Report The National à La Salle Pleyel

Il y a des concerts qu’il faut davantage laisser mâturer dans sa tête avant de pouvoir être à même d’en parler. The National à la Salle Pleyel, le 30 mai, en fait partie. Je peux maintenant vous parler de cette expérience qui restera gravée dans ma tête pour quelque temps.

Crédit photo Inès Ziouane. Retrouvez sous travail sur son Instagram ou sur son site internet.

A chaque entrée dans le bâtiment, l’admiration est toujours au maximum. Chic, immaculé, le hall d’entrée fait toujours sa petite impression et on commence déjà à entrer dans un nouveau monde, hors du temps.

Billet en main, il n’est question que de quelques minutes d’attente au milieu de la foule impatiente avant que l’on rejoigne le balcon assis.

Les conversations vont de bon train pour faire passer les dernières minutes qui nous séparent du show du groupe venu de Brooklyn. Le stress monte, l’adrénaline s’amplifie à mesure que le public s’amasse dans la fosse.

Pour cette première soirée annoncés à guichet fermé, sur les deux, on est face à un public plus que motivé à être les premiers à vivre l’expérience The National.

En première partie, David Chalmin, qui, de sa douce musique, a ralenti nos cœurs qui battaient la chamade. Une ambiance vaporeuse et des sonorités électro-ambiantes se dégagent de la scène pour envelopper la salle. Ses samples se rapprochent des éléments naturels et le piano donne un aspect acoustique qui accompagne une voix douce au style folk. Le musicien a su asseoir une ambiance mystique, une très belle introduction au groupe phare de la soirée.

Le changement de scénographie se fait sous un vrombissement constant venant du public, la chaleur qui émane de la fosse commence à se faire ressentir. Sous les yeux ébahis des fans, une scénographie futuriste se met en place. Des trombinoscopes entourent tout l’espace des musiciens. C’est à ce moment-là que nous nous rendons compte que le set risque d’être électrique.

Une retransmission vidéo se projette d’un seul coup sur le fond de la scène. Le groupe apparaît en coulisses, prêts à monter, attendus en stars. Dernier mot de ralliement, remise de l’oreillette, la caméra les suit jusqu’à leur arrivée.

La pénombre se fait et la lumière se dirige vers les membres de The National, entrant chacun leur tour sous les applaudissements. Sans attendre, la première musique retentit dans la salle, tandis que mes oreilles et mon cerveau peinent à se rendre compte de ce que je suis en train de vivre. Des lumières vives se mettent à se mouvoir et à créer une ambiance presque industrielle, tout en nous faisant prendre de la hauteur. Elles se font tantôt intimistes et tamisées, accentuées par la voix chaude de Matt Berninger. Nous sommes instantanément déplacés dans l’esthétique de la cabane mystérieuse et apaisante représentée sur la pochette de Sleep Well Beast, album constituant l’un des meilleurs de leur discographie (voir même le meilleur, mais je ne serais pas objective).

Pour rendre le show encore plus clos, la vidéo projetée continue de suivre les musiciens avec des superpositions psychées. On assiste alors à un concert expérimental dans sa conception, mêlant création vidéo aux compositions musicales, ce qui rend la prestation encore plus magistrale.

Abasourdie, ne sachant où poser mes yeux, le bonheur commence à se faire ressentir et les larmes commencent à monter. Les premières notes de la chanson qui nous a accompagnés lors des périodes les plus difficiles se font entendre. Ces moments sont comme suspendus et prennent au cœur. 

The National nous offre un spectacle resplendissant et les déraillements de voix de Matt Berninger rendent les morceaux davantage insaisissables et brisants. The National a la capacité de rendre les musiques encore plus puissantes et à fendre le cœur en live.

Comment un concert peut être vécu avec autant de passion par un individu N Ces concerts tant attendus sont aussi complexes à s’imaginer. On se construit pendant longtemps une image d’un groupe, on emmène les chansons dans notre vie et on les fait vivre avec nous. C’est un mythe qui peut se briser lors de la rencontre avec les créateurs de ces mélodies qui nous accompagnent. Se retrouver entouré d’individus qui ont fait de ces mêmes mélodies, quelque chose de personnel autant que vous l’avez fait. La poésie des textes entonnés par le chanteur nous replonge dans les moments que nous avons passés à écouter ces titres. Les souvenirs de chacun.e se croisent, se heurtent dans la salle et la tension est forte, comme si chacun.e amenait son bagage pour pouvoir le laisser s’échapper en criant à pleins poumons l’hymne qui lui est cher.

Le public s’est donné tout entier, vulnérable, accroché aux lèvres de Matt et aux mélodies des instruments. Les bras levés vers la scène, les yeux fermés, la bouche grande ouverte, les spectateurs ont vécu ce concert comme une expérience cathartique.