De projets en projets Peet grandit et avec lui sa musique. A l’approche de la sortie de son nouveau projet A Demain, on a pris le soleil à la terrasse du Belga, un bar réputé de la capitale belge dans lequel il nous attendait. Deux ans après notre dernière discussion, on se plait à le voir évoluer et se livrer de plus en plus. C’est avec le même plaisir qu’on a parlé de cette évolution avec lui.
La Face B : A l’heure où on se parle, le projet n’est pas encore sorti, juste quelques singles, dans quel état d’esprit es-tu ?
Peet : Je suis curieux de voir comment les gens vont prendre le projet sachant que ça change un peu de ce que j’ai pu faire, c’est un peu plus calme. Comme d’habitude, on attends de voir ! Moi, ça fait depuis septembre que je le connais et qu’il est prêt donc il est déjà loin derrière moi.
LFB : Est-ce que dans ces périodes, tu n’as pas envie de revenir sur le projet et de le retoucher ?
P : Nan, quand mon projet arrive au mastering, je les écoute et une fois qu’ils sont validés je n’écoute plus trop le projet. Par contre je me le suis gravé et quand je suis en voiture, j’aime bien de temps en temps l’écouter. Souvent je laisse passer 2/3 mois pour avoir un peu de recul et là je l’aimais toujours autant donc tout va bien !
LFB : Lors d’une de nos dernières discussions, on parlait de cette envie de partir qui nous donne, au final, envie de revenir là où on était de base. J’ai l’impression que c’est encore plus présent sur ce projet.
P : Ouais ! Que ça soit de manière physique ou dans ma musique, j’ai pensé de tester des choses, de sortir de ma zone de confort mais souvent je reviens vite à mes bases, à ce qui me composent. Il y a des thématiques qui vont toujours revenir avec peut-être une autre perception.
LFB : Sur ce projet, on marque un tournant qui avait déjà été amorcé avec Mignon mais tu parais plus assagi sur certains points.
P : Je pense que ça se fait naturellement, c’est pas quelque chose que je calcule. C’est juste que je grandis et qu’automatiquement j’ai un point de vue qui peut-être différent sur certains points. Je ne le remarque pas forcément, c’est plus les gens qui m’écoutent qui me le disent. En plus, une fois que mes albums sont sortis, je ne les écoute plus donc je ne sais plus vraiment ce que je pouvais dire avant.
LFB : Tu t’es souvent considéré comme quelqu’un de « paresseux », pourtant quand on voit ton rythme de sortie sur ces dernières années, on a du mal à le croire.
P : (rires) Les tournées, les moments promos et les moments où je fais de la musique c’est des moments très intenses mais en dehors de ça, j’ai pleins de temps où je ne peux rien faire que je pourrais utiliser pour continuer à faire de la musique sauf que j’ai besoin de faire autre chose et même des fois de ne rien faire.
LFB : Je pense que ça peut aussi t’aider dans ton processus créatif de t’arrêter pour pouvoir prendre du recul sur ce que tu crées.
P : Oui, je me perdrais et je n’aurais plus de recul sur ce que je fais. C’est trop important pour moi de faire d’autres choses en dehors de la musique.
LFB : Sur A Demain, il y a aussi un assez gros rapport à la nostalgie. C’est un sentiment qui t’as toujours habité ?
P : Je pense que j’ai toujours été quelqu’un de nostalgique et mélancolique mais vu que je grandis et que j’ai plus vécu, j’ai plus de nostalgie et de mélancolie puisque j’ai plus de choses à raconter.
LFB : Tu as aussi un rapport aux gens qui est assez ambivalent. C’est l’un des projets où il y a le plus de collaborations, t’as un passif au sein d’un groupe (Le 77, ndlr) mais tu te penses souvent la question de la solitude. C’est un équilibre que tu recherches ?
P : J’ai toujours eu besoin d’avoir des moments où je suis seul parce que j’aime me retrouver avec moi-même. Je peux être très sociable mais j’aime aussi beaucoup le calme, être dans mon fauteuil sans que personne n’intervienne dans ce petit moment de solitude.
Je pense que j’aurais toujours besoin de ça. Même si demain j’habite avec ma meuf je sais qu’il y aura des moments où j’aurais besoin d’être seul.
Il y a des gens qui détestent être seul, moi j’aime bien !
LFB : Et concernant les collaborations, qu’elles étaient tes envies ? J’ai l’impression que c’est la première fois que ça dépasse ton cercle proche.
P : Ca s’est fait par le feeling des rencontres. Pour Ben PLG, par exemple, je l’ai rencontré quand j’ai fait le Skyrock de Lord Esperanza, il est directement venu me dire qu’il adorait ce que je faisais. Du coup, quand on s’est posé la question des featurings c’était évident pour moi de l’inviter. Humainement, c’est un gars sympa avec qui je me suis directement entendu. Il est venu à Bruxelles, à la maison et on a fait le morceau.
Il y a aussi Ele A, que j’ai découvert sur un morceau et à qui j’ai directement envoyé un message sur Instagram. Elle écoutait déjà ce que je faisais, ça a facilité les choses pour qu’on travaille ensemble. Mais encore une fois ça s’est fait naturellement.
