Les clips de l’été – Partie 3

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Si La Face B a pris des congés, la musique a continué à faire vivre notre été. On vous a sélectionné les clips qui ont accompagné notre été. Suite et fin avec notre troisième partie des clips de l’été.

Hotel Lux – Costermonger

Même durant cet été, nous n’avons pas perdu nos bonnes habitudes : nous satisfaire d’un ciel gris, accompagné d’une musique toujours aussi efficace, fournie par nos voisins du dessus.

Le retour des bien trop méconnus Hotel Lux en mai dernier a su nous donner toute la joie dont nous avions besoin. Le groupe a troqué les sonorités plus sobres et introspectives de leur précédent titre Another One Gone pour laisser apparaître leur propre son plus dynamique avec Costermonger. Deuxième extrait de leur second album, à paraître le 31 octobre, ce morceau déploie une rage progressive qui fait surgir une ode au quotidien, parfois morose, et assume le fait de se laisser happer par ce que ce décor pouvant cacher une source inépuisable d’inspiration.

Hotel Lux posent véritablement une pierre solide dans le vaste paysage indie rock britannique et conservent toujours leur franc-parler ainsi que leurs racines, qui ne demandent qu’à se déployer.

Tchotchke – Playin’ Dumb

Il est absolument hors de question de vous laisser plus longtemps dans l’ignorance : il est grand temps que vous commenciez, si ce n’est pas déjà le cas, à saliver à l’idée du second album des New-Yorkaises les plus mélodiques de ces dernières temps : Tchotchke.

À l’instar de leurs confrères et producteurs The Lemon Twigs, réjouissons-nous de voir un groupe oser déployer son esprit créatif au service d’une couleur musicale aussi mélodieuse qu’inédite dans le paysage actuel. Playin’ Dumb marque le quatrième et dernier extrait avant la sortie du second opus du trio, attendu pour le 5 septembre.

Parmi la multitude de projets qui déferleront dans les prochains jours, celui de Tchotchke s’impose déjà comme l’un des rares capables d’offrir un véritable moment de béatitude. Alors, accompagnez-nous dans cette excitation. C’est dans quelques jours que nous pourrons caresser ces nouveaux titres, tout en savourant encore ceux déjà parus, ainsi que leurs sublimes clips, de véritables douceurs à déguster comme des bonbons fondants.

Jo Vague  – No Disco

La musicienne Jo Vague augmente le BPM avec son titre No Disco. À ce genre souvent jugé trop kitsch, l’artiste répond par une techno brute, répétitive, fédératrice et instinctive.

Dans son clip, Jo Vague fait littéralement danser les animaux grâce aux animations kaléidoscopiques et psyché signées Angèle Chiodo. Les deux artistes, déjà complices au sein de leur précédent projet Carte Contact, transforment une boîte de nuit en une arche de Noé sous stroboscopes, où chaque créature trouve son rythme.

Loin du glamour, le clip bascule dans une transe joyeusement étrange, bizarroïde, comme un rituel collectif de libération animale. Une invitation à se déchaîner, sans poser de questions.

Gabriel Ajar – Crever trop tôt

En amour, les pensées et les fantasmes s’accumulent au point de nous faire dérailler voire crever ? C’est en tout cas l’inquiétude de Gabriel Ajar dans son morceau Crever trop tôt. L’artiste émergeant chante dans une pop aérienne qui tend parfois à ce rapproche de celle de Pierre de Maere : « J’accumule les mots, tout ce que tu peux dire, tout ce que tu respires avant même de le dire, je me bouffe le cerveau, je vais crever trop tôt »Lou Chrétien, réalisatrice et photographe sortie des Gobelins, immortalise les derniers instants de l’artiste que l’on voit chanter dans un cabaret avant de se transformer en ange et de rejoindre son amoureux dans un cimeterre. L’amour plus fort que la mort.

Baxter Dury – Schadenfreude

Baxter Dury continue sa mue pour notre plus grand bonheur. Si il avait déjà touché du doigt la musique électronique avec l’excellent projet BED ou certains featurings, Allbaraone semble être une plongée assumée et parfaite dans ce milieu musical qui semble lui sied à merveille.

