Les clips de l’été – Partie 1

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Si La Face B a pris des congés, la musique a continué à faire vivre notre été. On vous a donc sélectionné les clips qui nous ont accompagné entre fin juillet et fin août. Première partie tout de suite.

Disiz – Ton ventre

Trois ans après L’Amour, album où il explorait les liens familiaux, amoureux et intimes, Disiz revient avec Ton ventre, un titre et un clip qui s’inscrivent dans la continuité de son œuvre. La filiation et la relation mère-enfant, déjà centrales dans sa discographie, refont surface. On se souvient de Madeleine, dédiée à sa fille, ou plus récemment de Try Try Try sur Colors, hommage bouleversant à sa mère disparue.

Avec Ton ventre, Disiz s’attache de nouveau à cette mémoire intime et corporelle, en évoquant l’absence de son père, l’amour maternel et la paternité. La force du morceau réside dans sa capacité à mêler émotion et production pop mélancolique, un registre qu’il a affiné au fil de ses dernières années de création.

Le clip, co-réalisé par Luana Bajrami et Sandor Funtek, accompagne cette intensité avec des images casi sensorielles. Les textures dominent : la peau, le sable, l’eau, qui renvoient à la mémoire physique des liens familiaux. Disiz apparaît plongé dans une eau aux accents amniotiques, perdu entre flashbacks de jeunesse sur les quais du RER, moments de tendresse avec sa mère et séquences plus sensuelles.

Un travail visuel et musical qui confirme la place de Disiz et sa capacité à transformer son vécu en matière universelle.

The Lemonheads – The Key of Victory

The Key of Victory est le troisième extrait de l’album à paraître Love Chant – sortie prévue le 24 octobre 2025 chez Fire Records. Après le mordant In The Margin et l’intensité nerveuse de Deep End, ce nouveau morceau ralentit le tempo pour offrir une respiration profonde, à la fois mélancolique et introspective. Il s’ancre dans une douceur modale, tissée par la guitare en arpèges presque bossa d’Apollo Nove, et les harmonies riches et sensibles d’Erin Rae. La production apporte cette touche brésilienne dans la fluidité rythmique et dans la chaleur qu’elle dégage. La voix traînante d’Evan Dando y trouve un écrin délicat pour briller pleinement.

Le refrain — “I’m livin’ in the key, I’m livin’ in the key of victory” — fonctionne comme une affirmation en particulier après le pont. Ce troisième extrait dévoile une facette plus apaisée et intérieure de Love Chant, mais toujours chargée émotionnellement.

Écrite avec David Ashby (Rum Shebeen) et enregistrée à Abbey Road, The Key of Victory se distingue par ses paroles lucides et désarmantes :
“It’s not the comfort / It’s the truth that sets you free / And still it hurts to say it / You know it hurts to be me.”

Evan Dando y aborde la nécessité douloureuse d’être honnête, surtout envers soi-même. Il explore la tension entre vérité et malaise, et les conséquences qu’elle entraîne : silences, pertes, vulnérabilité. Comme il le résume : « C’est calme, c’est génial. C’est joli et c’est modal. J’essayais de créer une ambiance à la Street Hassle, vous voyez ? »

Un morceau un peu à la Lou Reed, dans la diction flottante, les arrangements dépouillés, la lucidité crue.

Réalisé par Sick Jim, le clip tranche avec les précédentes vidéos par sa simplicité volontaire. Les paroles y défilent en bulles, façon roman graphique psychédélique : un karaoké halluciné, entre bouches chantantes et bubble letters sous fond de backgrounds animés. Les couleurs et formes mouvantes en boucle soulignent la dimension introspective du morceau. Tout converge vers l’essentiel : guitare, voix, message. Le pont, passage culminant et suspendu, laisse place à un refrain doux et entêtant. À l’image de la chanson, le clip crée un espace contemplatif, presque méditatif, efficace et impactant.

En somme, The Key of Victory est un bijou discret, une chanson en retenue, où chaque mot compte. Moins immédiat que les précédents singles, ce titre modal et aérien révèle toute sa richesse à force d’écoutes.

