Please : « Un groupe de rock aujourd’hui tu as plutôt intérêt à ne pas trop le prendre au sérieux ».

C’est la même chose chaque année, j’attends mon Spotify Wrapped comme le messie, pour au final dire à tout le monde « non mais tu sais c’est vraiment pas représentatif de ce que j’écoute ». Mais s’il y a bien un groupe qui n’y a pas volé sa place cette année c’est Please, qui s’est glissé sans surprise en 2nd position. Une année passée à réécouter compulsivement les 6 titres de leur EP eponyme, à les suivre en concert à La Boule Noire ou plus récemment au Badaboom. Tout ça m’a donné envie de percer les secrets de leur énergie folle, de leur goût raffiné du kitch et de cette délicieuse auto-dérision qui anime le trio parisien.
Debut décembre 2023, je retrouve les 3 membres Aristide, Louis et Dylan dans un bar proche de République – Le Désordre. À peine entré, l’ambiance parle d’elle même, « un bar de rockeur » remarque Aristide – j’avoue, cliché – avant de noter l’odeur d’encens qui imprègne le bar. Vraiment cliché. Un bar de rockeur pour parler avec eux de leur volonté de ne pas se prendre comme tel et de jouer des codes du « groupe de rock ». Le choix du bar en devient presque ironique – attention on adore Le Désordre.

« Un groupe de rock aujourd’hui tu as plutôt intérêt à ne pas trop le prendre au sérieux« . On a donc imaginé une interview décalée, faite de questions qui ne se posent pas à un groupe. Des questions à travers lesquelles le trio se révèle, jusqu’à nous dévoiler leur date de séparation ?? (en fin d’article bien sûr, on est fort en teasing). On croise les doigts pour qu’elle n’ait pas lieu d’ici le 17 avril prochain, date de leur première Maroquinerie. À moins qu’ils nous réservent une petite surprise à la Oasis !

LFB : Vous avez fait des festivals, des concerts, vous avez sorti votre 1er EP Please en avril dernier suivi d’une édition Deluxe en novembre. Ces morceaux vous accompagnent maintenant depuis presque deux ans. Parmi eux, lequel vous ne pouvez plus entendre ?

Aristide : On peut se mettre d’accord [rires] ? Fun And Games

Dylan : Fun And Games ? Il a un peu mieux vieilli.

Louis : Celui que je ne peux pas écouter c’est What Have You Got To Lose.

Aristide et Dylan : Ah oui !

Aristide : Je ne l’ai pas réécouté depuis sa sortie. Alors qu’il est bien ! Je trouve le début mieux que la fin finalement. C’est un morceau qu’on a trainé un moment, qui a été vraiment polymorphe sur deux ans…

Dylan : Il rappelle tellement la souffrance, le travail. Il a eu peut être 45 versions.

Aristide : Ouais c’est ça, c’est celui qui n’a pas été deluxe-éditionné [rires].

Louis : On a longtemps haï Fun And Games quand même. 

Aristide et Dylan : Mais il revient un peu !

Aristide : Loving Soft est le morceau qui marche le mieux dans nos cœurs et auprès du public. Je pense que c’est un des premiers de Please qui est allé vite dans sa création. On était aligné : l’inspiration, les évocations, les paroles… tout est allé très vite du starting point jusqu’au mix, contrairement à Fun And Games où on cherchait comment notre musique devait sonner. On s’était arrêté sur lequel ?

Louis : What Have You Got To Lose.

Aristide : Le titre parle de lui même [rires].

LFB : On a pu admirer dans toutes vos apparitions une belle collection de vestes Adidas vintages : la blanche, la jaune, la verte, la bleue… Qu’est-ce que vous avez fait de l’argent du partenariat ? 

Dylan : Et ben on ne l’a pas vu [rires]. 

Louis : Il existe, il existe… en tout cas on ne l’a pas encore vu. 

Dylan : Ce serait énorme une collab’ !

