Seb Martel vient de publier sur le label Infiné deux albums étonnants – Saturn 63 et Face Cachée – dont la genèse remonte à une résidence qu’il a effectuée au Musée de la Musique lors du confinement. Le conservateur lui a ouvert les portes des réserves et il a pu découvrir et expérimenter les guitares électriques de la collection muséale. Pour la dernière session, il a eu l’idée d’inviter deux amis et comparses musiciens Matthieu Chedid et Mathieu Boogaerts. Une jam-session qui s’est déroulée sur une journée entière les ramenant plus de 30 ans en arrière, au temps où ils bricolaient ensemble des sons dans la cave des parents de Mathieu Boogaerts à Nogent-Sur-Marne.
Face Cachée se nourrit d’un double plaisir, musical et amical. Celui de rejouer dans l’esprit des soirées post-adolescentes qui les unissaient. Et aussi de le faire dans un lieu d’exception (le Musée de la Musique), avec des guitares rares (Telecaster 1957 / Ambassador 1962 / Steinberger L2 bass 1981 / Saturn 63 1963). Face Cachée n’est pas l’album d’un super groupe (Martel-Chedid-Boogearts) constitué pour l’occasion. On y trouve le souvenir d’un moment suspendu que Seb Martel a su capter. Neuf morceaux quasiment instrumentaux qui laissent aux guitares du musée la liberté de s’exprimer et à l’imaginaire des trois amis, celle de prendre corps.
Quelques jours après la publication de l’album – et un concert mémorable à l’Archipel organisé pour sa sortie – nous sommes allés à la rencontre du musicien aux multiples talents. On a parlé guitare, forcément, mais pas que.
« J’ai évolué pendant longtemps dans le milieu du théâtre ou de la danse, d’un point de vie performatif »
La Face B : Tout d’abord, comment vas-tu ?
Seb Martel : Très bien, si ce n’est que comme chaque année et là encore plus, je suis dans une situation d’ultra activité. C’est aussi ma nature. Je suis toujours très actif. Trop. J’ai tendance à dire « Oui » plus que « Non ». Quelqu’un comme Mathieu Boogearts sait se préserver. Il sait dire « Non ». Moi, j’ai du mal et je me retrouve souvent englouti. À part cela, ça va très bien. Je suis allé courir aujourd’hui. Je fais du sport tous les matins. Sinon d’un point de vue spirituel (j’entends par là l’esprit, je suis dénué de croyance), ça va plus que bien.
Toutes mes activités convergent vers cette idée de faire principalement de la musique, mais aussi de participer à des projets fabuleux avec des musiciens fabuleux. C’est ce qui t’amène, je pense. Face Cachée est une belle histoire et pas anodine du tout. On a fabriqué ici l’album de Cindy Pooch, elle est sur le label Infiné. C’est une magnifique artiste d’origine camerounaise qui vit à Lyon. Elle a une manière très singulière d’écrire les chansons et de les interpréter. C’est quelqu’un d’exceptionnel et c’est une grande chance de travailler avec elle. C’est une nourriture de l’esprit.
La Face B : Le fait d’avoir rejoint le label Infiné – défricheur – t’ouvre de nouvelles possibilités.
Seb Martel : C’est un renouveau, un redépart pour moi. Avant, j’ai eu aussi plein d’activités passionnantes. C’est moins le cas en ce moment parce que je redeviens musicien, enfin musicien pour la musique. J’ai évolué pendant longtemps (c’est très intéressant et peut-être ce qui me distingue de mes congénères) dans le milieu du théâtre ou de la danse, d’un point de vie performatif. Je n’ai pas créé énormément de bandes sonores mais j’ai participé à un grand nombre de spectacles chorégraphiques ou dramatiques. C’est une grande satisfaction.
La Face B : C’est une façon pour toi de remettre la musique au centre de la performance ?
Seb Martel : C’est sûr que la musique a une place très importante.
La Face B : Ton frère est acteur.
Seb Martel : Oui, mon frère est acteur et ma femme est danseuse, danse contemporaine. Et c’est un milieu passionnant. Surtout les chorégraphes ont une culture musicale vraiment débordante. J’ai découvert énormément de choses grâce à eux, beaucoup plus que par les musiciens (mais ça dépend lesquels) qui ont tendance à être plus dans leurs niches ?
Et il y a des défis inhabituels à relever dans l’expérience de vie d’un musicien. Je me suis retrouvé dans des situations assez dingues de postures corporelles. Je pense à une chorégraphe fabuleuse, Nadia Beugré. Une chorégraphe ivoirienne qui m’a poussé dans des retranchements, à travailler sous des contraintes physiques assez dures.
