Protomartyr et son post-punk glacial étaient à la Station

Novembre devrait être rebaptisée la saison de l’enfer (sorry les scorpions). Pluie, nuit, froid et vent, voilà les éléments déchainés, ne nous laissant aucun répit. Ce jeudi 9 novembre, nous avions rendez-vous dans le nord de Paris avec le célèbre groupe américain de post-punk, Protomartyr. Et nul doute que le temps collait parfaitement à l’ambiance la soirée : musique froide et dense, relevée et incarnée.

Crédit : William Langer

Première partie : CIA Débutante

C’est en retard que nous arrivons à la Station ce soir-là et un brin désolé d’apprendre que la première partie a de plus commencé en avance. Si la foule est diffuse et le premier rang clairsemé, les regards sont toutefois alerte et chacun.e est réellement concentré.e.

Derrière CIA Débutante se cache Paul Bonnet et Nathan Roche, ex leader autoproclamé du célèbre Villejuif Underground. De cette musique, bruitiste et éloquente, se dégage des esprits curieux et inventifs. A contre-courant, parsemant ce lieu si réceptif à ces sons, de candeur et d’ivresse, les artistes se dévoilent. Entre pop expérimentale et improvisation, la poésie n’est jamais loin. Boîte à rythme, synthétiseurs modulaires et guitare : tous les moyens d’expressions sont déployés et Nathan Roche, avec ses textes en main, lit et chante des mots planants.

Protomartyr

Ce n’est pas la première fois que nous voyons Protomartyr. Il y a déjà eu le festival Hop Pop Hop à Orléans en 2022. Si nous avions été charmé.e.s par les sonorités, c’est bien le dernier album, Formal Growth In The Desert, qui nous a définitivement convaincu.e.s. Et, persuadé.e.s, que la pluie irait à merveille avec leur musique, nous nous sommes dirigé.e.s d’un pas alerte vers la Station. Joe Casey, le frontman, hypnotise instantanément la foule. Il a ce côté dandy assumé, mais définitivement contrasté par ses mimiques, ses doigts d’honneur et cette fureur maniaque. Prenant la foule comme cible, il la « shoote », d’un regard inquisiteur.

Le concert s’ouvre avec Make Way du nouvel album. C’est la rencontre entre la langueur des couplets et l’explosion du refrain. Les guitares fusent, nous poussant toujours plus loin dans nos retranchements. L’ascension se poursuit avec 3800 Tigers et son groove implacable. Puis Protomartyr poursuit avec Windsor Hum de l’album Relatives in Descent (2017). Cet album qui contient un de nos titres préférés, Half Sister (qu’ils ne joueront pas ce soir-là, dommage).

Elimination Dances, Fun In Hi Skool ou encore A Private Understanding, les musiciens enchaînent les morceaux attendus et les moins connus. Joe Casey arpente la scène, sermonne, alpague et crie. Et régulièrement, il fouille ses larges poches, si pratiques, à la recherche de ses bières. Une, deux, trois, on sourit. Ça fait partie du jeu.

Exploration également du côté d’Under Color of Official Right (2014) avec l’entêtant Maidenhead. Les mots valsent au sein de cette chanson brumeuse. Émotions, sensations, tout se mélange et on laisse le tempo s’ancrer en nous. Mais Protomartyr ne nous laisse pas de répit : voilà Scum, Rise ! Les corps s’échauffent, la fosse se resserre. On a un peu envie d’hurler avec lui. Le post-punk devient dansant, frondeur. Jubilation.

Retour sur le nouvel album avec The Author puis Polacrilex Kid qui confirme encore le talent du groupe. « I’m back », sans cesse rappelé. « I’m back », ça claque, on en redemande. Et le riff de guitare à la fin ? Il nous achève, tout simplement.

My Children fédère, I Forgive You libère. Et lorsque survient Feral Cats, on a l’impression de n’avoir jamais quitté Protomartyr. Ce sont les accords fiévreux, la voix qui se laisse porter et le rythme libéré.

Et c’est sous un ciel voilé, en évitant les flaques d’eau, que nous repartons de la Station, enchanté.e.s d’avoir passé cette soirée avec le groupe de post-punk jamais égalé. Merci Protomartyr.

Crédits photos : William Langer

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