Pokey LaFarge: « J’ai la responsabilité d’offrir la meilleure musique possible aux gens »

La Face B a rencontré le singer-songwriter américain Pokey LaFarge, venu présenter son nouvel album Rhumba Country en showcase à Paris. L’occasion de parler inspiration, spiritualité, processus creatif et retour à la nature.

Photo: Fabian Fioto

*Cette interview a été réalisée en anglais. Pour lire la version originale, rendez-vous plus bas. / To read the original english version, scroll to the bottom.*

La Face B : Tu as joué un showcase de ton prochain album Rhumba Country hier soir au Sub Pigalle, comment c’était ? Tu es déjà venu souvent à Paris ?

Pokey LaFarge : Pour commencer par la deuxième question, j’ai joué pour la première fois à Paris il y a 12 ans dans une salle qui n’existe plus, la Flèche d’Or. Quelques années plus tard, je suis revenu et j’ai joué au Point Éphémère et à la Maroquinerie, et l’automne dernier, on a joué au New Morning, où je vais aussi jouer en novembre. Ma femme est une grande amoureuse de la ville, on vient y faire un petit tour de temps en temps. Le showcase de jeudi était génial ! C’est parfois difficile quand la salle est pleine, qu’ils sont tous debouts et bruyants, et que tu te retrouves seul sur scène. Mais avec Dieu, la caféine et le rock’n’roll, tout est possible !

La Face B : Et un maître de cérémonie comme Nicolas Ulmann !

Pokey LaFarge : Oui exactement, qui chauffe les gens à bloc ! On s’est bien amusés, et j’ai quelques bons amis de Montreuil ici, j’ai passé du temps avec eux. Mais il faut que j’écrive une chanson sur Paris ! J’ai une chanson pour Rotterdam, parce que j’ai passé beaucoup de temps là-bas, j’adore les Pays-Bas. Et j’aime aussi l’Espagne, alors j’ai écrit une chanson il y a quelques années qui s’appelle Goodbye Barcelona. Maintenant, je dois écrire une chanson pour Paris, ce que j’avais justement commencé à faire avant que tu arrives !

La Face B : C’est cool ! J’ai hâte de l’entendre.

Pokey LaFarge : Elle sera terminée si Dieu le veut. J’ai la chance d’avoir un peu de temps libre, car les derniers jours ont été très intenses. Quand on a du temps libre et qu’on peut aller doucement, c’est là que les chansons commencent à sortir. Paris est un endroit qui regorge d’inspiration si on sait comment la trouver, mais on doit être capable de créer l’espace nécessaire pour que les choses sortent naturellement. Je ne m’assois pas en me disant que je vais écrire une chanson aujourd’hui, je m’assois dans le silence, je me déstimule. Et ensuite la plupart des chansons s’écrivent d’elles-mêmes, la musique d’abord et les mots ensuite.

La Face B : Donc tu ne te forces pas à écrire à ton bureau tous les jours ou ce genre de choses ?

Pokey LaFarge : Je ne m’assois pas à mon bureau pour écrire, je m’assois à mon bureau pour jouer. Pour faire circuler les jus, je m’entraîne ou j’apprends une chanson. Aujourd’hui, par exemple, j’ai pratiqué la chanson Mohair Sam de Charlie Rich. Je fais souvent ça, pour remuer un peu la terre et voir ce qui attend en-dessous.

La Face B : En parlant de ton écriture, tu es une personne assez religieuse et tu as dit récemment que tu écrivais tes chansons comme des prières. Qu’est-ce que tu entends par là ? Comment la religion influence-t-elle ta façon d’écrire ?

