Rattrapage #2 : Fuudge, Saint DX, Dionysos, Volage

Autant se l’avouer, parfois on manque de temps. Alors des albums nous passent sous le nez, des albums qu’on aime mais dont on ne prend pas le temps de parler. On a décidé de contrer tout ça en lançant nos articles rattrapage ou l’on rient sur des albums des derniers mois qui nous on marqué. Aujourd’hui on vous propose de découvrir les derniers albums de Fuudge, Saint Dx, Dionysos et Volage.

Fuudge – Fruit-Dieu

crédit : Micheal Jappans

Croqué dans Fruit-Dieu a tout du maléfice dont on ressort différent dès la première écoute. Sortie en janvier, le second album issu de l’esprit de l’omnipotent David Bujold, cet album est une explosion musicale aussi parfaite sur la forme que dérangeante et tordue dans ses thématiques. Comment du coup définir la musique de Fuudge ? On pourrait bien se laisser aller à dire qu’on est face à du grunge-psychédélique mais ce serait sans doute réducteur tant ces douze morceaux penchent autant vers le stoner que le lo-fi et la pop. C’est donc face une explosion des genres qu’on se retrouve. Le tout pourrait paraitre un brun bordélique à la première écoute mais finit par trouver tout son sens au fur et à mesure qu’on se plonge dans se puits sans fin et un brin dérangeant qu’est Fruit-Dieu.
Le but ici est de bousculer l’auditeur, de le maintenir en éveil en forçant les contrastes et les structures. On est ici dans un univers presque surréaliste, ou les démons et les anges danse main dans la main dans une ronde machiavélique qui nous entourent. Ici on parle de la vie, autant que de la mort, on fait des prières autant que des incantations. Fruit-Dieu est un tout, une expérience totale et brillante qu’on a du mal à découper même si des morceaux comme Tu peux prendre mon âme, Beurrée d’marde ou Mourir j’aime trop ça ressortent du lot. On ne saurait plus décrire cet album de Fuudge tant son impact sera différent sur chaque auditeur. Voilà la conclusion simple qu’on pourrait vous donner : écoutez-le.

Saint DX – SDX

Saint DX © Charlotte Krieger

En novembre dernier, Saint DX a dévoilé son premier album, compilant ainsi les titres diffusés avec parcimonie depuis 2017. 
Voguant entre les influences de Mylène Farmer ou encore Kanye West, l’artiste s’impose comme crooneur énigmatique et hypnotique. On est fascinés par la puissance qui se dégage de l’album, d’une sensualité suave et chaleureuse à un extrême presque angoissant. Les productions, toujours judicieusement teintées de synthétisme et couleur électronique, se mutent en mélodies plus organiques, avec parfois des notes d’orgues ou de flûtes, mais toujours menée par une basse ronde. 
Ce qu’il y a de fascinant, c’est cette douce amertume qui se dégage des morceaux, encouragée par une voix nue et percutante qui déstabilise. L’Autre, l’amour et la rupture obsèdent l’artiste qui s’en sert comme trame, comme fil conducteur d’un récit cinématique et épique. Staccato apparaît presque comme une bande originale de film, quand l’électronique crée une sensation de pluie dans une forêt tropicale, dans une ambiance moite et humide, qui confine à la beauté une forme d’inquiétude, de nervosité
C’est le leitmotiv de SDX : une onde sismique qui tend vers la beauté, vers l’amour, la rupture, l’amertume et la douceur.

Dionysos – Surprisier

Tout le long du Surprisier, un retour en enfance ressenti, un feel-good constant.
Une nouvelle mise en musique du roman de Mathias Malzieu ,Une sirène à Paris, dont la voix suave donne une saveur très candide à l’album.
Le surréalisme des paroles est notable, Malzieu est tout aussi conteur que chanteur. Mais ce qui l’est encore plus est le mélange de la couleur musicale. On commence dans une ambiance Western pour finir par une valse en passant par du Folk.
Autant le dire: Le Surprisier nous prend de court à chaque début de morceau.
Chaque morceau pétille d’une joie, d’un enthousiasme de comédie musicale miniature, c’est à s’y méprendre les chansons que vos professeurs de musiques vous apprenaient au collège.
Dionysos donne un brin d’enfance à la chanson française.
Un vrai florilège de bonne humeur, de sentiments en apparence ordinaires mais magnifiés, le tout agrémenté de poésie, de refrains de cour de récréation parisienne.
Le Surprisier c’est littéralement le son d’un carrousel. Et c’était la première pensée qui m’est arrivée avant de voir la pochette de l’album.

Volage – Strangers

10 années qu’ils écument les scènes françaises, allant et venant depuis leur ville d’origine, Tours. Avec deux albums à leur actif, les quatre musiciens de Volage ont quitté leur garage depuis longtemps, et se sont fait un nom dans la musique indépendante. Désormais, ils reviennent avec un dernier EP, Strangers, comme un dernier salut à leur formation actuelle. Quelques changements de line-up sont à venir, mais le groupe continuera à faire résonner ses mélodies très sixties, d’une manière ou d’une autre. Hommage à la formation actuelle, cet EP est un bouillon de ce qu’ils font de mieux : une touche de pop, une bonne cuillerée de psychédélique, et une pincée de rock, le tout fait maison, et vous obtenez Strangers.
Si le dernier album s’appelle StrangersPaulRannaud (au chant), Simon Pruvost (à la basse), Thibaut Gaudinat (à la batterie) et Paul Vidy (à la guitare) sont loin d’être des étrangers, étant amis de longue date. Les mélodies de l’EP volent vers un autre temps, à l’époque des Doors -les années 60 pour info-, ou aux débuts des King Gizzard & the Wizard Lizard, notamment Oddments (2014) et Paper Mâché Dream Balloon (2015). Leur précédent album, Sittin’ Sideways (2018) était marqué par une basse bien marquée, avec un rendu plus rock mélancolique et shoegaze à la Ty Segall. Avec Strangers, il n’en est rien : Volage prend le virage psychédélique, à l’instar de Horses, petite pépite du genre, comme on les aime, à base de voix profonde et riff soignés. The Weakness, entrée en matière de l’EP, rappelle la caresse du soleil sur la joue, douce, rassurante. Le triptyque que forme Strangers (The Weakness, The Confusion, The Aftermath) invite à se laisser bercer par des émotions, parfois étrangères à nous-mêmes. Être perdu, vulnérable, ou mélancolique, connaître le deuil, tout le monde connaît, mais il faut savoir poser les mots sur nos sentiments. Volage met en musique le ressenti de chacun, à travers plusieurs ambiances, calmes ou dynamiques. Pendant un instant, on oublie ses problèmes, et l’esprit vagabonde, à travers les nuages, guidée par la voix planante de Paul. Ecouter Strangers, c’est partir et se réchauffer, le temps de 15 minutes, sur les plages de l’Ouest Américain. Et là-bas, on y resterait bien plus longtemps.