Rencontre avec PAR.SEK

Projet en perpetuelle évolution depuis sa création, PAR.SEK semble avoir trouver sa voie avec la récente sortie de Mölkky, premier extrait du prochain album. On a profité du passage de Simon et Corentin au MaMa Festival pour en savoir plus sur ce projet qui nous plaît particulièrement. On a parlé d’humanité, de sincérité et de musique, forcément.

portrait PAR.SEK

LFB : Salut PAR.SEK ça va bien ?

PAR.SEK : Ça va. On a chaud et on est mouillés.

LFB : Le concert s’est bien passé ?

PAR.SEK : Ouais, c’était nickel. C’est assez particulier comme lieu. Mais c’était cool. On a réussi à en faire un moment fun et tout ça. C’était chouette.

LFB : Je me demandais comment vous analysiez l’évolution du groupe ?

Simon : Il y avait un truc à la base du projet. C’était le moment où j’étais tout seul et le but à ce moment-là… J’étais à la fac, je faisais un truc sur la réunion entre musique expérimentale et musique pop. Du coup, le truc, c’était de trouver les ponts entre les deux. Du coup, ça partait de là, et les ponts se sont faits petit à petit, jusqu’à maintenant, avec cet album qui est un peu plus pop. Et puis après, il y aura probablement un revirement dans l’autre sens. C’est essayer de trouver comment les deux peuvent se mélanger dans les textes et dans la prod’ aussi.

LFB : Est-ce que tu as l’impression d’avoir trouvé ce point d’équilibre, ou pas encore ?

Simon : Pas encore tout à fait. A la fois oui, et là je suis trop content de là où ça en est maintenant, mais je pense qu’il y a encore… C’est un peu une recherche infinie entre les deux. Du coup, c’est cool comme sujet. Ça donne plein de matière à réflexion.

LFB : Ce qui est intéressant dans ce que tu dis et dans ce que j’ai retrouvé un peu, même sur les derniers morceaux à venir, c’est que oui, on a l’impression d’avoir un album de pop, mais justement avec une petite « pointe » de perversion et de hackage de la pop, avec des trucs un peu plus électroniques, barrés.

Simon : C’est un peu le truc recherché. Souvent, quand j’écris les sons, il y a un moment où j’ai un peu envie de les casser pour ne pas que ça soit trop… Le truc de faire des trucs sages, ça me lasse. Je pense qu’il y a besoin d’exprimer d’autres choses autrement aussi.

LFB : Et du coup, tu t’impliques aussi dans la composition des morceaux ?

Coco : Non non, pas sur tout ça. Moi je m’implique plus sur la réalisation du projet sur scène. Là, Simon me pervertit à nouveau. Et on essaie de pervertir les gens aussi.

LFB : Si je te dis que pour moi, Par.Sek, c’est un peu un point de croisement entre la douceur, la violence, la naïveté de l’enfant et la crudité du monde moderne, est-ce que c’est une idée qui te parle ?

Simon : Je trouve ça très bien la naïveté de l’enfant. J’aime bien. C’est un autre pote qui m’avait dit ça il y a quelques temps, et ça m’avait beaucoup plu. La violence, pas de nous, mais du monde. Nous, on est pas forcément soumis à une violence extrême dans nos vies. Mais c’est vrai que le monde est violent quand même pour plein de gens. C’est un peu chiant de faire face à ça pour beaucoup de gens je pense.

LFB : Il y a certains morceaux où il y a un truc très doux, très accueillant, mais dans les textes, malgré le vocabulaire un peu simple, il y a quand même un truc sous-entendu de douleur, qui a pour effet qu’on se prend des choses un peu violentes dans la tronche.

Simon : Oui, mais je pense qu’on y assiste tous. Tout le monde assiste à ça, partout, tout le temps. Donc du coup, je trouve ça important d’en parler aussi.

LFB : Sur les morceaux qui vont sortir et sur les autres… C’est un projet qui à la base est purement sonore, sans texte. Est-ce que t’as l’impression d’avoir trouvé le bon dosage entre la tension du texte et l’enrobage sonore qui va avec ?