La preuve avec l’excellent Schadenfreude paru cet été dans lequel l’anglais pose sa voix de crooner désabusé sur des nappes électroniques qui montent en tension et en puissance au fur et à mesure du morceau et où les chœurs féminins apportent une profondeur différente et étrange au morceau avant une explosion dansante décomplexée.

Schadenfreude c’est le plaisir malsain et il en est sans doute un peu questtion dans la vidéo de Gareth Bowen. Dans des allures étranges de film noir et de fin de soirée où tout déraille, on suit cette voiture dans laquelle Baxter Dury observe le monde et cet personne perdue qui semble la suivre à la recherche d’aide. Un petit trip psychédélique plus loin, c’est le jour qui succède à la nuit et Baxter Dury qui a disparu de la voiture alors que les ballons s’envolent dans le ciel. Un clip fascinant et mystérieux qui colle parfaitement aux ambiances dépeintes dans le morceau.

Pour le reste, c’est l’arrivée de l’album pour la fin du mois de septembre, une entrevue à venir sur La Face B et une grosse tournée française à l’automne !

Tom Odell – Ugly

Ugly est le 3ᵉ single que Tom Odell nous offre avant la sortie de son album A Wonderful Life le 5 septembre. Il y parle de « ce que l’on ressent en tant qu’être humain, quand on regarde le monde et qu’on a l’impression que tout le monde semble traverser la vie avec facilité, alors que notre propre expérience est tellement difficile et loin d’être agréable ». 
Les paroles, dans leur entièreté, nous laisse découvrir l’esprit d’une personne triste, qui a du mal à avoir confiance en elle

I wanna change my skin / Wish that I was taller / Wish that I was thin / Not just a reflection of people’s opinions. Un état d’âme blessée, qui n’arrive pas à reconnaitre sa propre valeur autrement que dans les yeux des autres.
Dans le clip, réalisé par Alex Leggat, qui a déjà travaillé avec Tom Odell sur le clip de Don’t Cry, Put Your Head On My Shoulder, on peut voir que le fond, un écran géant, est tapissé des commentaires sur l’artiste, que l’on suppose provenir de commentaires YouTube ou Instagram. Parfois bienveillants, souvent négatifs, ils apparaissent jusqu’à saturer la surface du fond, comme si Tom Odell lui-même se perdait et oubliait ce qu’il pense de lui-même, s’en remettant à une vision, déformée bien sûr, que les autres ont de lui. La 

caméra tremble toute la durée du clip, comme pour signifier la fragilité de l’estime de soi.En résumé, un morceau qui fait couler une larme, mais qu’on adore.

Vous pourrez retrouver Tom Odell en concert à Paris à l’Accor Arena le 31 octobre

Murman Tsuladze- Money

Murman Tsuladze, c’est un peu le Gainsbarre géorgien qui brûle un billet de 500 de la devise locale. Désormais en solo, l’artiste d’origine caucasienne à la coupe mulet réclame du cash fric sur l’air techno-dance de Money. Le clip rend hommage à une pratique bien connue en Géorgie et en Arménie : le shabash, un “pourboire” offert à des musiciens pour qu’ils jouent un morceau choisi. Ce terme, Murman l’a d’ailleurs pris comme titre de son dernier album, sorti fin mai.

Réalisé par Ianis Habert, le clip s’amuse avec les codes du mec friqué et arrogant : lunettes de soleil, poses ostentatoires, décors de château. Un jeu de rôle au millième degré qui colle parfaitement à l’esthétique décalée et au goût du non-sens de Tsuladze. Le tout qui flatte l’algo de TikTok, où le grotesque flirte avec le viral.

Punani – Mes lèvres rouges

Punani ou Bonnie Tyler ? Avec ses lèvres pulpeuses et sa perruque blonde XXL, l’ancienne candidate de Drag Race brouille les pistes dans son premier clip, baigné dans une esthétique eighties. Sur Mes lèvres rouges, une chanson pop aux accents glam-chic, Punani célèbre sa passion pour le cinéma d’épouvante de cette décennie.

Christophe Ideal, réalisateur dans la mode et la musique, filme Punani comme une créature à la fois redoutée et désirée, en témoigne le regard discret d’un homme caché dans un parking. Sensuelle et provocante, la drag queen joue sur tous les registres du fantasme, chantant ou murmurant des paroles teintées de mélancolie :
« Je retouche ma bouche amère / j’te plais dans le noir, j’en suis fière / j’étais une ombre au cœur de pierre / et tu m’as changée en lumière. »

Avec ce premier titre, Punani incarne une nouvelle idole queer, comme surgie du rayon « Giallo » d’un vidéoclub oublié des années 1980.