Retrouvez The Lemonheads en concert cet automne en France :
Le 18 septembre – Paris, Café de la Danse
Le 20 septembre – La Roche-sur-Yon, Quai M

Mac Demarco – Holy

Mac DeMarco dévoile Holy, extrait de son album Guitar, paru le 22 août 2025 sur Mac’s Record Label, son propre label. Après Home, ballade épurée et mélancolique, Holy propose une méditation douce et spirituelle, portée par une voix calme et une mélodie apaisante.

Une narration à la fois spirituelle et divine explore la quête de sens, le poids intérieur à porter, ainsi que la tension entre lumière et obscurité :
“Miracle, reveal yourself to me / Miracle, your help could set me free…”
— “Curse, carried on forever in me / Curse, from which I may never be free /
Curse from down below / Holy

Sous ses airs décontractés, Holy de Mac DeMarco parle d’un combat intérieur et de cette dualité entre espoir spirituel et fardeau personnel. Il y exprime un désir de rédemption, invoquant un « miracle », tout en reconnaissant une malédiction — ou « curse » — profondément ancrée en lui et difficile à briser. Musicalement, la simplicité de la composition renforce la sincérité et la clarté du message, avec une voix presque mystique.

Comme pour Home, Mac a réalisé lui-même le clip de Holy, mêlant absurdité et symbolisme. Il raconte, fidèle à son humour décalé : « J’ai pataugé dans l’océan tout habillé pendant deux heures… mais c’est la scène où je tombe dans le jardin et mange une pomme qui a fini par être la meilleure. Merci de m’avoir écouté. » Dans ce clip, Mac DeMarco nous chante Holy les yeux dans les yeux — filmé en contre-plongée via son portable fixé sur une perche, il lance la chanson et on le suit le temps d’une balade chantée. Il marche et court dans la verdure, attrape une pomme, puis la croque.

Guitar est un projet entièrement fait maison : écrit, enregistré, mixé (au Canada), filmé et même photographié par Mac DeMarco dans son studio de Los Angeles. Seul le mastering a été confié à David Ives. Un album intime et profondément personnel, fidèle à l’éthique DIY de l’artiste.

Vous pourrez découvrir Guitar en live le 25 octobre à la Salle Pleyel (Paris), accompagné de Mock Media, groupe originaire de Vancouver et signé sur son label.

The Beths – Mother, Pray For Me

Les néo-zélandais de The Beths, emmenés par leur chanteuse Elisabeth Strokes, dévoilaient au début de l’été Mother, Pray For Me, le troisième single/clip vidéo extrait de leur nouvel album, Straight Line Was A Lie, tout juste sorti.

Un morceau dépouillé et introspectif qui aborde la question de la relation et de l’amour filial dans toute sa complexité. Elisabeth Strokes précise « Ce n’est pas vraiment à propos de ma mère, c’est à propos de moi : ce que j’espère que notre relation soit, ce que je pense qu’elle est, ce qu’elle est peut-être réellement, et ce que je peux ou ne peux pas en attendre. » On est touché en plein cœur par la voix de Strokes, à la fois pure, juste et fragile.

Une profonde mélancolie s’en dégage, qu’on retrouve dans le clip réalisé par Annabel Kean et Callum Devlin. On y voit Elisabeth Strokes seule, pensive, jouant de la guitare à la tombée de la nuit, puis en train de naviguer sur un petit bateau à voile. Ce petit bateau, elle le quitte puis le regarde, la nuit tombée. Une métaphore en somme du chemin entamé par Strokes vers sa relation avec sa mère, sans en avoir encore trouvé l’issue.

Freddie Gibbs & The Alchemist – 1995

Le 25 juillet signe le retour d’une saga dont le premier opus date de 2020. Il s’agit d’Alfredo 2, projet collaboratif porté par le producteur The Alchemist « Al » et le rappeur Freddie Gibbs « Fredo ». Après un premier album ancré dans l’univers du Parrain, direction le Japon pour une ambiance Yakuza. La sortie du disque s’accompagne carrément d’un court métrage, et du clip du morceau 1995, qui ouvre l’album.

