Nat Myers: « Pour moi les vrais poètes d’aujourd’hui sont les auteurs de chansons »

Le bluesman et poète américain Nat Myers a sorti son premier album Yellow Peril en juin dernier, un recueil de récits modernes ancré dans la tradition du Delta blues. La Face B a eu le plaisir d’échanger avec le musicien en marge de son passage à La Maroquinerie le 28 janvier dernier.

Photo: Jim Herrington

*Cette interview a été réalisée en anglais. Pour lire la version originale, rendez-vous plus bas. / To read the original english version, scroll to the bottom.*

La Face B: Pourquoi tu as choisi Yellow Peril comme titre de ton album ? C’est un terme très connoté, qui renvoie à une idéologie raciste, où les asiatiques sont considérés comme une menace pour les valeurs occidentales. Qu’est-ce que cela signifie pour toi ?

Nat Myers : Le « péril jaune » est un terme qui a été utilisé au début du 20ème siècle, lorsque l’immigration asiatique a pris de l’ampleur aux États-Unis. A l’époque, la peur s’est installée et des lois ont été adoptées pour empêcher les Asiatiques de venir. Ces lois sont restées en vigueur jusque dans les années 70. Ces peurs sont liées en partie à des craintes plus profondes que les Américains ressentent par rapport à l’évolution démographique de leur pays. Le 21ème siècle, en particulier la récente période de pandémie, a été le théâtre d’une rhétorique anti-chinoise aux Etats-Unis, venant de la droite principalement. J’ai entendu l’ancien président de la Chambre des représentants dire que chaque étudiant chinois aux États-Unis est un agent potentiel du PCC! Je viens du Kentucky et il n’y a pas beaucoup d’Asiatiques là-bas. Parce qu’on n’en parlait peu, beaucoup de mes amis pensaient que j’étais chinois, alors que je suis coréen-américain. Avant la pandémie, j’avais davantage conscience de ma propre identité, mais après, j’ai ressenti une peur profonde. La croyance que l’origine du virus se trouvait en Chine et la rhétorique imprudente de la présidence ont créé un environnement qui a eu de graves conséquences pour les gens. Dans certains endroits, des Asiatiques se faisaient tabasser dans la rue. Je ressentais une peur profonde et concrète pour ma mère, à l’idée qu’elle puisse avoir à faire face à quelque chose comme ça.

La Face B : Comment as-tu traduit cela dans ta musique ?

Nat Myers : Le blues est la seule musique que j’ai toujours aimé jouer. Il a ce pouvoir narratif. La capacité à parler de ce qu’il se passe a toujours été un des principaux moteurs de la musique blues. La poésie est ancrée dans le côté pratique de la musique, elle parle de la vie de tous les jours. Yellow Peril est basé sur la chanson Boweavil Blues de Charley Patton, dans les années 1930. Il parlait d’une grande famine, d’insectes venus du Mexique qui avaient dévasté les cultures dans le Sud. Dans la chanson il personnifie le boweavil comme un pater familias, une figure paternelle qui dirige sa famille. Lorsque le coronavirus est devenu synonyme de toute une région du monde, j’ai pensé que le pouvoir du blues avait vraiment la capacité de décrire ce qui se passait. Ma mère est une immigrante de la première génération, elle est arrivée par bateau en 1969, et je raconte son histoire dans mes textes. Ce qui a été une grande joie avec la sortie de ce disque, c’est que j’ai pu dialoguer avec d’autres Américains de la première génération qui ont des histoires de leurs propres parents et de leur lutte pour venir ici. Peu de gens dans le Kentucky savaient ce qu’était le péril jaune, ils ne se rendaient pas compte que ce sentiment anti-asiatique était profondément ancré dans l’histoire de l’Amérique. Les Chinois ont construit le chemin de fer transcontinental et pourtant, aujourd’hui encore, on leur refuse le droit de participer aux commémorations. C’est toujours d’actualité, et il y a en ces temps une dynamique étrange, qui donne la sensation d’être un exilé dans son propre pays.

La Face B : Tu as étudié la poésie à New York. C’était un exutoire pour toi, avant même de commencer à écrire des chansons ? Comment cette culture de la poésie ancienne t’a-t-elle influencé en tant qu’auteur-compositeur ?