Léo SVR – Diagonale du vide

L’été peut aussi faire référence à la simplicité, et Léo SVR fait partie de cette idée avec Diagonale du vide, un morceau et un clip qui respirent l’authenticité. Le choix du titre est révélateur : la “diagonale du vide”, ce territoire français souvent décrit comme isolé, se transforme ici en manifeste artistique. Loin de l’image stéréotypée du rap bling-bling, il revendique un ancrage local et une esthétique du vrai.

Dans ses paroles, Léo raconte l’été tel qu’on le vit vraiment : les potes qui se retrouvent, les bières bien fraichent, la piscine qui devient décor central, et ces petites habitudes racontées avec humour, comme ce passage à la caisse automatique, à se demander si on prend une ou deux bouteilles en plus. Ce sont des détails, mais des détails qui font sourire, parce qu’ils sonnent justes.

Le clip illustre ce parti pris. Pas de villas au bord de la mer, pas de décors hors de portée, mais une atmosphère de vacances familières. Les images respirent la convivialité, captent les moments sans filtre et transforment la banalité en esthétique. Musicalement, l’équilibre est clair : la production funky et lumineuse amène des couleurs estivales, tandis que le flow de SVR reste posé, presque nonchalant. Ce contraste fonctionne à merveille : la légèreté de l’instrumental dialogue avec une interprétation qui respire la décontraction, renforçant l’identité du morceau. Là encore, pas besoin de forcer : l’énergie circule naturellement.

En bref, Diagonale du vide est un morceau pour se faire kiffer. Simple, sincère et authentique, ce moment ressemble à ce qu’on pourrait tous vivre, et c’est bien là toute sa force.

Wet Leg – davina mccall

Issue de l’album moisturizer sorti le 11 juillet dernier, davina mccall est une ballade sur l’amour, surprenante et simple, aux paroles qui montrent un amour dévoué et inconditionnel — Every day is spent trying to say something to make you smile.

Le clip est réalisé par Chris Hopewell, qui a déjà travaillé avec Radiohead. Un petit bijou d’animation en stop-motion, qui suit un groupe d’amis traquant un voleur de plumes. Des couleurs éclatantes, une atmosphère réconfortante, sur fond de musique de Wet Leg, on adore. 

Le morceau est vraiment un retour aux sources tout en douceur pour le groupe. Accompagnées par un bon riff de guitare, les paroles nous embarque dans un amour doux et pur — To spend an hour with you / Just say and l’ll come through / It’s kinda cold on earth anyway / When you’re not around.

Retrouvez Wet Leg en tournée et à Paris de 27 octobre, au mythique Olympia !

Tyler The Creator – Sugar On My Tongue

L’été a ses surprises, et Tyler, The Creator en a fait la démonstration en juillet avec la sortie inattendue de son neuvième album, Don’t Tap the Glass. Loin des introspections profondes de projets comme IGOR ou CHROMAKOPIA, il signe cette fois une œuvre résolument festive et dansante, pensée comme une bande-son éclatante pour accompagner la saison estivale.

Et parmi ces 10 morceaux, Sugar on My Tongue s’impose rapidement comme un hit, porté par un clip qui déroute autant qu’il fascine. La mise en scène s’ouvre calmement : Tyler face à une femme, dans une pièce capitonnée à l’atmosphère presque feutrée. Mais cette sérénité est trompeuse. Progressivement, l’équilibre se fissure et la situation bascule vers une intensité chaotique, traduisant une montée volontairement dérangeante.

Le décor se teinte d’abord d’une ambiance décontractée, avec une rencontre faussement légère chez les parents de la jeune femme. À chaque refrain, le ton change : Tyler et sa partenaire apparaissent dans une esthétique aux accents BDSM, lui tiré en laisse par elle. Puis, au fil des séquences, la fête enfle, les invités se dénudent, la célébration se transforme en transe. L’escalade semble inévitable : les protagonistes finissent nus, jusqu’à une ultime image choc où Tyler offre sa langue à sa compagne, pour un plaisir solitaire qui clôt brutalement la séquence.

