Sept ans en arrière, c’est avec le cœur lourd que nous disions au revoir à Chester Bennington. Icône d’une génération toute entière mais également figure de proue du projet Linkin Park, ce dernier nous quittait alors que l’été bâtait son plein. C’est ainsi que le groupe californien se mit en pause, ayant perdu sa tête d’affiche et son leader. C’était sans compter sur l’arrivée en milieu d’année de la chanteuse Emily Armstrong. Ceci donnant logiquement lieu au huitième album de la formation : From Zero.
Ce nouveau projet prend la forme d’une renaissance claire et assumée. Rien que le titre de ce dernier annonce clairement la couleur et l’idée de repartir de zéro pour poser de nouvelles bases. Cependant, soyons honnêtes, la démarche reste malgré une apparente bonne volonté difficile à considérer de la sorte. Le décès de Chester Bennington n’a pas marqué l’arrêt de la formation pendant presque une décennie pour rien. Cette dernière a perdu non seulement son leader mais aussi sa voix. Une voix indissociable du son de Linkin Park et qui, en plus d’agir comme une signature, représentait le pouvoir d’attraction majeur du projet. Il faut dire que la nomination d’Emily Armstrong à la lourde tâche de prendre le flambeau ne fait pas tâche.
La fondatrice de Dead Sara livre à travers From Zero une performance plus que correct, qui se lie à la difficulté de s’intégrer à une telle formation. Mais il est cependant évident que le niveau de puissance et de maîtrise vocal de ce huitième album ne parvient pas à atteindre la qualité des travaux précédents des californiens. Cette dernière n’est de plus pas réellement mise en avant par la production et le mixage du projet. Même si sa voix et son timbre demeurent et restent indéniablement impressionnants, ces derniers ne parviennent à établir une comparaison qui atteint la carrure et tout le coffre de Chester Bennington. Les registres aigües sont bien évidemment ornés d’un grand contrôle et d’une réelle stabilité, mais cet aspect se voit terni par l’autre facette du chant d’Emily Armstrong. Le chant hurlé, sans être mauvais, n’est pas aussi précis et impressionnant que celui de l’ancien frontman du groupe. Un fait qui n’est pas arrangé par des soucis de production qui mettent malheureusement en valeur ces points négatifs.
De nombreux passages de From Zero présentent une gros manque de profondeur. Après de multiples écoutes, que ça soit au casque ou bien sur des enceintes, on ressent un réel manque qui vient systématiquement nuire au rythme et à l’impact de l’album. On retrouve un son résolument contemporain, mais qui est loin d’atteindre le niveau de ses ambitions. Ce manquement purement technique vient gâcher des idées excellentes qui sont notamment permises par la versatilité de la voix d’Emily Armstrong appuyant un aspect mélodique recherché et par moment réellement réussis. On peut notamment penser au pré-refrain de Cut The Bridge qui illustre bien ce propos.
Certaines pistes émettent de réelles réussites et prouvent que malgré les différents changements opérées à travers From Zero, le groupe conserve tout de même tout son savoir-faire. On peut émettre les exemples des morceaux de Two Faced ou encore le single Heavy Is The Crown, l’hymne des Worlds 2024 de League of Legends, qui restent des illustrations d’une efficacité certaine qui parcoure toujours l’ADN de Linkin Park. On retrouve cependant des morceaux rappelant d’autres formations qui peinent à convaincre. On peut citer Overflow qui sonne peu ou prou comme les travaux des originaires de Las Vegas, Imagine Dragons sans pour autant parvenir à toucher du doigt la réussite que la formation du Nevada affiche.
Sans briller tout du long de son retour par ses idées Linkin Park nous offre un disque à la réussite partielle. From Zero entreprend une démarche risquée, portant ses fruits par moment mais qui reste trop inconstante et irrégulière pour réellement une réussite quelconque. Ce huitième album a le don de nous proposer une vision contemporaine d’un genre dont le groupe est l’une des figures de proue mais qui manque en substance et en teneur. Faisant du disque ni une réussite ni un échec, mais simplement une production correcte qui peine à se démarquer.