Trio important de la scène belge, L’Or du Commun signe un album qui sonne comme une libération du coeur et de l’esprit avec Avant La Nuit. Un projet fait en famille qui regorge d’une certaine intimité et qui par pur hasard a un écho tout particulier avec la situation sanitaire actuelle.
Si récemment, c’est plutôt en solo que Loxley, Primero et Swing se sont illustrés, l’appel du travail en groupe ne les a jamais réellement quittés. Au contraire, ces aventures en solo ont permis aux trois artistes de savoir ce qu’ils voulaient et ce qu’ils pouvaient apporter à l’énergie du groupe. Cela se ressent au travers de l’alchimie parfaite qui règne entre les trois hommes et qui balisent tout la durée de cet album. Chacun apporte ses forces au collectif pour signer un projet cohérent.
Cette cohérence elle se ressent également à travers les thèmes abordés et en particulier celui du temps. S’il n’est pas exprimé tel quel et qu’il n’a pas été pensé comme cela par les artistes, il est omniprésent dans chaque morceau du projet. Dès l’Intro et son effet de ralenti, l’envie de mettre sur pause le temps qui file se ressent. Mettre ce temps entre parenthèse, le temps des 45 minutes de l’album voilà ce qu’offre L’Or du Commun de Négatif à Pollen.
A la fois hors du temps et pourtant rempli de questions bien actuelles, Avant La Nuit est un mélange complémentaire des diverses influences des trois artistes de L’Or du Commun mais aussi de leurs interrogations. Ces dernières semblent avoir un écho tout particulier au vue de la situation sanitaire et le repli sur soi-même que cela a occasionné. Pourtant le groupe ne l’a pas pensé comme cela.
Même si les thèmes ne semblent pas être des plus joyeux, le projet est loin d’être pessimiste, au contraire des morceaux comme Pansement ou Pas de Regrets viennent contrebalancer le propos en confirmant que les moments durs font partie de la vie et que même si cela prends du temps, ça ira mieux un jour.
J’passais ma vie dehors, lacets défaits
Rien ne peut effacer le temps mais on apprendrait pas sans l’échec
On était gamins, fallait que la vie nous fasse de l’effet
Loxley – Pas de Regrets
C’est donc en passant par une multitude de sujets les touchant personnellement que le trio laissera s’entrechoquer leurs pensées. Une atmosphère qui se retrouve également dans la pochette du projet signée Romain Garcin.
En fil conducteur de toutes ses interrogations, un thème semble revenir plus que les autres, celui de leur parcours. Actif depuis 2012, le trio regarde dans le rétroviseur ces années qui ont filé. Durant ce temps, ils auront notamment pu tisser les liens avec les personnes se retrouvant sur le tracklisting, donnant à chacune des collaborations une alchimie s’inscrivant directement dans l’univers offert par l’album. De Lous and The Yakuza (Sable) à Zwanguere Guy en passant par Caballero et Roméo Elvis (Pollen et les trois artistes se retrouvent ensemble sur Banane) chacun apporte sa touche à un édifice déjà bien structuré. Par exemple, le titre Banane montre que malgré son ouverture musicale, le trio ne perd pas son amour pour un rap plus brut.
Une passion qu’ils ont toujours porté sur scène avec ardeur, ce n’est donc pas étonnant de les voir rendre hommage à ces moments lives sur C’est dingue. Par ce parallèle, ils prennent également le temps de voir l’évolution qu’ils ont parcouru depuis leurs débuts jusqu’à maintenant.
Avant, pour faire les choses, on me tenait la main
Maintenant, pour faire les choses, on me tient la jambe
Je regarde la ville avec mes yeux de gamin
C’est dingue, j’peux toucher les gens sans devoir sortir de ma chambre
Primero – C’est Dingue
A travers les quatorze morceaux du projet, le trio tente de mettre le temps sur pause, pour s’éloigner un maximum de la frénésie quotidienne qui envahit de plus en plus de monde. Les thématiques invitent à la réflexion, et cela par le biais des six yeux du groupe et ce qu’ils peuvent observer dans leur quotidien. Ils ont également mit ce temps à profit pour prendre du recul sur ce qu’ils avaient entrepris et là où ça les a mené. Ils ont évolué, pris de l’âge et surtout de l’expérience, ce qui se ressent également dans l’exigence musicale qui se démarque au long de l’album. Une architecture qui a été dessinée par PH Trigano et Phasm, bien aidé par une multitude de beatmakers (Dolfa, Seezy, Vax1,…).
Entre une thématique bien choisie tant elle résonne d’authenticité et une ambiance musicale cohérente, Avant La Nuit rempli bien sa fonction de bulle hors du temps.
L’Or du Commun s’est confié un peu plus sur le projet lors d’un entretien à retrouver ici.