Dans celui-ci, on découvre « Alfredo’s », restaurant de ramen qui sert de couverture aux activités illégales de nos deux protagonistes. En bon représentant du « coke rap », Freddie Gibbs nous entraîne dans un univers de trafic et de crime organisé. Tout cela dans une esthétique travaillée et cinématique propre à ce type de rap – et avec une dose de second degré (dont une scène de règlement de compte avec des mascottes).

Sans glorifier cette vie qui n’est plus la sienne, il raconte son histoire et débite des rimes sur une production planante de son acolyte. 1995 et son clip signé Nick Walker sont une belle introduction à Alfredo 2, qui est un incontournable de l’été. Clin d’œil à 1985 qui ouvrait le premier volume d’Alfredo, on y retrouve le duo au sommet de son art et on en redemande. 

CMAT – EURO-COUNTRY

Prévu le 29 août, le troisième album de CMATEURO-COUNTRY est déjà doté d’un single éponyme et d’un clip engagé, réalisé par Eilis Doherty.

L’artiste explique dans le média NME les trois significations cachées dans le titre de son album : le style de musique qu’elle produit, les dérives du capitalisme moderne et l’Irlande, son pays, régi par l’Euro. Dans EURO-COUNTRY, elle multiplie les références au Tigre Celtique, période de croissance économique soutenue qu’a connu l’Irlande dans les années 1990 et 2000. Une période d’espoirs, déçus par le crash de 2008 qui a frappé le pays de plein fouet.

Symboliquement, elle se met en scène dans un centre commercial de Dublin, lieu emblématique de la course à la consommation qui a marqué ces années. Sur un refrain entraînant et sous le regard étonné des passants, elle se fait la voix d’une génération en quête d’identité.

En témoigne le premier couplet magnifiquement interprété en Gaélique Irlandais.

VALD- Prozaczopixan

VALD a dévoilé cet été le clip de Prozaczopixan, extrait de son dernier album Pandemonium. Fidèle à son univers décalé, le rappeur s’y met en scène sur le tournage fictif d’une publicité pour un médicament, endossant tous les rôles : acteur principal, assistant de plateau, cadreur… Une satire grinçante de l’industrie pharmaceutique et médiatique.

Mais le clip bascule en deuxième partie, beaucoup plus sombre, tirée de la collaboration avec Vladimir Cauchemar et Todiefor. On y découvre une vieille femme seule, enfermée dans une maison, peu à peu hantée par VALD lui-même. Apparitions inquiétantes, ambiance sonore oppressante… le rappeur transforme son personnage en cauchemar éveillé. Le masque iconique de Vladimir Cauchemar devient l’élément clé de cette descente dans la folie.

Une œuvre visuelle dérangeante et créative, fidèle à l’univers hybride et provocateur de VALD.

Sorry – Echoes

Les Londoniens s’apprêtent à dévoiler leur troisième album Cosplay, attendu le 7 novembre, et en offrent déjà l’extrait le plus marquant à ce jour : Echoes. Inspiré d’un poème simple où un garçon crie “écho” dans un tunnel en espérant une réponse, le morceau se transforme en une puissante métaphore : celle de la perte de soi dans l’amour.

Le clip illustre cette idée avec force : deux jumeaux fusionnels, inséparables et passionnés, vivent une relation si intense qu’elle en devient inquiétante. Mais derrière cette mise en scène troublante, on comprend vite que l’artiste dialogue avec son propre reflet, son double intérieur. L’amour se fait miroir, avant que le moindre désaccord ne fissure cette union parfaite et ne la fasse voler en éclats. 

Soutenu par un refrain envoûtant, aux allures de mantra obsédant, Echoes frappe dès la première écoute et continue de résonner longtemps après. Un titre hypnotique qui s’impose comme l’un des plus beaux éclats de ce nouvel opus à venir.

FIDJI – Morning Rain (Pantless Record Session)

Il y a des matins de pluie qui invitent à se réfugier sous les draps. Mais pour FIDJI, c’est tout le contraire : le quatuor français choisit d’en faire un orage sonore. Avec Morning Rain, le groupe revient après deux ans de travail acharné, et signe un morceau incandescent où l’intime se transforme en énergie brute. On y entend la fin d’un cycle, les blessures qu’on traîne encore, mais aussi le point d’étincelle qui rallume la flamme.

