Grand monsieur du rap français, à 45 ans, Oxmo rempile pour un nouvel (et dernier ?) opus. La nuit du réveil, c’est un retour au hip-hop pour celui qu’on surnomme le Jacques Brel de cet art. Accompagné par des maîtres dans l’art de manier les mots tel qu’Orelsan, Gaël Faye et les belges Caballero et Jeanjass, il nous livre 15 titres dont lui seul a le secret.
Oxmo Puccino, c’est 24 ans de carrière, 14 albums et presque autant de classiques. Parmi eux, on peut citer des œuvres majeures comme Opéra Puccino, L’enfant seul et Le Cactus de Sibérie. Immigré du Mali et arrivé dans la cité Danube, il freestyle vite avec un groupe de rap composé de Kery James, Bo Green et Manu Key. Intégré par Pit Baccardi dans le collectif Time Bomb, il collaborera avec Lunatic et les X-Men. Lorsque Time Bomb se sépare en 1998, Oxmo signe chez Virgin et sort son premier album. La suite, vous la connaissez : toujours plus engagé, il continue à sortir projet sur projet mais collabore aussi avec la jeune générations (Hamza, Nekfeu, Seth Gueko, etc.). C’est aussi un homme très réfléchi s’impliquant dans plusieurs causes sociales.
Oxmo commence en demandant Le droit de chanter. Une intro calme, où la voix du rappeur est accompagnée d’un piano mélodieux, les thèmes actuels sont tous passés en revue, et malgré la gravité de certaines paroles M. Puccino et sa belle voix nous donnent envie de sourire. Après un morceau assez calme, on revient directement dans un rap brut voire ego trip avec Peuvent pas. Première connexion du projet, et c’est avec le duo belge que le Black Jacques Brel a décidé de parler de marijuana. Bien évidemment, substance à consommer avec modération, sauf si vous faites partie d’un Social Club. On retrouve le flow lent et saccadé propre au rappeur dans La peau de l’ours mais aussi sur la piste 7 où il nous sort de sa caverne d’Ali Baba une instrumentale hors norme. Malgré quelques années à rapper, Oxmo, nous gratifie d’un petit son introspectif avec Le nombril. On continue sur une note remplie de gaieté et de rap pur et dur entre Orelsan et Oxmo. Morceau rempli d’ego trip, mais peut-on leur reprocher d’avoir réussi leur Life ? À ton âge, Oxmo, on peut effectivement donner des conseils avisés aux plus jeunes, c’est chose faite avec ce morceau, sublimé par un refrain chanté.
Toujours aussi amoureux de la langue française, il n’hésite pas à lancer une Flèche épistolaire pleine de technique et de grâce. Dans 10 000, il se lâche complètement, montrant ainsi que même les plus grand peuvent aussi se faire plaisir, et il a bien raison. Certains disent qu’on a jamais Trop d’amour, Oxmo lui dit que c’est pire que pas d’amour. Sujet trop souvent abordé et traité en long et en large dans la musique, ici le rappeur l’aborde avec toute sa grâce et sa subtilité comme dans Horizon Sensuel. Le réveil est souvent brutal, mais avec M. Puccino ce n’est pas le cas. Sur une instrumentale saccadée, il joue sur les différents sens du réveil, étalant encore une fois sa technique. Gaël Faye est le dernier invité de l’album sur Parce que la vie, ode à la vie faite de bonne humeur aussi bien que de technicité. Après un si beau retour avec des morceaux bien rap, le public n’a envie que d’une chose, que ça continue. Mais comme toute bonne chose a une fin, Oxmo termine en nous disant : Je ne reviendrai pas. Un morceau introspectif qui clôture ces 15 titres.
S’il a décidé de se faire plaisir – et après une carrière si remarquable, cela est plus qu’acceptable – ce n’est pas pour autant qu’Oxmo Puccino tombe dans la facilité. Il joue de son amour pour sa langue maternelle et de sa subtilité avec les mots pour faire passer des messages imprégnés de toute son expérience. Il n’y a plus qu’à espérer qu’il reviendra un jour où l’autre…