Aristide : En plus cette veste c’est un parcours dans le temps, dans les pays : Brésil, Japon, Suède…

Dylan : À la base cette veste est venue d’un problème. Je n’arrivais pas à trouver les tenues qui marchaient sur scène. Comme je suis debout derrière un piano, il ne faut pas que ce soit trop habillé. Un costume c’est chelou, alors que j’ai des super costumes, des vieilles pièces un peu cool. Il faut que ce soit un peu plus sportif, mais trop casual ça ne passe pas non plus. C’est une styliste qui nous avait glissé ça à l’oreille “Y’a un truc qui est cool, c’est de prendre un vieux bas de costume en mode patte d’eph et une vieille veste Adidas seventies”. En général, quand y’a un truc qui marche je m’y accroche et j’essaye de le développer. 

Aristide : C’est à l’image du projet, y’a le côté cool et la sueur [rires]. 

Dylan : C’est d’arriver sur scène et d’avoir déjà dans l’outfit un truc un peu sport. Tu montes sur scène, tu perfs, donc tu te mets déjà dans une atmosphère un peu physique. 

Louis : Un jour on a croisé un mec qui avait la même veste juste avant le concert.

Aristide : C’était à pleurer de rire, surtout que c’était un grand chauve super imposant.

Dylan : Horrible !

LFB : On a aussi vu Aristide s’essayer en cow-boy ou en chevalier plus récemment au Badaboum. Parmi ces deux tenues, vous gardez laquelle ?

Louis : La cape de chevalier parce que nouveauté. Nous on est très excité par la nouveauté.

Dylan : Ahhhh je sais pas, moi c’est vrai que les chaps je les trouve iconiques. 

LFB : Comment avez-vous mis la main sur ces chaps d’ailleurs ?

Aristide : Au même moment que la veste de Dylan en fait. On se faisait des looks pour le clip de Fun And Games tourné dans un rodéo. C’est tellement stylé, on s’est dit que c’était une bonne idée de garder les chaps pour la scène, comme il y avait le prétexte du clip qu’on venait de sortir, je les avais pour le concert d’après. Ces chaps je les ai commandées sur ebay, et j’ai payé beaucoup trop cher pour. C’est un indien qui m’a demandé mes mensurations dans un anglais approximatif, je me suis dit que j’allais jamais les recevoir [rires]. Je me suis mesuré en vite fait et le miracle c’est que deux semaines après, je reçois ces chaps magnifiques. Bon là elles s’étiolent un peu à cause de la scène mais c’est une vraie pièce de cuire sur mesure. 

Dylan : C’est génial, c’est le genre de move iconique !

Aristide : Entre la cape et les chaps, ça m’a coûté cher. Quand tu veux le truc iconique, tu l’as pas dans un farce et attrape.  

LFB : J’imagine que les Beatles ont eu une importance particulière pendant votre vie..

Dylan : Non [rires].

LFB : Parmi leurs membres, il y a des personnalités marquées : Paul McCartney le doux romantique, le hippie John Lennon et George Harrison, le génie incompris du groupe. Qui de vous est qui ? 

Dylan, Louis et Aristide : et Ringo alors ! 

LFB: C’est vrai [rires], vous êtes un trio il fallait faire un choix ajoutons Ringo !

Aristide : John Lennon le hippie, il battait sa femme quand même…

Dylan : Qui a envie d’être John Lenon aujourd’hui ?

Aristide : C’est clair. Malheureusement il est un peu démodé.

Louis : Déjà, tout ce qui est Ringo je vais le prendre. 

Aristide : Mec, moi je t’aurais bien mis en George Harrison. 

Louis : Je peux prendre Ringo Harrison.

Dylan : En fait Louis c’est Ringharrison. 

Louis : Je fais les mêmes blagues que Ringo et je suis incompris comme Harrison [rires]. 

Aristide : Moi je suis bien un peu Ringo aussi. Dans le documentaire Get Back tu vois qu’il est un peu dans sa bulle, il est littéralement tête en l’air. Et je crois que si y’en a bien un du groupe qui doit porter ça c’est moi. Et je me sens ni Lennon ni McCartney. 

Dylan : C’est vrai qu’en fait y’a pas de Lennon dans ce groupe. 

