Après nous avoir livré son ADN musical, M Le Maudit a pris le temps de discuter avec nous autour de la sortie de son dernier EP, Poème Poisson. Le rappeur nous en raconte un peu plus sur lui, son amour pour le format EP, son projet et tout ce qui a pu l’entourer.
LFB : Comment tu vas en ce moment, en sachant que la sortie de l’EP arrive ?
M Le Maudit : Je me sens bien ! C’est comme avoir un nouvel enfant qui nait, t’es un peu stressé mais en vrai t’es content.
LFB : T’as des attentes spécifiques par rapport à ce projet ?
M Le Maudit : En vrai, c’est mieux de ne pas trop avoir d’attente et de voir comment ça se passe. Donc on verra.
LFB : En prélude de ce projet t’as déjà délivré quelques clips, c’était pour faire monter l’attente ?
M Le Maudit : Ouais et puis aussi c’est pour mettre en place l’univers et permettre une meilleure lisibilité de l’esthétique. Parce qu’il faut créer un univers, avoir de belles images qui vont avec le projet.
LFB : Justement, le travail fait au niveau de l’univers des clips se remarquent, c’est important pour toi qui aimes le cinéma de travailler tes visuels et à quelle échelle tu interviens dessus ?
M Le Maudit : J’ai un impact dessus et encore heureux ! En fait, nous on arrive avec nos idées et puis on essaye de les faire faire par des gens qui savent le faire. Après on peut se partager les idées aussi, en faisant des brainstormings. C’est sur qu’en dernier lieu, c’est moi qui décide ce qu’il se passe. Si j’aime bien ce traitement, ce rythme là,… Donc oui j’ai une bonne part d’implication dans les visuels.
LFB : Que ce soit à travers ces visuels où même à travers l’Intro du projet, tu dépeins souvent ce qu’il se passe dans ton quartier et notamment le trafic de crack. C’est important pour toi de mettre cela en avant ?
M Le Maudit : Je sais pas si c’est si important que ça de le mettre en lumière mais en tout cas ce que je peux dire c’est qu’un artiste c’est une éponge qui se sert de ce qu’il vit pour écrire. En tout cas, moi, l’artiste que je suis, je suis une éponge, je vis des choses, je les absorbent et je les retranscris. Ce que je vis en ce moment c’est ça donc je retranscris ça. Ce n’est pas une envie d’engagement politique, c’est simplement ce que je vois donc j’en parle.
Si j’étais dans des champs de fleurs avec des coquelicots, je rapperais les coquelicots (rires).
LFB : Du coup, c’est en regardant par ta fenêtre que t’as décidé de faire du rap où c’est en rappant que t’as décidé de raconter ce qu’il se passait par ta fenêtre ?
M Le Maudit : J’avoue c’est intéressant comme question ! Je pense que c’est plutôt la deuxième option. En vrai, quand tu commences à faire du rap, tu rappes parce que c’est stylé. Déjà faut que tu fasses tes armes, que t’arrives à écrire des trucs corrects et puis que t’arrives à être logique dans ce que tu dis. Avant de pouvoir exactement dire ce que tu veux dire dans ton texte, il va falloir juste rapper. T’apprends à aimer rapper avant de dire ce que t’as envie. Du coup après, si tu as envie de parler des coquelicots, tu parles de ça, si t’as envie de parler de club, tu parles de club. Mais de base, en tout cas pour moi, d’abord je fais du rap et après je dis ce que j’ai envie.
LFB : Sur le projet, on retrouve cette alliance entre le fond et la forme. Par moment, tu laisses même la place à des mélodies donnant une autre dimension à ta musique. Tu as travaillé ça ou c’était vraiment spontané ?
M Le Maudit : Je sais pas si c’était spontané ou pas. En fait que je chante, j’essaye de faire un truc stylé et de pas dire de la merde.
LFB : Au niveau du fond, tu places souvent un brin d’ironie dans tes textes, je trouve que c’est ça aussi qui fait ta singularité. Comment t’expliques cette manière que t’as de rapper ?
M Le Maudit : C’est moi, comme je suis dans la vie de tous les jours ! Il y a des choses très sombres sur lesquelles je vais rire, c’est un trait de ma personnalité. La plupart du temps, j’écris un peu comme je parle. Après, il y a des rappeurs qui ont des personnages mais la plupart des artistes, ils chantent un peu comme ils pensent.