Pokey LaFarge: C’est une très bonne question, parce que la religion a été le fondement de tout ce qu’il s’est passé dans ma vie au cours des cinq dernières années. J’ai vécu une sorte de rencontre surnaturelle avec Jésus au mois de janvier 2019. Je me trouvais dans une phase très sombre mentalement, j’essayais juste de survivre, et j’ai appelé Dieu à l’aide. C’était comme prendre un nettoyeur à pression et laver mon cœur. Une fois que Jésus est entré dans ta vie, tu marches avec lui, tu recherches l’amour au lieu de la haine, la paix au lieu de l’anxiété, la joie au lieu de la peur. Je ne glorifie plus la tristesse ou la dépression. Je ne veux plus écrire sur le fait de se saouler toute la nuit et de coucher avec un tas de femmes différentes, même si c’est cool et sexy pour les gens et que c’est ce que le rock’n’roll est censé être. Mais il y a un autre élément du rock’n’roll que les gens oublient et qui a eu une grande influence, et c’est l’église ! Le gospel, tu sais. Sans gospel, il n’y a pas de rock’n’roll. Écrire des chansons comme des prières, c’est la façon dont les gens ont écrit des chansons depuis la nuit des temps. Il n’est pas nécessaire que les paroles des chansons soient religieuses pour qu’elles suscitent un sentiment spirituel. Ces dernières années, alors que j’ai essayé de simplifier ma vie, j’ai aussi simplifié ma musique. Moins d’accords, moins de mouvements, pour laisser plus de place aux percussions et au rythme, à mes mots et à ma voix.

La Face B : Ces choix artistiques se reflètent dans ton nouvel album Rhumba Country. Pour quelle raison tu l’as nommé ainsi ?

Pokey LaFarge : Je pense que ce titre est en quelque sorte mon propre genre, au moins pour certaines des chansons de cet album. Lorsque j’étais en studio et que j’écoutais l’enregistrement de la deuxième chanson intitulée For a night, je me suis dit que c’était une rhumba mais qu’elle sonnait comme une chanson country, et le producteur a pensé que cela ferait un bon titre ! Rhumba Country est donc une sorte d’endroit fictif où l’on veut emmener les gens, un paradis. C’est coloré, c’est lumineux, c’est joyeux. Ce n’est pas sombre, ce n’est peut-être pas la ville.

La Face B : C’est plutôt une ambiance de campagne ? Quand tu as déménagé dans le Maine, tu as décidé de travailler dans une ferme. Comment cette expérience a-t-elle influencé ton travail et cet album en particulier ?

Pokey LaFarge : Ma femme – qui était ma copine à l’époque – vivait dans la région de Los Angeles. Il y avait du soleil tout le temps, des plantes qui fleurissaient toute l’année, des producteurs, des acteurs et des mannequins partout, des looks géniaux… Tellement d’inspiration et de stimulation. Puis elle a voulu déménager dans le Maine, parce qu’elle aime l’architecture anglaise ancienne. C’est littéralement l’opposé de la Californie. La pandémie de Covid était en cours, je ne pouvais pas faire de tournée et je cherchais quelque chose à faire. Le Maine n’a pas beaucoup de musique, il n’y a pas du tout d’industrie musicale.

La Face B : Mais il y a une belle nature, j’aimerais bien aller dans le parc national d’Acadia.

Pokey LaFarge : Ah oui ! C’est à deux heures au Nord de chez nous. Le Maine est très rural, ça ressemble un peu à l’Irlande avec des montagnes. J’avais toujours voulu faire quelque chose de nouveau, acquérir de nouvelles compétences, alors je me suis dit que je pourrais peut-être me lancer dans l’agriculture. J’ai trouvé un emploi dans une serre où j’ai suivi un programme de semis et j’ai ensuite travaillé dans une ferme, où j’élevais des poulets et tout le reste.

La Face B : Et tu n’avais jamais fait ce genre de choses auparavant ?

Pokey LaFarge : Non, j’étais sur les routes depuis si longtemps, et c’est la raison pour laquelle je voulais essayer de nouvelles choses. Travailler dans une ferme, creuser, se salir, les couleurs, le soleil, la sueur… c’était très profond, c’est en quelque sorte la forme d’art la plus ancienne et le premier métier qui existe. Je suis vraiment revenu à mes racines, sans mauvais jeu de mots !

La Face B : Avec une amie on a passé quelques jours dans une ferme la semaine dernière aux Etats-Unis, dans les Smokey Mountains. C’était tellement paisible, je n’avais pas ressenti ça depuis très longtemps. Le simple fait d’être là-bas m’a apporté une grande clarté mentale, et m’a rappelé à quel point la nature est importante.