La Face B : Où tu associes la gestuelle à la musique.
Seb Martel : Oui, exactement. C’est une pièce qui s’appelait Tapis Rouge. On est allé assez loin. Ça a même été un peu dangereux.
« je suis un grand spécialiste de rien »
La Face B : Et si on devait te présenter. Comment pourrait-on le faire ?
Seb Martel : J’aime bien dire bricoleur. Parce que je suis à l’aise avec plein de gens et plein de genres. Et puis je suis un grand spécialiste de rien. Enfin, non. Ce n’est pas comme ça qu’il faut le dire.
La Face B : Tu t’intéresses à tout.
Seb Martel : Il y a des chemins que je refuse d’emprunter, le flamenco par exemple. Je n’ai pas envie de le faire comme ils le font tous. Le jazz manouche pour d’autres raisons. Il y a assez de monde sur ce spot. Là, je travaille avec des Italiens. Je découvre le folklore napolitain et je me rends compte que mon expérience avec la Réunion (avec Christine Salem) fait que je me retrouve assez à l’aise dans la maîtrise du ternaire. En fait, toutes ces expériences convergent.
La Face B : C’est vrai que ton exploration musicale a été assez large.
Seb Martel : Oui, tout ce qui est folklore américain, afro-américain ou plus tradi, blues. Et puis le continent africain avec la rencontre de pas mal d’artistes. C’est un peu la fondation de mon savoir-faire.
« Quand j’ai raconté ça à Matthieu Chedid, évidemment ça l’a fait vriller »
La Face B : Et puis il y a eu ton expérience à la Philharmonie qui a donné lieu à – aujourd’hui – deux albums. Comment ça s’est organisé ? Comment se retrouve-t-on à explorer les pièces des réserves du musée de la musique.
Seb Martel : C’est Infiné. Alexandre Cazac a eu cette idée géniale. Il avait déjà collaboré avec la Philharmonie pour l’album In Bach d’Arandel. Un travail sur Bach où Arandel avait exploré la collection des instruments plutôt baroques, Renaissance. Et puis Alex a vu cette collection de guitares. On se connaissait déjà. Justement, il voyait que je bricolais. Il a eu cette idée. Une rencontre s’est faite. J’étais assez bon ce jour-là. Et puis on a décidé de s’y mettre. Ça a commencé par une exploration de toutes les pièces de leur collection, qu’elles soient affichées en vitrine ou dans les réserves.
La Face B : Au musée de la Musique, on ne pense pas forcément y trouver des guitares électriques.
Seb Martel : Leur collection de guitares électriques est plutôt sommaire, par contre il y a quelques pièces magnifiques, dont la pièce maîtresse une Stratocaster de 1954 ce n’est pas courant. Justement, j’avais quasiment fini l’album. Je n’étais pas censé revenir faire des enregistrements. Je n’ai pas eu beaucoup de temps en somme, juste quelques journées. Mais j’ai ensuite travaillé ici grâce à Abletone Live. Je m’y suis mis après avoir refusé pendant des années de m’en servir en tant que fervent défenseur de l’analogique. Je me suis mis à Ableton parce que c’est un outil formidable pour pouvoir reconstituer quelque chose à partir de plein de petits éléments divers.
Quand j’ai raconté ça à Matthieu Chedid, évidemment ça l’a fait vriller. Et cela m’a très spontanément donné l’idée d’organiser une session. Comme il y avait le disque de Boogaerts – Mathieu Boogaerts en anglais – qui trônait sur sa table, je me suis dit qu’il fallait aussi inviter Mathieu. L’idée était de se retrouver ensemble comme pendant la période qui a suivi notre première rencontre lors de la Fête de la Musique 1990. On s’était rencontrés dans la rue lors d’une jam nocturne. Fantastique. On avait joué à bâtons rompus sans se poser de questions.
La Face B : 1990, vous étiez jeunes à l’époque.
Seb Martel : Oui, j’avais 20 ans. Et aujourd’hui, cela a donné lieu à une session. Une journée entière. Ça a été un grand plaisir de se retrouver. On a fini par un repas magique ici. On a poursuivi… C’était extraordinaire. Et du coup, je me suis retrouvé avec plus de quatre heures d’enregistrement captées par un vieil ami à nous, Marlon [Bois].
La Face B : Et je suppose que l’enregistrement s’est fait dans les locaux de la Philharmonie.
