La Face B a rencontré Mathias Malzieu au Rocher de Palmer, à l’occasion de L’homme qui écoutait battre le cœur des chats, un projet aussi singulier que bouleversant. Conteur d’émotions et magicien du réel, il nous entraîne dans une aventure hybride où littérature, musique et spectacle vivant se croisent. Entre confidences et créations, l’artiste se livre avec sensibilité et liberté, fidèle à son esprit créatif aux multiples facettes. Auteur, chanteur, raconteur et aventurier, Mathias Malzieu aborde le deuil avec une délicatesse et une justesse qui lui sont propres, tout en préservant une profonde humanité. Une rencontre où poésie et sincérité se donnent la main.
Retrouvez également le travail d‘Alexia Arrizabalaga-Burns (sous le pseudo Troubleshooteur) sur son site et sur Instagram.

« J’aime la maîtrise, pas le contrôle. Dans la maîtrise, il y a le concept de surprise, d’échec possible et de déviation. Tu peux faire ce qu’on appelle un dérapage contrôlé. » Mathias Malzieu
La Face B: Bonjour Mathias ! Merci beaucoup pour ton temps aujourd’hui. Commençons par parler de « L’homme qui écoutait battre le cœur des chats » publié en mars. Au moment où tu as écrit ce livre, est-ce que tu as eu le projet d’en faire un spectacle ?
Mathias Malzieu: Alors, pas tout de suite en fait. Rapidement, quand j’ai eu l’idée de ces chats qui parlent, je me suis dit, un chat qui parle, un chat qui chante. Et je me suis dit, « est-ce que je ne ferais pas un album de Dionysos du point de vue des chats ? » Mais avec l’Extraordinarium, je suis déjà allé au bout d’une idée comme ça. Je me suis dit que ce n’était finalement pas une bonne idée.
Déjà, parce qu’il n’y avait pas une fonction narrative. Par exemple, Une Sirène à Paris, il y a une fonction narrative. C’est un chanteur et une chanteuse. Le Guerrier de Porcelaine, je n’ai pas fait d’album. La Mécanique du cœur, c’est autre chose. Pour Un Vampire en Pyjama, c’était un moment de résistance. J’envoyais des chansons aux autres pour faire les arrangements pendant que j’étais à l’hôpital. Je ne pouvais pas écrire sur autre chose que ce que je vivais.
Pour « L’homme qui écoutait battre le cœur des chats », je me suis dit que je ferai des concerts-lectures. Et puis finalement, mes chats mangeaient des disques, mais pas les miens, comme les livres. Et du coup, là, ça peut être marrant parce que ça m’oblige à un autre cadre. C’est-à-dire qu’au lieu de faire des chansons qui vont avec, je voulais trouver des chansons qui racontent l’histoire par une espèce d’écho thématique ou émotionnel. Et là, du coup, je rentre dans un autre jeu que je n’avais jamais fait. Donc là, ça m’a amusé.
Au début, c’était juste les chansons pour spectacle avec Mike, puis la maison de disques nous a encouragé à en faire un album. Et on a fait ça en deux mois, au milieu de la tournée Dionysos. Avec Mike, on n’a pas dormi de la nuit pendant deux mois. Et on s’est arrachés à faire ça, mais l’album n’était pas prévu. Cependant, les reprises, ça s’est fait quand j’ai vraiment décidé que les chats parlaient parce qu’ils mangeaient les livres. Et donc, je me suis amusé.
En plus, il y avait nos deux ateliers car justement, les chats pouvaient grignoter des livres et des disques des deux côtés. Il y avait des madeleines de Proust à moi comme Johnny Cash, les Doors. Et il y avait des plaisirs semi-coupables qui venaient de l’atelier de Daria. Et ça m’amusait aussi de chanter dans le même spectacle du West Side Story, du Bad Romance de Lady Gaga et en même temps, faire une version White Stripes de Brassens.
En somme, c’est un labo qui me donne envie d’écrire de nouvelles chansons. Ça s’est fait comme ça. J’essaie d’être curieux quand je déroule ma bobine de fil, comme avec mes personnages. Du coup, j’ai un peu le scope avec la musique, le spectacle ou le film.



La Face B: Sur ce projet c’est Mike des Dionysos qui t’accompagne ?