Les guitares saturées frappent comme des éclairs, portées par une batterie à la cadence disco et dansante qui donne au morceau une tension unique : un contraste entre la douleur et la fête/. Ce jeu de clair-obscur rappelle autant l’efficacité incendiaire de Franz Ferdinand que les élans vertigineux de Foals, tout en conservant une identité profondément personnelle.

Morning Rain n’est pas seulement un single : c’est le premier chapitre d’une nouvelle ère pour FIDJI. Conçu au Globe Audio de Bordeaux, ce futur EP promet de marquer un tournant plus mature, plus intense, où la rage et la lumière se mêlent. Et si le morceau emporte déjà en studio, il prendra toute sa dimension en live : rendez-vousle samedi 13 septembre au Supersonic !

Flock of Dimes – Long After Midnight

Flock of Dimes, de son vrai nom Jenn Wasner, fait partie de ces artistes capables de nous envoûter rien qu’avec une voix et une guitare. C’est d’ailleurs par ce biais qu’elle a choisi de nous dévoiler une chanson de son troisième album solo The Life You Save, qui sortira en octobre prochain.

Long After Midnight c’est une chanson acoustique et mélancolique qui explore divers thèmes profonds : la codépendance, l’addiction et le sacrifice. Les paroles évoquent une narratrice qui offre un soutien inconditionnel à une personne en difficulté. Pour Wasner, cet album marque un tournant artistique particulièrement personnel, où elle témoigne depuis l’intérieur d’un processus encore en cours.

Visuellement, Spencer Kelly a choisi de retranscrire cette chanson grâce à un clip uniquement constitué d’un plan séquence en travelling arrière progressif. Cette technique n’a pas été choisie par hasard : le mouvement de caméra qui s’éloigne graduellement de l’artiste révèle le thème central de la chanson, l’idée de prendre du recul par rapport à une situation de codépendance.

Cette réalisation s’inscrit parfaitement dans la démarche introspective de Wasner et dans la tendance actuelle des clips musicaux, qui privilégient l’authenticité et l’intimité pour créer une connexion directe entre l’artiste et son public.

CLN – Buées // Black out

Colin Vincent ne connait pas l’oisiveté. S’il n’est pas derrière son clavier pour MUET, c’est qu’il œuvre pour son projet plus personnel voire intime CLN. C’est pendant l’été qu’il a décidé de partager le clip de Buées // Black out. Dans ce morceau – qui est en réalité la fusion de 2 issus de son EP Les pôles -apaisant d’un peu moins de 6 minutes, CLN renouait avec sa tendre affection des bidouillages électroniques.

Le clip de Buées // Black out pourrait raconter l’histoire de flottaison hors du temps, d’un échappatoire ordinaire. Des formes ondulent comme dans une lampe à lave, comme de l’encre qui se diluerait dans de l’eau. L’illustration de la banale poésie de la géométrie. Nul besoin de chercher de la force symbolique partout. Comme une véritable compilation d’images relaxantes pour mieux s’évader en douceur.

L’anecdote derrière ce clip est simple : le multi instrumentiste Colin avait compilé des images libres de droit et a profité d’une accalmie pour le partager au plus grand nombre. Un dossier caché de son auteur désormais révélé à tous.

Percheye – Drained Out

Tristan Rolland et son band reprennent du service. A l’ombre du soleil cognant de cet été, ils nous ont révélé la mise en images du single Drained Out. Présenté dans une parenthèse de l’intime d’un groupe, Percheye nous prend à témoins et nous embarque en studio avec eux. On délaisse le 19ème arrondissement parisien pour les studios bordelais de Cyrogène où le quatuor a tout donné pour sa nouvelle production à venir dans les prochains mois.

Percheye signe avec Drained Out un morceau à la limite du psyché, très indie dans son approche, il offre une bonne basse bien classy-groovy – oui on en vient à inventer des expressions pour vous chatouiller les oreilles – et un chœur féminin chaleureux. Un franchement bon morceau qui donne le ton d’un nouvel objet sonore sortant des sentiers bedroom pop empruntés par son chanteur quelques années auparavant.