Nat Myers : Il y a quelques jours, je parlais avec des étudiants à Clermont-Ferrand. Je leur disais que l’on nous enseigne que les arts sont compartimentés, que si l’on est designer, on ne peut pas devenir peintre ou que si l’on est musicien, on ne peut pas être poète. Mais lorsque vous apprenez l’état d’esprit artistique, il s’applique à tous les arts, il n’y a pas de barrières. C’est plus facile pour moi parce que je travaille avec le langage, mais le passage de la poésie à la musique s’est fait naturellement. Depuis que j’ai pu partir sur les routes ces deux dernières années et demie, je suis fermement convaincu que les vrais poètes qui méritent de l’attention de nos jours ne sont pas les universitaires ; les vrais poètes, qui pratiquent ce sens primordial de ce qu’est la poésie, sont les musiciens d’aujourd’hui, principalement les singer-songwriters, comme Theo Lawrence ou Vincent Neil Emerson. Ce que Lou Reed dit dans Sweet Jane, « tous les hommes étudient les règles du vers, et les femmes se contentent de rouler des yeux« , on le ressent lorsqu’avec la musique on est capable de contourner l’académisme ; les gens pratiquent la poésie tous les jours, nous l’appelons simplement musique, c’est tout.

La Face B : Pour toi, écrire des chansons n’est donc pas différent de la poésie ? Je trouve qu’il est souvent plus difficile de passer de la poésie à la musique.

Nat Myers : Pour moi, d’un point de vue poétique, faire des rimes est démodé. C’est quelque chose que beaucoup de poètes d’aujourd’hui ont abandonné. Il y a une dynamique curieuse qui fait qu’un poète qui se lance dans la poésie crée ces limites parce qu’il recherche des choses comme la cadence, l’harmonie… c’est très strict. C’est comme écrire un sonnet ou un poème épique en vers libres, la musique n’est qu’une forme différente de poésie.

La Face B : Quels sont les artistes de blues qui t’ont le plus inspiré et qui t’ont vraiment donné envie de suivre cette voie ?

Nat Myers : Quelqu’un qui dont on se souvient peu, c’est Memphis Minnie, que j’aime profondément. Son vrai nom était Lizzie Douglas, née dans le Mississippi. C’est un monstre absolu à la guitare, elle est incroyable. Elle a fait de nombreux enregistrements au début du 20ème siècle, mais à moins d’être un passionné de blues, on ne sait pas vraiment qui elle est. C’est un autre aspect intéressant de la musique blues : même si j’apprends aujourd’hui qu’il y a beaucoup d’interprètes féminines, elles ne sont toujours pas reconnues à leur juste valeur. Tu as déjà entendu parler de Jesse Mae Hemphill ? C’est une très grande musicienne de blues, qui est décédée au début des années 2000. Il semble que dans le blues, le public n’accepte que peu de femmes. Beaucoup d’artistes féminines sont comparées aux hommes. Memphis Minnie a une attitude presque masculine, elle parle des mêmes choses que les artistes masculins, comme courir après son mec, et elle est fière de sa musique. Un autre artiste à qui je dois rendre hommage est Tommy McClennan. C’était un petit musicien à l’époque, il a joué avec Robert Petway qui a écrit le Catfish Blues original, rendu célèbre par Muddy Waters.

Photo: Andres Tabares

La Face B : Génial ! Je vais les écouter. Pour continuer sur ton parcours, quand le Covid est arrivé, tu as commencé à enregistrer des chansons et des vidéos et les poster sur les réseaux sociaux. C’est comme ça qu’Easy Eye Sound t’ont repéré, puis t’ont fait venir à Nashville, où tu as fini par enregistrer un album avec eux. Comment tout cela s’est-il passé ?