Simon : Ouais, ça je suis assez content. Je pense que pour la suite… Bon il y a cet album, que t’as entendu, qui va sortir mais pour la suite, j’aimerais bien aller vers un truc un peu plus indus’, plus brut encore. Trouver la simplicité le plus possible. Mais c’est toujours une histoire d’épurer petit à petit, de racler pour que le truc aille pile au bon point. Mais ça demande de racler.

LFB : Il y a une recherche de pureté aussi. Il y a des choses à la fois minimales qui sont impactantes. Pour moi, ta musique impacte les gens de manière très directe, que ce soit du côté physique avec la production et le côté littéraire qui est très présent aussi, mais qui justement… Limite, tu prends le morceau physiquement et tu réfléchis après, quand le morceau s’arrête, sur ce qu’il raconte.

Simon : Dans les textes et dans l’écriture, j’essaie d’avoir un truc très honnête mais aussi sans trop de métaphores. Enfin si, il y a plein de métaphores et tout. Mais qui sont en effet très directe. Je trouve que les gens ont un peu du mal à présenter des émotions qui sont très simples pour tout le monde. J’ai l’impression que les émotions de base sont assez simples et qu’on sait tous quelles émotions c’est. Autant se l’avouer les uns aux autres plutôt que de tourner autour du pot.

portrait PAR.SEK
portrait PAR.SEK

LFB : Il y a quelque chose de très direct dans la façon… Ce qu’il y a d’intéressant aussi, c’est qu’il y a un vrai travail d’interprétation au niveau de la voix. Sur l’EP qui est sorti il n’y a pas longtemps, et même sur les nouveaux morceaux, tu interprètes. Ce n’est pas monocorde. Tu joues avec la voix.

Simon : Trop bien. J’aimerais le faire plus mais c’est un peu intimidant, comme c’est quelque chose qui en ce moment, dans le monde de la musique, se fait moins. Des trucs un peu plus cyniques ou vénères. Quand on pense à des trucs genre Queen ou n’importe quoi, j’ai l’impression qu’il y a eu une époque où les gens s’impliquaient vachement dans le chant. Dalida par exemple. Là, il y a une vibe un peu plus terne, j’ai l’impression qu’il y a un peu de peur. Il y a plus de retenue en tout cas.

LFB : Je trouve qu’il y a énormément de nuances dans la façon dont tu utilises ta voix. Ce qui est intéressant, c’est que je pense aussi que ça vient du fait que c’était un projet musical pur à la base et que donc la voix est utilisée comme une texture à part entière, et pas que pour le mot. Il faut vraiment qu’il y ait de la musicalité dans ce que tu proposes.

Simon : De base, les premières chansons, c’était juste des slogans en fait, sur de la musique électronique. C’est parti de ça de base. Juste des textes, pour avoir un peu… C’était surtout pour le live je pense. La première chanson chantée, Love Addict, qu’on fait qu’en live, c’était juste un slogan pour ajouter cette dimension-là et s’impliquer un peu plus dans le live.

LFB : Est-ce qu’il y avait un truc d’acceptation de ta voix au départ ou pas du tout ? Pourquoi t’es arrivé à ce process du chant ?

Simon : Je pense qu’au début, je ne me disais même pas que je pourrais faire un truc chanté. Enfin, je chantais quand je faisais de la musique et tout, mais j’avais pas l’impression que c’était un truc pour moi. Du coup, c’est venu tout doucement. Maintenant, c’est complètement OK, mais ça a pris un peu de temps.

LFB : Ce que je trouve aussi super intéressant dans ta musique, c’est qu’on est sur un truc de fait un peu désespéré, mais contrairement à beaucoup de projets qui sont très nihilistes, je trouve qu’il y a toujours un vrai espoir auquel se raccrocher à chaque fois sur tes morceaux.

Simon : Grave. Je pense que c’est important quand même. On réfléchit beaucoup, le but c’est pas que tout le monde s’enterre sous terre. Essayer de trouver des trucs. Le fait de mettre des choses tristes en musique, je trouve que c’est déjà un mouvement d’espoir de ouf, d’essayer d’en faire quelque chose de poétique. Je pense que c’est déjà un signe que ça va. Plutôt que de la garder à l’intérieur de soi.

LFB : Et puis c’est un vecteur d’échanges aussi, parce que j’ai l’impression que sur le live, les émotions pures et dures sont des choses qui rapprochent le plus les gens. De se réunir en se disant que ouais, c’est la merde, mais c’est pas grave, ça va aller. Toi qui intervient sur le live, est-ce qu’il y a un travail de transformation ?

