Prophéties : L’apocalypse selon Nerlov

Lorsque le monde se barre en couille, l’humain à tendance à se chercher des héros. Des leaders charismatiques derrière lesquels se cacher et qui cristallisent en eux tout ce que l’on peut avoir de peurs, d’inquiétudes et de questionnements. Autant le dire, Nerlov n’est pas de ceux là. À la manière de Balavoine, il n’est pas un héros, mais une voix, une présence qu’on a envie d’écouter lorsqu’il nous raconte en six titres ses prophéties, visions du monde parfois tendres, parfois désespérées .

Si l’on se fie à la définition du terme, un prophète est « une personne inspirée par la divinité, qui prédit l’avenir et révèle des vérités cachées.« 
À la lecture de cette évidence, on peut donc l’annoncer sans lui faire ombrage : Nerlov n’est pas un prophète. Déjà parce qu’on l’a rencontré et qu’il est un être humain fait de chaire, de sang et de moustache.

Surtout parce que ce que nous propose l’angevin est une musique profondément ancrée dans l’actuel, le futur n’étant qu’un élément flou qu’il n’envisage que de manière très sombre à travers le prisme du présent, parfois même du passé. Et autant le dire, le présent n’est pas glorieux et, si l’on s’en fie à ces Prophéties, on va clairement droit dans le mur.

Ce premier titre, lance l’EP en grande pompe. Si dans le fond, Nerlov n’a pas changé, la forme elle étonne autant qu’elle enchante. Une production presque grandiloquente, carrément lumineuse et à haute dose de BPM sur laquelle il pose des obsessions qui reviendront ici et là nous taper derrière la tête dans les cinq titres suivants : monde qui se fracasse petit à petit, violences policières et incompréhension du monde qui l’entoure. Comme pour nous protéger, et désamorcer un peu la bombe qu’il nous lance en pleine gueule, le garçon nous prévient tout de même à travers une rime : « je grossis le trait, t’inquiètes pas pour moi, ouais ça va. »

En une petite phrase, Nerlov décode sa musique autant qu’il brise la carapace qu’il s’était forgé avec Je Vous Aime Tous : derrière le cynisme,la violence et la détresse de surface se cache donc un petit cœur qui bat et qui, apparemment, s’autorise à danser. Si Nerlov ne change pas, il évolue, il grandit et les morceaux qui vont suivre le prouvent avec brio.

Ainsi Ma Vie Avec Elle se veut comme le pendant sombre de Prophéties. Une anti-chanson d’amour, bien plus réaliste et humaine que toute la soupe que l’on peut nous servir en permanence. Alors que sonne les sirènes de la fin du monde, Nerlov nous raconte une histoire d’amour, entre incompréhension et fin inéluctable. Comme si il cherchait tellement à se protéger, que ce moment semble voué à s’autodétruire. L’amour ici semble avoir un temps défini, voué à brûler dans la haine et l’enfer.

MacLéod est une autre étape d’évolution. On sent ici une mélancolie sourde, guidée par l’apport de Chahu, camarade angevin et nouveau venu dans la team auparavant uniquement composée de Nerlov et Atom. Avec ce ukulélé tendre et entêtant, Nerlov nous raconte le temps qui passe et qui prend parfois le dessus sur tout. Malgré tout, le morceau se veut profondément positif, laissant une porte ouverte aux rêves et aux envies du bonhomme. Il porte ainsi un regard lucide sur la vie qui file alors qu’il réalise qu’i n’est pas un héros sur lequel le temps glisse.

Le morceau tient une place centrale sur l’EP, il est surtout le plus long des six titres proposés et on y sent une vraie évolution, une vraie tendresse qui se diffuse alors qu’il est aussi celui qui se tient le plus dans le format « pop » classique.

Des Mots Gentils prolonge ce sentiment presque doux sur lequel se fracasse un discours volontairement pessimiste mais rempli d’émotions alors qu’on retrouve ici toute le capacité de Nerlov à nous proposer des ritournelles addictives et portées par un chant spleenesque au possible.

Vision débarque et le monde se brise définitivement. On l’avait déjà dit, mais Nerlov est un observateur assez fin de la nature humaine. Si vision est un titre au singulier c’est parce qu’ici Nerlov nous raconte l’obsession que l’on peut avoir pour un discours qui ne trouve jamais de contradiction. C’est un peu l’état du monde qu’il nous décrit, où tout se vit en noir et blanc et où chaque opinion refuse tout idée de pluriel.

Pourtant comme il nous l’explique, si l’on apprend à écouter l’autre, c’est le premier pas vers l’amour commun. Musicalement, Nerlov surprend une nouvelle fois et nous noie dans une énorme vague synthétique avant que le côté organique, et une batterie complètement folle, ne vienne nous exploser les tympans. Le refrain est à ce titre une petite merveille qui prend toute son ampleur en live pour mieux nous faire chialer.

L’EP se termine avec Acide, premier morceau que Nerlov avait dévoilé pour ces nouvelles aventures. En trompe l’œil, le morceau joue de tous les gimmicks connus de son auteur pour nous offrir une sorte de chanson « somme », triste et belle à la fois, électronique et organique, violente et tendre.

Avec Prophéties, Nerlov nous chamboule et nous émeut. Jamais manichéen, cherchant toujours plus à explorer les genres musicaux pour jouer avec eux, le garçon nous rappelle surtout que, si triste et violent le monde peut être, on sera tous sauvés par l’amour. Alors on lui dit ici pour fermer cette chronique : Pour le câlin Nerlov, c’est quand tu veux !

Vous pouvez retrouver notre interview à propos de Prophéties ici et suivre les aventures de Nerlov sur Instagram et Facebook.