Nat Myers : Oui, c’est vraiment arrivé! Dan [Auerbach] partage le même état d’esprit que moi. Lorsque nous nous sommes rencontrés pour la première fois, il me racontait que lorsqu’il était adolescent, il envoyait de l’argent par la poste à des festivals pour obtenir des cassettes VHS de ses musiciens préférés. Il est très investi, il s’engage beaucoup dans la recherche de nouveaux talents. Lorsqu’il est tombé sur moi, j’étais à la croisée des chemins, j’avais presque abandonné la musique il y a deux ans et demi. J’étais à New York, j’avais passé un accord avec un producteur pour enregistrer certaines de mes chansons pour 250 dollars, ce qui représentait beaucoup d’argent pour moi, car je gagnais 600 dollars par mois à l’époque. Il a gardé mes masters et a commencé à être vraiment bizarre, à m’insulter, etc. Lorsque j’ai contacté mes amis de la communauté folk et blues, ils ne m’ont pas aidé. Je me suis dit que si ce sont ces gens-là qui sont dans cette musique, alors fuck it. J’allais repartir faire mes trucs. Je suis vraiment heureux que la roue ait fini par tourner. J’ai commencé à mettre ma musique en ligne et j’ai sorti une chanson intitulée Hobo Wine, une originale basée sur le Old Time Blues de Carl Martin. Le fabricant de ma guitare, Matt Eich, a fabriqué des guitares pour Dan, mais aussi pour Jason Momoa. Jason est la première personne à m’avoir contacté via Matt, on s’est très bien entendus, il m’a beaucoup soutenu lorsque j’avais envie d’abandonner. Il m’a envoyé une guitare et j’ai composé un morceau instrumental intitulé Poor Boy Headed Home. J’ai mis une vidéo en ligne et, quelques semaines plus tard, j’ai reçu un message de Tom Osborne ([Easy Eye Sound]). Je suis allé à Nashville, et j’ai rencontré le producteur Allen, et Dan.

La Face B : Est-ce que ça a cliqué instantanément ?

Nat Myers : Oui absolument, on s’est super bien entendus. On était assis à une table ronde, Dan fumait son éternel cigare et on parlait de blues. Ils m’ont fait visiter le studio, j’étais un peu sur mes gardes et ils se sont montrés très francs. Ils ont profondément apprécié ma musique, et mon amour du même son qu’ils aiment. J’adore aussi les autres artistes d’Easy Eye, comme Robert Finley avec qui j’ai joué en tournée, et Aaron Frazer.

La Face B : Oh oui, je connais Aaron, il est génial !

Nat Myers : Je l’ai vu jouer dans une toute petite salle folk à New-York, il a fait cette folle reprise à la batterie d’un musicien de blues qui s’appelait Blind Lemon Jefferson.

La Face B : Il est incroyable à la batterie. Je l’ai vu à Washington DC avec Durand Jones, j’ai été bluffée.

Nat Myers : C’est un chanteur et artiste hors du commun. Donc quand j’ai vu qu’il était aussi sur le label, j’ai pensé que c’était un bon endroit pour moi, et ça s’est avéré être vrai.

La Face B : Comment s’est déroulé l’enregistrement de l’album ? Je sais que vous n’avez pas enregistré dans un studio traditionnel, mais dans la maison de Dan Auerbach, avec Pat McLaughlin et Alvin Youngblood. Comment s’est passée la collaboration avec eux?

Nat Myers : Mes chansons Yellow Peril ou 75-71 étaient presque complètes quand je les leur ai présentées. Pat McLaughlin est un collaborateur de longue date de Dan, sa réputation le précède. Dan et moi sommes de grands admirateurs d’Alvin Youngblood, qui est un artiste extraordinaire. Je ne savais pas qu’il serait présent au studio d’écriture. Dan m’a dit que même si on n’arrivait pas à écrire une chanson, on aurait au moins l’occasion de le voir jouer. J’étais tout à fait d’accord. Si j’ai un regret à propos de l’album, c’est que l’on n’ait pas pu faire jouer Alvin dessus. Mais il a travaillé avec moi à l’écriture de certaines chansons, comme Roscoe et Undertake Blues. C’était une période géniale. Lorsqu’on était assis autour de la table, Pat griffonnait des trucs, il n’écrivait même pas mais faisait des gribouillis en laissant son esprit s’évader. Des chansons comme Pray for Rain ont vraiment pris vie grâce à lui.

La Face B : J’allais te poser une question sur Pray for Rain d’ailleurs. C’est un morceau beaucoup plus country. Qui est-ce qui chante les chœurs avec toi ?