Mathias Malzieu: Mike fait pleins de trucs. Il fait de la musique de film de court-métrage, il fait plein de trucs, ça se voit peut être moins. J’avais fait avec Olivier Daviau pas mal de choses. Là, Olivier, les tournées, il en a un peu marre. Il est mieux à faire de la musique chez lui mais Il aurait pu être dans le projet. Babette était plus centrée sur son album cette année. Stéphan était venu m’accompagner jusqu’en Espagne sur des concerts lectures.
Mais c’est avec Mike qu’on avait fait le Guerrier de Porcelaine, les showcases, et qu’on avait déjà envie à l’époque de se dire « là on vient avec notre petite conduite, avec un éclairagiste et tout, on aimerait bien faire un vrai spectacle pour le prochain ». Donc, c’est comme si c’était un peu une histoire de parole donnée parce qu’il peut être très fort à faire ce type de projets aussi. Mais il y a un moment, je me suis posé la question de le faire carrément avec le groupe.
Ce qui me posait problème à emmener Dionysos sur un projet comme ça c’est que là surtout sur un sujet aussi perso comme La Symphonie du Temps qui passe ou celui-ci, c’est que je les mettais complètement à mon service. Je trouve que sur un spectacle comme ça ou je raconte mes trucs on est à la limite de l’exercice. Sur l’Extraordinarium ou La Mécanique du Cœur, ça va encore parce que finalement, c’est du rock, ce sont des concerts. Mais là, je voulais vraiment faire une pièce de théâtre. Mais on s’en est parlé et ce n’est pas tabou du tout. Et puis, c’est bien aussi qu’on fasse tous des trucs un peu à côté. Parce que ça crée du désir joyeux de se retrouver. On n’a jamais été dans un truc purement album tournée album, sauf quand on était très jeunes. Et je pense que c’est important.






La Face B: Justement, pour rebondir sur La symphonie du Temps qui passe, ce projet n’est pas une continuation de la Symphonie du Temps qui passe. Pourquoi as-tu voulu raconter certains événements de la perspective de deux chats?
Mathias Malzieu: C’est assez simple. Dans la vraie vie, ces chats nous faisaient du bien. Parfois, les constructions sont simples. C’est qu’en fait dans la fonction narrative les chats apaisaient la situation. Ils nous faisaient du bien. Quand on était heureux on était encore un peu plus heureux de les avoir. Et quand on n’était pas bien, ils étaient un confort et une consolation extraordinaires. Un chien amène d’autres choses que n’amène pas le chat et inversement. Le chien te donne des réponses. Le chat te pose des questions. Philosophiquement, ce n’est pas la même chose. Le chat console, le chien rassure. Tu vois la différence ? Le chat c’est une présence. Tu ne sais pas. Et avec sa présence, tu peux prendre quelque chose dedans.
La Face B: C’est toi qui habites chez lui.
Mathias Malzieu: Oui bien sur ! Le chien, c’est formidable aussi. Le chien est plus rassurant. Parce que tu lui dis son prénom, il vient. Donc tu es rassuré. Le chat, oui, des fois, il accepte de se faire caresser, et puis, il se casse. C’est autre chose. Mais j’adore, parce qu’il n’y a pas de dépendance. La dépendance, elle se passe sur un autre niveau. De toutes façons, j’avais des chats à la maison. Si j’avais eu un chien, je l’aurais écrit du point de vue du chien mais ça n’aurait pas été le même livre. Je n’aurais pas fait dire au chien la même chose.
La Face B: Comment est-ce que dans la narration tu transformes cette expérience douloureuse en une œuvre littéraire et comment est-ce que tu injectes cette poésie dans ton récit?
Mathias Malzieu: ça c’est le travail, ça te donne des angles. Je travaille, j’essaie de me rapprocher au maximum de ce qui me fait vibrer, de ne pas être trop dans la construction. Et justement, quand on invente des petits dispositifs, des contrats de lecture, comme parler du point de vue d’un chat, il faut surtout pas en rajouter en termes de superficialité sinon tu fais une blague et tu arrives dans le déni d’émotion. L’autre écueil sur un sujet comme ça, c’est justement d’être trop dans l’émotion du coup d’arriver jusqu’au pathos. Les chats m’ont permis d’avoir la ligne de crête entre les deux entre l’humour, la poésie, la profondeur. Voyager léger pour aller en profondeur c’est comme ça que ça s’est fait que ça s’est travaillé.
