Comment mieux débuter la rentrée qu’avec un concert de Nous Étions Une Armée et Maybeshewill ? Malgré les multiples reports dus à la crise sanitaire, nous étions là, et ça valait le coup de patienter. Retour sur cette soirée où post-rock et mélancolie ont frappé, plus fort que jamais.
Crédit photo : Ophélie Legriffon
Le froid, délicatement installé, nous déplace, de la terrasse de Petit Bain à la cale, où les discussions entre amis se poursuivent tandis que les premiers passionnés se dirigent déjà vers le merchandising.
Première partie : Nous Étions Une Armée
Au premier rang, j’attends patiemment Nous Étions Une Armée, ceux que je ne rate jamais depuis leur premier concert l’an dernier à Bastille. Duo constitué de Léo Nivot et Rémi Le Taillandier, duo qui ne cesse de surprendre et d’émouvoir, date après date. Spoken word en français, teinté d’anglais, phrasé délicat et sensible.
En guise d’introduction, Léo déclame quelques vers : « Ce soir on oubliera déjà ce qu’on s’était promis » Silence religieux et respectueux des spectateurs. « On se prendra soi-même pour un autre et on regardera hier en souriant ». Bienvenue dans l’univers de Nous Étions Une Armée. Introspection, émotions et frissons.
Crédits photos : Ophélie Legriffon
Le premier morceau s’intitule Se perdre. Une boîte à rythmes donne le tempo, tandis que le clavier s’installe et que la voix de Léo nous berce. Mais rapidement, nous voilà saisis par cette ardeur incontrôlée et incroyable. Les passages doux sont instantanément contrebalancés par des envolées noisy intenses : les guitares jaillissent et les coups pleuvent. Nous voilà déjà à terre.
Mais pas le temps de se relever car vient Déjà-vu. Les mots, toujours les mots. Susurrés, à nous, à moi. Je crois. Avec des envolées vers l’anglais, à deux, souvent. Morceau calme, parfait pour nous préparer à Évidence, qui est introuvable sur internet. Car Nous Étions Une Armée multiplie les créations et ainsi les inédits. Et une Évidence, ça l’était. Sans doute mon titre préféré. Montée progressive avant que Léo ne s’époumone, habité par une force cathartique tandis que Rémi enchaîne les accords habiles et furieux. J’en redemande.
Alors apparaît Héros. « C’est un bonheur trop grand pour moi ». La boîte à rythmes, colérique, les guitares frappantes et les mots désarmants. Les titres se succèdent, jusqu’à Solstice, un des morceaux phares. En live, il prend encore plus de puissance et s’étire sans s’étioler. Et comme les musiciens aiment toujours surprendre, ils nous présentent Rendez-vous, qu’ils viennent de finir de répéter. « Rien n’arrive quand on l’attend. » En effet, impossible d’être prêt à cette vague de sensations diverses et variées qui s’emparent de mon corps.
Tandis que le concert touche à sa fin, ils nous offrent un dernier morceau, Jour et nuit. Il y est question d’ombre qui se lève. Après ? J’ai oublié, emportée par la folie de Rémi qui s’acharne sur sa guitare et de Léo qui hurle, sans micro.
Nous Étions Une Armée, pour contrer le blues du lundi soir, pour faire exister les idées noires, leur donner un espace et les partager. Merci.
Crédits photos : Ophélie Legriffon
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Maybeshewill
Alors que nous sommes encore éblouis par la prestation de Nous Étions Une Armée, une musique trop forte et totalement hors propos vient troubler notre tranquillité, tandis que le matériel se charge et disparaît. Passera (entre autres) Peggy Gou et son tube (non) I go. Cet étrange instant aura au moins eu le mérite de faire sourire la salle entière.
Puis, le quintet anglais Maybeshewill ouvre le bal avec un morceau du nouvel album, We’ve Arrived at Burning Building. Sorti en novembre 2021, c’est le sixième disque du groupe et il s’intitule No Feeling is Final. Et quelle joie de les découvrir enfin ! En effet, ils annonçaient en 2015 leur séparation et dans la foulée, partaient en tournée. Si ce soir-là, on n’a pas très bien saisi si la dernière fois où on les a vu c’était au Batofar ou ici même, ce qui est certain, c’est qu’ils avaient bien manqué à chacun et chacune d’entre nous.
Ainsi, pendant plus d’une heure, les musiciens nous distillent un rock massif et brutal, sans jamais cesser de nous parler, dans un français parfait et touchant. On sent la complicité qui les lie. Il y a en effet les regards échangés entre le guitariste Robin Southby, qui joue sur la pointe des pieds, et le bassiste Jamie Ward qui sautille partout.
Ils poursuivent avec Zarah, extrait également de leur nouvel opus et dans lequel intervient via des samples la voix de Zarah Sultana. Membre du parti travailliste britannique, elle s’exprime en faveur de notre planète et a œuvré contre le réchauffement climatique. Car No Feeling is Final s’interroge sur l’avenir du monde, les catastrophes écologiques et les ressources qui s’amenuisent.
De Co-conspirators que l’on retrouve sur Sing the Word Hope in Four Part Harmony (2009) à Red Paper Lanterns sur I Was Here For A Moment, Then I Was Gone (2011), les post-rockeurs font monter instantanément la tension et virevoltent avec aisance d’un album à l’autre, pour le plus grand plaisir des spectateurs. Et les légères incursions vers le nouveau disque me ravissent au plus haut point. Si je regrette qu’ils ne jouent pas Even Tide, je suis tout de même comblée lorsque les premières notes d’Invincible Summer retentissent. S’ils terminent le set avec Not for Want of Trying, c’est sous des applaudissements nourris qu’ils nous retrouvent avec Seraphim & Cherubim et bien évidemment, He Films the Clouds Pt.2. Quel instant de grâce, lorsque guitaristes et bassistes chantent a capella et que le public, en chœur, les rejoint.
Maybeshewill manie donc comme jamais le mélange entre instruments classiques, guitares et électro. Sans cesser de nous surprendre, ils nous ont offert un concert puissant et captivant.