Nat Myers : Oui, à 100 % ! Pat chante et Dan fredonne aussi un peu. Je dois saluer Leroy Troy, qui a joué du washboard et du banjo avec nous sur l’album. Son inclusion dans Pray for Rain a vraiment bien complété l’album. Dan joue également de la basse sur Yellow Peril. J’avais un riff et une mélodie, mais cette chanson nécessitait un peu plus de travail, il m’a aidé à trouver une mélodie et un hook. Il m’a apporté une vision d’ensemble, et je pense qu’on l’a fait avec suffisamment de subtilité pour lui rendre justice. Lorsque j’ai rencontré Dan, je lui ai dit que j’essayais d’apprendre des reprises, comment jouer ces chansons de Robert Johnson ou de Charley Patton, et Dan m’a dit que ces chansons n’allaient pas disparaître. Il n’y a aucune raison de ne pas utiliser son amour des vieilles chansons pour créer un son à partir de ses influences et l’actualiser, ce qui est exactement ce qu’il fait dans sa propre musique. Il s’est appuyé sur l’héritage du blues et, en même temps, il a fait beaucoup pour mettre en valeur des artistes comme Screamin’ Jay Hawkins ou Fred McDowell, qui que ce soit qui l’ait inspiré, il a pu mettre ces artistes dans la lumière. De manière beaucoup plus concrète, avec des gens comme Robert [Finley], Dan est allé enregistrer un disque avec lui parce qu’il était époustouflé par ses capacités de musicien. Ce qu’il disait résonnait beaucoup en moi. Je sais jouer Boweavil Blues, mais la question est de savoir comment le rendre pertinent et cool.

La Face B : Comment y mettre une touche personnelle.

Nat Myers : Exactement, être capable de s’ancrer dans la tradition tout en étant pertinent aujourd’hui. Yellow Peril a été l’une de mes premières incursions dans ce travail.

Photo: Andres Tabares

La Face B : Quels sont tes projets pour cette année ? Est-ce que tu prépares un nouvel album ? Y a-t-il quelque chose que tu aimerais expérimenter musicalement ?

Nat Myers : Dans le blues, j’aime la tradition des duos de guitares ou la présence d’un washboard dans le morceau. J’ai été très inspiré par Fred McDowell et Bukka Whites, ce n’est pas du blues ordinaire. Je travaille sur beaucoup de nouvelles chansons en ce moment, en m’intéressant aux récits. Je viens d’en écrire une sur le sous-marin Titan qui a coulé, dans le cadre d’un gospel blues. Ce qui m’a frappé dans cette tragédie, c’est qu’il s’agissait d’une sorte d’arrogance biblique, du peu de sympathie que le monde avait pour les gens qui ont sombré là-dedans. Il existe d’ailleurs une chanson traditionnelle intitulée Titanic de Mance Lipscomb, qui a une pertinence plus profonde. Donc, oui, j’aborde des sujets d’actualité. J’aimerais aussi faire un peu plus de poésie, intégrer plus d’influence poétique dans mes morceaux, plutôt que de me concentrer sur la dynamique « toi et moi » de certaines chansons de l’album. En tout cas, j’ai beaucoup de nouvelles chansons, je vais en jouer quelques-unes ce soir.

La Face B : De quoi tu t’es inspiré pour ces nouvelles chansons plus poétiques ?

Nat Myers : Ce qui caractérise les poètes, c’est que même s’ils écrivent sur quelque chose qui ne les concerne pas, ils écrivent en fait sur eux-mêmes ou sur leurs propres expériences et les retranscrivent en quelque chose d’autre. Par exemple, mon grand-père a servi pendant la Seconde Guerre mondiale, et j’ai été fasciné par ces références au blues, comme Blind Lemon Jefferson qui a enregistré en 1927 une chanson intitulée Dry Southern Blues, qui parle de la conscription de 1917, avec cette phrase hilarante : « Uncle Sam was no woman, but did’t he draft your man ? » J’ai acheté à mon père un disque de Fat Domino datant de 1950, à l’époque de la guerre de Corée. La première phrase de cette chanson, trente ans plus tard, est la même. En regardant ces références et en m’inspirant des histoires de mes grands-parents, j’ai exploré cet aspect et j’ai puisé dans mon imagination. Certaines de mes chansons sont également nées par erreur, je n’ai pas joué comme je voulais et j’ai trouvé de nouvelles façons.