Aristide : Déjà, je vais faire de la mousse, mais les meilleures lignes de basse de Paris c’est Dylan, et McCartney c’est les meilleures lignes de basse des années 60.

Dylan : Ça tu peux le marquer en gras [rires]. 

LFB : On va maintenant regarder 3 photos ayant marqué votre année, racontez-nous l’histoire derrière celles-ci !

Dylan : Le shooting de la cover. On a une copine qui bossait dans un studio photo qui nous a permis de venir faire des photos gratos, on a sauté sur l’occasion. Ce qui est marrant c’est que le studio photo est tout blanc et qu’on avait une idée de photo toute noire [rires]. Et Ari avait cette idée de mettre des diamants partout par terre, pour que ça feat aussi avec le titre Diamonds

Aristide : On imaginait un truc qui devait être rempli de diamants, mais le budget… [rires]. En fait un diamant, même un fake, c’est hyper cher. Le volume est tellement énorme, rien que pour ça on en a eu pour 200 / 300€. On s’est dit qu’on allait pas plus forcer. Mais on voit l’idée, même si on dirait aussi des débris de glace, comme s’il y avait eu un accident ou qu’on avait fait un dunk un peu trop fort [rires]. Il y a aussi un côté un peu crafté qui est charmant je trouve, mais c’est un peu notre excuse qu’on sort à toutes les sauces dès que c’est un peu amateur : “C’était voulu, c’est Do It Yourself. C’est nous, c’est l’esprit bonne franquette”. La photo est dans son jus, un peu vintage avec la guitare transparente, ça c’était vraiment pour le kiff. Après ça reste une photo studio, il n’y a pas d’anecdote plus croustillante derrière.

Louis : J’avais dormis deux heures juste avant. 

Aristide : Ah ouais ? T’es plutôt bien pourtant.

Louis : Je le disais uniquement pour ça [rires].  

Aristide : Celle-ci c’était à Londres, la friperie avait même fait un post insta avec marqué “The Please”. 

Dylan : Cette photo a été prise sur le tournage du clip de Loving Soft qu’on a fait à Londres et qu’on a imaginé deux semaines avant. On avait un plan de faire la première partie de Sir Chloe là bas. Ça coûtait tellement cher d’aller à Londres qu’on s’est dit qu’on devait rentabiliser le truc. L’histoire du clip c’est un groupe qui cherche désespérément un gig à Londres. On était avec Luca Lellouche, qui a réalisé le clip, on est rentré dans cette frip parce qu’il y avait cette idée des noobs qui arrivent à Londres et qui veulent absolument se faire une frip là-bas. On rentre dedans et le mec, sans qu’on dise quoi que ce soit, nous dit “Wait, wait, wait, you are musicians ?”. Et il a voulu prendre une photo avec nous.

Aristide : “The Please” avec une petite étoile “Our star customer today”. Trop mignon en plus le post est trop bien. 

Aristide : Ça c’est une radio que j’avais passé juste après le clip de Fun And Games. D’ailleurs, je ne suis pas le seul à en avoir passé une. 

Dylan : J’ai eu un problème de hanche aussi. 

Aristide : Ce rodéo nous a coûté en points de vie littéralement. Dylan et moi on a bien chuté, Louis a été le petit prince du rodéo. Il est descendu du taureau il a dit “pardon je vais descendre ici, terminus c’est mon arrêt” [rires]. 

Louis : J’ai un doigt qui craque depuis quand même.

Aristide : Physiquement c’était très violent. Je me suis tapé la tête dans la barrière, j’ai eu un flash blanc, j’avais mal partout. Le taureau m’a fait tomber dès le début et j’avais tout le poids de mon corps sur mon poignet, ça m’a fait ressortir l’os. Ça me fait un peu chier pour la guitare. La médecin m’a dit de me faire opérer mais avec des mois de post-opération donc trop chiant pour la musique. Je vis avec depuis. On a vraiment mouillé le maillot pour le projet [rires]. 

LFB : Vous devez avoir des anecdotes à nous raconter sur ce tournage...

