Leur premier album était en gestation depuis deux ans déjà. Lulu Van Trapp ne pouvait pas attendre davantage pour sortir leur premier long format afin de développer d’autres projets par la suite. I’m Not Here To Save The World sort ce vendredi 23 avril sur Backdoor Records et finalement, au bon moment. C’est une porte pour des promesses d’évasions qui nous échappent à l’heure actuelle.
Formé en 2017 à partir de deux anciens membres de la formation punk La Mouche, Lulu Van Trapp a gardé certaines traces historiques de leur ancienne formation. A commencer par leur nom d’un des personnages de leur groupe précédent mais aussi leur état d’esprit libre de toute oppression. Galvanisé avant tout par la scène, le quatuor a pour habitude de se costumer pour des shows énergiques qu’il nomme « Le Bal de l’Amour ». Savoir se transformer de nouveau pour retranscrire les mêmes couleurs sonores en studio et ainsi retrouver l’esprit Lulu Van Trapp, tel était le défi de ce premier essai.
Le choix de porter Brazil en ouverture leur permet d’assurer avec aisance cette transition. Le groupe puise dans les esprits psychédéliques des sixties et seventies pour envouter son auditeur. L’univers est foncièrement fantaisiste et orchestré de la façon la plus théâtrale par la chanteuse Rebecca qui se positionne en harpie dévastatrice du monde de la nuit. Rien ne semble laisser au hasard dans la composition musicale, chaque élément est accentué pour apporter de la puissance mélodique.
Lulu Van Trapp
A commencer bien évidemment par la voix de Rebecca qu’on assimilerait trop facilement à Catherine Ringer, essentiellement sur les textes en français. Elle donne la sensation que chaque mot se vit sur l’instant, sur une unique note, rien ne peut être linéaire. Tantôt cinématographique sur Valley Of Love, tantôt cabaret sur Lulu, elle se dévoile comme la conteuse parfaite qui nourrit notre imaginaire. Et puis, il y a l’apport instrumental bien trop complexe pour que l’on résume l’ensemble à de la variété. Les synthés flottent toujours en arrière-plan, la basse finit par vaciller et les riffs de guitare par s’épaissir pendant que la batterie mène une cadence rythmée et décousue.
On retrouve ce mélange de saveur dans le très abouti et endiablé Valley Of Love qui sonne comme une résurrection cérémoniale. On pourrait le rapprocher à un exemplaire plus majestueux du groupe anglais Black Honey. Quand on entend ce titre, c’est tout de même la classe. Autre claque beaucoup plus planante : Joan of Arc, l’hymne feel good du groupe qui rend hommage à leur fraternité mais aussi à leur public. Plus libérateur qu’une séance de yoga, le titre est une merveille de pop dream avec une fin instrumentale sublime. Il est fortement conseillé de l’écouter en bonne compagnie pour un hug magique.
Lulu Van Trapp
Si plusieurs genres sonnent à travers l’album, il n’en reste pas moins que Lulu Van Trapp est avant tout un groupe rock brillant. Ses influences y sont d’ailleurs plus nombreuses. Sur le titre électro-pop Les Mots d’Amours s’enchaîne ainsi des premières mélodies parallèles de I Already Knew de The Vaccines avec une synthé kitsch proche de La Femme. Sauf que la bande sait imposer ses griffes pour arranger le tout dans un schéma burlesque et réaliser sa propre sauce moderne de Grease. On appréciera au passage la voix de Max dont sa phrasée fait rappeler Serge Gainsbourg.
La playlist n’offre aucun superflu, ce qui est assez rare pour un premier long format. Chaque morceau apporte son propre poids et intérêt à l’ensemble avec son lot de surprises qui permet de mieux comprendre l’imaginaire du groupe. Lulu résume parfaitement l’identité de la bande entre grosses guitares et paroles burlesques qui se transforment brusquement en sonorités caraïbéennes dans son dernier tiers pour tout exploser dans un délire punk. La fusion des genres et l’ouverture d’esprit sont totales. Et c’est tant mieux car c’est par ce biais que la musique prend un nouvel essor
En définitif, Lulu Van Trapp vient nous faire ressurgir des sentiments oubliés : la passion, la folie, l’ivresse. Bref, l’amour. Dans I’m Not Here to Save The World, le groupe réussit à donner de la cohérence à sa réalisation par le message universel délivré. Qu’importe si les influences se mélangent, la marque est posée et indélébile. Ils ont déjà tout déglingué sur leur premier album pour nous offrir le meilleur des orgasmes.
Coups de cœur de l’album : Brazil, Joan Of Arc, Valley Of Love, Song for L, Lulu
Crédit photos : Inès Zizouane