Corentin : Il n’y a pas tellement de travail de transformation parce qu’on ne fait qu’exprimer ce qui existe déjà sur scène. Les morceaux sont tels qu’ils sont et ensuite, je me les approprie. J’essaie de voir ce que ça procure comme émotion et j’essaie de le transmettre. Au final, on vit les chansons en direct sur scène de manière très brutale. On est à la même place que les gens qui écoutent je crois. Nous, ça nous fait du bien de jouer sur scène. C’est un peu l’exutoire d’une semaine galère. Je crois que je réfléchis pas trop à avoir comment les gens le reçoivent, mais je crois que les gens le reçoivent de la même manière que moi. Ou en tout cas, il y a des gens qui sortent du concert et qui ont l’impression d’avoir lâché des trucs quoi. Donc c’est cool. Je trouve ça bien.

LFB : Si tu composes tout seul, est-ce que t’as besoin d’un soutien sur scène parce que la musique est tellement pure que ça pourrait être violent d’être seul face aux gens ?

Simon : Pas forcément pour la violence, mais j’ai grave besoin de soutien sur scène. J’ai fait une date tout seul parce qu’il n’était pas dispo et il y a juste un truc où c’est trop rassurant de l’avoir avec moi sur scène, parce que les chansons s’impriment sur son visage. Et c’est trop bien pendant un concert, surtout avec des textes comme ça, il y a plein de moments où tu te dis « qu’est-ce que je fais là ? ». Et du coup, il y a toujours moyen de le regarder, et c’est trop bien de sa rattacher à ça, c’est hyper réconfortant. Ce sont des trucs très impudiques aussi et du coup, le faire tout seul, les gens te regardent beaucoup plus.

Corentin : Ouais, là on se renvoie les miroirs.

LFB : Le côté très impudiques des paroles, tout ça, finalement d’avoir quelqu’un avec toi sur scène te permet d’être beaucoup plus dans l’échange et de te protéger un peu sur certains trucs.

Simon : Ouais grave. Et puis, il y a la validation permanente de quelqu’un qui est à côté de toi. C’est trop bien.

LFB : Finalement, même sur scène, tu as cette idée de t’accrocher à l’humanité. Est-ce que vous scrutez les réactions des gens ?

Simon : Oui je regarde. Après, en en parlant avec des gens après, finalement on a parfois une très mauvaise analyse de ce que les gens ressentent en face parce que tu t’attends à des trucs sur certains moments, et puis ça va pas sortir. Des fois ça marche, des fois ça marche pas. Mais tu ne sais pas si ça marche pas ou si c’est juste que ça fait autre chose. Du coup, on scrute beaucoup, mais surtout on demande beaucoup aux gens qui sont dans le public, qui sont nos amis. Après, il y a des trucs qu’on voit qui prennent de ouf et tout et puis il y a des moments trop touchants avec les gens. On chante avec eux et tout. Mais il y a une partie où il faut un tout petit peu se détacher de leurs réactions, surtout au début des live, parce que des fois, les gens ne sont pas prêts à ce qu’il va se passer ou il faut leur laisser le temps de rentrer et tout. Mais si on leur laisse le temps de rentrer là-dedans en diminuant un peu ce qu’on fait, du coup ils y rentrent moins aussi. Il y a toute une partie où il faut un peu les prendre de court, j’ai l’impression.

Corentin : C’est l’expression physique de la musique de PAR.SEK finalement. Il y a une forme de brutalité, donc il faut que les gens s’abandonnent à ça.

LFB : Ça doit aussi être surprenant parfois d’avoir des personnes qui ne vous connaissent pas forcément et qui se retrouvent face à vous. Il y doit y avoir un temps de latence, d’analyse.

Simon : Il faut du second degré. Il y a des gens qui nous disent « Ouais, d’habitude, j’aime pas trop cette musique mais là, j’ai bien aimé ». Ils sont même surpris d’avoir kiffé. C’est trop bien comme retour. C’est super d’entendre ça de la part des gens.

LFB : J’ai des questions sur le futur de PAR.SEK. Du coup, si j’ai bien compris, on ne te retrouvera jamais autour d’une partie de molki.