Aristide : Le moment le plus flippant oui. Déjà c’était trop folklorique de tourner dans un ranch, il y avait le mec avec son chapeau de cowboy qui était là à nous expliquer comment faire. On se tapait des barres toute la matinée. Quand on est passé au rodéo, on attendait devant la grille que le gars ramène le taureau. On voit un énorme taureau arriver, suivi d’un tracteur qui le poussait vers l’enclos. Et là tous les autres taureaux se mettent à beugler, ils lui font un baroud d’honneur. T’as l’impression que ce sont ses potes qui disent “Vas-y, défonce-les”. Je peux te dire que là on a tous les trois perdu toutes nos couleurs [rires]. 

LFB : Où est-ce que le clip a été tourné ?

Aristide : C’était en Normandie. 

Dylan : Au Texas [rires]. 

Aristide : Jacksonville, Normandie. 
En fait c’est un italien qui a fait ses classes au Brésil et aux States. Il a fait du rodéo dans des stades de 80 000 personnes. Puis il s’est installé en France avec sa femme qui était normande, ils ont monté un ranch ensemble. Ils font de l’élevage pour les meilleurs taureaux de compétition d’Europe.

LFB : Et comment vous est venue l’idée de faire du rodéo dans le clip ?

Aristide : C’est Dylan.

Dylan : En fait on avait du mal à trouver une idée porteuse pour le clip. C’est dur quand c’est ton premier single. On avait tous les trois la flemme du clip qui passe inaperçu parce qu’il y a pas d’idée forte derrière. Ça nous enchantait pas tellement pour un clip qui allait porter notre projet. Notre identité est aussi dans la façon dont on fait des choses, les idées qu’on peut avoir. Je cherchais des idées out of the box, et je sais plus pourquoi je leur ai proposé qu’on fasse un clip en mode rodéo. Sauf qu’à la base, moi je pensais à un faux rodéo, je pensais pas à de vrais taureaux. Je voulais trouver un rodéo mécanique et faire des images marrantes avec ça. Je présente l’idée à Ari en vocal, et il me dit “Ah ouais du coup on va dans un ranch et on monte sur des vrais taureaux” !

Aristide : Heureusement que tu as trouvé cette idée là parce qu’elle est très proche de nous. Tous les étés on se retrouve dans les maisons de campagne des potes et on fait les cons, on organise des combats de boxe, on fait des concerts… On a un côté comme ça, pas Jackass non plus [rires]. On aime bien faire des conneries. En fait un groupe de rock c’est un bon prétexte pour faire tout et n’importe quoi. Avec nos clips préférés on se dit à chaque fois “Y’a que dans un clip que tu pourrais faire un truc comme ça”. Donc on le fait !

LFB : Si vous deviez revivre un de ces deux concerts, lequel choisiriez-vous ? 

Please à La Boule Noire – 28 Avril 2023
Concert au collège Buffon

Dylan : J’aimerais tellement revivre notre concert à Buffon !

Aristide : C’était notre tout premier concert dans notre collège. Avec Dylan on était en cinquième et on avait drafté Louis qui était en quatrième. On a fait finalement pas mal de concerts dans ce collège. Là on était tout timide on a à peine joué trois morceaux, on peut te les dire c’était Hey Joe de Jimi Hendrix, Should I Stay or Should I Go des Clash et Ça (c’est vraiment toi) de Téléphone

Louis : On avait pas joué Cendrillon aussi ?

Dylan : Non on l’a bossé mais on ne l’a pas joué. Tu l’avais joué avec un autre groupe. Louis c’était la mascotte de la salle de repet parce que c’était le seul batteur du collège. 

Aristide : C’était le moins flamboyant de tous en polaire Quechua mais le meilleur ! Il était en cinquième mais il jouait avec les troisième. 

Dylan : On revit lequel ?

Aristide : Moi je dirais La Boule Noire. Le concert à Buffon, c’est historique, c’est légendaire, mais La Boule Noire ça nous a ému !

LFB : Et vous choisiriez votre première ou deuxième Boule Noire ?

Dylan : La deuxième !