La Face B : Cela me fait un peu penser à Charley Crockett, que j’ai interviewé l’été dernier.

Nat Myers : Je pense qu’il est l’un des meilleurs. C’est un musicien et un auteur-compositeur extraordinaire. La première fois que je l’ai rencontré, j’ai eu l’impression qu’il lisait dans mon âme, il m’écoutait vraiment. Il est complètement présent. Il m’inspire beaucoup, de par son attitude et son caractère. Il vient lui aussi d’un milieu de musiciens de rue, et a probablement eu plus de coups durs que moi. Il est très fier de ses origines, très intransigeant et ne laisse rien l’entraver. J’espère avoir l’occasion de sortir autant de disques que Charley !

La Face B : Oui, c’est impressionnant, il sort un autre disque en avril.

Nat Myers : Oui, 10$ Cowboy ! J’ai hâte de voir comment sa carrière va continuer à exploser, tout comme celle de Sierra Ferrell. J’espère qu’il va continuer, c’est vraiment une star.

La Face B : Tu joues en solo aujourd’hui. Est-ce que tu as un groupe aux Etats-Unis avec lequel tu as l’habitude de jouer ?

Nat Myers : Pas vraiment, je joue souvent seul. J’ai quelques amis dans ma région avec qui je joue parfois. En ce moment, comme je joue souvent en première partie, je n’ai pas l’occasion d’emmener beaucoup de monde sur la route. Et puis j’ai 33 ans, beaucoup de mes amis élèvent des familles. Trouver un vrai groupe est la prochaine étape pour mes tournées, pour les rendre plus dynamiques. J’ai vraiment adoré jouer avec Robert [Finley], son groupe faisait des jams avec moi entre les concerts, c’est toujours agréable de trouver des gens qui jouent du bon blues. J’espère collaborer avec de nombreux musiciens avec lesquels j’ai travaillé. Je ne sais pas si j’enregistrerai sous mon nom. On verra bien.

La Face B : Et pour finir, aurais-tu une chanson ou un artiste que tu as écouté dernièrement à nous recommander ?

Nat Myers : Oui, il y a ce guitariste incroyable qui s’appelle Jontavious Willis, qui pratique la musique d’avant guerre comme moi. Il a 25 ans je crois, il vient de sortir un nouveau disque avec King Fish. Je l’ai rencontré en Géorgie quand je jouais avec Vincent Neil Emerson. Sinon je peux aussi citer Jerron Paxton, Don Fleming, Rhiannon Giddens.

La Face B : J’adore Vincent Neil Emerson d’ailleurs.

Nat Myers : Oh oui, Vincent est génial, et tout comme Charley il met beaucoup de blues dans sa musique. Il vient de l’Est du Texas, qui n’a pas la même réputation que le Mississippi ou la Louisiane pour le blues, mais c’est l’un des meilleurs en ce moment.

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ORIGINAL ENGLISH VERSION

La Face B: Could you tell me about why you chose Yellow Peril as the title of your album? It is a very connotative term, that refers to an ideology, racist, where Asian people are seen as a threat to Western values. What does it mean to you? 

Nat Myers: You know, “yellow peril” is a term that was used in the turn of the 20th century when there was a rising tide of Asian American immigration in the USA. There was a fear that happened at the time, and they passed laws to prevent Asians from coming. These laws were in the books all the way into the 70s. It had partially to do with the deeper purveying fears that Americans feel on the ground level about what the changing demographic of America would mean. I think particularly with the pandemic, but even before, the 21st century has seen a lot of anti Chinese rhetoric occurring within primarily the right wing. I’ve heard the former speaker of the house say that every Chinese student in America is a potential agent of the CCP. I come from Kentucky and there are not a lot of Asian folks there. A lot of my friends thought I was Chinese growing up but I’m half Korean. Before the pandemic I was having a greater awareness of my own identity, but after there was this deep fear. The belief that the origin of this virus happened in China and the careless rhetoric from the presidency created this environment which had led to serious consequences for folks. Asian people were actually getting beaten up in the streets in certain places. I had a deep practical fear for my mother, the idea that she could be going to the grocery store and have to deal with something like that. 

La Face B: How did you translate this into the music you play? 