LFB : Pour le moment tu n’as sorti que des EP’s, c’est un format avec lequel tu te sens à l’aise ?
M Le Maudit : Ouais ! En soit je préfère parce que moi-même j’ai du mal avec les formats longs. Du coup le format court je trouve que c’est plus accessible. Tu peux finir le projet, le réécouter même un peu l’oublier et retomber dessus. C’est bien !
LFB : Le projet plus long t’as déjà traversé l’esprit ?
M Le Maudit : Faut que tu saches qu’en vrai j’ai fait des formats courts mais ce n’est pas ce qui me taraude le plus quand je fais des morceaux, la durée, le nombre de morceaux,… c’est vraiment secondaire pour moi. J’y pense pas sur le moment. Je pense juste qu’il fait faire un projet assez court pour que les gens ne s’ennuient pas trop.
Je me suis déjà pris des interludes de 40 secondes comme des morceaux de 7/8 minutes. C’est un peu la même chose, qu’il soit court ou long, le morceau il peut tuer.
LFB : J’ai trouvé qu’à ce niveau, le projet arrivait à rester cohérent tout en apportant de la diversité.
M Le Maudit : C’est cool, ça veut dire que l’objectif est réussi, parce que c’est ce qu’on a voulu proposer : des morceaux qui ne se ressemblent pas trop mais avec une sorte de cohérence dans ce que je raconte.
LFB : En dehors de cette carrière solo, tu es aussi un membre du collectif de la 75ème Session, qu’est ce que ça a pu t’apporter ?
M Le Maudit : Beaucoup de choses ! Si tu veux qu’on parle de manière matériel, il y a un studio déjà. Pour un artiste c’est pas mal, c’est déjà 85% des choses dont tu as besoin. Après sur le plan non matériel, ça a rendu mon affaire plus sérieuse. Au delà de ça, ça m’a apporté beaucoup de bonheur, c’est tous devenus mes amis. Ca m’a apporté beaucoup de choses positives en réalité.
LFB : C’est drôle parce que j’en parlais dans une autre interview avec Hash 24 et il m’ a répondu sensiblement la même chose.
M Le Maudit : Normal ! En vrai tu as vraiment les deux côtés : tu peux faire du bon son grâce à Sheldon, Khadafi ou Yung.Coeur. En plus, c’est de bonnes personnes.
Il y aussi les rappeurs qui gravitent autour qui sont aussi de bonnes personnes.
LFB : Pourtant, sur le track listing, le seul invité c’est Caballero. Pourquoi lui ?
M Le Maudit : La connexion s’est faite comme en 2015, il était venu faire un morceau avec Sheldon et ce soir là il n’y avait pas d’ingénieur du son du coup j’ai enregistré. Ca m’a fait plaisir, j’ai passé quelques heures avec lui, on a bien parlé, on a bien rigolé et voilà on a prit contact. Pendant tout ce temps là, on a gardé contact et ça parlait de faire du son. Juste j’attendais le moment logique pour faire un morceau avec lui. Je suis allé le voir, on a plié le morceau et puis c’est beau.
LFB : Tu as l’air assez exigeant sur le choix des invités, c’est souvent des gars de la 75ème Session ou des gens qui y gravitent de près ou de loin. Je me trompe ?
M Le Maudit : En fait, il y a deux choses. J’ai fait des feats au commencement pour faire des feats et au bout d’un moment, je suis arrivé à un stade ces trois dernières années où toutes les personnes qui ont collaborées avec moi c’est parce que j’aimais ce qu’elles faisaient.
Il y a pleins de gens qui me demandent de travailler avec eux, et je sais que ça se fera pas. Il y a aussi pleins de personnes avec qui j’ai envie de faire de la musique.
Mon seul critère pour faire de la musique c’est si je trouve fort l’autre ou non. Si c’est le cas, on va faire de la musique ensemble. Du coup ce qui fait que logiquement ça réduit le champ des possibles puisque je trouve pas tout le monde très fort. Après il y a aussi les gens qui font payer les featurings trop chers. Il y a pleins de choses qui rentrent en compte.
LFB : Pour terminer, qu’est ce que je peux te souhaiter pour la suite ?
M Le Maudit : Franchement, ce que je te souhaite à toi : du biff, de la santé, de l’amour, il n’y a pas besoin d’autres choses.
Pour découvrir l’ADN de M Le Maudit c’est par ici.