Aristide : Y’avait nos amis qui étaient là aux deux, et pour la deuxième ils étaient en mode grand final. Nous on était complétement déstressés parce que la première était déjà hyper cool et ça nous a vachement rassurés. On s’est dit que c’était que du plaisir en fait. Donc la deuxième on est directement arrivé dans ce mood là.

Dylan : Surtout que c’était trop bien parce qu’on est arrivé et qu’on avait 4h de balances. Le premier jour on s’était tapé tout le matos à installer. Deuxième jour, tout était là, on avait 4h sur scène pour se faire plaisir. On était un peu dans la peau d’un groupe ultra connu, hyper rodé. Il y avait un côté flowless, c’était trop bien ! Et les gens étaient d’autant plus fous.  

Aristide : Je trouve que les deux photos se font écho. Parce qu’il y a notre tout premier concert, et notre tout premier headline show. Le premier concert était déjà dans le fantasme du suivant. Si tu m’avais dit ne serait-ce qu’on allait remplir La Boule Noire avec des gens que tu ne connais pas dans le public j’aurais pété un câble. C’était notre premier headline show c’était incroyable.  

LFB : Après ces fameux concerts à Buffon, vous avez fait une pause pendant les études sup. Comment avez-vous vécu ces années ?

Dylan : De fait, parce que quand on était en terminale avec Aristide, Louis était en première année de prépa et il avait une fenêtre de 4h le samedi aprem après ses exams pour venir répéter avec nous. On avait que 4h de repet par semaine et l’occasion de faire 4 ou 5 concerts par an : le Cosy Club, le Supersonic… 

Aristide : Avec les études, ce qui a été cool pour nous, c’est que ça a bien réaffirmé notre envie de faire de la musique. On est allé tous les trois jusqu’au bout, on a vu les stages, on a vu le monde de l’entreprise et on a constaté à sang-froid que c’était pas forcément pour nous. On a fait le petit contrat informel qu’on allait essayer de faire de la musique pendant un an après nos études. Et en fait on a été rattrapé par les événements parce qu’on a sorti un EP alors même qu’on était encore étudiant, cet EP a tapé dans l’oeil de Spotify et on s’est retrouvé avec des partenaires très vite. La question ne s’est même plus trop posée à la fin de nos études. 

Dylan : C’est ça qui nous a vraiment motivé et rassuré quelque part, de se dire qu’on pouvait droper des morceaux et qu’il y aurait de la place pour nous. Parce qu’en fait quand tu es dans ta chambre, à faire des concerts devant tes potes, tu sais pas. T’arrives pas à savoir si t’es légitime à faire ce que tu fais. Pour nous c’était comme une sorte de validation, on avait notre place là-dedans !

LFB : Comment se sont faites les collaborations avec Kids Return et Anna Majidson, des artistes dont vous êtes proches.

Aristide : Kids Return sont des potes de longue date, justement quand on était à Buffon. Ils étaient pas à Buffon mais dans un lycée plus ou moins voisin. En fait on avait ensemble le monopole sur la musique indé de la rive gauche de Paris [rires]. Si tu veux ta concurrence tu la connais, on sortait ensemble on était déjà pote. On gravitait tous un peu autour et ça continue maintenant. Et on a rencontré Ana grâce à Please. L’histoire est moins sexy, on était en séminaire Universal pour composer de la musique. On a eu un coup de cœur amical tous les trois avec elle, on l’a revu à Pete The Monkey et on s’est marré.

Dylan : C’est très drôle d’ailleurs on n’avait pas bossé avec elle pendant le séminaire, on bossait dans des studios séparés. On sort du studio au même moment, en dernier, on se retrouve devant et on se présente. Puis on est allé boire une bière, on est resté 3 heures dans un bar à parler. On s’est fait chacun écouter nos morceaux, elle a trop kiffé donc c’était logique. Elle est venue à La Boule Noire chanter Kind of Morning donc ça faisait sens qu’on le fasse dans la Deluxe avec elle.

LFB : Vous développez dans votre musique un certain goût du kitch, je pense notamment au clip de It’s Only A Band avec ses références quasi désuètes, quelles sont vos inspirations ?