Photo: Fabian Fioto

Pokey LaFarge : Oui, je pense que ça fait partie de nous, c’est comme ça que l’on a commencé et c’est comme ça que nous voulons tous vivre en fin de compte, mais les emplois sont en ville, et la ville est magnifique. La stimulation qu’on reçoit de la ville peut en quelque sorte nous « aveugler ». Paris est trépidante, Los Angeles, New-York… Ton esprit est toujours en action, j’ai du mal à dormir et à écrire. Tu vis cette grande vie et toutes ces expériences, mais tu vas tellement vite qu’à peine tu commences à y réfléchir qu’elles ont déjà disparu.

La Face B : Oui, c’est difficile d’assimiler autant de choses. Moi j’essaye vraiment de faire des pauses et de prendre le temps de réfléchir, sinon je deviens folle !

Pokey LaFarge : Oui, c’est pour ça que les gens en ville deviennent un peu fous ! Je dois m’assurer que la vie que je mène me permet d’être en paix, sinon mes chansons ne viendront pas ou ne seront pas les meilleures que je puisse écrire. C’est la vie qui sert les chansons.

La Face B : Et pendant combien de temps as-tu travaillé à la ferme ?

Pokey LaFarge : On s’est arrêtés fin 2022, j’ai commencé à enregistrer en janvier 2023, puis j’ai commencé à tourner tout au long de l’année. Mais on est toujours basés dans le Maine, on vient d’acheter une maison dans un village.

La Face B : C’est super ! Tu peux donc revenir te reposer entre deux tournées ! Est-ce que ta femme va partir en tournée avec toi ?

Pokey LaFarge : Oui, elle sera là, elle fait partie du groupe, on a écrit trois chansons ensemble sur l’album. Elle est à la maison en ce moment, elle m’a laissé un message vocal ce matin parce que le plafond de la salle à manger fuyait ! C’est ce qui arrive quand on a une vieille maison. Elle date des années 1840.

La Face B : Elle doit être très belle, avec une architecture ancienne.

Pokey LaFarge : Oui, c’est pour ça qu’elle voulait s’y installer.

La Face B : Rhumba Country est ton dixième album, tu as donc eu le temps de faire évoluer ton style, tu me disais notamment que tu avais simplifié ta musique. Est-ce que tu dirais que ton style pourrait encore changer à l’avenir, ou tu te sens bien là où tu es artistiquement ?

Pokey LaFarge : Je pense les deux. J’aimerais continuer sur cette voie sur le plan du son et du rythme, mais il y aura toujours des expérimentations. La musique que j’écoute va toujours changer. Les influences et les expériences de la vie sont différentes – on accumule de plus en plus de voyages en vieillissant, j’aurai des enfants un jour…

La Face B : Ça me fait penser aux Secret Sisters, on les a vues à Houston et elles expliquaient comment la maternité avait influencé leur écriture. Sur leur dernier album, elles ont quelques chansons liées à la maternité, mais d’une manière qui peut parler à la plupart des gens.

Pokey LaFarge : Oui c’est sûr, comment cela pourrait ne pas avoir d’impact ? La musique que tu fais est ce que tu es, c’est pour ça que tu dois le faire de façon intentionnelle. Et j’ai aussi la responsabilité de faire la meilleure musique possible, pas pour moi, mais pour les gens. C’est un don que tu dois partager. Quel artiste créerait quelque chose qui resterait simplement à la maison ? Ce n’est pas comme ça que c’est censé se passer.

La Face B : Et il ne faut pas essayer d’imiter les autres ou se conformer à un style particulier juste pour plaire aux gens.

Pokey LaFarge : Certains le font, ils ont leur truc et les gens adorent. Moi je veux écrire des chansons rapides, je veux écrire des chansons en solo, je veux écrire de la guitare électrique… J’aime différents types de choses, et les fans n’apprécient pas toujours, les fans n’aiment pas quand on change. Je sais que j’ai perdu beaucoup de fans au fil des années à cause de différents albums et sons, mais qu’est-ce que tu veux y faire ? Je fais la meilleure musique que j’ai faite jusqu’à maintenant, et je continue de grandir.

La Face B : Certains nouveaux artistes ont du mal à penser de cette façon, car ils ont peur de perdre des gens en cours de route. Et c’est compréhensible, il faut « fidéliser son public » si l’on veut gagner sa vie en tant que musicien. Je suppose que ça prend des années de se détacher de cet état d’esprit.

