un véritable terrain d’expérimentation, une lente montée en puissance qui vient nous maintenir en tension par ses cordes, ses percussions apocalyptique ou les chants effectués par Le Mystère des Voix Bulgares.

Le clip de William Laboury n’est pas en reste puisqu’il nous offre une véritable expérience lui aussi, une exploration de l’esprit humain en forme de feu d’artifices visuel qui semblent résulter de l’effet de la musique sur l’esprit de la personne au coeur de l’expérience.

Tout un programme à l’ambition démesurée qui nous rend plus qu’impatient concernant la suite de SPECTRE.