Seb Martel : On était dans une petite pièce à côté de l’Auditorium de la Cité de la Musique. La session a duré toute la journée. Je me suis retrouvé avec ces rushes. J’ai pris une bonne année à décrypter, monter, retravailler. Retravailler même méchamment certaines pièces, les produire. Je ne me suis pas interdit ça.
« Tout cela dans l’idée – très dogmatique de Saturn – de composer un album exclusivement à partir des instruments de la collection du Musée de la Musique«
La Face B : En les considérant comme de la matière brute.
Seb Martel : Exactement, de la matière brute. Même pour Saturn, c’est assez brut ce que j’ai retravaillé. Tout cela dans l’idée – très dogmatique de Saturn – de composer un album exclusivement à partir des instruments de la collection du Musée de la Musique. Aucun ajout extérieur, excepté la voix humaine. Il y a un petit chantonnement qui était dans l’improvisation que j’ai juste souligné pour l’affirmer en rajoutant une petite voix. Je trouve désagréable de ne pas assumer les choses.
La Face B : C’est donc parti d’improvisations que tu as retravaillées pour composer au final les neuf pistes de ton album Face Cachée.
Seb Martel : Oui et répertoriées, tu as vu l’espèce de nomenclature que j’ai utilisée. J’aimais bien et ça tenait au côté musée. Nomenclature préfixée par MJ parce que pendant très longtemps j’ai appelé cette session les Mat Jams (les Jams avec les deux Mat.thieu). Je voulais même garder ce titre pour l’album, mais ils n’assumaient pas.
La Face B : Le nom des titres fait un peu penser aux numéros d’inventaire que l’on trouve dans les musées, comme la E.994.21.1 pour la Stratocaster de 1954 ou la E.998.16.2 pour la Saturn 63
Seb Martel : La 23a… la 23c… la MJ23c… On n’a pas joué en continu. Marlon a bien tout séparé. C’est plus pratique pour analyser. Il y avait 48 pistes au total. La 23, formait un bloc que j’ai séparé en quatre parties. Quatre moments. J’en ai extirpés trois pour l’album. Les enregistrements pouvaient être très courts, de l’ordre de la minute. On s’est fait un peu comme aux échecs, des blitz. À un moment, on s’est dit : « Tiens on se fait des petites impros, une minute ou 12 mesures ». On a fait ce petit jeu-là.
La Face B : Comme lors du concert à l’Archipel.
Seb Martel : Oui, on a refait ça. C’est très Boogaertsien comme démarche. Des plages très courtes mais aussi d’autres plus longues. Certaines ont une durée de plus de 20 minutes.
La Face B : Les improvisions partaient d’une thématique ou ont-elles été totalement libres ?
Seb Martel : Impro… Je ne sais pas si j’ai initié tant que ça, peut-être un peu. Surtout Chedid et moi (je suis obligé de parler avec les noms de famille). Mat Boog était plutôt à l’affût. Il analysait bien ce qui était en train de se passer et c’est lui qui décochait le contrechamp qui donne du caractère à l’impro. Il est très fort pour ça, avec son recul rythmique et mélodique épatant. C’est vraiment sa patte. Au bout d’un moment, il y a un process qui s’est installé. On a eu un petit temps d’observation. Chedid et moi, on est plus à dégainer assez vite, mais de manière sûrement plus académique.
« Je me suis équipé d’une Saturn très vite. Ça a été un coup de cœur total »
La Face B : Et le tout a constitué les pièces de Face Cachée. D’où vient ce titre d’ailleurs ?
Seb Martel : On a un peu galéré avec ce nom. Je trouve cela marrant par rapport à Saturn, la Face Cachée de Saturn. Je voulais l’appeler The Last Session Of Saturn 63. Parce que c’était la dernière session. Mais, ils ont trouvé ça un peu glauque. Ça faisait fin de groupe. C’est vrai. Et puis c’est une jeune fille d’Infiné qui a eu cette idée. Et puis Mathieu voulait absolument un titre en français.
La Face B : Lequel des Mat.thieu ?
Seb Martel : Plutôt les deux. Ils n’assumaient pas un truc en anglais. Finalement, je trouve que Face Cachée c’est très bien. Cela sonne comme une résonance à Saturn. C’est fabuleux. D’ailleurs là, il m’arrive une histoire pas banale. J’ai été contacté via Instagram (pourtant je n’y suis presque jamais et c’est un miracle que j’aie vu ce message) par un certain Daniel Hopf, petit neveu du concepteur des guitares Hopf. Il relance la marque et a sorti l’an dernier, en 2023, la Saturn 23. 60 ans après le modèle de son grand-oncle. Il m’invite le week-end prochain. Je vais le retrouver à Hambourg pour un gros festival de guitares, je lui ai proposé d’aller performer sur les morceaux de l’album avec ma vieille Saturn.