Pokey LaFarge : Oui, et tu en es toujours un peu conscient. Tu as un public et tu essayes de le conquérir et de le garder. Tu veux t’assurer que les gens voudront s’asseoir là où tu t’assieds, mais en fin de compte, ce ne sont pas les gens qui vont te dicter ce que tu enregistres.

La Face B : L’album sortira le 10 mai. Tu as déjà sorti trois singles. Il y en a un qui s’appelle Sister André et qui est inspiré par une vraie religieuse française. Peux-tu me parler de cette histoire ?

Pokey LaFarge : J’avais une idée de chanson, avec un groove et une progression d’accords en tête. Lors d’une séance d’écriture avec l’un de mes producteurs, Chris Seefried, mon manager m’a envoyé un article sur une femme qui, au moment de son décès, était la personne la plus âgée du monde. Elle avait 118 ans. Il s’agissait d’une religieuse française nommée Sœur André. Je me suis dit que ça ferait une bonne chanson, que c’était un nom cool. Elle a traversé la Première et la Seconde Guerre mondiale, la Grande Dépression, elle a survécu au Covid… Je me suis demandé à quoi ressemblerait notre conversation si on s’asseyait avec une femme de 118 ans, quels conseils elle nous donnerait.

La Face B : Et la chanson parle de la façon de trouver l’amour, ce qui n’est pas typiquement ce que l’on attend d’une nonne ! Mais je la comprends comme un moyen de transmettre l’importance de l’amour, quelle que soit la forme d’amour – de Dieu, de votre amoureux, etc. J’ai beaucoup aimé cette chanson.

Pokey LaFarge : Oui, c’est assez cocasse ! La façon dont tu la décris est parfaite.

La Face B : On n’a pas encore parlé de ton groupe. Tu as toujours joué avec les mêmes musiciens ? Lesquels viendront en tournée avec toi ?

Pokey LaFarge : Pour jouer avec moi, surtout en tournée car je joue des morceaux de toute ma carrière et des reprises que je décide le jour du concert, il faut avoir un groupe de musiciens très polyvalents, et il est donc très difficile de les trouver. Il n’y a pas beaucoup d’options. Par exemple, il n’y a qu’un seul guitariste que je veux vraiment, et pareil pour le claviériste. Il y a donc ces gens que je veux, qui sont musicalement fantastiques, mais aussi personnellement. J’ai le même groupe depuis environ un an, ils ont déjà tourné avec moi l’année dernière.

La Face B : Tu les connaissais avant ? Comment s’est déroulée la tournée ?

Pokey LaFarge : Certains oui, d’autres non. J’ai dû demander autour de moi et creuser. Deux d’entre eux étaient à Los Angeles, un à San Francisco, un autre est maintenant à Philadelphie. Aucun d’entre eux ne se connaissaient. La partie musicale s’est très bien passée, mais le plus difficile en tournée, ce n’est pas la musique ! C’est plutôt la communication. C’est comme une famille, et on est tout le temps coincé au même endroit, alors il faut parfois avoir la peau dure.

La Face B : La tournée de cette année se fera donc avec les mêmes musiciens ?

Pokey LaFarge : Oui, l’année dernière, on fait une tournée de 75 à 100 concerts, et cette année, ce sera à peu près la même chose, mais sur une période plus courte. On va faire plus de 100 concerts en 7 mois, soit environ 20 concerts par mois.

La Face B : C’est très intense ! Tu ne peux pas te permettre de tomber malade !

Pokey LaFarge : La seule chose qui m’inquiète, c’est ma voix. Quand je suis sur la route, je parle comme ça [en chuchotant], je prends du thé, du miel, des pastilles contre la toux, je me gargarise d’eau salée, je me rince le nez, je prends des douches à la vapeur, des humidificateurs…

La Face B : Ah oui, tu as beaucoup de techniques !

Pokey LaFarge : Il le faut, parce que tu es un athlète ! Quand tu es joueur de foot, tu te sers de tes pieds. Si je ne chantais pas, je pourrais encore jouer de la guitare ou de la batterie, mais quand tu chantes, oublie ça ! C’est le plus dur, c’est tellement lié physiquement et associé à ton esprit, tu sais.

La Face B : Tu as appris à chanter tout seul ?