Nat Myers: Blues is the only music I’ve ever loved to play. It has this narrative power. The ability to discuss what’s going on has always been a primary driver of Blues music. Poetry is rooted in the practical within the music, it speaks to everyday life. Yellow Peril is based upon that song called Boweavil Blues by Charley Patton. Back in the 1930s he was speaking about a deep famine, insects came up from Mexico and devastated the crops in the Deep South. The way that he personifies the boweavil is like this pater familias with his father figure who’s leading his family. When the coronavirus becomes synonymous with an entire region of the world, I thought that the power of the Blues really had the capacity to describe what was going on. My mom is a first-generation immigrant, she came by boat in 1969, I tell her story within my lyrics.  I just have a deep appreciation for their stories, and what’s been a great joy with getting this record out was for me to engage with other first-generation Americans who have stories of their own parents and their struggle to come over here. Not a lot of people in Kentucky knew what yellow peril was, they didn’t realize that this deeper anti-Asian sentiment is rooted deeply within our history in America. Chinese folks built the transcontinental railroad yet to this day they’re still denied the right to participate in the commemorations. It’s still relevant today, and I think there’s a strange dynamic where it’s not written into the books that Asian people aren’t welcome here, but at the same time it gives you the sensation of being an exile in your own land. 

La Face B: You studied poetry in New York. Was that an outlet for you, even before starting to write songs? How did this nurturing of old poetry influence you as a songwriter?

Nat Myers: I was speaking with students in Clermont-Ferrand a few days ago, I was telling them how we’re taught almost that arts are compartmentalized, like if you’re a designer you can’t become a painter or if you’re a musician you can’t be a poet. But when you learn the artistic mindset, it applies to any arts, there are no barriers. It’s easier for me because I’m working in language, but the transition from poetry to music was a natural one to me. Since I’ve been able to get on the road the past two and a half years, I’m firmly under the belief that the real poets right now who deserve attention aren’t the academics; the real poets who are practicing that primordial sense of what poetry is are the musicians of today, primarily the singer songwriters, like Theo Lawrence, or Vincent Neil Emerson. There’s kind of a deeper context of what poetry means to me. What Lou Reed says in Sweet Jane, “all the men study the rules of verse, and the women just roll their eyes”; there’s a sensation of that when with music you’re able to get around the academic; people are engaging with poetry every day, we just call it music right.

La Face B: So to you writing poetry isn’t different from writing songs? I find it often harder to switch from poetry to music.

Nat Myers: To me if you come from a poetic standpoint rhyming things is old fashioned. It’s something a lot of poets today have removed themselves from. There is a curious dynamic where, as a poet going into poetry, you create these limitations because you are looking for things like cadence, harmony, it’s very strict. To me it’s like writing a sonnet vs an epic poem in free verse, music is just a different form of poetry.

La Face B: What blues artists have inspired you the most and really made you want to follow that path? 

Nat Myers: Somebody that hasn’t been so much on the record is Memphis Minnie, that I deeply love. Her real name was Lizzie Douglas, she was born in Mississippi. She’s an absolute monster on the guitar, she’s unreal. She was prolifically recorded in the early 20th century, but unless you’re kind of deep in the blues, you don’t really know who she is. That’s another interesting thing about blues music where even am learning today, there are a lot of female performers but they still don’t get their full cut. Have you ever heard of Jesse Mae Hemphill? She’s a really great blues musician, who passed away in the early 2000s. it seems for women blues artist the audience still only allows for one or two. A lot of the female performers are compared to the men. The thing about Memphis Minnie is that she has this attitude almost masculine, she’s talking about the same things male artist are, like running around on her dude, and she’s proud of her music. Another artist I got to give my props to is Tommy McClennan. He was a small musician back in the day, he played with Robert Petway who wrote the original Catfish Blues, that was made famous by Muddy Waters

La Face B: Awesome! I’ll have a listen to these. And so pursuing on your path, when Covid happened, you started recording songs and videos on social medias. That’s how Easy Eye Sound spotted you, and then made you come to Nashville and you ended up recording an album with then. How did that happen? 