Je me suis équipé d’une Saturn très vite. Ça a été un coup de cœur total. J’ai eu la chance d’en trouver une très vite. J’ai été geeker sur le net le soir même où je l’ai découverte au musée. J’en ai vu une en Angleterre à un tarif très intéressant. Je n’ai pas réfléchi. Je l’ai prise tout de suite. Elle est arrivée le lendemain, en moins de 24 heures. C’était fabuleux. Quant au titre de l’album, Saturn 63. C’était une évidence. Et, j’aime beaucoup la photo de l’album. C’est comme une déclaration. Toutes proportions gardées, c’est un peu comme la photo de John et Yoko à poil dans leur lit. Une photo de nu avec la Saturn. Elle m’a tellement accompagnée.
La Face B : La guitare donc tu parles c’est celle que tu avais à l’Archipel, la noire et blanche.
Seb Martel : Oui. Elle a été atrocement repeinte. Le modèle d’origine est en bois naturel ou verni. Mais j’aime bien.
La Face B : Et qu’est-ce qui fait que tu as une accroche particulière avec une guitare plutôt qu’une autre ?
Seb Martel : Avec la Saturn, son amplitude sonore est gigantesque. Elle est dotée d’une caisse de résonance immense. Si on comparaît à la capacité pulmonaire, ce serait comme une sorte de Miguel Indurain de la guitare. Ça génère des graves incroyables. Il y a aussi, pour ceux qui connaissent, le moyen de mettre les deux micros hors phase. Cela génère une sorte de fréquence étonnante, très fine, très aigre. Quand tu enregistres hors phase, cela donne un son très sec. Tu l’entends dans le mixage même sans pousser le volume. C’est un phénomène acoustique.
La Face B : Il existe un rapport physique qui se crée entre toi et la guitare.
Seb Martel : Oui, bien sûr. Par exemple, la Fender Stratocaster 1954 – la pièce du musée. Mathieu Boogaerts est arrivé un peu avant Matthieu Chedid. On a commencé à jouer, à poser le son. Il y avait tout un parterre de guitares disponibles que nous avait mis à disposition Alexandre Girard, le conservateur. Mathieu est arrivé en disant : « Je vous préviens, je ne connais rien aux guitares ». Et il a pris tout de suite la pièce maîtresse. Il a joué cinq minutes avec et a fait :« Oh, je n’aime pas ». Matthieu Chedid est arrivé. Je voyais qu’il observait. Il a attendu avant de la prendre. Je l’ai prise un moment. Je l’avais déjà essayé auparavant. Mais non, et je ne saurais pas expliquer pourquoi. Par contre Matthieu Chedid… C’est sa guitare fétiche. Il en a une de 63 ou 64, la même dix ans après.
Une petite parenthèse pour en revenir au musée, j’ai été tout du long de cette aventure Saturn, accompagné magnifiquement par toute l’équipe du musée. Je rentrais là-dedans avec un profil ultra bas, tu penses bien. Ils ont tout fait pour me mettre à l’aise.
La Face B : Ils devaient être hyper contents de voir les instruments revivre.
Seb Martel : Oui, et j’ai pu percevoir par instant de grands moments d’émotion.
« Et là, je passe une période fabuleuse avec Cindy [Pooch] qui est d’une exigence très pointue »
La Face B : Si on revient à ton label. Infiné t’a permis d’accéder à la résidence, mais également – on en a déjà un peu parlé – de collaborer avec Cindy Pooch.
Seb Martel : Assez vite Alex m’a connecté avec elle. Une très belle rencontre. À la suite de ça, on a décidé de collaborer. Et là, je passe une période fabuleuse avec Cindy qui est d’une exigence très pointue. Elle est dans la précision, musicale, rythmique. D’intention et d’attention au public. Elle vit les concerts. Ce n’est pas du simple « Entertainment ». Elle y met une grande part d’elle-même. Moi, j’ai tendance à… comme ce que l’on a fait à l’Archipel – ne pas mettre beaucoup de profondeur. J’ai rarement écrit des textes. J’ai plutôt fait travailler des auteurs, mais volontairement, très volontairement. Sur les textes, je m’amusais à faire résonner des sonorités ensemble.