Pokey LaFarge : Oui, en usant beaucoup ma voix. Ce qui fait que tu uses ta voix, c’est quand tu ne respires pas bien, quand tu es trop stressé. Si tu as des problèmes de sinus et que tu ne peux pas respirer par le nez, tu vas respirer par la bouche, et ça assèche encore plus. J’ai donc beaucoup perdu ma voix parce que j’ai eu des problèmes de sinus toute ma vie. Mais je fais ça depuis longtemps, alors je me suis endurci. Et si je peux le faire, tout le monde peut le faire. Personne dans ma famille ne chantait. Au début, pendant les 5 à 10 premières années où j’ai joué de la musique, j’étais très mauvais.

La Face B : Vraiment !

Pokey LaFarge : Oui, je chantais mal, par le nez et la poitrine, je criais beaucoup. Mais si tu aimes ça suffisamment, tu ne peux pas t’arrêter, et tu finis par devenir bon.

La Face B : Et pour conclure, as-tu une chanson ou un artiste que tu as écouté et que tu pourrais nous recommander ?

Pokey LaFarge : Il y en a beaucoup ! Je dirais que pour commencer, aux États-Unis, il y a Bo Diddley, Chuck Berry, et plus récemment Nick Waterhouse, et Shannon & The Clams qui est un groupe cool, ils ont un nouveau disque qui va sortir, je les aime vraiment. Et il y a le groupe qui assurera la première partie de ma tournée en juin, The Tailspins, composé d’un mari et de sa femme. Si tu veux découvrir la musique sud-américaine, écoute Andres Landero de Colombie, Jorge Ben du Brésil. Pour de la bonne musique cubaine, je te recommande Habanero Sexteto, l’un des premiers groupes de son cubain. J’écoute aussi beaucoup de Gospel américain, beaucoup de groupes dont personne n’a jamais entendu parler, tu vas sur leur profil Spotify et il y a environ 15 auditeurs mensuels, et tous sont probablement des gens à qui j’ai dit d’écouter cet album. Mais c’est la musique la plus funky qui soit. Il y a un groupe qui s’appelle The Sunrising Kings, c’est un Gospel incroyable ! De la guitare électrique de malade, du super chant, des super harmonies, du bon groove. On sait d’où vient le rock’n’roll quand on écoute ce genre de musique. Et aussi The Golden Gate Quartet. Ce qui est très inspirant dans le Gospel américain, c’est que ces gens étaient persécutés dans tout le pays à cause de la couleur de leur peau, et pourtant ils font la musique la plus joyeuse et pleine d’espoir, en posant les bases de la musique américaine, c’est très inspirant.

La Face B : Oui, et une grande partie de la musique américaine a commencé avec des instruments africains comme le banjo, joué par les esclaves. J’ai été particulièrement touchée de visiter le mémorial de Congo Square à la Nouvelle-Orléans.

Pokey LaFarge : Et on se rend compte qu’à Cuba, c’est la même chose, qu’en Amérique du Sud, c’est la même chose. Dans toute l’Amérique, ça vient des Africains, c’est incroyable.

La Face B : Merci beaucoup Pokey pour ces recommandations et pour cette excellente discussion !

Retrouvez Pokey LaFarge sur Youtube, Instagram et Facebook

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ORIGINAL ENGLISH VERSION

La Face B: You played a showcase of your upcoming album Rhumba Country last night in Pigalle at the Sub, how was it? How do you feel being in Paris, have you been here a lot before?

Pokey LaFarge: Starting with the second question, I played for the first time in Paris 12 years ago at a venue that’s no longer around, called Fleche d’Or. Then a few years later I came back and played at Point Ephemere and the Maroquinerie, and then last fall we played in New Morning, where I’m going to play this November too. My wife is a huge lover of the city, we come for a little trip here and there. The showcase on Thursday was great! It can be hard sometimes when you have a packed house, they’re all standing and they’re loud, and you go up there by yourself. But with God, caffeine and rock’n’roll anything is possible!

La Face B: And a master of ceremony like Nicolas Ulmann!

Pokey LaFarge: Yeah exactly, getting people all fired up! So yeah we had a great time, and I have some good friends here from Montreuil, I’ve been hanging out with them. But I have to write a Paris song! I have a song for Rotterdam because I spent a lot of time there, I love the Netherlands. And I love Spain too so I wrote a song a few albums ago called Goodbye Barcelona. So now I have to write a song for Paris, which I was starting to do before you arrived!