Drained Out n’en est pas moins une chanson personnelle ce qui expliquerait sans doute ce choix de s’orienter vers les coulisses comme une mise à nu. C’est également un beau moyen de rendre hommage à la nouvelle formation initiée il y a maintenant un an.

Carla Chanelle – Juillet

Carla Chanelle nous a offert cet été le beau clip Juillet, tourné dans les rues de nos cousin.e.s belges ! Une musique parfaite aux accents indie-pop veloutés et sensuels, qui donne envie de rêver et de baisser les vitres de sa voiture. Vous savez, quand on passe la main dehors et qu’on la fait glisser au vent ? Eh bien voilà. Le clip est également une douce balade qui nous donne envie de flâner encore un peu dans les chaudes soirées de fin d’été.

OJOS – 100 Fois / L’amour ou le succès

Chez La Face B, on a parfois un petit côté prophète. Noga Erez étant une influence avouée, et parfaitement assumée, d’Élodie et Hadrien, on n’avait pas s’empêcher de leur demander lors de notre entretien si une version « against the machine » de leur musique pourrait un jour voir le jour.

Le temps a fini par nous donner raison puisque cet été, OJOS a présenté non pas un mais bien deux extraits de leur OUI FUTUR (NON MACHINES) à parraitre au mois d’octobre prochain.

Et le résultat est à la hauteur du talent de nos deux musiciens et donne une ampleur complètement différente à 100 fois et l’amour ou le succès. Entouré d’une palanquée (on aime beaucoup ce mot) de musiciens hyper talenteux, OJOS s’offre organique parfaite et superbe de sa musique. La section de cuivres claque comme il faut, les chœurs font parfaitement effet, la basse groove et le piano sonne. Ces deux morceaux, c’est redécouvrir sous un œil (et une oreille) nouveau, une musique qu’on pensait pourtant bien connaître, car on l’avait énormément écoutée.

Ça sonne terriblement bien et ça nous donne carrément hâte de découvrir la suite, et pourquoi pas fantasmer à un concert spécial de cette formule non machines.

Ryder The Eagle – The Girl With The Makeshift Tie

Comme une parenthèse mélancolique au cœur d’un été solaire, Ryder The Eagle a surpris dès la première date de la tournée de son nouvel album Smile, Hearse Driver!. À Mexico City, ville où il a longtemps vécu, il a offert ce qu’il décrit lui-même comme un concert d’adieu : un live réarrangé spécialement pour l’occasion, avec le Mariachi Band Los Dolientes. Les chansons de Ryder y prennent une dimension nouvelle, magnifiées par les envolées de trompettes, de violons et de guitarrones.

C’est dans ce cadre qu’il interprète The Girl With The Makeshift Tie, une ode à sa partenaire Eloïse Labarbe-Lafon, alias Bambi, qui le rejoint sur scène pour chanter ce duo. Complice de longue date, Bambi a réalisé la plupart de ses clips et visuels, reconnaissables à sa technique singulière de peinture sur photographie argentique. Leur échange a des accents de Birkin et Gainsbourg : une conversation intime, douce et presque improvisée, où transparaît leur quotidien sicilien, fait de routines simples et de nostalgie tendre.

La Sicile est d’ailleurs le berceau de Smile, Hearse Driver!, album dans lequel Ryder incarne cette fois-ci un conducteur de corbillard, conteur de solitude, de dérives sentimentales et de voyages cabossés. Après avoir été cow-boy désabusé dans Follymoon, puis marin égaré en quête d’amour dans Autotango, le voilà transformé en chauffeur lynchéen à l’écriture poétique et toujours lo-fi, où les ballades soft-rock sixties se frottent à des synthés eighties grinçants.

Ryder The Eagle continue ainsi de dévoiler ses multiples visages, chaque album ouvrant un nouvel univers plus surprenant que le précédent. Il s’apprête désormais à repartir sur les routes, pour une tournée fleuve d’une centaine de dates à travers le monde. À bord de son corbillard imaginaire ou non, il reste ce Léonard Cohen sous caféine : mélancolique, insaisissable et toujours bouleversant.