Ravyn Lenae prend son envol avec Bird’s Eye

Après un excellent premier album, Ravyn Lenae poursuit l’exploration de son identité musicale et nous propose, avec Bird’s Eye, un projet plus pop, et surtout plus intuitif que le précédent.

Crédit : Kennedi Carter

Si vous vous intéressez de près (ou même de loin) à la scène R&B actuelle, le nom de Ravyn Lenae vous est sûrement familier. Entre ses nombreuses apparitions sur les projets de ses pairs, dont ceux de Smino, J.I.D, ou Kaytranada plus récemment, et ses multiples collaborations avec Steve Lacy, le moins qu’on puisse dire est qu’elle est déjà validée par la crème du milieu.

Déjà bien identifiée par les amateurs du genre grâce à sa tonalité singulière, présente sur bon nombre d’albums de leurs mélomanes favoris, c’est avec son premier album HYPNOS qu’elle se dévoile au grand public en tant qu’artiste dans toute son individualité. Deux ans après le succès d’estime de ce premier album encensé par la critique c’est avec Bird’s Eye que la chanteuse revient nous partager ce qu’il reste à découvrir de son univers.

Produit en majeure partie par Dahi, véritable hit-maker derrière (entre autres) plusieurs succès de Kendrick Lamar et de Travis Scott, ce second album se révèle plus accessible et s’éloigne de la complexité pourtant tant appréciée de son prédécesseur. Des morceaux plus courts et des refrains plus catchy: tous les ingrédients sont réunis pour rendre moins niche les mélodies de Ravyn.

Crédit : Kennedi Carter

En effet, derrière cette sublime cover aux nuances plutôt sombres se cache en réalité un projet flirtant presque avec l’univers de la bedroom pop.

Loin des productions audacieuses et avant-gardistes d’HYPNOS, ici les sonorités s’adoucissent, révélant un univers plus intime et surtout empreint d’une véritable authenticité. Fini l’angoisse de devoir prouver que l’on est une artiste à part entière et non une simple vocaliste ; ces deux ans ont permis à Ravyn de prendre confiance en son instinct, et ainsi parvenir à faire une musique qui lui ressemble davantage.

Elle décrit justement l’album comme bien plus intuitif car moins soumis à cette pression permanente de l’extérieur : un relâchement qui, loin d’enlever en qualité, lui permet d’apprendre davantage à connaître et à peaufiner ses goûts et ses envies. Un véritable retour à l’essentiel, à la raison d’être de sa musique: faire ce qu’elle aime.

Crédit : Brandon Hong

L’album s’ouvre sur le pétillant Genius, qui remplit son rôle d’introduction à merveille puisqu’on est tout de suite plongés dans la relation amoureuse complexe qui occupe une place centrale tout au long de l’album. Ses tenants et aboutissants sont clarifiés dès le titre suivant sur une production plus psychédélique, où Ravyn confronte son amant au sujet de sa tromperie.

On retrouve deux featurings plutôt réussis : Childish Gambino, sur l’émouvant One Wish, puis un Ty Dolla Sign agréablement peu autotuné sur Dream Girl. Le premier prend le rôle d’un père aux abonnés absents face à une jeune Ravyn démunie et abattue face à ses manquements. Une nostalgie poignante émane du morceau, qui réussit avec brio à nous faire ressentir la souffrance de la chanteuse à travers ses vocalises tremblantes. Le second accompagne l’artiste sur un morceau aux délicats accents de bossa-nova, sur lequel on croirait presque entendre Kali Uchis.

Love Is Blind et Love Me Not marquent quant à eux le début d’une seconde partie de l’album centrée autour d’une profonde nostalgie, avec des rythmes et sonorités plus traditionnels du R&B pour l’accompagner.

La démonstration de la versatilité de Ravyn se poursuit avec From Scratch et 1 of 1, qui semblent tout droits sortis d’un album de TLC. Comme si l’on n’en avait pas déjà plein la vue, From Scratch se pare également de vocalises dignes d’une véritable cantatrice. Au cas où certains oseraient encore douter de l’étendue de ses talents.

Bird’s Eye se révèle donc être un projet étonnamment complet du haut de ses trente-six minutes, durant lesquelles on découvre une palette sonore si riche que qu’il serait presque insultant de la qualifier simplement de diversifiée. Entre reggae, rapide saut à l’opéra et clin d’œil discret aux iconiques girlbands, ce second album ne fait pas seulement écho aux qualités révélées par HYPNOS, mais dévoile encore plus sa créativité et sa polyvalence.

Le moins qu’on puisse dire est que Ravyn Lenae continue de s’imposer en tant qu’artiste solo à suivre de très près, bien au-delà de ses apparitions aux côtés de figures bien établies du grand public, dont on espère que ce projet plus accessible lui ouvrira les portes pour dépasser le cap du succès d’estime. Elle a en tout cas toutes les cartes en main pour y parvenir.

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