La Face B: Oh cool! Looking forward to hearing it.

Pokey LaFarge: Well God willing it gets finished. I’m just fortunate I have some time off, as the last few days have been really intense. When you have time off and you can go slow, that’s when the songs start to flow. Paris is a place ripe with inspiration if you know how to work for it, but you have to be able to create the space for the things to naturally come out. I don’t sit down and think oh I’m going to write a song today, I sit and just have silence, de-stimulate. And then most songs just write themselves, the music first and then the words.

La Face B: Right, so you don’t sit at your desk and force yourself to write every day or anything?

Pokey LaFarge: I don’t sit at my desk and write, I sit at my desk and play. I’ll sit and just to get the juices flowing I’ll practice or learn a song. Like today I practiced the song called Mohair Sam by Charlie Rich. So yeah I often do that, it tills the soil a bit, so you can see what’s waiting underneath.

La Face B: And so talking about your songwriting, you are quite a religious person and you said that most recently you have been writing your songs as if they were prayers. What do you mean by that? How has religion impacted your songwriting?

Pokey LaFarge: That’s a really good question, a profound question, because it’s been the foundation for everything in my life for the last 5 years. I had a profound supernatural encounter with Jesus on January 12, 2019. I was coming from a very dark place, just trying to survive, and called out for God. It was like taking a pressure washer and just washing out your heart. Once Jesus has entered your life you walk with him, you are seeking love instead of hate, peace instead of anxiety, joy instead of fear. I am no longer pursuing women or drugs and alcohol, I don’t glorify sadness or depression. I don’t want to write anymore about getting drunk all night and sleeping with a bunch of different women, even though that’s cool and sexy to people and that’s what rock’n’roll supposedly is. But I would go so far as say there is another element of rock’n’roll that people forget had such a big influence, and that was the church! Gospel music you know. Without Gospel there is no rock’n’roll. Writing songs like prayers is how people have been writing songs since the beginning of time. Songs do not have to be religious in the lyricism for them to elicit this spiritual feel. My music, though I am Christian, does not necessarily mean that all my songs are Christian songs. I get to do something that 99.9% of Christians don’t get to do: I get to go at music venues where most people aren’t Christians, so I have an opportunity to shine a light, to be a bridge, to share my gift with whoever is bound to receive it. In the last few years, as I have tried to simplify my life, I have also simplified my music. So less chords, less movements, to create more space for the percussions and the rhythm, for my words and voice.

La Face B: And that’s reflected in your new album Rhumba Country. Why did you call it like that?

Pokey LaFarge: I guess that title is sort of my own genre, for a few of the songs on the album at least. When I was in the studio listening to the recording of the second song called For a night, I was oh that’s a rhumba but it sounds like a country song, and the producer thought that would make a great title! So rhumba country is like this sort of fictional place where you want to take people to, this paradise. It is colorful, it’s bright, it’s joyful. It’s not dark, it’s not the city maybe.

La Face B: Is it more a countryside vibe? When you moved to Maine, you decided to go working on a farm. How did this experience impact your craft and this particular album?

Pokey LaFarge: Yeah, so for context, my wife – who was my girlfriend at the time – was living near L.A. Sunny all the time, things blooming year-round, producers, actors and models everywhere, great fashion… So much inspiration and stimulation. Then she had wanted to move to Maine, because she likes old English architecture. It’s literally the complete opposite from California. Covid was happening, I couldn’t tour, and I was looking for something to do. Maine doesn’t have a lot of music, it doesn’t have a music industry at all.

La Face B: But it has beautiful nature, I’ve been wanting to go to Acadia National Park.

Pokey LaFarge: Ah yeah exactly! That’s 2 hours north of us. So yeah Maine is very rural, it looks kind of like Ireland with mountains. I had always wanted to do something new, to learn new skills, so I thought maybe I will start farming. I got a job at a greenhouse showing seeds, started a seeding program and then I worked on a farm, harvesting chicken and everything like that.

La Face B: And you had never done any of that before?

Pokey LaFarge: No, I had been on the road for so long, which is the reason I wanted to try new skills. Working in the farm, digging, getting dirty, the colors, the sunshine, the sweat… it was very deep, it’s kind of the oldest art form and the first job that there is. I was really going back to my roots, no pun intended!

