Réparer, la poésie délicate de Rosemarie

Il est des musiques qui nous émeuvent instantanément. Sans crier gare, sans effet de manche ni d’annonce. Simplement, elles s’imposent à nous avec la force de l’évidence. Réparer, le premier album de Rosemarie, est de celles-ci. Une poésie délicate, entre pudeur et sensualité, qui, à n’en pas douter, saura vous toucher en plein cœur.

Rosemarie, une artiste libre et indépendante

Marie Robert, alias Rosemarie, est une artiste originaire de la région lyonnaise. Elle a commencé la musique par l’apprentissage du piano au conservatoire, vers 6 ou 7 ans, suivi du chant. Ses premières chansons, elle les écrit à l’adolescence, dans la langue de Shakespeare. Une langue qu’elle gardera pour débuter sa carrière musicale avant, finalement, d’oser le français il y a cinq ans. Un déclic qui a provoqué en elle une nouvelle impulsion artistique, alors qu’elle était sur le point d’arrêter la musique, et a donné naissance à son nouveau projet. Rosemarie venait de voir le jour, libre, déterminée, indépendante.

Une écriture en pudeur et sensualité

S’il fallait la qualifier, on pourrait dire que la musique de Rosemarie appartient à la grande famille de la chanson française. Ce n’est pas vraiment un genre, me direz-vous. Et vous avez parfaitement raison. La musique de Rosemarie est inclassable. Elle est avant tout poétique. Une poésie dans les textes d’abord, dont l’écriture, entre pudeur et sensualité, vient exprimer des émotions et des ressentis plus ou moins bruts, teintés de mélancolie.

Une poésie instrumentale également, composée à quatre mains avec Olivier Koundouno, violoncelliste, bassiste et arrangeur. Olivier Koundouno a travaillé avec de nombreux artistes parmi lesquels Youssoupha, Emily Loizeau, Luz Casal, Cocoon, Stéphane Eicher, etc.

Le choix de l’organique

Le binôme a fait le choix de travailler uniquement avec des instruments acoustiques : « On a vraiment fait du vivant et de l’humain ». Des sonorités organiques qui amènent de la chaleur et donnent de l’ampleur aux textes de la Lyonnaise grâce à la richesse des instruments utilisés. Parmi eux, piano, Rhodes, claviers, guitare nylon, guitare électrique, basse, violoncelle, alto, violon, batterie, trompette, tuba, euphonium (tuba ténor) et même conques !

Un ADN musical extrêmement travaillé, mais jamais complexe, à la beauté lyrique sans tomber dans le classicisme. Autant d’ingrédients qui confèrent à la musique de Rosemarie un caractère intemporel.

Ouverture : la promesse d’une histoire

La beauté est au rendez-vous de chaque morceau de l’album, y compris — et singulièrement — dès les premières secondes d’Ouverture, le morceau instrumental qui débute Réparer. Extrêmement court (un peu plus d’une minute), il plante pourtant précisément le décor sonore de l’album tout en nous invitant à écouter la suite. Les cordes s’élancent, majestueuses. Le jour se lève, une fleur éclot : la promesse de l’histoire que Rosemarie va nous conter. Une histoire où il sera question d’apaisement, de joie, mais aussi de passages plus sombres incarnés notamment par des cuivres inquiétants et des chœurs intrigants à la toute fin du morceau.

La mer : l’apaisement après la tempête

Parmi les morceaux qui m’ont marquée — même s’ils sont tous superbes —, il y a La mer. Il s’agit du premier titre que Rosemarie a dévoilé, et aussi du premier morceau chanté de l’album, juste après Ouverture. « C’est une chanson qui est importante pour moi et je suis super fière de l’écriture aussi. […] Elle a donné le ton sur toute la direction artistique, le visuel de l’album. » Un morceau clé pour Rosemarie, qui explique l’avoir écrit « en juillet 2023, après une période de surcharge, dans un moment où j’ai fait le constat que j’étais allée trop loin, que j’avais atteint mes propres limites. »

Un tempo lent, un piano délicat, des cordes virevoltantes, la voix sensible de Rosemarie qui chante l’apaisement. Un morceau empreint de sérénité, une poésie métaphysique sur l’existence où Rosemarie aborde aussi la question du cycle. Le début est aussi la fin de toute chose : tout est question de point de vue et de perspective. Si La mer incarne le calme après la tempête, Rosemarie explore cette tempête intérieure dans les morceaux qui suivent.

L’énergie libératrice de Faire partie du monde

Faire partie du monde, c’est l’urgence de dire pour avancer, comme si Rosemarie avait cheminé longtemps et se sentait désormais prête à assumer qui elle est. La rythmique plus rapide et les arrangements viennent renforcer ce sentiment, avec notamment le piano entêtant et les envolées des cordes. Faire partie du monde, tolérer ma tristesse, ne plus s’excuser d’être : des mantras qui guident Rosemarie et lui permettent d’avancer malgré les épreuves que la vie peut parfois nous réserver.

Un autre morceau qui m’a émue — aux larmes cette fois —, c’est Nénuphar. En référence à L’Écume des jours de Boris Vian, Rosemarie aborde dans Nénuphar le cancer qui a emporté trop tôt un être cher. Grâce au piano délicat, à la majesté des cordes et à la poésie des paroles, ce morceau réussit à faire jaillir la beauté d’une expérience tragique. Un voile de velours qui fera sans doute du bien à nombre d’entre nous.

Fleuve : 49 secondes d’intensité pure

Pour finir de vous convaincre d’écouter Rosemarie, je tenais à vous parler de Fleuve, un titre qui ne ressemble à aucun autre sur l’album. En seulement 49 petites secondes, avec sa seule voix, Rosemarie réussit l’exploit de nous faire vivre le moment le plus intense de Réparer. La vie, la mort, la douleur, la solitude, l’amour, le désir, la colère, la haine, la réparation : un tourbillon d’émotions brutes et contradictoires déversées au galop, sans artifice. On est en apnée, on s’accroche à sa voix, on a le souffle coupé.

Avec Réparer, Rosemarie nous livre là un magnifique premier opus qu’on ne peut que vous inciter à écouter et à partager. Une œuvre poétique intemporelle, à la fois très instinctive et cérébrale, portée par la beauté des mots et la chaleur organique des instruments.

Crédits photo : Cléo-Nikita Thomasson

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