Si certains y lisent un jeu de rôle sulfureux entre domination et soumission ; d’autres peuvent avoir une parabole sur la perte de contrôle et la marchandisation des corps. L’image de la langue tranchée, nourrie puis exhibée, incarne le risque de céder à des forces qui transforment l’intime en objet d’exposition. Cette audace visuelle résonne avec la musique elle-même : un mélange de disco, de funk et d’électro, rythmé par une basse 808 et des synthés éclatants, qui donnent au morceau un caractère à la fois euphorique et troublant.

En définitive, Sugar on My Tongue illustre parfaitement la manière dont Tyler, The Creator conjugue provocation, humour et symbolisme. Derrière l’esthétique lumineuse et festive, il construit une fable où désir, excès et perte de contrôle s’entremêlent jusqu’au grotesque.

Parazar – Liyah feat Cheba Manel

La rappeuse québéco-algérienne Parazar nous a encore fait danser cet été avec son titre Liyah, en featuring avec la chanteuse Cheba Manel. Dans Liyah, Houria, alias Parazar, nous lance, avec le sourire de celle qui a réussi et qui est au-dessus de tout ça, son ras-le-bol des profiteurs qui n’en ont jamais assez.

En tout cas, si elle m’invite à l’accompagner tourner un clip dans un endroit aussi beau que celui-ci, je ne demande pas mon reste et je dis merci!

Purity Ring – imanocean 

T’as une nostalgie de l’été de tes 16 ans, quand tu étais emo ? On a la musique parfaite pour accompagner ta nouvelle frange et tes étoiles au coin des yeux ! Purity Ring, c’est notre petit plaisir coupable venu tout droit d’Edmonton, en Alberta. Mais ne croyez pas que le duo, composé de Megan James à la voix et de Corin Roddick aux instruments, soit des petits nouveaux. Actifs depuis le début des années 2010, ils ont déjà trois albums à leur actif et ont été récompensés par le prix Pitchfork Best New Music ainsi que sélectionnés pour le prix Polaris. Avec imanocean, ils prennent un virage radical, mêlant musique d’animé d’un autre monde et rock des années 90. Et cette ambiance s’accentue avec un clip tourné au clair de lune, sur une plage déserte.

Jim Legxacy x Dave 3X

C’est toujours une belle surprise de scruter ce qu’il se passe chez nos voisins britanniques, que ce soit avec le prince de la jerk YT ou la princesse du rap alternatif BXKS. Jim Legxacy, lui, installé dans le sud-est de Londres, façonne une musique en constante évolution, nourrie à la fois par l’héritage (comme le suggère son nom de scène) des musiques noires anglaises et par celles venues d’outre-Atlantique.
Avec 3x, son duo avec Dave, il multiplie les détours stylistiques : hommage à Wiley, surnommé le parrain du grime, via un sample de Jam Pie, et clins d’œil appuyés dès les premiers vers aux paroles de son invité.
Son album black british music prolonge cette démarche. Il met en lumière la contribution essentielle de l’immigration à la culture musicale britannique à travers ses chants, ses phrasés et sa richesse sonore, tout en posant la question de son devenir.

PICHE – CARRÉ

PICHE est de retour et tout est carré !

Pas là pour arrondir les angles, l’artiste les rend plutôt tranchant comme un rasoir et nous a offert cet été un titre hyper efficace et entêtant. Un flow précis et une prod aux petits oignons, le Carré de PICHE est là pour enflammer le dancefloor et les soirées. Entre égotrip et empouvoirement, PICHE s’affirme de plus en plus comme une incontournable, et trace sa route avec puissance et énergie.

Le morceau était sorti au court du mois de juillet, comme pour mieux nous préparer à l’arriver d’un clip aussi puissant que le morceau.

Réalisé par Kevin Vivès, la vidéo de Carré multiplie les tableaux de manière à la fois hyper cinématographique et métaphorique. Multiplication des tenues, des ambiances et des allusions, des chorégraphies hyper dynamiques et parfaitement réalisées au service d’une artiste qui est définitivement la star qu’elle pense être.

Vous en doutez ? on se donne rendez-vous à la Cigale en novembre prochain.