La Face B: My friend and I spent a few days in a farm last week in the US, in the Smokey Mountains. It was so peaceful; I hadn’t felt like this in a very long time. You get so much mental clarity just being there, and you remember how important nature is.

Pokey LaFarge: Yeah I think it’s all part of us, that’s how we all started, and how we want to live ultimately, but jobs are in the city, and the city is beautiful. The stimulation you get from the city can kind of “blind” you. Paris is hectic, L.A, New-York… Your mind is always working. I find I have a hard time sleeping and writing. You’re living this big life and having all those experiences but you’re moving so fast you don’t even have time to reflect on them, and they’re just gone.

La Face B:Yeah it makes it hard to process things. I really try to sometimes pause and take time to process, otherwise I’m gonna get crazy!

Pokey LaFarge: Yes, that’s why people in the city gets kind of crazy! Silence is so important, it serves me not only as a person but as an artist, I have to make sure the life I’m living allows me to be at peace, or my songs aren’t going to come or be the best songs I can write. It’s the life that serves the songs.

La Face B: And how long did you work on the farm?

Pokey LaFarge: We stopped at the end of 2022, I started recording in January 2023 and then started touring through that year. We’re still based in Maine; we just bought a house in a village.

La Face B: That’s great! So you can come back to get some silence in between tours! Is your wife going to tour with you?

Pokey LaFarge: Yes she will be there, she’s in the band, we wrote three songs together on the record. She’s home right now, she left me a voice message this morning, because the dining room ceiling was leaking! That’s what happens when you get an old house. It’s from the 1840s.

La Face B: It must be very beautiful, with old architecture.

Pokey LaFarge: Yes it is, that’s why she wanted to move there.

La Face B: And so Rhumba Country is your tenth album,you’ve had time for your style to evolve, you said you simplified your music. Would you say that your style might still change?

Pokey LaFarge: I think both. I would like to continue to pursue it sound wise and rhythm wise, but there is going to be constant experimentation. The music I listen to is always going to change. Different influences and different experiences of life, the more places you travel as you get older, and I’ll have children someday.

La Face B: That makes me think of the Secret Sisters, we saw them in Houston and they were explaining how motherhood had impacted their songwriting. On their last album they have a few songs related to motherhood, and made it in a way that can still speak to most people.

Pokey LaFarge: Yeah definitely, how could it not have an impact! The music you make is who you are, that’s why you have to be intentional about you are. Because you care about the music, and I also have a responsibility to make the best music I can, not for me but for people. It’s a gift you have to share. What artist would create something that just stays at home. That’s not how it’s meant to be.

La Face B: And you shouldn’t try to imitate others or fit into one particular style just to please people.

Pokey LaFarge: Some people do it, they have their thing and people love it. I want to write fast songs, I want to write solo songs, I want to write electric guitar… I like different types of things, and fans don’t always enjoy, fans don’t like when we change, I know I have lost a lot of fans over the years because of different albums and sounds, but what are you gonna do? I am making the best music I’ve made up to date so. I’m continuing to grow.

La Face B: Some newer artists have a hard time thinking this way, as they are worried to lose people along the way. And it’s understandable, you need to “win your audience’s loyalty” if you want to make a living as a musician. I guess it takes years to detach yourself from that.

Pokey LaFarge: Yeah, and you are still aware of it a little bit. It is a conversation. You do have an audience and you try to gain and keep it. You want to make sure people will want to sit where you sit, but ultimately the people are not going to dictate what you record.

La Face B: The album will be out May 10. You have already released three singles. There is one called Sister André, who you said was inspired by a real French nun. Can you tell me about that story?

Pokey LaFarge: Yeah so I had this song idea, with a groove and chord progression in mind. Going into a songwriting session with one of my producers, Chris Seefried, my manager sent me this article about this lady who had the time of her passing was the oldest person in the world. She was 118 years old. She was a French nun named Sister André. I thought man that would make a good song, that’s a cool name. She’s been through WWI and WWII, Great Depression, she survived Covid… I thought what the conversation would be like if you sat down with a 118 years old woman, what advice would she give.

