Après le premier jet, Anéantir le monde moderne, Les Modern Men décident de lancer leur deuxième vague électro . Depuis Rouen, ce duo électrique confirme avec Partout en France leur dynamique nihiliste. N’y voyez aucun élément défaitiste. Au contraire, ici, les Modern Men rejettent toute croyance et contrainte sociale. Ils proclament la liberté totale et, pour mieux s’en convaincre, leurs compositions frôlent souvent l’impertinence.
Tout commence alors en 2019. La date a son importance. Le monde hésite et une pandémie venue d’Asie avance.
Pour ce duo déjanté une rage pesante et insondable se fait sentir. Elle n’en a que faire des reliefs, des villes ou des gens, elle est définitivement « partout en France ». Une étrange sensation se dégage des premiers instants : une fièvre monte. Le duo introduit l’idée d’un monde déglingué et ubuesque. Le chant devient parfois vocifération.
Après quelques écoutes, une remarque s’impose. Les Modern Men montrent un penchant clairement « kraftwerkien ». L’approche musical ou la critique de notre société constituent autant d’éléments qu’ils partagent avec le groupe allemand.
FFNHR qui en d’autres termes veut dire Fighting for No Human Rights ou Hear Nothing naviguent littéralement dans des rythmiques industrielles. Les mélodies s’écrasent dans des boucles synthétiques alors que le chant s’engouffre dans d’insondables distorsions. L’espoir est un triste privilège.
Il y a aussi ce petit côté Ich Bin avec une fantaisie électro et un texte toujours mordant. « Sale bête », bien plus maussade, est de loin le titre le plus cruel. Les hommes sont désormais « des moutons » qui n’osent plus franchir la clôtures. Les « maîtres », ou tenants du capitalisme, regardent le spectacle de la captivité avec un air amusé. Parfois, ils utilisent leurs chiens pour contenir les plus aventureux. On approche d’un monde orwelien. Derrière ce côté fantasque, Modern Men montrent bien un aspect bien plus sombre.
Mixing my pain with hate est sans concession et radical. La boite à rythme se transforme en coups de marteau. La ligne mélodique lancinante retranscrit les effets néfastes de l’incompréhension ou de la folie. L’être humain, dépassé par ce monde moderne, peut ressentir la haine. Triste constat.
Pour clore cet EP, Modern Men laissent trois petites surprises sous forme de bonus totalement foutraques. L’ambiance devient bien plus étrange et fantasque avec Lock me up (feat Grand Guru), I’m so tired , un cover saturé des Fugazi et Banned in DC , des Bad Brains. Décidément, le monde des rennais est bigarré.
Nous refermons Partout en France avec une saveur aigre-douce. Éprouvés par la frénésie rythmique et des paroles parfois dures et radicales, nous leur reconnaissons toutefois un talent d’observateur d’un monde impersonnel. Le prochain EP donnera-t-il les clés d’une autre fuite en avant ?