En gros, je vais essayer d’être très sérieux sans me prendre au sérieux. Mais j’essaye vraiment au maximum. Parfois, je n’y arrive pas. J’ai écrit toute une première version du livre sans les chats. J’ai jeté 180 pages. J’en ai gardé deux qui se retrouvent dans la projection fantôme. Même pas, deux paragraphes. Il faut travailler, il faut recommencer. L’imaginaire doit avoir une posologie. C’est-à-dire que s’il n’y a pas assez de fantaisie, le risque dans des sujets comme ça, c’est d’avoir trop de pathos. Si tu as trop de fantaisie, tu passes à côté de l’émotion.






La Face B: Complètement, il faut jauger et doser.
Mathias Malzieu: Donc c’est le travail, c’est un travail comme si tu faisais à manger, avec plus ou moins d’épices, plus ou moins de temps de cuisson, c’est le travail en fait. Et c’est de travailler un matériau qui est quand même extraordinaire. C’est une chance, dans les temps qui courent, de travailler en liberté, à des choses intimes et joyeuses. Aujourd’hui, il y a 300 personnes qui viennent voir le spectacle, je reçois des tonnes de trucs sur le livre, c’est extraordinaire !
L’écueil numéro un, c’est croire que nous, on va soigner les autres. Parce qu’on va raconter un truc, on va faire le Guide du Routard des gens qui ont perdu un enfant ou qui ont été malades ou qui ne peuvent plus avoir d’enfants. Ça, c’est une catastrophe, c’est d’une prétention folle. Catastrophe, c’est prendre les gens pour des cons, c’est faire un autre métier. Alors que le marketing, quand il arrive après, une fois que tu as terminé ton projet. Le marketing, c’est comment le défendre. Ça, c’est beau. Il n’y a pas de gros mots.
Moi, je ne l’écris pas pour les gens qui ont vécu ça. J’essaie le plus humblement possible, avec toutes les erreurs que ça comporte, de raconter mon histoire à ma manière, les chats, ma façon, le masque, les trucs, une marionnette. Je raconte mon truc et je donne le maximum. Après, c’est comme confectionner une petite bouteille à la mer. Dedans, tu glisses vraiment les trucs que vraiment t’aimes, que t’as envie vraiment, que t’as envie de donner à un copain. Tu veux offrir. Et après, les gens s’en emparent ou pas.
Mais le but c’est d’essayer d’être le plus universel possible. Sinon ce serait en fait une espèce d’assignation en résidence terrible que d’écrire un livre pour ceux qui ont eu ces problèmes là. On est touché par des textes ou des chansons, des fois parce que ça parle de ce qu’on a vécu, mais des fois parce que dans un billard à deux bandes émotionnelles, ça fait écho. Et c’est ce que j’essaye de faire. Mais ça ne peut pas marcher sur tout le monde. Il y a des gens qui ne sont pas touchés et c’est le jeu.
C’est ce que disait Alexandre Astier. Alexandre Astier à un moment donné c’est Kyan Kojandi qui lui disait » Toi tu es le mec qui a le plus de confiance en soi que j’ai jamais vu ». Lui, il dit « je sais pas si j’ai confiance en moi. ce que je sais c’est que je me défonce pour faire le meilleur produit possible Mais ce n’est que ma subjectivité. Après, quand ça sort, ça ne me regarde plus. «






La Face B: N’importe quelle œuvre, quand elle sort, elle ne t’appartient plus. Elle devient autre chose. Elle peut prendre d’autres formes.
Mathias Malzieu: Oui, mais elle n’appartient qu’à l’homme. Et lui, il disait ça. Il disait en fait, ça ne me regarde plus. Ça ne veut pas dire que je m’en fous. Au contraire. Il faut accepter de prendre la joie que ça génère, et accepter qu’il y a des gens qui n’aiment pas. Je ne veux pas dire « moi je m’en fous, ça ne me fait rien », bien sûr que ça touche. Pour continuer, Il faut arriver à avoir du plaisir et à se remettre en question et être dans une aventure. Pas dans un dans une espèce de truc un peu pré-marketé ou d’une espèce de soi-même.