La Face B: And the song is about how to find love, not typically what you would expect from a nun! But I understand it as a way to convey the importance of love, whatever form of love it is – of God, your person etc. I really liked it.

Pokey LaFarge: Yeah it’s kind of funny right! The way you describe it is perfect.

La Face B: We haven’t spoken yet about your band. Have you always played with the same group of musicians? Who will come on tour with you?

Pokey LaFarge: To play with me, especially on the road as I’m playing material from my whole career, and covers I decide on the day of the show, you have to have a very versatile group of musicians, so finding them is very difficult. There are not a lot of options, like there is only one guitar player I really want, keyboard same thing. So there are these people that you want, musically fantastic but also personally too. I’ve had the same band for about a year, they toured with me last year.

La Face B: Did you know them before? How did it go on tour all together?

Pokey LaFarge: Some of them yes, others no. I had to ask around and dig. Two of them were in L.A, one in San Francisco, one is now in Philadelphia. None of them knew each other. The musical part went great, but the hardest part about touring isn’t the music! It’s more communication stuff. It’s like a family, and you’re stuck in the same places all the time, so you have to have a thick skin sometimes.

La Face B: And so the tour this year is going to be with those same musicians?

Pokey LaFarge: Yes, last year we toured about 75 – 100 shows, and this yearwill be about the same but over a shorter period.We will do over 100 shows in 7 months, so about 20 shows a month.

La Face B: That’s very intense! You can’t afford to get sick!

Pokey LaFarge: The only thing I worry about is my voice.So when I’m on the road I talk like this [whispering], I take tea, honey, cough drops, I use gargling salt water, nasal rinses, steam showers, humidifiers…

La Face B: Oh yeah you have a lot of technics!

Pokey LaFarge: You have to, because you’re an athlete! Like when you’re a soccer player you use your feet. I could go out there and throw up in a bucket, if I wasn’t singing I could still play guitar or drums, but when you’re singing forget about it! It’s the hardest, it’s so physically related and associated with your mind you know.

La Face B: Did you teach yourself how to sing?

Pokey LaFarge: Yeah, from using my voice a lot. What causes you to use your voice a lot is not breathing right, being too stressed. If you have sinus issues and you can’t breathe through your nose, you’re going to breathe through your mouth, and it dries everything out more. So I lost my voice a lot because I’ve had sinus problems my whole life. But I’ve been doing this for a long time, so I toughened it out. But yeah I say if I can do it anybody can do it. No one in my family was singing. I was terrible at first, for the first 5 – 10 years playing music.

La Face B: Really!

Pokey LaFarge: Yeah I sang wrong, through my nose and chest, I just screamed a lot. But if you love it enough you can’t stop doing it, and you end up getting good.

La Face B: And to wrap up, would you have any song or artist you’ve been listening to that you could recommend to us?

Pokey LaFarge: There’s a lot! I would say to start in the United States Bo Diddley, Chuck Berry, and more modern Nick Waterhouse, or Shannon & The Clams which are a cool group, they’ve got a new record coming out, I really love them. And there’s the duo who will be opening up for my tour in June, called The Tailspins, a husband and wife. If you want to experiment with South American music, listen to Andres Landero from Colombia, Jorge Ben from Brazil. For some good Cuban music I would recommend Habanero Sexteto, one of the first son Cubano band. I listen to a lot of early American Gospel too, a lot of bands no one has really ever heard of, you go to their Spotify profile and there’s like 15 monthly listeners, and all of them are probably people I told to listen to that album. But it’s the funkiest music man. There’s a band called The Sunrising Kings, it’s amaaazing gospel! Sick electric guitar, great vocals, great harmonies, great groove. You know where rock’n’roll came from when you listen to this stuff. Also The Golden Gate quartet. The thing that’s so inspiring about Gospel music in America is also that these people were being persecuted nationwide for the color of their skin, and yet they’re making the most hopeful and joyful music, flying the foundations of American music, it’s so inspiring.

La Face B: Yeah and a lot of American music initiated with African instruments like the banjo, played by slaves. I was particularly moved by the memorial on Congo Square in New Orleans.

Pokey LaFarge: And you realize if you go to Cuba: same thing, South America: same thing. All throughout Americas it comes from Africans, it’s amazing.

La Face B: Thank you so much for those recommendations and the great discussion!