La Face B : Mathieu Boogaerts a cette fibre de jouer énormément avec les mots.
Seb Martel : Oui, mais il y attache aussi du sens. Plus ou moins. Après, les auteurs qui rentrent dans cette catégorie très franco-littéraire – mais c’est mon opinion – il y en très très peu qui en valent la peine. Je suis très sévère vis-à-vis du monde de la chanson auquel j’ai appartenu pendant si longtemps.
La Face B : C’est peut-être moins le cas aujourd’hui. J’ai le sentiment d’une scène actuelle très inventive.
Seb Martel : Maintenant, on est dans un moment de diversité fabuleux. Cindy m’a par exemple, fait découvrir le label ougandais Nyege Nyege qui représente la jeune et nouvelle avant-garde africaine de création musicale. C’est extraordinaire. Laurent Garnier a déclaré assez récemment que l’avenir de la musique électronique se situait en Afrique.
La Face B : Si seulement quelque chose d’universel pouvait en ressortir
Seb Martel : Oui, voir même aller grignoter le terrain des enjeux politiques. Mais en même temps les traditions sont importantes. Je me suis rendu compte à Naples que c’est important de préserver des traditions, de les confronter. En France, le folklore occitan est magnifique. Ces dernières années il y a eu comme des combats là-dessus. J’ai grandi en Anjou-Poitou-Charente. Il y a une tradition musicale, des chansons très anciennes. Des copains de La Rochelle – surtout un – qui se sont beaucoup impliqués. Et c’est important que cela se maintienne. Il y a un grand intérêt culturel.
La Face B : Et pour tes prochaines actualités hormis le festival à Hambourg ?
Seb Martel : Sûrement grâce ou à cause du label Infiné, j’ai une espèce de lubie… J’ai mon vieil ami Cyril Atef (batteur de Bumcello, musicien, rythmicien extraordinaire) qui depuis quelques années s’exhibe (et c’est le cas de le dire) dans un projet solo fabuleux qui s’appelle Papatef où il devient DJ et batteur. Il joue tous les mois à la Petite Halle de La Villette et il faut aller voir ça ! Il faut y aller en bande, c’est fa-bu-leux ! Trois heures de transe. Hier avec mon association vélo [La Petite Reine], on a emmené les gens sur les toits du 93, un rooftop d’usine gigantesque où il nous attendait pour une perf.
Tout ça pour te dire, je rêve de faire la même chose à la guitare. Proposer une espèce de set seul ou accompagné, parmi mes acolytes de Saturn, Romain Constant est très fort pour cela. Proposer à la guitare de la musique électronique minimale comme on l’entend à Berlin. Ça me fascine. C’est un vrai genre. Je découvre des créations, des sculptures sonores admirables. Je rêve de ça.
« J’aimerais bien être un tantinet bankable juste pour récompenser tout le travail des gens qui m’accompagnent »
La Face B : Et pour la dernière question, que peut-on te souhaiter ?
Seb Martel : D’aller au bout de ce truc ! Et puis, j’aimerais bien un truc qui marche. Un truc qui fonctionne, qui soit écouté, streamé, juste pour avoir un peu de poids. J’aimerais bien être un tantinet bankable juste pour récompenser tout le travail des gens qui m’accompagnent. Ce n’est pas facile. Tout ça pour pouvoir faire des choses encore plus folles avec tous les gens dingues qui m’environnent. Il y a tellement de choses que l’on voudrait faire. Après ça ne me limite pas, mais ce serait plus facile. C’est une petite frustration. J’aimerais avoir une reconnaissance un peu plus populaire.
Mais, en même temps, je ne fais pas grand-chose pour. Quand je dis ça, c’est surtout pour les gens avec lesquels je travaille ou que j’accompagne. Cindy ou le chanteur napolitain que j’ai produit. Ça a été le cas par le passé. Camille est bien installée et cela nous fait du bien à tous. On a débuté ensemble. Là, elle va proposer bientôt encore autre chose. J’ai eu la chance de découvrir son futur projet. Cela va être fabuleux et nouveau. Contrairement à bien d’autres qui se cantonnent à ce qu’ils font – en reprenant mon franc-parler de paysan : « qui se roulent dans leur merde ». Et même quand c’est de qualité, toujours les mêmes choses.
Je n’excuse pas ça. Il y a des gens qui arrivent à tenir leur cap. Radiohead est un exemple flamboyant. Plus on avance dans leur parcours, plus ça va explorer, chercher. Ils ont inventé un son, leur son, et c’est à chaque fois passionnant.