On est tous multiples. Il y a des jours où je suis, comme on peut l’imaginer, complètement sur l’imaginaire. Et puis il y a des jours où je n’écoute que de la politique ou que de la philosophie. Donc je ne veux pas être juste celui qui fait des trucs un peu magiques et qui saute dans tous les sens dans Dionysos. Ça, c’est moi aussi, ça me va. Le Jedi, je suis hyper heureux de cette chanson. Toujours heureux de la chanter. Je suis heureux d’être un peu le lutin qui saute partout et d’inventer des histoires de fées et de sirènes. Ça me plaît. Et j’en écrirais encore… tant que ça a du sens pour moi.
Par exemple, le Guerrier de Porcelaine, il n’y a pas de merveilleux dedans. Le merveilleux, il est hors champ, c’est ce qu’imagine l’enfant. Mais il n’y a pas de monstre, il n’y a pas de géant, il n’y a pas de femme avec des plumes. Parce que ça aurait été vouloir le mettre absolument dans ce qu’on attend pour moi. Donc je ne l’ai pas fait. Et ce premier livre-là, pareil, il n’y avait pas de merveilleux au début. Et finalement, je l’ai remis parce que je trouvais qu’il avait du sens. Comme tu vas faire une chanson en guitare voix, puis d’un coup, quand le refrain rentre, tu veux des cordes parce que c’est plus émouvant ! Voilà, je travaille.
La Face B: Tu as aussi un instinct et une patte, on le ressent beaucoup. Pas seulement du point de vue des arrangements, mais dans la façon d’aborder certains sujets.
Mathias Malzieu: C’est un dosage, c’est comme un arrangement de chanson. Je vais faire « Neige » avec une guitare acoustique, un banjo, les chœurs des copains et c’est tout. On avait fait plein de versions beaucoup plus arrangées. Mais quand il y a trois fois rien, c’est mieux. Par contre, « le jour le plus froid du monde », c’est bien qu’il y ait un beat hip-hop, des cloches, des coucous, un orchestre symphonique, des cuivres. Parce que la chanson a besoin de ça. Tu joues « Le jour le plus froid du monde » comme « Neige », ça ne marche pas. Tu joues Neige comme le jour le plus froid du monde comme le jour le plus froid du monde, c’est boursoufflé, tu perds l’émotion. C’est pour ça que c’est passionnant de créer.
La Face B: Je me dis toujours que tu as une version dans ta tête et elle prend forme immediatement. Et en fait non, tu essayes pleins de choses différentes.
Mathias Malzieu: C’est le principe presque Coubertin de l’importance c’est de participer. En fait c’est le chemin. Ce n’est pas l’arrivée. Si tu vises l’arrivée, en chemin tu vas te distraire, tu vas seulement te concentrer sur l’arrivée. Le but, ce n’est pas d’arriver. C’est d’avoir une idée. Parce que si tu n’as pas de cap du tout, tu fais n’importe quoi. Donc c’est un cap, mais il faut accepter de sortir de ton rail. Et c’est souvent au moment où tu sors de ton rail que quelquefois tu fais des erreurs. Mais ce sont ces erreurs qui t’apportent le plus. C’est ce que tu vas en faire, et se tromper, ce n’est pas grave.
Mais si tu vas en faire un truc, je te donne un exemple tout simple. Le premier morceau qui a marché un peu de Dionysos, c’est Wet. C’est Mike qui a penché sa pédale à l’envers. Le Wawa, sur 9 guitares sur 10, ça ne fait juste pas de son. Tu le remets. Et sur cette guitare, elle fait un son… on a fait « oula c’est quoi c’est bizarre. » . Si tu remets ton truc à l’endroit, tu passes à côté.
On lui a dit « c’est marrant ça. c’est quoi comme note c’est un si ? ». Et la semaine d’après je suis revenu avec une chanson en si. Le riff qui est un peu à la beck, j’avais fait les paroles et on a fait le truc. C’est probablement la premiere chanson qui est passée en radio. Si je m’étais dit que je voulais faire un autre morceau et je voulais vraiment une pédale wawa normale, je naurais pas Wet. Tu vois si j’avais visé l’arrivée et bien je n’aurais pas eu ça.
La Face B: Pour basculer sur l’Extraordinarium de Dionysos qui est un peu comme une cousinade. On en avait parlé tu m’avais dit que vous aviez invité que des amis du groupe. Je me demande toujours la connexion entre le groupe et Sly Johnson? Parce que je trouve la version de la Coccinelle hyper moderne, C’est une collaboration surprenante.