Il n’y avait pas spécialement d’envies de faire des featurings un peu plus diversifiés mais clairement quand on a réfléchi l’album avec Rayan (son manager, ndlr) on s’est dit que la scène bruxelloise on en avait fait le tour. C’est cool du coup parce que ca va être plus surprenant pour un gars qui m’écoute de voir ces nouveaux noms.
LFB : Sur Mignon tu nous avais dit que le fait d’être en « famille » te rassurait parce que le disque était assez personnel. Maintenant que tu as passé ce stade, j’ai l’impression que t’es encore plus ouvert à la collaboration.
P : Je suis très ouvert à la collaboration et il y a pleins de jeunes talents que j’aime beaucoup. Mais, je sais comment ça marche, si t’envoies un message tu as peu de chances d’avoir de réponses, sauf si la personne te connait. C’est pour ça que c’est plus simple d’aller vers des gens de Bruxelles parce qu’on s’est surement déjà rencontré.
Puis des fois il y a des petits hasards de la vie comme avec Ben PLG, si on s’était pas rencontré ce jour là, il n’y aurait surement même pas eu l’idée de collaborer.
LFB : Il y a aussi Artÿ sur le projet pour un morceau qui ouvre un peu plus ton spectre musicale en allant un peu plus vers la pop. Est-ce que c’est un virage musical qui t’intéresse ?
P : Pas spécialement. Sur le coup on était en studio et j’avais commencé une instrumentale qu’on a tous les deux aimés. A aucun moment je me suis dit que c’était trop pop. Je fonctionne au feeling, si j’aime la prod c’est tout ce qui compte.
Sur ce projet j’ai fait des morceaux un peu plus chantés mais peut-être que plus tard j’en aurais marre et je voudrais refaire du rap pur et dur, je n’en sais rien, je me laisse aller là où j’ai envie d’aller.
LFB : C’est aussi une direction qu’on retrouve dans tes lives qui sont beaucoup plus organiques qu’au début. Comment travaillez-vous cet aspect qu’est le live ?
P : Mignon c’était le premier projet où des musiciens m’accompagnaient sur scène. C’était un peu compliqué au début parce que ça change beaucoup ta musique. T’as l’habitude d’entendre la version studio et là tout d’un coup t’as une batterie qui débarque et ça n’a plus rien à voir. Mais maintenant, je ne me vois plus faire de live sans eux. Ça a tellement pris de la place et permis de gonfler le live, ça apporte une vraie plus-value.
LFB : Est-ce que c’est pas à ça que devrait servir le live au final ? D’accompagner les auditeurs sur une autre version de ta musique.
P : Oui totalement ! Heureusement j’ai des musiciens trop forts, ils arrivent très vite à faire quelque chose qui va bien sonner. Il y a même des morceaux où j’ai du monter les BPM parce que j’estimais que c’était trop lent sur scène.
Après, on ne change pas complètement le morceau, ça reste la même mélodie,… Puis, c’est drôle parce qu’il y a des morceaux que l’on pose fait pour le lives et quand on les ré-arrange avec le band ça rend pas spécialement bien et inversement. Tu ne sais jamais à quoi d’attendre quand tu ré-interprétes les morceaux.
LFB : Quelque chose qui en change pas par contre, c’est ton énergie sur scène. Je suppose que le live est toujours aussi important pour toi ?
P : Oui ! J’essaye de donner un maximum au public.
Après je m’adapte, jouer à Dour ce n’est pas la même chose que de jouer en live-club.
Mais oui, la scène c’est le moment que je préfère ! C’est le moment où ça bouillonne.
LFB : Tu as fait l’Ancienne Belgique il n’y a pas longtemps, comment ça s’est passé ?
P : C’est différent, les gens n’étaient là que pour moi. Il y avait pleins de refrains où je pouvais lâcher le micro et les gens chantaient. C’est une autre approche, limite avant même de monter sur scène tu sais que tu as déjà gagné.
LFB : On en a parlé au début et on y revient maintenant. Le projet reste traversé par une certaine mélancolie mais qui est toujours contrebalancé par de l’espoir mais surtout par des compositions très colorées. Est-ce que c’est une volonté de te part de ne pas tomber dans le larmoyant ?
P : Oui ! Après, par exemple, le morceau avec Ben PLG, je le trouve assez dur même dans la production, c’est des accords très deep.
Si je peux arriver à mettre une touche de soleil dans des morceaux qui sont tristes c’est mieux.
C’est comme sur Mignon, j’ai fait un morceau sur ma mère mais j’ai essayé de le rendre plus joyeux pour ne pas tomber dans le piano/voix.
LFB : Puis ça ne colle pas vraiment à qui tu es.
P : C’est vrai que je suis quelqu’un d’optimiste, je rebondis toujours quand il m’arrive un problème. Fatalement ça va se retrouver dans ma musique.
LFB : Est-ce que le fait que la composition soit plus joyeuse ça t’aide pour te livrer ?
P : Je pense que c’est plus simple d’avoir ce petit côté coloré. Les productions que je préfère ce sont celles qui mélangent nostalgie et espoir. Si c’est trop nostalgique ça rentre dans le cliché de l’artiste qui se plaint et si c’est trop ensoleillé ça peut donner l’illusion que tout va bien. J’aime bien quand ça balance entre les deux.
LFB : A part une bonne sortie de projet, que peut-on te souhaiter pour la suite ?
P : La bonne santé !