Avec une sensibilité à fleur de peau et une assurance bien trempée, Lola Young s’impose doucement mais sûrement comme l’une des nouvelles voix à suivre de la scène britannique.
Sorti en juin dernier, l’album This Wasn’t Meant for You Anyways vient en effet confirmer le talent de Lola Young pour mêler punk, britpop, R&B et soul avec une sincérité désarmante. L’artiste anglaise y développe comme dans ses notes intimes le chaos des relations amoureuses, cheminant à travers ses colères, ses désillusions mais également ses doutes et ses vulnérabilités. Le tout, dans un disque qui se distingue autant par ses textes coup de poing que par l’efficacité de ses arrangements.

Qui es-tu Lola Young ?
Originaire du sud de Londres, Lola Young commence à écrire dès l’enfance, mûrie par une passion qui la mènera à la BRIT School, école qui a formé Amy Winehouse, Adèle ou encore RAYE. Elle est très vite repérée par l’ancien manager d’Amy Winehouse, Nick Shymanksy, et signe à 18 ans chez Island Records, le label d’Angèle et de The Last Dinner Party. Après avoir fait ses armes avec des EPs comme Intro et My Mind Wanders and Sometimes Leaves Completely, où elle posait déjà les bases de son style, Lola Young franchit une nouvelle étape de sa carrière et dévoile ici une maturité artistique évidente.
This Wasn’t Meant for You Anyways : une main de feu dans un gant de verre pilé
Avec ce nouvel album, Lola Young continue d’explorer ses thèmes de prédilection, mais elle le fait avec une sophistication et une assurance que l’on sent dès les premières notes. This Wasn’t Meant for You Anyways incarne l’essence de son style : des mélodies acérées et des arrangements percutants qui servent une voix rauque, toujours sur le fil. Ses textes trouvent écho dans la production soignée de Solomonophic, son ami et collaborateur de longue date (BROCKHAMPTON, Remi Wolf, Dominic Fike), apportant une profondeur supplémentaire à chaque morceau sans jamais forcer le trait.

Mish-mash d’influences
Dès l’ouverture avec « Good Books », l’ambiance est posée : une track douce-cinglante qui aborde les relations dysfonctionnelles, les ultimatums tacites et les efforts vains pour sauver l’insauvable. La voix suspendue de Lola Young se marie ici à une ligne de percussion frénétique et une guitare imprévisible, évoquant par moment la puissance d’une Florence + the Machine.
La suite de l’album nous réserve de belles surprises. Les hit tracks « Conceited » et « Messy » , déjà bien accueillis par le public, s’inscrivent parfaitement dans la dynamique de l’album, là où des titres comme « Walk on By » ou « Big Brown Eyes » nous surprennent : l’un par son atmosphère jazzy presque feutrée, et l’autre par sa rythmique off-beat et ses influences reggae.
Coup de cœur et trigger nostalgie, la mention spéciale de cet album revient pour ma part à « Crush », dans lequel la chanteuse britannique explore le sentiment de résignation amoureuse sur fond de rock brut et adolescent. Avec « Crush », Lola Young revient à une atmosphère plus sombre et grinçante, comme un clin d’œil non dissimulé à un certain Thom Yorke.
R&B-ish catharsis
Et là où l’on pensait avoir cerné ses démons, Lola Young dévoile des morceaux plus introspectifs encore, comme avec « Intrusive Thoughts ». Porté par une guitare sèche délicate, ce titre folk minimaliste aborde avec douceur la schizophrénie dont elle souffre. Dans « Intrusive Thoughts », Lola s’adresse aux « voix dans sa tête », avec une forme de recul et d’apaisement : « They’re just intrusive thoughts. And maybe I’m not all that strange ».
L’album se clôt sur un « Outro » parlé, parti-pris à la fois sobre et incisif, dans lequel Lola invective ceux qui se reconnaîtraient dans ses textes : « To anyone who’s ever hurt me, thinks these songs are about them – This wasn’t meant for you anyway. » Une conclusion qui dépasse le credo personnel et vient boucler ce chapitre musical avec un sang-froid implacable, fidèle à l’ADN de l’album.
Tout est chaos ?
Ce qui frappe avec This Wasn’t Meant for You Anyways, c’est sa cohérence inattendue, malgré la variété des influences qui l’imprègnent. Lola Young, qui se qualifie elle-même de « Messy », embrasse ce bazar créatif et n’a pas peur de naviguer entre les genres musicaux, piochant ici et là dans des univers où on ne l’attend pas. Des skanks de reggae aux lignes de basses dignes des Arctic Monkeys, Lola Young joue avec les codes et prend des risques sur ses titres. Là où l’ensemble aurait pu paraître brouillon, le disque trouve au contraire sa force dans cette fusion improbable.
L’unité de l’album repose en grande partie sur une écriture brisée et incisive. Même lorsqu’ils explorent des influences distinctes, chaque morceau reste lié l’un à l’autre par des mots qui cognent et une honnêteté criante. On revient ici à cette idée du journal intime, où le désordre apparent cache une ligne de fond claire : une introspection brute, une fragilité assumée et une puissance qui s’exprime sans détour.
This Wasn’t Meant for You Anyways est un album qui confirme tout le bien que l’on pensait déjà de Lola Young. Entre mélancolie et résilience, elle nous dévoile une partie d’elle-même qui ne manque pas d’étoffer sa trajectoire musicale. Lola Young performera le 13 février 2025 à l’Alhambra, pour un avant-goût de Saint Valentin cathartique. On a hâte !
Retrouvez Lola Young sur Instagram