Mathias Malzieu: On écoute du hip-hop. Pas beaucoup de choses plus modernes, mais c’est vrai que notre culture elle est plus Woot & Clamp, Beastie Boys, et autres. Mais on écoute quand même du hip-hop et ça nous a toujours intéressés parce que ça vient du Talking Blues, ça vient de plein de choses qui nous intéressent.
Collaborer avec un mec qui fait du hip-hop, ça nous aura toujours intéressé. D’ailleurs, on a eu des rythmiques hip-hop dans plein de morceaux. On ne fait pas du hip-hop. Il y a des influences hip-hop par moment. Il y a notre façon de bricoler rock. Sly Johnston, je l’ai programmé au Théâtre de la Ville de Paris pendant le Covid. Je l’ai trouvé aussi talentueux qu’adorable. Donc c’est aussi simple que ça. On s’est revu 2-3 fois et je lui ai dit ça te dirait de venir rapper sur un morceau avec des grosses guitares avec nous ?
La Face B: Tu m’avais raconté ta rencontre avec Arthur Teboul, qui relève plus… Du comique de situation, franchement du destin. Donc, je pensais que ça allait aussi, peut-être que c’était une rencontre un peu de ce type-là. Cette version est super sympa.
Mathias Malzieu: En plus, je me suis amusée à mettre les voix, à trafiquer les voix après au mix. J’aimais bien son travail, depuis longtemps, notamment de beatboxer, et j’ai adoré son concert. On a sympathisé, on s’est envoyé quelques messages, et quand on a commencé à parler des invités, je me suis dit Sly, ça vous dit les gars ? Tout le monde retrouvait ça cool, parce qu’évidemment, c’est toujours collégial, ce genre de décision-là, et hop, ça s’est fait comme ça.
La Face B: Et il y a une chanson que je n’ai jamais osé te demander. Ma chanson préférée, c’est « Song 2 » de Blur. Ce duel de groupes avec Louise Attaque, je ne m’en remets pas.
Mathias Malzieu: Je voulais le refaire l’extraordinaire mis Les Louise n’étaient pas dispo parce qu’on leur a demande qu’on refasse Song 2 parce qu’on n’a que cette version live. Je me suis dit qu’on devait faire une version de Song 2 pour l’Extraordinarium enregistrée Les Louise
La Face B: Est-ce que vous aviez répété avant ?
Mathias Malzieu: Je tiens à le dire, parce que c’est la vérité, c’est une idée de Gaëtan, surtout. J’adore cette chanson, je lui ai dit oui tout de suite, mais c’est son idée à lui. Au début, je pensais qu’on ferait un Johnny Cash, parce que je savais qu’il aimait Johnny Cash, ou un Violent Femmes, parce qu’évidemment, ils adorent les Violent Femmes, Gordon Gano, le chanteur, a produit leur premier album. Moi, je suis hyper fan des Violent Femmes. Et donc, c’était l’évidence. Et lui, il le fait là, et Song 2 de Blur ? T’as raison, trop cool.
La Face B: Je trouve que ça fait vraiment un duel de groupe. Et ça fait vraiment batteur contre batteur, chanteur contre chanteur, Violon contre violon. Superbe !
Mathias Malzieu: Tu vois, c’est ce qu’on a un peu fait avec Last Train sur Jay & Jack. C’est-à-dire qu’on a enregistré deux batteries, deux basses, deux guitares. D’ailleurs on l’a fait au Zenith ! Et je voulais refaire ça avec Louise, mais ils n’étaient pas dispo.
La Face B : Ce n’est que partie remise ! Justement quels sont tes projets?
Mathias Malzieu: Il y a pleins de trucs ! Il y a un projet de long métrage d’animation qui est au tout début, on s’en reparlera peut-être dans 4 ou 5 ans. C’est très long et les embûches seront nombreuses et j’en ai fait plein des projets qui ne sont pas allés jusqu’au bout. C’est très difficile mais en tout cas il y a un vrai truc qui part, notamment avec Stéphane Berla avec qui j’ai fait la mécanique du cœur donc je suis très content de le retrouver.
Il y a une émission de télé avec des marionnettes pour enfants, qui est un projet qui me tient énormément à cœur. Où il y aurait Dionysos pour la musique.