Aristide : On aime bien jouer sur l’ambiguïté, sur le degré d’humour de notre musique à nos clips. Par exemple des morceaux qui sont hyper romantiques, au lieu de se demander si ce n’est pas un peu trop fleur bleue on y va à fond. Pour les clips c’est pareil, celui de It’s Only A Band a été réalisé par Alice Moitié et ça faisait aussi partie de son univers. 

Louis : Déjà avoir un groupe de rock aujourd’hui, c’est kitch. 

Dylan : La musique qu’on représente n’est plus de la pop mais vient de ce qu’était la pop avant. Et comme la pop c’est premier degré, on parle de quelque chose qui était mis en avant comme une évidence. Maintenant, c’est plus évident, mais nous on la vit toujours comme ça. Il y a plein de références qui appuient ce truc un peu kitch, Elton John ou des films comme Phantom of the Paradise, les comédies musicales. Pareil un groupe comme Supergrass, qui sur les clips allait à fond dans le style 90s kids. Nous on ne rougit pas de cette image là, on s’en fout on y va à fond, on porte ça et si tu trouves ça ridicule c’est pas grave.

Aristide : Je rejoins Louis en fait, un groupe de rock aujourd’hui tu as plutôt intérêt à ne pas trop le prendre au sérieux. La musique on aime trop ça on l’a fait sérieusement mais en revanche quand il faut se présenter comme un groupe, faire de la promo, accompagner ça d’images on a juste envie de s’amuser. On sait quel est notre héritage, aujourd’hui on ne va pas te dire qu’on adorerait être les prochains Beatles. Y’aura pas de prochain Beatles donc autant s’en amuser, faire la musique qu’on a envie de faire, l’assumer et faire sourire la personne qui tombera dessus. Je touche du bois si on n’est pas cringe aujourd’hui, c’est qu’on a conscience de qui on est et dans quelle période on est. 

LFB : Vous avez déjà eu peur d’être trop kitch ?

Dylan : Pas kitch mais une peur qui revient souvent c’est de faire trop groupe de rock. Quand on fait un shoot par exemple, on sait qu’on est un groupe de rock et que si on pose tous les trois avec un coude, une main sous le menton, un truc trop posé face à la caméra, on va se dire “putain là on est un groupe”. Nous notre angle, quand on s’exprime, quand on est bien, c’est de faire ressortir toutes les aspérités du groupe. Il faut qu’il y ait une idée plus générale qui se dégage. On a besoin de se distinguer de ce truc là du groupe. 

LFB : Dans tous vos clips, vous vous mettez en scène en live dans un champs, sur une place, sur une plage… Vous jouez vraiment de partout ?

Aristide : On aime bien ça ! On n’ a pas envie de faire valoir des belles gueules. On a envie de faire valoir le fait qu’on va venir dans votre ville, on va faire le plus gros concert de l’année et on a envie que tu le vois.

Dylan : C’est le présupposé n°1 du groupe, tu les vois jouer en live. On a la chance d’avoir un batteur et la batterie ça cristallise le projet. Avec Ari on est tous les deux autour de la batterie, et le batteur il est là il tient le bordel. C’est ce qui fait qu’on est un groupe. 

Louis : Ça rend le truc marrant, j’apporte ma batterie n’importe où.

Aristide : On se joue du format groupe en fait, on le présente, on le met là, mais ensuite on essaye de l’emmener ailleurs. 

Dylan : On a tellement vu dans notre enfance des ”wanna be rocker”. D’ailleurs on nous l’a dit quand on a commencé, en nous tapant sur l’épaule, “encore un groupe de rock, vous voulez être les vedettes”. 

Aristide : On essaye de nous l’expliquer tu vois mais fréro t’inquiète pas qu’on est très au courant de ce que ça implique [rires]. 

Dylan : On a cette identité de savoir qu’on ne veut pas être ça mais qu’on l’est par la force des choses. Ça devient même un défi avec Salomé David qui bosse chez Universal et qui nous suit depuis le début. Elle s’est fait une religion d’essayer de développer des groupes parce qu’elle en a marre qu’il y ait plus de groupe en france. Elle voit bien que les groupes souffrent du fait qu’ils sont des groupes.

