La Cave aux Poètes de Roubaix est un endroit où les diamants viennent se polir. Ce soir, pour couronner le tout, la soirée est co-organisée par Jazz en Nord. Il n’était donc pas possible de se tromper en venant découvrir Jungle Sauce et Bada-Bada.
Crédit Photo : Martin Sojka / @tintamar_music
La salle de concert la plus basse d’Europe ne manque jamais à sa réputation. Plafond bas signifie chaleur qui monte en flèche et ce froid soir de Décembre n’y a pas fait exception. On s’engouffre dans la pénombre pour aller jusqu’au bar et patienter avant l’arrivée des artistes. On est vendredi soir, rien ne presse.
Les trois gaillards de Jungle Sauce jouent presque à domicile ce soir. Lillois, ils ne sont qu’à un jeter de caillou de leurs terrains de jeu habituels. On les sent d’autant plus à l’aise, contents de les découvrir après plusieurs mois à les suivre en guettant l’opportunité de pouvoir venir les écouter. C’est très propre, techniquement très au point et la sauce prend rapidement (jeu de mot nul sans doute déjà fait mille fois). Ambiances changeantes, drops succulents, la salle s’anime et bouge de gauche à droite, d’avant en arrière, alors qu’elle n’est pas remplie autant que les artistes ne le méritent. Qu’à cela ne tienne : on aura plus de place pour dancer et sauter dans tous les sens. Le mix entre techno, jazz, rock (?) nous emballe et il va sans dire qu’on sera présent pour voir le trio ouvrir pour Tukan à l’Aéronef en Février, ce qui paraît d’autant plus évident que le lien de filiation entre les deux formations l’est également.
Quarante minutes à fond et puis s’en va. Le shot était intense, mais on a un peu de temps pour redescendre. Pas tant que ça au final, surtout au vu de ce qui se profile pour la suite de la soirée.
Venus de Paris, c’est un autre trio qui prend la suite, tout en puissance et en expertise. Bada-Bada, nom aussi simple que déclaratif, c’est s’affranchir des fioritures tout en explorant des contrées techniques exceptionnelles. Ils arrivent à construire quelque chose de très innovant tout en donnant envie de citer des références. Ils nous ont tour à tour fait penser à Colin Stetson, Bon Iver, Mammal Hands, Jungle By Night… Autant de noms qui évoquent une énorme puissance d’univers. Empreinte de mélancolie, leur musique est un cadeau d’une rare et délicate brutalité, encadrée par une technique rendue accessible au commun des mortels. À ce sujet, mention spéciale à Tao à la batterie, qui n’est pas habituellement à ce poste mais qui a tout fracassé lors de son intérim.
Lorsque l’on passe beaucoup de temps dans les salles de concert, il arrive parfois une forme de lassitude, comme si tout était convenu et voué à ne pas provoquer de surprise. Et pourtant, telle une comète qui file dans le ciel, Bada-Bada nous aura scotché comme rarement. À fleur de peau, intime et pudique à la fois, la formation ne peut pas laisser indifférent(e). Si leurs premiers singles avaient déjà planté quelques graines ici et là, leur premier album Portraits sorti en début d’année est une fabuleuse proposition déjà extrêmement mature. On aimerait avoir la chance de les entendre tous les soirs, mais la fin de soirée nous rappelle qu’il faut bien partager et que des bonnes choses il ne faut pas abuser. Alors merci Bada-Bada, et revenez-nous vite. Du fond du coeur.