J’ai des nouvelles chansons pour Dionysos, je suis au tout début. Et quand je suis parti en Islande, en résidence, pour travailler sur ce spectacle-là, je travaillais la journée, je faisais une pause, et le soir, je travaillais sur mon prochain livre. Et j’ai tout le livre dans la tête. alors je n’ai quasiment rien écrit. J’ai 30 pages. Et là, pour l’instant, je suis trop encore dans le spectacle. Il faut que le spectacle se rode parce que c’est vraiment beaucoup de déconcentration pour moi. Ce spectacle-là, c’est tout nouveau. Donc, pour l’instant, je ne me mets pas encore à écrire autre chose. Puis, j’ai toute la promo, ce que je te disais tout à l’heure, qui est des jolis problèmes.
Mais je pense que vu que c’est un été sans festival pour moi, par un ou deux, on n’est pas sur tous les gros festivals, je vais me reposer. Et je pense que je vais pas mal écrire aussi de chansons de Dionysos et du nouveau livre. Et après, si le développement du film a commencé, le scénario, tout ça.
La Face B: Non, mais tu as toujours plein de choses.
Mathias Malzieu: Je vais réinventer la vie de ma mère. Ma mère avait commencé à écrire ses mémoires juste avant de mourir. Et j’ai récupéré le livre. Et je voulais écrire ce qu’elle n’a pas pu écrire. Mais au lieu d’écrire l’histoire que je connais, je voudrais écrire l’histoire de la vie qu’elle aurait eue si on ne l’avait pas empêchée d’être chanteuse quand elle était petite. Parce qu’elle gagnait des radios crochet et tout dans les fêtes foraines à Oran dans les années 50. Et sa mère l’a humilié beaucoup.
Elle n’a plus jamais été créative, elle a gardé sa fantaisie mais elle n’a plus jamais chanté. Et elle s’est remise à écrire des poèmes à la fin de sa vie, quand elle est tombée malade. Et quand j’ai sorti mon premier recueil, on s’en parlait beaucoup. C’était super ce qu’elle écrivait. Je commence à prendre des bouts de poèmes qu’elle a, peut-être pour en faire des chansons. Et j’ai commencé à écrire ce livre qui s’appelle « De l’autre côté de la mère ». Du coup, j’ai envie de faire l’album des chansons qu’elle aurait pu écrire.



La Face B: Tu dis qu’il y a beaucoup de travail, mais tu sais également ce que tu veux.
Mathias Malzieu: Et encore une fois, il n’y a pas de règle. Il y en a qui, certains, en contrôlant tout, font des choses merveilleuses. C’est que moi, j’aime la maîtrise, pas le contrôle. Dans la maîtrise, il y a le concept de surprise, d’échec possible et de déviation. Tu peux faire ce qu’on appelle un dérapage contrôlé. Moi, je n’ai pas besoin ni envie. Tu vois le ski de fond ? Moi, ça, depuis gamin, ça me rend dingue. Si je sais où je vais aller, j’ai l’impression que ça ne sert à rien de le faire.
Alors que moi, par contre, je sais que je dois monter la baie. Et si on passait par la forêt ? Tiens, et si on s’accrochait a un télésiège. La maintenant, il faut mettre des raquettes parce que… il y a le lac gelé, on peut prendre des photos. C’est l’aventure, en fait. C’est l’esprit d’aventure qui m’intéresse. Et c’est sur le chemin, ce qui va se passer, qui pour moi, vraiment donne l’étoffe au résultat final. Pas seulement ce que tu vises. Tu dois viser… Mais si tu es obsessionnel sur ce que tu dois obtenir comme un contrôle. En tout cas moi, ça ne me convient pas.
La Face B: On rate pleins de choses.
Mathias Malzieu: C’est comme un voyage. En fait, en gros, tu fais le voyage organisé. moi je préfère galérer, avoir loupé le train, être en skateboard, machin, des fois avoir froid, des fois, louper d’autres trucs. Mais ce que tu ressens à l’intérieur, c’est plus organique, quoi. Et moi, je vibre à ça.
La Face B: Moi, je suis un peu pareil. J’ai toujours adoré me perdre dans une ville. Tu vois toujours des choses surprenantes. Merci beaucoup pour ton temps.
Mathias Malzieu : Merci beaucoup et aussi pour le petit cadeau.
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