Aristide : En fait on avait surtout peur de ça quand on s’est lancé, mais aujourd’hui on a des clips pour montrer qu’on a du second degré. Quand tu débarques t’as juste ta musique, quand tu vois trois dudes qui font de la musique romantique t’as l’impression qu’on est perdu, les gars ils ont loupé un train de quarante ans. Aujourd’hui on a pu le prouver. 

LFB : Après un EP, des salles pleines et bientôt une Maroquinerie, certains des plus grands groupes n’ont pas resisté à un tel succès. Alors on se demande avec appréhension, quand est-ce que vous vous séparez ?

Dylan : On est pas encore assez proche de la séparation, elle va arriver après notre tournée mondiale !

Aristide : Une tournée mondiale, un Olympia et Coachella [rires].

Dylan : Après Madison Square Garden on pourra logiquement se serrer la main et mettre un terme à tout ça.

Aristide : On est très à l’aise avec la séparation parce qu’on sait où on veut aller.

Dylan : Dans un groupe c’est très important le split, parce que ça veut dire qu’il y a des comebacks. Tous les grands groupes vont splitter en fait, c’est important quand t’es un groupe de passer par là. 

Aristide : Là on vas splitter dans deux mois, juste avant la Maroquinerie. On va voir si on va la tenir [rires]. 

Louis : Peut être qu’on va disparaitre, on rembourse tout le monde. 

Aristide : Le split sera à la hauteur de la carrière, on va faire un truc dantesque. Un nez cassé, un coup de guitare au Zénith. 

Dylan : La réponse c’est qu’on n’est pas encore assez fat pour spliter. 

Arisitde : Ça serait nul.

Louis : Le beau split c’est Oasis. 

Arisitde : Soyez présents pour le split ça va être énorme, streamez le split [rires]. On vous prépare un truc vous êtes pas prêts. On va faire un split bien kitch. 

LFB : Dernière question, à quelques jours de la fin 2023, c’est l’heure de nous partager votre Wrapped de l’année.

Louis : Très simple, il y a la BO de Dunes, Justice et Lana Del Rey. C’est une poubelle gigantesque [rires].

Aristide : J’ai une confession, c’est qu’il y a énormément de Please. Please c’est mon deuxième groupe. Je suis obligé de rendre hommage aux Lemon Twigs, j’ai adoré l’album et à Flavien Berger aussi j’ai trop kiffé. Il a sorti un single super bien, sapon. Et il y a beaucoup de Please, tout le monde se fout de ma gueule et ils ont raison. Quand il faut aller en repet, ou en balances, je me retrouve à beaucoup écouter nos morceaux.

LFB : Et quel est ton morceau le plus streamé de Please ?

Aristide : Je dirais que c’est Diamonds.  

Dylan : Et moi c’est pas très représentatif, faudrait que j’ai un dictaphone wrapped [rires]. Ce que j’écoute le plus c’est démo v1, nouveau morceau, possibilité 47… C’est ce que j’écoute tout le temps, mon nombre d’écoute est ridicule sur Spotify. Le titre que j’ai écouté le plus je ne l’ai écouté que 19 fois, c’est pas beaucoup. 

Aristide : Quand tu fais de la musique t’en écoutes beaucoup moins.

Dylan : Et alors mon top 3, en trois c’est Paul McCartney, en deux les Lemon Twigs parce qu’ils ont sorti un album incroyable et en 1 c’est Troy Sivan. C’est un mec qui fait de la pop depuis des années, qui faisait un peu de l’EDM chantée. Et là il a sorti un album qui est fou, j’ai trop aimé. C’est vraiment la belle synthèse entre la grosse pop à l’américaine et un truc avec beaucoup de refs, un peu de Air, des petits grooves…

Aristide : Il a un peu rhabiller Harry Styles pour l’hiver, c’est Harry Styles en plus créatif. On partage beaucoup de groupes en commun quand même !