Nat Myers: Yes, it really did. Dan [Auerbach] comes from the same place as me. When we first met, he was telling me stories about when he was a teenager, he would write to a festival sending money in the mail to get the VHS tape of his favorite musicians. He’s very invested, he’s engaging a lot looking for new music. When he came across me, I was at a crossroads, I almost quit music two and a half years ago. I was up in NYC, had a handshake deal with some producer who would record some of my songs for 250 $, which was a lot of money to me, I was making like 600 $ a month at the time. He held on to my masters, and started being really weird, insulted me etc. when I reached out to my friends in the folk and blues community there, they didn’t help me. I thought well if these are the people who are in that music, fuck it. I was going to go back and do my thing. Am really glad it eventually circled around. I started putting my music online, I put out a song called Hobo Wine, an original one based on Martin’s old time blues. The maker of my guitar, Matt Eich, has made guitars for Dan, and also for Jason MomoaJason was the first person who reached out to me, we got along so well and he gave me a lot of support when I was feeling I was gonna quit. He had a guitar sent to me, and I composed an instrumental piece called Poor Boy Headed Home. I put a video online, and a few weeks later I got a message from Tom Osborne ([Easy Eye Sound]). When I went down there in Nashville I met the record producer Allen, as well as Dan, they showed me around. 

La Face B: Did it click immediately with them?  

Nat Myers: We got along so well. We were sitting at a round table, Dan was smoking his eternal cigar, we were just talking about the blues. They showed me around the studio, I was a bit cautious and they were very upfront, they were deeply appreciative of my music, my appreciation of the same sound that they love. I love Easy Eye roster, like Robert Finley I was touring with, Aaron Frazer as well. 

La Face B: Oh yeah I know Aaron, he’s amazing!

Nat Myers: I had seen him perform in a very small folk venue in New-York, he did this crazy drum cover of this blues musician named Blind Lemon Jefferson.

La Face B: He’s incredible at drums. I saw him in DC with Durand Jones, I was blown away. 

Nat Myers: I mean he’s an unreal singer and performer. So when I saw that he was also on the roster, I thought it seemed like a good place to be., and it definitely proved itself to be true. 

La Face B: How did the recording of the album was done? I know you didn’t record in a traditional studio, but rather at Dan Auerbach’s house, with Pat McLaughlin and Alvin Youngblood. How did you work with them? 

Nat Myers: Songs like Yellow Peril or 75-71 were almost complete songs when I brought them to them. Pat McLaughlin has been a longtime collaborator of Dan, his reputation precedes himself. Both Dan and I are deep admirers of Alvin Youngblood, who is an amazing performer. I didn’t know he was going to be at the writing studio. Dan was like well even if we don’t get any song done at least we get to see him play. I completely agreed. If I had one regret about the record, it is that we weren’t able to get Alvin to actually perform on the record.  He worked on some songwriting, like on Roscoe and Undertake Blues with me. It was a marvelous time. When we’d be sitting around the table, Pat would be scratching stuff, not even writing but drawing doodles letting his mind expand. Songs like Pray for Rain really came to life by working with him. 

La Face B: I was going to ask you about Pray for Rain actually. It’s more country isn’t it? It’s very nice, with those different voices. Who is singing with you? 

Nat Myers: Yeah 100%! Pat is singing, and Dan is also doing some humming. I got to shout out Leroy Troywho did washboard and some banjo with us on the record. His inclusion in Pray for Rain really rounded it out. Dan also plays bass on Yellow Peril. I had a riff and a melody, but that song required a little more work, he helped me find a melody and a hook. He gave me a bird’s eye perspective, and I think we did with enough subtlety to do it justice. Also, when I met Dan, we were talking about country blues, which kind sometimes be a bit lame. I said I was trying to learn all these covers, how to play those songs by Robert Johnson or Charley Patton, and Dan was just like those songs are going nowhere, they will always exist. There is no reason to use your love of the old songs not to create a sound from your influences and update it,  which is exactly what he’s doing in his own music. He’s built upon a legacy of the blues and at the same time, he’s done a lot to lift up artists like Screamin’ Jay Hawkins or Fred McDowell, whoever that have inspired him, he’s been able to shed a spotlight on these artists. In a much more concrete way with folks like Robert [Finley], Dan went to do a record with him because he was blown away by his capacity as a musician. It really made sense to me. I know Boweavil Blues, but the question is how do you make this relevant, and cool? 