Simon : Ça peut arriver, mais rarement.

LFB : Puisque tu as choisi ce morceau comme premier extrait du projet à venir, qu’est-ce qu’il représente ce morceau pour toi ?

Simon : Je trouve que dans l’album, tu sais, quand on disait qu’il faut un peu prendre les gens de court, c’est un peu l’idée. C’est toujours ce qu’on essaie de placer en début de concert. Moi, j’ai l’impression que placer ce morceau en début d’album comme première sortie, ça permet de créer ce sentiment, qui est celui qu’on essaie de créer en début de live. On a aucune idée de si c’est une bonne idée ou pas, mais j’ai l’impression qu’en tout cas, ça résume bien cette énergie parce qu’il est très particulier, bizarre. Je pense qu’il va y avoir beaucoup de gens qui vont se demander ce qu’il se passe. Mais du coup, avec les sorties d’après, il y a moyen de rattacher avec des choses plus émotionnelles.

LFB : C’est une bonne porte ouverte sur les morceaux.

Corentin : C’est préparer à la réflexion, quoi. Préparer à recevoir quelque chose de froid ou chaud, au choix.

LFB : Malgré tout, même si c’est de la pop, il y a un côté très radical qui s’exprime et qui est intéressant justement.

Simon : C’est ce qu’on essaie au max. Après, tu es toujours poussé à te conformer à des choses d’une part, par peur de toi, et puis par un truc de milieu aussi, qui te pousse à rentrer dans des trucs, quoi. C’est un peu compliqué, je pense qu’il faut être radical. D’un côté, les gens aiment que ce soit radical. Mais d’un autre côté, quand ça l’est, il y a des gens qui bloquent.

LFB : Par exemple, quelqu’un comme Flavien Berger, il a toujours gardé cette espèce de radicalité. Il y a toujours cette petite touche de bizarrerie qui touche à ce qu’il est. C’est important de garder sa personnalité dans sa musique. J’ai l’impression que tu le fais très bien. Les morceaux qui sont à venir représentent bien ça aussi. C’est une nouvelle étape, celle du premier album, mais aussi l’évolution des morceaux qui sont apparus après.

Du coup, qu’est-ce que tu en attends de cet album à venir ? Comment tu l’envisages ?

Simon : J’aimerais bien qu’il sorte parce que le projet vit beaucoup sur le live. En tout cas, c’est là qu’il y a quelque chose qui se révèle beaucoup. Et à chaque live, c’est très frustrant de dire que tout ça va sortir plus tard. Après, c’est une première marche. Il y en aura d’autres. J’essaie de composer d’autres trucs pour la suite. Pour l’instant, j’aimerais juste que ça résonne un peu plus pour voir ce que ça peut faire avec plus de gens. Essayer de toucher le plus de monde possible, parce que je pense que pour le moment, ce qu’on fait, ça atteint un public particulier qui sont les gens qui nous ressemble. J’ai trop envie de voir avec les gens qui nous ressemblent moins ou qui sont plus distants de nous. J’espère que ça va les toucher, mais on sait jamais trop. Mais en tout cas, j’ai trop envie de parler à des gens qui sont différents de moi ou de nous. Je crois que c’est ça le truc, de connecter des gens qui sont différents entre eux.

LFB : Pour rester sur cette idée d’échanges avec l’humain. Est-ce que vous avez des coups de coeur culturels récents ?

Simon : Récemment, en musique, il y a des trucs qui ne sont pas encore sortis, de potes, des trucs qui me touchent trop. Un groupe qui s’appelle Hyper Bien, qui va bientôt j’espère sortir un son. Et Manon, qui fait la vidéo sur nos concerts et qui fait beaucoup de clips avec nous, va faire un clip pour janvier. Je pense que c’est vraiment un trop bon truc qui va arriver. J’ai trop hâte.

Corentin : Il y a plusieurs trucs, mais je pense que le truc qui m’a touché, si je dois parler vraiment de mon rôle de bassiste, de musicien, c’est d’avoir assisté au mur de son de Psychotic Monks Déjà, beaucoup de gens l’ont vécu avant moi, donc c’est pas quelque chose de très nouveau, mais ça m’a foutu une claque.

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Crédit photos : Eva Duc