La Face B: How do you put a personal touch to it.

Nat Myers: Exactly, being able to have a root within the tradition and at the same time being relevant today. Yellow Peril was one my first foray into dealing with that. 

La Face B: What are your plans for this year? Are you preparing a new album? Is there anything you’d like to experiment musically? 

Nat Myers: Within the blues, I love the tradition of guitar duets, or having a washboard in the piece. I’ve been really inspired by Fred McDowell and Bukka Whites, it’s not just regular blues. I’m working on a lot of new songs right now, looking at narratives. I just wrote one about the Titan submarine that sank, within a gospel blues. What was striking to me about that tragedy is it was a kinda biblical thing of hubris, how little sympathy a lot of the world had for the people who went down there. There’s actually a traditional song called the Titanicby Mance Lipscomb, there’s kind of that deeper relevanceSo yeah just approaching topics that are going right now. Also I’ve been interested in doing a little more poetry, how can I integrate more poetic influence within my piece, rather than focusing on the ‘I and you’ dynamic of some of the songs that are on the record.Anyway, I have a lot of new songs, I will play some of them tonight, stepping outside of my comfort zone.

La Face B: How did you go about writing those new more poetic songs? Is it less about things that happened to you? 

Nat Myers: One thing about poets is even if they’re writing about something that ain’t about them, they’re really writing about themselves or about their own experiences and transcribing it into something else. For instance, my grandpa served in World War 2, and I’ve been fascinated by those Blues references, like Blind Lemon Jefferson recorded in 1927 a song called Dry Southern Blues, a lot of the song has to do with the draft in 1917, he’s got this hilarious line “Uncle Sam was no woman, but didn’t he draft your man?” I bought my dad a record of Fat Domino from 1950, when the Korean war happened with the US. The first line of that song, 30 years later, is the same. Looking at those references and drawing from the stories of my grandparents, I was exploring that aspect and reaching into my imagination. Some of my songs are also based on me fucking up, not playing the way I want to and figuring news things out. 

La Face B: It makes me think a bit about Charley Crockett, who I interviewed last summer.

Nat Myers: I think he’s one of the best. He’s an amazing player and songwriter. The first time I met him I felt he was staring at my soul, he was truly listening to me. He’s completely there, very present. I’m very inspired by him, about his attitude towards stuff and his character. He comes from a busking background too. He probably had more hard knocks than me. He’s very proud about where he comes from, very uncompromising and not letting anything get in the way of that. I hope I get the opportunity to come out with as many records as Charley!

La Face B: Yeah it’s impressive, he’s releasing another record in April. 

Nat Myers: Yeah, 10$ Cowboy! I’m looking forward to see how his career is going to keep booming, the same way like Sierra Ferrell. I hope he keeps going, he’s really a star.

La Face B: You are playing solo today. Do you also have a band back in the States you usually perform with? 

Nat Myers: Not usually. I often play by myself. I got some friends back home that I’ve been playing with. At the moment as so many of my shows are as an opener, I don’t get the opportunity to bring too many people on the road. I’m 33, a lot of my friends are raising families, I need to get a band that would come out with me. That’s my next step when it comes to touring, I’d like to make it more dynamic. I really loved when I was playing with Robert [Finley], his band would jam with me between sets, it’s always nice when you find people who play good Blues. I’m hoping to collaborate with lots of the musicians I’ve worked with. And to me it’s important if I bring people to me to be egalitarian, I don’t know if I would record under my name. We’ll see where the wind blows. 

La Face B: And to finish, would you have a song or artist you’ve been listening to lately to recommend to us?

Nat Myers: Yeah, there’s this unreal guitar player named Jontavious Willis, who practices the pre-War as I do. He’s 25 I think, he’s got a new record with King Fish. I think he’s the real deal in terms of the sound I love.I met him down in Georgia when I was playing with Vincent Neil Emerson. Also Jerron Paxton, Don Fleming, Rhiannon Giddens

La Face B: I love Vincent Neil Emerson by the way

Nat Myers: Oh yes Vincent is great, and just like Charley he actually brings a lot of blues in his music. He’s from East Texas, which doesn’t get the same reputation as Mississippi or Louisiana for the blues, but he’s one of the best doing it right now.